Faire les gros yeux en dit-il assez?

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Hebdomadaire distribué gracieusement à tous les ménages du
Canton de Genève, de l’agglomération de Nyon et de toutes les
autres communes de la Zone économique 11 (Triangle GenèveGland-Saint Cergue). 168 818 exemplaires certifiés REMP/FRP.
Edité par Plurality Presse S.A. Paraît le lundi
Directeur-Rédacteur en chef: Thierry Oppikofer
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Daniel Hostettler, Sophie Gravante
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Distribution: Epsilon SA
20 juillet 2015 – No 687
© Plurality Presse S.A., 2015
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Faire les gros yeux en dit-il assez?
C
oups et notes, le débat sur
la pédagogie naturelle fait
encore rage; deux livres,
au moins, l’ont pris par le bas:
celui de Jacques Serguine
«Eloge de la fessée» et celui
de Christine Barras «Sociologie
de la fessée». Le tricentenaire
de Jean-Jacques Rousseau, il
y a trois ans, n’a pas épuisé le
sujet, et l’a sans doute à peine
effleuré: que l’homme naisse
bon ou mauvais… qu’on doive
l’élever de gré ou de force, qu’il
pousse seul comme une plante
ou qu’on doive mater la bête,
au moins, on ne doutait pas –
depuis trois siècles au moins –
d’un haut au-dessus du bas.
La morale est-elle
aussi ronde qu’un
astre?
De nos jours, le haut et le bas
ont perdu le nord… et même
l’est: va-t-on «élever» la Grèce
par la fessée, ou l’Europe en
lui faisant la leçon? Les pouvoirs au bout du fusil sous la
bannière verte ou noire en
Orient et les publics indignés
qui voient rouge en Europe,
sont-ils, chacun à sa manière,
prêts à écouter la logique des
cieux? Qu’on lève la voix, le
poing ou la main, grimpe-t-on
pour voir les anges ou pour fuir
les diables? Les Nations Unies
– qui prônent cet été le doux
système «T» d’un bonze (unog.
ch/80256EE60057D930/
(httpPages)/A3609D61BE9A
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enDocument) – peuvent-elles
trouver une issue à ces crises?
Bref, la pédagogie semble en
panne dès qu’il s’agit de questions de fond (qu’il soit haut ou
bas)… on le voit bien en revenant
au débat sur la fessée. Ce qui a
frappé le plus, au Café Philo du
13 juillet, au-delà des idées, ce
fut l’échec de l’écoute: chacun
était venu pour battre l’ennemi,
sûr de sa foi en ou sans les
gosses… et les ennemis de la
fessée se firent entendre surtout par leur… force de frappe.
Mais on se quitta sur une question ouverte: les parents qui –
en cent mille ans – ont élevé
leurs enfants par la torgnole ou
par l’épreuve étaient-ils pires
TIM
Dernier «Spécial Formation » avant les vacances… alors, autant finir la saison sur une fantaisie. Un «café
philo» sur «la fessée» a bien failli causer une guerre, mi-juillet à Annemasse (cafesphilo.org). Guerre de
religion, mais de nos jours, ce sont les dieux qui méritent la fessée, en jouant avec le feu: et comme ils sont
camouflés et que nous sommes pacifistes, le fossé entre nos valeurs et la réalité ne peut que se creuser.
Dans un monde à feu et à sang, verra-t-on des trêves pour laisser l’Unicef inspecter les fesses des enfants?
• L’image peut-elle ouvrir
l’oreille?
que des fauves? Les animaux,
certes, ne fessent pas, mais les
bonobos eux-mêmes ne sont
pas les anges qu’on a dit.
L’histoire roule
moteur en feu
C’est moins l’état des lieux que la
carte du temps qui nous manque
désormais: «Pour mettre de
l’ordre quand tout va mal, il faut
une image de son avenir», disait
en somme Patrick Weil, vedette
d’un récent Congrès sur les migrations (imiscoe.org) à Uni-Mail.
L’ennui, c’est que l’avenir est ar-
TOUT L’EMPLOI & FORMATION • NO 687 • 20 JUILLET 2015
rivé vers l’an deux mille, et qu’on
ne sait plus comment en sortir par
devant. Alors on tente parfois de
le faire par l’arrière; c’est, en tout
cas, une question pour la formation: à quoi bon tout savoir… sur
les cauchemars? «Si vous trouvez
l’éducation trop coûteuse, essayez
l’ignorance» est une formule
attribuée un peu vite à Abraham
Lincoln, mais elle devient de fait
un programme scolaire. Avec ou
sans Rousseau, la pédagogie des
peuples tombe vite dans l’oubli.
Même dans le camp du progrès,
où on est à cheval sur la flèche
du temps, l’histoire se limite à la
révolte de Spartacus.
J’ai tout de même été surpris,
ces derniers temps, de voir
Genève sans mémoire de Ferdinand Lassalle, de tomber sur un
étudiant en «sciences-po» d’Anvers ignorant Camille Huysmans,
et d’entendre – au Congrès sur
les migrations déjà cité – de
jeunes sociologues allemands
impatients de faire le grand saut
militant, mais à qui le nom de la
Bande à Baader ne disait rien. n
Boris Engelson
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