Le rétrécissement aortique est la pathologie valvulaire la plus
fréquente en Amérique du Nord et en Europe puisqu’elle
touche 2 à 7 % des plus de 65 ans. Sa prévalence augmente
avec l’âge et les pathologies cardiovasculaires
concomitantes. Le pronostic est plutôt bon pour les patients
asymptomatiques, mais dès l’apparition des symptômes, le
taux de survie chute. La médiane de survie se situe alors
entre 2 et 3 ans. La seule thérapeutique efficace est le
remplacement valvulaire par chirurgie mais seul 1/3 des
patients y accèdent du fait du risque opératoire élevé et de
nombreuses comorbidités. Le TAVI (transcatheter aortic
valve insertion) apparaîtrait comme une alternative à la
chirurgie chez ces patients à haut risque opératoire même si
la mortalité n’est pas négligeable (10 à 22% à 8 mois) et
nécessite une réflexion quant au rapport bénéfice/risque au
cas par cas. L’évaluation du risque de mortalité lors d’une
chirurgie cardiovasculaire se fait grâce à des scores
complexes tels que l’EURO-score et le STS-PROM score.
Le but de cette étude prospective allemande était de
comparer la survie de patients de plus de 75 ans, à haut
risque chirurgical, porteurs d’un rétrécissement aortique
sévère, < 1 cm2 (groupe A), avec celle de patients du même
âge, de même risque chirurgical et présentant une pathologie
valvulaire moins sévère, ≥ 1 cm2 (groupe B), et d’identifier
des facteurs pronostiques. Les patients bénéficiaient à
l’entrée dans l’étude d’une échocardiographie et d’un
examen clinique. Ils recevaient le traitement optimum :
diurétiques, IEC, ß-bloquants si possible. Le suivi minimum
était de 2 ans, avec un entretien téléphonique tous les 6 mois.
Au total, 161 patients, dont 40% d’hommes, ont été inclus
entre 2002 et 2006, soit 79 dans le groupe A et 82 dans le
groupe B. L’âge moyen était de 86,0 ± 7,7 ans, la clairance
moyenne de la créatinine de 38 ml/min, la fraction d’éjection
de 50% et l’indice de masse corporelle moyen de 26 kg/m2.
Le suivi était de 26 mois en moyenne.
Au cours de cette période, 60,9% des patients du groupe A
sont décédés. Le taux cumulé de mortalité était de 77,5%
avec une durée moyenne de survie de 16,4 ± 16,1 mois. Dans
le groupe B, 44,4% des patients sont décédés pendant l’étude
(p < 0,0001).
Quel pronostic vital pour un octogénaire porteur d’une sténose aortique
serrée à haut risque chirurgical ?
Nathalie Faucher,
Hôpital Bichat Claude Bernard, Paris.
Af 648-2011 ©2011 Successful Aging SA
Scheler R, Hammerstingl C, Sinning JM & al. Prognosis of octogenarians with severe aortic valve stenosis at high risk
for cardiovascular surgery. Heart. 2010;96:1831-1836.
Taux de survie dans les 2 groupes à chaque évaluation.
Les facteurs prédictifs indépendants de mortalité pour les patients porteurs d’une sténose serrée (groupe A) étaient : une élé-
vation de la pression artérielle pulmonaire ≥ 30 mmHg, le STS-PROM score, le taux de créatinine sérique et l’existence d’un
diabète. Les facteurs de risque « classiques » tels que âge, sévérité des symptômes, syncopes, n’étaient pas prédictifs de sur-
venue de décès dans cette étude. De même, la prise médicamenteuse n’avait pas d’impact en termes de survie. Dans le groupe
B, les facteurs prédictifs étaient : la pression artérielle pulmonaire, la fraction d’éjection et le taux de créatinine sérique. La
prise de ß-bloquants et d’IEC avait un effet bénéfique sur la survie de ces patients.
Quant à savoir pourquoi les patients n’étaient pas opérés, les réponses étaient les suivantes : 58% des patients avaient refusé
l’intervention chirurgicale, 24% avaient été récusés par le chirurgien du fait du haut risque chirurgical et 18% avaient été ré-
cusés par le cardiologue pour les mêmes raisons.
Du fait du vieillissement de la population, cette pathologie va devenir de plus en plus fréquente. Il est donc indispensable de
la dépister et de proposer une prise en charge chirurgicale au patient en concertation entre le gériatre, le cardiologue et le chi-
rurgien avant qu’il ne soit trop tard, en tenant compte d’une part des comorbidités et d’autre part de l’espérance de vie et de la
qualité de vie du patient.
Suivi Groupe A Groupe B p
6 mois 70,9% 98,8% < 0,0001
12 mois 65,8% 84,1% = 0,003
18 mois 49,4% 69,5% = 0,006
24 mois 41,8% 59,8% = 0,01