LES INDICATIONS DU DOSAGE DES HORMONES STEROIDES

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Les indications du dosage des hormones stéroïdes
LES INDICATIONS DU DOSAGE
DES HORMONES STEROIDES
B. ARGEMI
Immunotech
- Marseille -
Durant les vingt dernières années, les progrès de
l’immunoanalyse ont permis d’obtenir des anticorps spécifiques dirigés contre de nombreux haptènes et en particulier contre les hormones stéroïdes et leurs précurseurs.
La mise au point de dosages performants a largement contribué à la connaissance de la pathologie surrénalienne et
gonadique. Ces dosages ont, maintenant, complètement
supplanté la mesure très approximative des métabolites
urinaires des hormones sexuelles ou surrénaliennes.
Après un bref rappel sur la biosynthèse des hormones
stéroïdes, nous nous proposons de passer en revue dans
leurs grandes lignes les principales circonstances dans
lesquelles le dosage des hormones stéroïdes et de certains de leurs précurseurs peut apporter une aide au diagnostic des dysfonctionnements ovariens, testiculaires ou
cortico-surrénaliens.
1. La biosynthèse des hormones
stéroïdes
Les hormones stéroïdes dérivent toutes du cholestérol. A
partir de la prégnènolone, précurseur initial, les voies de
synthèse, prioritaires ou exclusives, dépendent de l’équipement enzymatique des cellules.
prédominante et qui conduit à la testostérone. Au niveau
de l’ovaire, l’intervention d’une aromatase permet la transformation de la testostérone en estradiol.
Il faut remarquer que certaines enzymes sont communes à
différentes voies, ce qui permet de comprendre la traduction clinique des déficits enzymatiques.
2. Exploration de la fonction ovarienne
De l’enfance à la ménopause, le dosage des hormones
sexuelles trouve sa place à tous les âges dans l’exploration des dysfonctions de l’axe hypophyso-ovarien.
2.1. Rappel physiologique
La Figure 2, empruntée à Emperaire et Ruffié (1), résume
les différentes étapes de l’évolution hormonale au cours
du cycle menstruel : lorsque, sous l’action de la FSH, le
follicule sélectionné a atteint un volume et une capacité
sécrétoire suffisants, la brusque augmentation de la production d’estradiol entraîne une stimulation de la sécrétion de LH, elle-même responsable de l’ovulation.
Les principales voies de synthèse des hormones corticosurrénaliennes et gonadiques sont schématisées dans la
Figure 1.
Les deux voies horizontales supérieures sont spécifiques
de la cortico-surrénale. L’aldostérone est physiologiquement produite, exclusivement, par la zone glomérulée et le
cortisol par la zone fasciculée.
La synthèse des androgènes passe préférentiellement par
la voie ∆5 dans la zone réticulée de la cortico-surrénale,
pour aboutir à la production d’androgènes faibles, la
déhydroépiandrostérone (DHEA) et surtout son sulfate
(S-DHEA) environ mille fois plus abondant.
Dans les gonades au contraire, c’est la voie D4 qui est
Revue de l'ACOMEN, 1998, vol.4, n°3
- FIGURE
2Evolution hormonale au cours du cycle (d'après Emperaire J.C.
et Ruffié A. (1) avec l'autorisation de l'éditeur
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- FIGURE 1 Schéma général de la biosynthèse des hormones stéroïdes chez l’homme.
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Les indications du dosage des hormones stéroïdes
Au cours de la phase lutéale, le corps jaune, principalement stimulé par la LH, produit de la progestérone et de
l’estradiol.
L’ensemble de ces phénomènes est sous la dépendance
de la sécrétion pulsatile de la "Gonadotrophin Releasing
Hormone" (GNRH) d’origine hypothalamique, soumise au
rétro-contrôle négatif de l’estradiol et de la progestérone.
2.2. Les troubles de la puberté
2.2.1. La puberté précoce
L’apparition d’une pilosité pubienne et d’un début de développement mammaire chez une enfant âgée de moins de
7 ans doit faire évoquer une puberté précoce. Celle-ci est
confirmée par le dosage de FSH. Le degré de maturation
ovarienne est évalué par la mesure de l’estradiol sérique et
l’échographie. L’ensemble du contexte clinique et
paraclinique permet de préciser l’étiologie (tumeur hypothalamique, syndrome de Mac Cune-Albright, puberté précoce idiopathique) et de mettre en route le traitement approprié (2).
2.2.2. Les retards pubertaires
En l’absence de signes cliniques de développement pubertaire à l’âge de 12 ans, et de règles à 15 ans, les dosages
des stéroïdes sériques s’intègrent dans l’ensemble des
investigations qui vont explorer en premier lieu
l’adrenarche dont le premier stigmate biologique est l’élévation du S-DHEA ou de la DHEA. Le dosage de l’estradiol,
comme précédemment associé à l’échographie, apprécie le
degré de maturation ovarienne. L’orientation étiologique
est donnée par le dosage de FSH (plus accessoirement de
LH) dont le taux élevé oriente vers une dysgénésie ovarienne ; inversement, une valeur basse évoque une origine
haute, et la réponse à la stimulation par GNRH permet d’affirmer la simple puberté différée.
2.3. Chez la femme en période d’activité
génitale
2.3.1. Exploration des perturbations du cycle menstruel
Le dosage de l’estradiol aux différentes phases du cycle et
celui de la progestérone dans la deuxième période du cycle
sont très utiles, associés à l’étude de la courbe thermique,
pour apprécier l’importance d’une dysovulation.
Dans le cadre de l’exploration d’une aménorrhée secondaire, le dosage de l’estradiol sérique permet d’évaluer le
degré de carence estrogénique.
2.3.2. Procréation médicalement assistée (P.M.A)
Le dosage régulier de l’estradiol sérique et l’échographie
sont les deux éléments de surveillance de la stimulation
ovarienne : l’ovulation est déclenchée par injection de
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gonadotrophine chorionique, ou la ponction ovarienne
réalisée lorsqu’un ou plusieurs follicules ont atteint un
diamètre de 20 à 22 mm et que l’estradiol sérique se situe
entre 500 et 1000 pg/ml (3).
Le dosage de la progestérone en fin de stimulation aurait
une certaine valeur pronostique : son élévation préovulatoire est corrélée avec l’échec de l’implantation des
embryons (4).
Dans les syndromes de basse réserve ovarienne, responsables d’infertilité et d’échec de la fécondation in vitro, un
taux d’estradiol supérieur à 80 pg/ml au 3ème jour du cycle,
associé à la classique augmentation du taux de FSH, représente un élément péjoratif de poids (5).
2.3.3. Au cours de la grossesse
Le dosage de l’estriol en fin de grossesse est de moins en
moins utilisé pour rechercher la souffrance fœtale, car les
progrès du monitorage ont permis un diagnostic beaucoup plus précoce de celle-ci.
Par contre, le dosage de l’estriol libre est utilisé par certains laboratoires en association avec celui de l’HCG et
éventuellement de l’alphafoetoprotéine (AFP) pour évaluer, entre la 15e et la 17e semaine d’aménorrhée, le risque
de trisomie 21 (6).
2.4. La ménopause
En dehors du dosage de la FSH qui permet de confirmer
l’installation de la ménopause, les dosages hormonaux ne
sont utiles ni pour poser l’indication d’un traitement hormonal substitutif (THS), ni pour adapter la dose
d’estrogènes.
Le dosage de l’estradiol et/ou de l’estrone sérique n’est
utile que chez les femmes présentant une contre-indication relative au THS et chez lesquelles la persistance d’une
production résiduelle d’estradiol, ou d’estrone (à partir de
la DHEA surrénalienne) en quantité suffisante fera pencher la balance en faveur de l’abstention thérapeutique.
2.5. Les hyperandrogénies
Les syndromes d’hyperandrogénie représentent l’indication majeure du dosage des androgènes chez la femme.
Le syndrome des ovaires polykystiques s’accompagne
fréquemment d’une production anormale d’androgènes
avec élévation de la ∆4-androstènedione et, de façon plus
modeste et inconstante, de la testostérone sérique. Le
dosage de la testostérone libre ou de la testostérone
biodisponible, préconisé par certains auteurs (7), ne fait
pas l’unanimité.
Dans le cadre des explorations, il faut garder à l’esprit la
possibilité de tumeur virilisante de l’ovaire qui doit être
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B. ARGEMI
soupçonnée et recherchée dès que le taux de testostérone
sérique dépasse 2 ng/ml (8).
Au cours des hirsutismes dits idiopathiques, où les androgènes ovariens sont normaux, c’est un trouble du métabolisme périphérique de la testostérone ou une hypersensibilité des récepteurs qui est le plus souvent en cause.
On peut observer une élévation de la dihydrotestostérone
(DHT) ou de son métabolite l’androstanediol dont le
glycuronide est plus facilement accessible aux méthodes
de dosage radioimmunologique (9).
Il ne faut pas oublier, enfin, que certains hirsutismes, avec
ou sans troubles de la fécondité, peuvent être en relation
avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit partiel en 21-hydroxylase. Lorsque l’ensemble du bilan
ovarien est négatif, un dosage de 17-hydroxy-progestérone avec stimulation par l’ACTH doit être réalisé pour
l’éliminer avant de considérer qu’il s’agit d’un hirsutisme
idiopathique.
3. Exploration de la fonction testiculaire
Comme chez la femme, c’est tout au long de la vie que l’on
peut être confronté à des anomalies de la fonction
gonadique chez l’homme.
3.1. La cryptorchidie
Les chirurgiens ont tendance à opérer de plus en plus tôt
les testicules cryptorchides pour préserver la fertilité ultérieure, mais il faut s’être assuré auparavant de la présence
de testicules fonctionnels intra abdominaux. Celle-ci est
confirmée par l’augmentation de la testostérone sérique
au-dessus de 3 ng/ml, après 7 injections de 1500 UI de
gonadotrophine chorionique administrées à 2 jours d’intervalle.
3.2. Troubles de la puberté
3.2.1. Les pubertés précoces
A côté de la puberté précoce vraie par tumeur hypothalamique, plus rarement testiculaire, ou, le plus souvent idiopathique, il faut distinguer les pseudo-pubertés précoces
par hyperplasie congénitale des surrénales, et plus rarement, la testotoxicose, par anomalie des protéines G au
niveau de la membrane des cellules de Leydig (10) et qui
s’observe habituellement chez des enfants plus jeunes.
Le Tableau I ci-dessous résume les caractères cliniques et
biologiques qui permettent de différencier ces trois condi-
- TABLEAU I -
Pseudo-puberté précoce
Puberté précoce vraie
Testotoxicose
Pilosité
Verge
Testicules
Augmentée
Augmentée
Normaux
Augmentée
Augmentée
Augmentés
Augmentée
Augmentée
Augmentés
LH
FSH
Testostérone
Basse
Basse
Basse
Augmentée
Augmentée
Augmentée
Basse
Basse
Augmentée
3.2.2. Les impubérismes
L’absence de tout signe de puberté après 15 ans doit faire
éliminer avant tout les différentes causes d’hypogonadisme : une dysgénésie gonadique (syndrome de
Klinefelter) est facilement rattachée à sa cause par la clinique et le caryotype ; le diagnostic biologique d’un hypogonadisme hypogonadotrophique repose sur les résultats
du dosage de FSH et LH après stimulation.
En l’absence de cause organique, on peut alors parler de
retard pubertaire. Dans tous ces cas, le dosage de la testostérone sérique permet d’évaluer la capacité fonctionnelle du testicule endocrine. Le dosage de DHEA ou SDHEA en l’absence de tout signe de puberté donne, comme
chez la fille, des informations sur le degré de maturité des
surrénales.
3.3. L’homme adulte
3.3.1. Les hypogonadismes sont la plupart du temps secondaires. Le dosage de la testostérone entre dans le cadre de l’exploration globale du syndrome et indique le niveau d’atteinte gonadique. Qu’il s’agisse de la testostérone totale, libre ou biodisponible, aucune de ces trois
méthodes de mesure n’a montré sa supériorité en dehors
de perturbations importantes de la SHBG.
3.3.2. Les troubles de la fertilité ne s’accompagnent qu’exceptionnellement de perturbations de la production de testostérone : les causes endocriniennes d’hypofertilité sont
rares et habituellement évidentes.
3.3.3. Les dysérections d’origine endocrinienne chez
l’adulte jeune s’intègrent dans le cadre d’un hypoandrisme
facilement rattaché à sa cause. Après la cinquantaine, le
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Revue de l'ACOMEN, 1998, vol.4, n°3
Les indications du dosage des hormones stéroïdes
tions pathologiques.
dosage de testostérone, associé à celui de la FSH, permet
de faire le diagnostic de la peu fréquente andropause. Son
dépistage systématique à cette période de la vie est important car le traitement substitutif donne alors d’excellents
résultats.
3.3.4. Les gynécomasties
En dehors de toute cause thérapeutique, on peut les observer dans diverses circonstances pathologiques. Outre
la testostéronémie et le dosage de la prolactine, la mesure
de l’estradiol sérique est importante pour dépister une tumeur féminisante du testicule ou de la surrénale.
Les cirrhoses hépatiques s’accompagnent d’un déséquilibre estrogènes/testostérone lié d’une part à la baisse de
synthèse de la SHBG, d’autre part aux perturbations du
métabolisme des stéroïdes et en particulier des estrogènes.
4. La cortico-surrénale
4.1. Rappel physiologique
La biosynthèse du cortisol par la zone fasciculée et celle
des androgènes dont le siège est principalement la zone
réticulée de la cortico-surrénale, sont sous la dépendance
de l’ACTH. C’est la concentration en cortisol qui assure le
rétro-contrôle négatif de la production hypothalamique de
C.R.H (corticotropin releasing hormone). La production
d’ACTH et de cortisol suit un rythme nycthéméral de
grande amplitude, avec une sécrétion maximale entre 4h et
8h du matin et un minimum entre 20h et 24h. La sécrétion
d’aldostérone par contre, au niveau de la zone glomérulée,
est indépendante de l’ACTH et soumise au contrôle du
système rénine-angiotensine.
Dans certaines conditions pathologiques, cette dualité peut
disparaître et être à l’origine, comme nous le verrons, d’hypertensions artérielles assez particulières.
4.2. Les hypercorticismes
4.2.1. Le syndrome clinique (Cushing) est commun à tous
les hypercorticismes. Il associe, dans sa forme complète,
une obésité facio-tronculaire avec «bosse de bison» cervicale basse, des vergetures pourpres, une amyotrophie,
une hypertension artérielle, un diabète et enfin une déminéralisation osseuse.
4.2.2. Le syndrome biologique est celui d’un hypercortisolisme : augmentation du cortisol sérique, perte du rythme
nycthéméral, et élévation de l’excrétion urinaire du cortisol.
4.2.3. Le diagnostic étiologique repose d’une part sur
l’imagerie, d’autre part, sur les dosages d’ACTH et les
épreuves dynamiques (Tableau II).
Il est rendu parfois difficile par le caractère incomplet ou
- TABLEAU II -
Origine du Cushing
Test
Tolérance
Réponse normale
Lysinevasopressine
CRH
Mauvaise
ACTH
Bonne
x2à4
Hypoglycémie
inulinique
Métopirone
Correcte
ACTH
Médiocre
x2à6
Bonne
ACTH freinée
de plus de 50%
Cortisol sérique <10nM
Cortisol urinaire abaissé
Dexaméthasone
"Minute"
Faible
Fort
Hypothalamus
Hypophyse
Surrénales
Para
néoplasique
+
+
Sans intérêt
±
-
+
Sans intérêt
-
+
+
-
-
4.3. Les hypocorticismes
Qu’ils soient primitifs (maladie d’Addison) ou secondaires à un déficit hypophysaire, leur diagnostic biologique
ne pose pas de problème majeur.
Revue de l'ACOMEN, 1998, vol.4, n°3
4.4. Cas particulier de la corticothérapie au
long cours
Certaines affections rhumatismales chroniques, les
connectivites, les greffes d’organes ou l’asthme sévère,
nécessitent une corticothérapie qui peut durer plusieurs
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B. ARGEMI
trompeur des réponses (10).
mulation.
années. Le freinage de l’axe hypothalamo-hypophysosurrénalien persiste plusieurs mois après l’arrêt du traitement corticoïde, nécessitant une thérapeutique de type
susbtitutif : celle-ci n’est arrêtée que lorsque l’ACTH s’est
normalisée avec reprise d’un rythme nycthéméral, et que
le test au synacthène est redevenu positif (11).
4.5.2. Les déficits en 11-hydroxylase (13)
Ils représentent 10 à 15% des hyperplasies congénitales
des surrénales. C’est le gène CYP 11B1, régulé par l’ACTH
et situé sur le chromosome 8, qui est en cause. Ce déficit se
traduit cliniquement par un hypocorticisme mais sans perte
de sel et avec hypertension artérielle en raison d’une accumulation de 11-désoxycorticostérone (D.O.C.), synthétisée dans la fasciculée.
Le tableau biologique comporte :
- abaissement du cortisol avec élévation du 11-désoxycortisol, ou composé "S",
- augmentation de la D.O.C.,
- absence de modification de l’aldostérone, car le gène
CYP 11B2, régulé par l’angiotensine, n’est pas altéré.
4.5. Les hyperplasies congénitales des
surrénales
4.5.1. Déficit en 21-hydroxylase (12)
C’est le déficit le plus courant : il représente 85 à 90% des
déficits enzymatiques de la cortico-surrénale. La mutation
porte sur le gène CYP 21 situé sur le bras court du
chromosome 6. Elle est transmise selon un mode autosomique récessif.
4.5.1.1. Les formes homozygotes se traduisent, cliniquement, par :
- Un syndrome de perte de sel, qui se manifeste dès la
naissance
- Un syndrome de virilisation grave surtout chez la fille
puisqu’il peut réaliser un véritable pseudo-hermaphrodisme.
- Le tableau biologique est caractéristique. Il associe aux
troubles hydro-électrolytiques :
. baisse de la cortisolémie,
. augmentation de l’ACTH,
. baisse de l’aldostérone,
. augmentation de la rénine,
. enfin et surtout, augmentation de la 17-hydroxyprogestérone.
- L’enquête génétique est essentielle pour pouvoir :
. prévenir la virilisation d’un fœtus féminin par un traitement systématique instauré dès le début de la grossesse
(dexaméthasone),
. réaliser un diagnostic anté-natal et préparer le traitement
intensif du nouveau né atteint dès la naissance.
4.5.1.2. Les formes non classiques : le plus souvent hétérozygotes. Cliniquement, elles se révèlent de façon habituellement tardive, chez l’adolescente ou la femme adulte,
par un hirsutisme isolé, avec ou sans troubles du cycle,
mais associé parfois à des troubles de la fertilité. Dans
d’autres cas, c’est l’enquête génétique qui met en évidence la mutation chez certains membres d’une famille.
C’est le test de stimulation par le synacthène qui permet le
diagnostic de l’anomalie enzymatique : le taux de 17hydroxyprogestérone, qui peut être normal ou à peine augmenté à l’état basal, dépasse toujours 10 ng/ml après sti-
4.5.3. Les autres déficits enzymatiques (12)
Ils sont beaucoup plus rares : 5 % des déficits
corticosurrénaliens.
β déshydrogénase est rarement
4.5.3.1. Le déficit en 3-β
complet. Il touche à la fois la stéroïdogénèse gonadique et
surrénale, avec défaut de virilisation du fœtus masculin,
virilisation du fœtus féminin par transformation de la DHEA
en testostérone au niveau du , foie, syndrome de perte de
sel variable. Le bilan biologique objective la baisse du cortisol et de l’aldostérone, l’augmentation de l’ACTH, l’augmentation de la DHEA, enfin la diminution de la testostérone.
4.5.3.2. Le déficit en 17-hydroxylase se traduit par un
pseudohermaphrodisme chez le garçon et un impubérisme
chez la fille, du fait de l’absence de synthèse de testostérone et donc d’estradiol ; l’insuffisance surrénale s’accompagne d’une hypertension artérielle en raison d’une
synthèse anormale de D.O.C. au niveau de la fasciculée.
La production d’aldostérone n’est pas touchée.
4.5.3.3. La très rare hyperplasie lipoïde des surrénales
est liée à l’absence de transformation du cholestérol en
prégnènolone. Toutes les voies de la stéroïdogénèse sont
interrompues.
4.6. La pathologie de l’aldostérone
4.6.1. Les hypoaldostéronismes
Un certain nombre d’hypotensions mal expliquées sont
probablement en relation avec un hypoaldostéronisme,
mais le manque de sensibilité des dosages ne permet pas
toujours de les mettre en évidence. L’absence de modification de l’aldostérone sérique à plusieurs reprises lors de
tests d’orthostatisme ou après restriction hydrique ou
sodée est un bon argument.
230
Revue de l'ACOMEN, 1998, vol.4, n°3
Les indications du dosage des hormones stéroïdes
4.6.2. Les hyperaldostéronismes
4.6.2.1. L’hyperaldostéronisme primaire du syndrome de
Conn est évoqué devant l’association d’une hypertension artérielle et d’une hypokaliémie. Le diagnostic est
confirmé par l’augmentation de l’aldostéronémie, exagérée par l’orthostatisme, et l’effondrement de la rénine. Dans
ces cas difficiles, le cathétérisme veineux rétrograde montre un gradient net des taux d’aldostérone entre les veines
surrénaliennes droite et gauche.
4.6.2.2. Les hyperaldostéronismes secondaires ont des
origines multiples : rénale, métabolique, thérapeutique, alimentaire.
Le contexte est habituellement suffisamment évocateur
pour que l’on n’ait pas besoin de dosages hormonaux.
Dans les cas douteux, l’augmentation de l’aldostéronémie,
non modifiée par l’orthostatisme, s’accompagne d’une élévation de la rénine.
4.7. Les autres hypertensions d’origine
surrénalienne (14)
Plus rares, elles commencent à être mieux connues grâce
aux dosages de stéroïdes et aux progrès de la génétique
moléculaire.
4.7.1. L’hypertension sensible à la dexaméthasone est
une affection transmise selon un mode autosomique dominant. Elle est liée à la formation d’une chimère sur le
gène de la 11-β-hydroxylase qui a incorporé la partie
codante de l’aldostérone-synthase au niveau de la fasciculée. L’hypertension est précoce et sévère. L’élévation
de l’aldostérone est accentuée par l’ACTH, elle est surtout remarquablement freinée par la dexaméthasone qui
réduit parallèlement l’hypertension artérielle.
4.7.2. Le syndrome d’excès apparent de minéralo-corticoïdes
Il est beaucoup plus rare que le précédent, car transmis
selon un mode récessif. La cause en est un déficit en 11 βhydroxystéroïde deshydrogénase qui, au niveau du rein,
inactive le cortisol en le transformant en cortisone. Il y a
donc accumulation de cortisol, qui est reconnu de façon
identique à l’aldostérone par le récepteur minéralocorticoïde du tubule distal. L’hypertension est sévère, à début
précoce. Elle s’accompagne, comme dans le cas d’un
hyperaldostéronisme primaire, d’une hypokaliémie, d’une
expansion du volume extra-cellulaire et d’une rénine basse,
mais l’aldostérone est diminuée et non stimulable. C’est
l’abaissement du taux de cortisone dans le sang avec élévation du rapport cortisol/cortisone qui signe le diagnostic. La dexaméthasone permet de réduire la production de
cortisol et donc l’hypertension.
Conclusion
La complexité du métabolisme des hormones stéroïdes, la
multiplicité des enzymes qui contrôlent ses différentes étapes et la diversité des sites de production hormonale, imposent une parfaite connaissance de la physiologie des
glandes endocrines impliquées dans leur production.
Ainsi, pour chaque situation pathologique le clinicien et le
biologiste peuvent choisir avec la meilleure précision les
paramètres qui apporteront l’aide la plus efficace au diagnostic.
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