CURRICULUM Forum Med Suisse 2008;8(37):674–678 676
Le traitement d’une tuberculose résistante, plus
rapidement découverte chez nous grâce aux
sondes géniques permettant d’obtenir le gène de
la résistance à la rifampicine (gène rpo B) et à
l’analyse de routine des résistances, doit sans faute
être discuté avec un collègue connaissant parfai-
tement le problème. Il est très difficile de juger la
tolérance des effets indésirables fréquents et de
préciser la durée du traitement. Une résection
parenchymateuse chirurgicale est en outre souvent
nécessairepour accélérer encore la guérison,voire
la rendre possible.
Que faut-il contrôler?
Des contrôles cliniques hebdomadaires, mensuels
par la suite, de l’évolution de la maladie et des ef-
fets indésirables des médicaments sont très im-
portants pour le résultat du traitement.
La recherche de mycobactéries dans les expecto-
rations doit se faire chaque mois jusqu’à négati-
vation des cultures. Si les résultats des cultures
sont toujours positifs après deux mois, cela n’est
pas nécessairement synonyme d’échec thérapeu-
tique. Mais le traitement devra être prolongé d’un
mois au moins. Dans une tuberculose caverneuse
surtout, l’examen direct des expectorations mon-
tre encore longtemps des mycobactéries alors que
les cultures sont négatives. Il y a échec thérapeu-
tique uniquement si la radiographie du thorax
après deux mois ne montre aucune amélioration
ou si les cultures sont encore positives après cinq
mois. L’explication peut être une résistance aux
médicaments mais aussi une mauvaise observance
ou une résorption insuffisante. Les Asiatiques sur-
tout, mais aussi les sidéens, présentent des trou-
bles de la résorption ou des interactions avec les
traitements antirétroviraux, inhibiteurs des pro-
téases surtout. C’est alors que le dosage sanguin
de l’isoniazide et de la rifampicine est indiqué par
ex. dans les laboratoires Viollier [6].
Les dosages des transaminases et de la bilirubine
avant la mise en route du traitement, une à deux
semaines plus tard et chaque mois par la suite, sont
recommandés à partir de 35 ans et en cas de sus-
picion d’hépatopathie. Chez les patients asympto-
matiques, des transaminases atteignant cinq fois
leurs normes supérieures sous traitement peuvent
encore être tolérées. L’adjonction de vitamine BV6
à faible dose, 40 mg, est recommandée s’il y a des
facteurs de risque tels que l’alcool ou en présence
d’une hépatopathie préexistante. Des contrôles de
la vue et de la vision colorée sont préconisés avec
l’éthambutol à des doses supérieures à 15 mg/kg
ou pendant plus de deux mois.
Au terme d’un traitement efficace de six mois, ou
de neuf mois pour une méningite ou lymphadéno-
pathie tuberculeuse, aucun autre contrôle n’est
nécessaire sauf s’il y a eu des interruptions de trai-
tement prolongées ou en cas de doute sur la bonne
prise des médicaments. Dans la tuberculose gan-
le dosage de leur taux sérique. Les changements
de médicaments ou leur posologie insuffisante
peuvent provoquer une résistance progressive
(«multi drug resistant» ou MDR), d’abord à l’iso-
niazide, ensuite à la rifampicine, et enfin aux mé-
dicaments de réserve, notamment les fluoroqui-
nolones et aminoglycosides («extensively drug
resistant» ou XDR). Certains cas de tuberculose
XDR ont déjà été observés chez nous, la plupart
traités avec succès [3]. Du fait de leur augmenta-
tion et de leur mortalité, surtout en Afrique du Sud,
ils font l’objet de la plus grande attention [4, 5].
L’AfriqueduSudn’estqu’àquelquesheuresd’avion
de Suisse. Sans traitement efficace, jusqu’à 50%
des tuberculeux décéderaient chez nous, comme
à l’ère préantibiotique!
Vu le manque de motivation financière, l’industrie
pharmaceutiquen’a malheureusement mis aucun
nouveau médicament antituberculeux sur le mar-
ché depuis la rifampicine en 1968, exception faite
de nouvelles rifamycines (par ex. rifabutine), de la
rifapentine et des quinolones, actuellement sou-
vent utilisées dans la tuberculose. La moxifloxa-
cine est essayée en remplacement de l’isoniazide
ou de l’éthambutol comme premier traitement
d’une tuberculose, et est devenue l’un des plus
importants médicaments de réserve. En plus de
l’amikacine, à n’administrer que par voie intravei-
neuse, et de la capréomycine en intramusculaire,
l’oxazolidinone est également un médicament de
réserve. Grâce des subventions étatiques et de gé-
néreux donateurs tels que Bill Gates, de nouveaux
médicaments sont dans le pipeline, à des années
encore cependant de leur emploi clinique.
Ta bleau 2. Points importants du traitement de la tuberculose.
Information du patient/des proches/des collaborateurs
De préférence par oral et par écrit dans la langue maternelle du patient, si nécessaire avec
un traducteur. Dans l’information des proches et des collaborateurs, prêter attention à la peur
de la contagion, au risque de perte du travail et à la protection des données.
Choix, dose et administration des médicaments
Sont utiles les recommandations thérapeutiques (Ligue pulmonaire suisse) et la hotline Tuber-
culose 0800388388, le conseil d’un pneumologue ou d’un infectiologue. Choix d’associations
fixes et prise journalière unique, le matin avec le déjeuner, pas forcément sur un estomac vide
malgré la résorption un peu moins bonne, ou si nausée avant le coucher pour faciliter l’obser-
vance.
Effets indésirables
Information sur les effets indésirables à prévoir, dont coloration rouge de l’urine sous rifampicine,
pour établir un climat de confiance et faciliter la poursuite du traitement.
Contagiosité
Les contaminations peuvent être prévenues par isolement pendant les 2 premières semaines
de traitement, protection des visiteurs par masque P2 et examen rapide de l’environnement.
Mais la chimiothérapie et le traitement préventif des contacts immédiatement mis en route,
tenant compte des résistances et ininterrompus, sont déterminants.
Prise de médicaments contrôlée (DOT) et intermittente
La DOT est de règle à l’hôpital et devrait être poursuivie à domicile dans toute la mesure du
possible. Après 2 mois, la prise contrôlée des médicaments peut devenir intermittente, plutôt 3x
que 2xpar semaine, à posologie naturellement plus élevée.
Contrôles réguliers
Des examens rapprochés des expectorations et éventuellement radiographies, les examens
des effets indésirables et surtout de l’observance (coloration rouge des urines et dosage des
métabolites urinaires de l’isoniazide) sont importants pour le succès du traitement.
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