PHYSIOLOGIE NEONATALE Définitions - Nouveau né = 37 semaines révolues AG à 42 semaines - Période néonatale = de la naissance au 28ème jour - Prématuré = Terme inférieur à la 37ème semaine d’AG - Hypotrophe (Dysmature) = Poids naissance < au 10ème percentile (surtout < au 3ème) des courbes de croissances intra-utérine AGE NN 6 MOIS 1 AN 3 ANS 8 ANS A. I. FC 130±20 120±20 120±20 105±20 90±20 PAS 140 120 110 105 95 70±10 90±10 60 80 95 100 110 PAD 35 45±10 65 60 60 PHYSIOLOGIE CARDIOVASCULAIRE +++ A LA NAISSANCE L’adaptation cardiovasculaire se produit en même temps que la mise en route ventilatoire. Le débit du VG doit doubler, les RVS s’élèvent et le myocarde doit s’adapter à ce surcroît de travail. C’est la libération massive de catécholamines pendant l’accouchement qui permet cette adaptation. 4 événements circulatoires majeurs (arrêt circulation ombilicale) 1. Augmentation des RV Systémiques Elles doublent à la disparition du placenta (arrêt rapide de la circulation des artères ombilicales sous l’effet de l’air froid et de l’oxygénation). Augmentation des pressions du cœur gauche et baisse de celles du cœur droit par clampage de la veine ombilicale 2. Effondrement des RV Pulmonaires qui chutent de 10 à 20 fois Cela augmente le débit sanguin pulmonaire. Baisse des pressions du cœur droit Effets cumulés avec : - Expansion alvéolaire - Augmentation partielle en oxygène (PaO2) - Modifications hormonales : libération de prostaglandines….. 1 3. Remise en série de la circulation par fermeture du canal artériel et de la CIA(communication interauriculaire) - Fermeture du Canal artériel : active par vasoconstriction des fibres ductales au cours des premiers jours de vie - Fermeture de la CIA : purement mécanique normalement dès la naissance. La pression de l’OG devient supérieure à celle de l’OD à la naissance et applique la valvule sur le FO. 4. Augmentation brutale de la demande circulatoire Car augmentation de la consommation d’O2 (VO2) Pour assurer cette augmentation de la VO2 (multipliée par 2 ou 3), le débit cardiaque (Q) augmente d’environ 30 à 50% Au total brutalement à la naissance, les deux ventricules travaillent en série : - le VG double son travail par l’augmentation de 30 à 50 % à la fois de la pression et du débit alors que - le VD voit son travail diminué de 30 % par diminution de moitié de la pression tandis que le débit n’augmente que de 20%. II. PARTICULARITES HEMODYNAMIQUES DU NOUVEAU NE Contractilité myocardique faible Compliance ventriculaire faible o Le débit cardiaque dépend essentiellement de la fréquence o Mauvaise tolérance à l’hypervolémie Système sympathique immature avec stimulation sympathique maximale au repos o Hypovolémie entraîne immédiatement une baisse de PA Tonus parasympathique élevé o Intérêt de la prémédication vagolytique en prévention de la bradycardie Faible réponse du myocarde au stress, l’hypoxémie entraîne : o Acidose o Bradycardie o Chute du débit cardiaque o Augmentation des résistances vasculaires pulmonaires o Risque de retour à la circulation fœtale par réouverture des shunts et arrêt circulatoire Autorégulation de la circulation cérébrale diminuée : le débit sanguin cérébral est pression artérielle dépendant 2 B. PHYSIOLOGIE RESPIRATOIRE +++ I. ADAPTATION RESPIRATOIRE A LA NAISSANCE 4 événements respiratoires majeurs 1-Élimination du liquide intra pulmonaire - Accouchement voie basse - 2/3 éliminés par compression du thorax (filière génitale = pression 70 cmH2O) - Le reste par circulation lymphatique pulmonaire dans les 1ères 24 heures de vie - Accouchement par césarienne Pas de facteur mécanique, d’où fréquence des DR transitoires par retard de résorption du liquide pulmonaire 2- Aération des alvéoles pulmonaires - Dépression respiratoire nécessaire (40 à 80 cm H2O) considérable pour déplisser et aérer les alvéoles à la première inspiration - Stimuli nombreux (30 s) : acidose, hypercapnie, froid, stimulations tactiles, clampage du cordon ombilical 3-Maintien de l’ouverture des alvéoles en fin d’expiration Rôle essentiel du surfactant et des muscles laryngés (frein glottique physiologique à l’expiration) pour constituer et maintenir la CRF +++ et diminuer la pression d’ouverture des voies aériennes 4-Augmentation du débit sanguin pulmonaire - Liée à la chute des résistances artérielles pulmonaires (RAP) sous l’effet de l’expansion pulmonaire - L’amélioration des gaz du sang artériel lors des premiers échanges contribue à maintenir les RAP à un niveau bas II. MECANIQUE RESPIRATOIRE CHEZ LE NOUVEAU NE a. Les particularités anatomiques des voies aériennes Respiration nasale presque exclusive jusqu’à 3 mois o Occlusion nasale => hypoxémie et diminution de la ventilation/minute Petite bouche, macroglossie relative Épiglotte longue et rigide Larynx situé en C3-C4 plus haut que chez l’adulte (C4-C5) o Intubation plus délicate que chez l’adulte Région sous-glottique étroite o Risque de sténose Trachée courte (4 à 5 cm de long) o Risque élevé d’intubation sélective Cartilages trachéaux très mous o La flexion de la nuque peut entraîner une apnée obstructive 3 b. Les particularités physiologiques Compliance pulmonaire : plus basse chez le nné, augmente progressivement et atteint les valeurs de l’adulte à J8 Compliance thoracique très élevée : o Faible opposition aux mouvements du diaphragme o Rôle essentiel des muscles intercostaux pour le maintien de la stabilité du thorax o Au cours du sommeil paradoxal, inhibition des intercostaux : respiration paradoxale (balancement thoraco abdominal avec baisse de la ventilation/min) Résistances pulmonaires élevées : nécessité de pressions d’insufflation identiques ou > adulte en ventilation contrôlée Volumes pulmonaires : CPT = 160 ml CV = 80 ml VC = 16 ml VD = 5 ml = 1/3 du VC Ventilation alvéolaire : 100 à 150 ml/kg/min (60 chez adulte) CRF très basse : faibles réserves en O2 donc hypoxémie rapide en cas de baisse d’apport en O2 Volume de fermeture des voies aériennes plus élevé Travail ventilatoire très élevé Fréquence respiratoire élevée : nécessaire pour minimiser le travail ventilatoire (FR = 40 chez le NN, 50 à 60 chez le prématuré) (Compliance : rapport ΔV / ΔP = variation de volume par rapport à une variation de pression => pression nécessaire à maintenir le poumon dans un certain volume CRF : volume où le poumon est à l’équilibre, cad gradient entre pression alvéolaire et pression atmosphérique=0) c. Les mécanismes physiologiques qui peuvent être à l’origine de troubles de la ventilation chez le nouveau-né Le niveau de vigilance : inhibition des muscles intercostaux pendant le sommeil paradoxal o Risque de respiration paradoxale o Augmentation du travail ventilatoire o Diminution de la réponse ventilatoire à l’hypoxie et à l’hypercapnie Réponse ventilatoire au CO2 o Très diminuée chez le prématuré : du VC, mais transitoire de la FR Réponse ventilatoire à l’hypoxie o Augmentation transitoire de la ventilation suivie d’une dépression o Réponse plus faible chez le prématuré o Dépression de la réponse au CO2 en cas d’hypoxie Mécanismes réflexes : o Réflexe de Hering Breuer : inhibe l’inspiration et prolonge l’expiration en réponse à l’inflation pulmonaire o Réflexes pharyngo laryngés (stimulation par solutés ou variations de pression) => risque d’apnées obstructives Immaturité des récepteurs et du SNC : risque d’apnées d’origine centrale 4 C. REGULATION THERMIQUE A la naissance : - Mécanismes inopérants durant les premières heures de vie d’où refroidissement rapide en l’absence de mesures - Déperditions thermiques par évaporation importantes+++ - Prévention par séchage immédiat du Nné I. MECANISMES DE PRODUCTION DE CHALEUR Les capacités de thermogénèse sont différents et limitées chez le Nné : - Absence de frissons contrairement au grand enfant et adulte - La thermogénèse du Nné repose sur une oxydation de la graisse brune (=5% chez le Nné et 1% chez le prématuré) - Mais, l’hydrolyse des triglycérides augmente la consommation en O2 qui peut tripler par rapport à l’état basal. Vulnérabilité du Nné aux déperditions thermiques car - Rapport Surface corporelle / Poids plus élevé - Moindre épaisseur du tissu sous-cutané - Faible possibilités de production de chaleur Température ambiante de neutralité thermique = température pour laquelle la consommation d’O2 est la plus faible (varie selon le poids et l’âge). Elle est d’autant plus élevée que le Nné est plus prématuré (32 à 35 °C) II. MECANISMES DE DEPERDITION THERMIQUE 1. Pertes par évaporation (prédominant chez le prématuré) Chez le prématuré - Intérêt de l’augmentation de l’humidité ambiante dans un incubateur +++ == réduction de moitié les pertes thermiques par évaporation. On évite aussi les pertes hydriques - Intérêt du bonnet isolant (production de la chaleur cérébrale = plus de 50% de la production de chaleur totale) 2. Pertes par radiation (liée à la température des objets environnants) - prédominant chez le Nné terme III. PREVENTION DES DEPERDITIONS THERMIQUES+++ Les déperditions thermiques sont nocives. Elles augmentent 1. Les résistances artérielles pulnomaires exposant au risque d’un retour à la circulation fœtale, et donc au risque d’hypoxémie 2. La fréquence des apnées, surtout chez le Nné prématuré 3. La consommation d’O2 4. La consommation de glucose exposant à une hypoglycémie néonatale Le maintien d’une ambiance thermique neutre est essentiel pour assurer plus facilement un équilibre hydro-électrolytique satisfaisant en particulier chez le prématuré (réduction des dépenses énergétiques, de la consommation en O2 et des pertes hydriques) Le maintien de la température centrale est un des problèmes majeurs en anesthésie pédiatrique+++ (monitorage systématique de la température centrale et mesures adéquates) 5 D. PHYSIOLOGIE RENALE +++ Les particularités de la physiologie rénale chez le nouveau né 1. Au niveau de la filtration glomérulaire : Diminution de la filtration glomérulaire Diminution de l’adaptation à une surcharge hydrique Conséquence : Augmentation de la demi-vie des médicaments éliminés par le rein Prévention : Posologie adaptée des médicaments et contrôle quantitatif de l’apport hydrique 2. Au niveau de la réabsorption tubulaire du sodium : Baisse de la réabsorption tubulaire du sodium Conséquence : Fréquente hypo natrémie du prématuré Prévention : apports sodés importants (3 à 4 meq/kg/j) 3. Réabsorption tubulaire du glucose Baisse de la réabsorption tubulaire du glucose par baisse du seuil rénal Conséquence : Risque de glycosurie avec déshydratation par polyurie osmotique Prévention : contrôle des apports glucosés et évaluation de la glycosurie 4. Pouvoir de concentration des urines Baisse du pouvoir de concentration des urines Conséquence : Risque de déshydratation surtout chez le prématur Prévention : Compensation rapide des pertes hydriques 5. Pouvoir d’acidification des urines Baisse du pouvoir d’acidification des urines, par baisse du seuil rénal d’excrétion des bicarbonates, et par baisse de la réponse à une charge acide Conséquence : Acidose métabolique fréquente chez le prématuré Prévention : Administration souvent nécessaire de bicarbonates de sodium 6 E. PHYSIOLOGIE HEPATIQUE Sur le plan fonctionnel = Immaturité De nombreux anesthésiques empruntent cette voie de dégradation. D’où la prudence en raison de la demi-vie beaucoup plus grande chez le Nné et et le prématuré F. PHYSIOLOGIE CEREBRALE ET NEURO-MUSCULAIRE I. PHYSIOLOGIE CEREBRALE = IMMATURITE La multiplication des neurones se fait entre les 15 et 30ième semaines d’âge gestationnel (sensible à la douleur +++) Le baroréflexe est peu fonctionnel (prématuré++) Ainsi, une hypovolémie provoque peu ou pas de tachycardie La régulation de la respiration est immature+++ d’où : o respiration périodique entrecoupée d’apnées o Mort subite du nourrisson++ o Respiration immature (réponse diminuée à l’hypoxie, au CO2, incoordination des muscles respiratoires, etc) o CONSEQUENCES EN ANESTHESIE - Prudence dans l’utilisation des morphiniques, anesthésie ambulatoire - Surveillance postopératoire prolongée pendant 24 heures++ AU TOTAL GRANDE SENSIBILITE A TOUTES LES AGRESSIONS (ACIDOSE, HYPOXIE, HYPOTHERMIE, HYPOGLYCEMIE) → GRAVITE DES SEQUELLES NEUROLOGIQUES +++ II. PHYSIOLOGIE DE LA PLAQUE MOTRICE Immaturité transmission neuro-musculaire chez le Nné Conséquences de l’immaturité Diminution de l’amplitude de la réponse au train de quatre Fatigabilité plus importante après stimulation tétanique Plus sensible aux curares non dépolarisants Moins sensible aux curares dépolarisants La variabilité dans la progression de la maturation est responsable des différences de curarisation observée chez les Nnés pour une même posologie de curare En pratique - Le volume de distribution des curares est augmenté (secteur extra-cellulaire augmenté) - Elimination rénale et hépatique des curares plus lente (excepté atracurium et suxaméthonium) - Gravité d’une curarisation résiduelle même minime chez le Nné (particularités respiratoires défavorables) 7 G. HEMATOLOGIE ET IMMUNOLOGIE Variation qualitative de l’hémoglobine Arrêt de la synthèse de l’HbF après la naissance avec augmentation progressive de celle de l’HbA d’où une anémie « physiologique » au 3ème mois Déficit physiologique en vitamine K à la naissance Le Nné (surtout le prématuré) = Très haut risque d’infection++ H. BESOINS HYDRIQUES ET NUTRITIONNELS I. BESOINS HYDRIQUES ET NUTRITIONNELS 1. Besoins en eau = fonction du poids et du terme a) Ils sont importants 60ml/kg/j le premier jour pouvant aller jusqu’a 120 à 150 ml/kg/j b) Augmentés à 80 ml/kg/j pouvant aller jusqu’a 180 ml/kg/j en cas de prématurité, dysmaturité, voire plus encore si majoration des pertes (digestives, photothérapie, etc) Cause : Importance de la SC (0,3M2 / kg) Déperdition hydrique par pertes insensibles Capacités réduites du rein (concentration-dilution) Incorporation d’eau dans les tissus formés On utilisera le même soluté pour besoin de maintenance et de remplacement, le Ringer lactate glucosé à 1% (type B66 à l’APHP) Règle des 4-2-1 : donne les apports de maintenance à effectuer en fonction du poids de l’enfant : 3 à 10 kg : 4ml/kg/h 11 à 20 kg : 2ml/kg/h par kg >11 en plus de l’apport précédent > 20 kg : 1ml/kg/h par kg >20 en plus de l’apport précédent II. REGULATION GLYCEMIQUE Variations physiologiques de la glycémie Absence de réserve (prématuré, dysmature+++) Nnés à risque : né de mère diabétique, de mère sous β-bloquants, infectés, syndromes particuliers FIBROPLASIE RETROLENTALE = Complication iatrogène redoutable+++ 1. Complication oculaire responsable de cécité survenant chez des Nnés exposés même peu de temps à des pressions partielles élevées en O2 2. Lésion : Membrane fibreuse opaque en arrière du cristallin 3. Population à risque = Nné < 44 semaines d’âge gestationnel Causes : - Hyperoxie avec PaO2 > 80 mmHg pendant plus de 3 heures - Hyperoxie avec PaO2 > 150 mmHg pendant plus de 2 heures Principe : administrer une FIO2 la plus basse qui assure une oxygénation « normale » chez le Nné ( 70 < PaO2 < 80 et SpO2 entre 93% et 95%) +++ 8