Le consommateur face à la crise La crise économique met en question l’hyperconsommation. Mais le consommateur du 21e siècle ne se contente plus de vouloir consommer moins et mieux, comme on l’y invitait déjà dans les années 1970 ou 1990. Il cherche du sens, et même il cherche son identité dans sa consommation. La consommation va-t-elle devenir de plus en plus « éthique », « durable », « responsable » ? Crise, oui. Crise de la consommation ? Pas si sûr ! A la fin de l’année dernière, les données de l’INSEE témoignaient d’un maintien relatif de la consommation. Le consommateur a bien l’impression d’avoir des difficultés financières. Mais depuis 15 ans pourtant, estimaient fin 2009 les chercheurs du CREDOC, le pouvoir d’achat a progressé. Simplement l’attitude envers la consommation a évolué. Vers la simplification, la comparaison des prix, la recherche de plaisirs accessibles. Vers une remise en question plus radicale aussi de l’hyperconsommation. Pour le CREDOC, il faut pour comprendre évoquer l’abandon des grands systèmes explicatifs du monde : religieux, politiques ou scientifiques. L’affaiblissement des repères, des structures d’encadrement et de sociabilité traditionnelles : familles, partis, églises, écoles… Isolé, atomisé, l’individu manque de moyens pour exprimer ses engagements. Et il se réfugie de plus en plus dans la consommation pour mettre en œuvre ses considérations morales et éthiques. La consommation devient le lieu d’une recherche de sens. D’où la montée des préoccupations liées au développement durable. On recherche des garanties écologiques pour les produits. On privilégie la production locale. On se préoccupe de l’éthique des entreprises, du respect des droits des salariés. D’après les chercheurs, ces critères seraient en passe de devenir plus importants que la marque ou le distributeur, qui subissent une crise de confiance notable… Dans le domaine alimentaire, les consommations qui ont beaucoup ralenti sont celles de boissons alcoolisées, de tabac, d’alimentation à domicile. Baisse aussi pour la fréquentation des cafés et des restaurants (sauf dans les plus jeunes générations). La morale n’est pas en reste ! Consommation durable, éthique, solidaire, locale… Quel que soit son nom, la consommation ne voudrait plus se limiter à la satisfaction d’un désir ou d’un besoin. Elle se présente de plus en plus comme un choix moral, exprimant un intérêt d’ordre collectif. En mettant du sens dans son acte d’achat, le consommateur engagé utilise son pouvoir d’achat à des fins responsables. Il veut assurer sa maîtrise sur le marché. D’où tout un faisceau de pratiques : consommation « verte », agriculture et magasins bio, chasse aux déchets, recherche de l’autoproduction par l’apprentissage du jardinage et de la cuisine… Tout un mouvement vers la consommation responsable, qui cohabite avec l’achat malin et la recherche d’économies. L’avenir dira si ce mouvement se confirme. Pour le meilleur ou pour le pire : un certain moralisme « citoyen », appelé à trouver un équilibre avec les libertés individuelles. Pour les chercheurs du CREDOC en tout cas, la crise n’a pas bouleversé ces tendances de la consommation. La récession ne fait qu’accentuer plus ou moins certaines pratiques qui avaient commencé à se mettre en place… (Nutrinews hebdo) CREDOC. Cahier de recherche n° 268.