Semi-normes
Dans tout ce qui suit, Kesignera selon le contexte le corps Rdes r´eels ou celui Cdes
complexes. Pour un ´el´ement λde K, la notation |λ|d´esignera dans le premier cas la valeur
absolue de λ, et dans le second son module.
D´efinition. Soit Eun K-espace vectoriel. On appelle semi-norme sur Eune fonction
p:ER+satisfaisant les deux conditions :
(i) xEλKp(λx) = |λ|p(x)
(ii) xEyE p(x+y)6p(x) + p(y).
Une norme est une semi-norme satisfaisant pour tout xde E:p(x) = 0 =x= 0.
1 - Topologie d´efinie par une famille de semi-normes.
Soient Eun K-espace vectoriel et Pun ensemble de semi-normes sur E. On appellera
P-boule de Ecentr´ee en aEtout ensemble de la forme
W(a, p1, p2, . . . , pk, r1, r2, . . . , rk) := {xE:j6k pj(xa)< rj},
o`u les pjappartiennent `a P, et les rjsont strictement positifs. Lorsque Pest un ensemble
constitu´e d’une seule norme, ces P-boules centr´ees en asont exactement les boules ouvertes
de centre apour cette norme.
Th´eor`eme 1.1. Si Pest une famille de semi-normes sur E, il existe une unique topologie
sur E(qu’on appellera la P-topologie) pour laquelle, pour tout aE, les P-boules de centre
aforment une base de voisinages de a.
Pour cette topologie, la fonction : (x, y)7→ x+yest continue de E×Edans E, et la
fonction (λ, x)7→ λxcontinue de K×Edans E(on dira que c’est une topologie d’espace
vectoriel).
Il est clair que l’intersection de deux P-boules de centre aest encore une P-boule
de centre a. De plus, si W=W(a, p1, p2, . . . , pk, r1, r2,...,rk) est une P-boule de centre
acontenant b, les nombres si=ripi(xa) sont strictement positifs et on v´erifie
imm´ediatement que W(b, p1, p2,...,pk, s1, s2, . . . , sk)W(a, p1, p2,...,pk, r1, r2,...,rk),
donc que West un voisinage de b. Il en r´esulte que ceci d´efinit une topologie sur E.
Si W=W(a+b, p1, p2, . . . , pk, r1, r2,...,rk) est un voisinage de a+b, on a pour
xW(a, p1, p2, . . . , pk, r1/2, r2/2, . . . , rk/2) et yW(b, p1, p2,...,pk, r1/2, r2/2,...,rk/2) :
pj(x+yab)6pj(xa) + pj(yb)< rj/2 + rj/2 = rj, donc x+yW: ceci montre
la continuit´e en (a, b) de la fonction (x, y)7→ x+y.
De mˆeme, puisque
pj(λxµa)6|λ|pj(xa) + |λµ|pj(a)6|µ|pj(xa) + |λµ|pj(a) + |λµ|pj(xa)
on voit qu’en assurant pj(xa)<inf(1,rj
3µ) et |λµ|<inf(rj
3,rj
pj(a)), on assure
pj(λxµa)< rj. On en d´eduit la continuit´e en (µ, a) de la fonction (λ, x)7→ λx.
version du 20 Octobre 2009
Proposition 1.2. Si Pest une famille de semi-normes sur E, la P-topologie est s´epar´ee si
et seulement si, pour tout x6= 0 de E, il existe une pPtelle que p(x)>0.
Si la P-topologie est s´epar´ee et si xest non nul dans E, il existe une P-boule
W(0, p1, p2, . . . , pk, r1, r2,...,rk) de centre 0 ne contenant pas x: il existe donc un j6ktel
que pj(x)>rj>0.
Inversement, si x6=yet s’il existe pPtelle que p(xy) = r > 0, les P-boules
W1=W(x, p, r/2) et W2=W(y, p, r/2) sont des voisinages disjoints de xet y: en eet, si
on avait zW1W2, on aurait r=p(xy)6p(xz) + p(yz)<r
2+r
2=r.
Th´eor`eme 1.3. Si Pest une famille de semi-normes sur E, chacune des fonctions pP
est continue pour la P-topologie, et toute P-boule est un ensemble convexe ouvert.
On a en eet, pour pP:p(x+h)6p(x) + p(h) et p(x)6p(x+h) + p(h) =
p(x+h) + p(h), donc |p(x+h)p(x)|6p(h), donc |p(x+h)p(x)|<εd`es que
x+hW(x, p, ε).
Soit pP. Puisque pest continue, l’ensemble {x:p(xa)< r}est ouvert. Donc toute
P-boule, intersection finie d’ouverts, est ouverte.
Enfin, si pP,p(xa)< r,p(ya)< r et 0 6t61, on a
p((tx+(1t)y)a) = p(t(xa)+(1t)(ya)) 6tp(xa)+(1t)p(ya)< tr+(1t)r=r
Il en r´esulte que l’ensemble {x=p(xa)< r}est convexe ; toute P-boule, intersection de
convexs, est donc convexe.
Th´eor`eme 1.4. Si Pest une famille de semi-normes sur E, et qune semi-norme sur E.
Alors il y a ´equivalence entre
(i) qest continue pour la P-topologie.
(ii) il existe un nombre fini (p1, p2,...,pk)d’´el´ements de Pet un nombre Mtels que
q(x)6Msupj6kpj(x)pour tout xde E.
(iii) qest born´ee sur un voisinage de 0.
Si qest une semi-norme continue, il existe un voisinage Vde 0 pour la P-topologie
pour lequel on a |q(x)q(0)|<1 pour tout xde V. Il existe donc une P-boule
W(0, p1, p2, . . . , pk, r1, r2,...,rk), de centre 0 sur laquelle qest major´ee par 1.
Si maintenant qest born´ee par Msur un voisinage Vde 0, il existe une P-boule
W=W(0, p1, p2, . . . , pk, r1, r2,...,rk), de centre 0 sur laquelle qest major´ee par µ. Soit
xE: si 0 < t < infj
rj
pj(x), on a pj(tx) = tpj(x)< rjpour tout j, donc tx W, et
q(tx) = tq(x)< µ, ou encore q(x)<µ
t, c’est-`a-dire q(x)6µsupj
1
rj
pj(x). On peut donc
prendre M= supj
µ
rj
.
Enfin, si qerifie (ii), puisque l’on a
|q(y)q(x)|6q(xy)6Msup
j
pj(xy)
on a |q(y)q(x)|<εen tout point yde W(x, p1, p2,...,pk,ε/M, ε/M, . . . , ε/M), ce qui
montre la continuit´e de qen x.
2
Corollaire 1.5. Soient Pune famille de semi-normes sur E,Qune famille de semi-normes
sur Fet f:EFune application lin´eaire. Alors fest continue de Emuni de la P-
topologie dans Fmuni de la Q-topologie si et seulement si qfest une semi-norme continue
sur Epour tout qQ.
Si fest continue et si qQ, alors qest continue sur Fet qfest continue sur
E. Inversement, si W=W(f(a), q1, q2, . . . qk, r1, r2, . . . , rkest une Q-boule de E, on a
f1(W) = W(a, q1f, . . . qkf, r1,...rk), qui est un voisinage de adans Epour la P-
topologie si chacune des semi-normes qjfest continue.
On notera L(E, F ) l’espace vectoriel des applications lin´eaires continues de Edans F.
Corollaire 1.6. Si Pest une famille de semi-normes sur E, et f:EKune forme
lin´eaire, alors fest continue pour la P-topologie si et seulement s’il existe un nombre
fini (p1, p2,...,pk)d’´el´ements de Pet un nombre Mtels que, pour tout xE, on ait
|f(x)|6M. supj6kpj(x).
Il sut de remarquer que, lorsque fest une forme lin´eaire, la fonction q:x7→ |f(x)|
est une semi-norme, que qest continue si fl’est, et que si qest continue, on a
|f(x)f(y)|=|f(xy)|=q(xy)<ε
en tout point yd’un voisinage de x.
Si Eest un K-espace vectoriel muni d’une Ptopologie, on appelle dual de El’espace
vectoriel E0=L(E, K) des formes lin´eaires continues sur E.
Proposition 1.7. Soient Pune famille de semi-normes sur E,Qune famille de semi-normes
sur Fet u:EFune application lin´eaire continue de Emuni de la P-topologie dans F
muni de la Q-topologie. Alors il existe une application lin´eaire tudu dual F0de Fdans le
dual E0de E, appel´ee transpos´ee de utelle que, pour tout xEet tout fF0on ait
htu(f), xi=hf, u(x)i.
Il sut de remarquer que si fF0la forme lin´eaire fuest continue sur E, et que
l’application f7→ fuest lin´eaire.
Th´eor`eme 1.8. Si Pest une famille de semi-normes sur E, alors Eest localement compact
pour la P-topologie si et seulement s’il est s´epar´e et de dimension finie.
Ceci r´esulte des deux lemmes suivants.
Lemme 1.9. Si Pest une famille de semi-normes sur un espace Ede dimension finie pour
laquelle la P-topologie est s´epar´ee, et si (a1, a2, . . . , an)est une base de E, l’application
ϕ: (x1, x2,...,xn)7→ Pxjajest un hom´eomorphisme de Knsur E.
Puisque chaque pϕ, pour pP, est une semi-norme sur Kn, on se ram`ene
imm´ediatement au cas o`u E=Kn.
On remarque d’abord que toute semi-norme psur Knest continue : si (e1, e2,...,en)
est la base canonique de Kn, on a
p(x) = p(
n
X
j=1
xjej)6X
j
|xj|p(ej)6Mkxk
3
o`u on a pos´e M=Pjp(ej), donc |p(y)p(x)|6p(yx)6Mkyxk. Il en r´esulte que
toute P-boule est ouverte, pour la topologie d´efinie par la norme.
Inversement, pour toute semi-norme p, l’ensemble p1(0) est un sous-espace vectoriel.
Si la P-topologie est s´epar´ee, on peut donc construire par ecurrence une suite strictement
d´ecroissante (Vk) de sous-espaces vectoriels de Eet des pkdans Ptelle que V0=Eet
Vk+1 =Vkp1
k(0) o`u pk(xk)>0 pour un xkVksi Vk6={0}. Cette suite est finie, de
longueur `6n, Alors supk6`pkest une semi-norme ne s’annulant qu’en 0, donc une norme,
qui est ´equivalente `a la norme k.kpuisque la dimension est finie : on a kxk6Msupk6`pk(x),
ce qui montre que la norme k.kest continue pour la P-topologie, c’est-`a-dire que cette
derni`ere est plus fine que la topologie usuelle sur Kn.
Lemme 1.10. Si Eest localement compact pour la P-topologie, Eest de dimension finie.
Si Eest localement compact, il existe une P-boule W(0, p1, p2,...,pk, r1, r2, . . . , rk)
qui est relativement compacte dans E. Soit a6= 0 un point de cette P-boule W. Il existe,
puisque Eest s´epar´e une pPtelle que p(a)>0 ; comme pest continue, elle est born´ee
sur le compact Wpar un nombre M, ce qui montre que na /Wsi n > M
p(a), donc qu’il
existe j6ktelle que npj(a) = pj(na)>rj>0, et enfin que pj(a)>0. Il en r´esulte que
q= supj6kpjest une norme sur E, et que West un voisinage de 0 dans l’espace Enorm´e
par q. La topologie d´efinie par qest moins fine que la P-topologie, et s´epar´ee : West donc
compact dans cet espace norm´e. Celui-ci est donc localement compact, donc de dimension
finie.
Th´eor`eme 1.11. Si Pest une famille d´enombrable de semi-normes sur E, la P-topologie
peut ˆetre d´efinie par une distance dinvariante par translation, c’est-`a-dire v´erifiant pour tout
x, tout yet tout zde E:d(x+z, y +z) = d(x, y), pour laquelle les boules sont convexes.
Inversement, si Pest une famille de semi-normes et si la P-topologie est etrisable, il
existe une suite croissante (pk)de semi-normes pour laquelle la P-topologie co¨ıncide avec la
topologie d´efinie par la famille des (pk).
Une suite (xn)de Econverge alors vers aEsi et seulement si pk(xna)0pour
tout k. Et une suite (xn)est de Cauchy si et seulement si, pour tout k,pk(xnxm)0,
c’est-`a-dire si (xnxm)tend vers 0 lorsque net mtendent vers l’infini.
Si (pk)k>1est une ´enum´eration de P, on d´efinit une distance dsur Een posant :
d(x, y) = sup
k>1°inf( 1
k, pk(xy)¢
et cette distance est clairement invariante par translation. On peut remarquer ´egalement
que si λKv´erifie |λ|= 1, on a d(x, 0) = d(λx, 0). On a, pour cette distance
B(a, r) = {x:k61
rpk(xa)< r}
qui est une P-boule centr´ee en a, ce qui montre que la P-topologie est plus fine que la
topologie associ´ee `a det que les boules de dsont convexes. Inversement, chacune des semi-
normes pkest continue pour la distance d, puisque, pour ε<1
k, on a, si d(x, y)<ε:
|pk(y)pk(x)|6pk(yx) = inf( 1
k, pk(xy)) 6d(x, y)<ε.
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Si, maintenant, la P-topologie est m´etrisable, d´efinie par une distance d, chaque boule
Bd(0,2k) est un voisinage de 0, donc contient une P-boule ; il existe donc une partie finie Jk
de Pet un εktels que Bd(0,2k){x:pJkp(x)<εk}. Si (qm) est une ´enum´eration
de l’ensemble d´enombrable P0=SkJk, on remarque que chaque qmest continue, et que la
P0-topologie est plus fine que la P-topologie initiale. Il sut alors de prendre pk=Pm6kqm
pour avoir la suite croissante chercee.
Il r´esulte de ce qui pr´ec`ede qu’une suite (xn) converge alors vers asi pk(xna)0
pour tout k. Une suite (xn) est de Cauchy pour dsi et seulement si, pour tout ket tout
ε>0, il existe un rang Ntel que pk(xmxn)<εpour met nsup´erieurs `a N, ou encore
que (xmxn) tende vers 0 quand met ntendent vers l’infini.
On remarque ainsi que la compl´etude de Ene d´epend alors que de la topologie, et pas
de la distance invariante par translation choisie.
Definition 1.12. On appelle espace de Fechet un espace vectoriel muni d’une P-topologie
m´etrisable, et complet pour cette topologie.
2 - Topologies faibles
Soient Eun espace vectoriel sur Ket Fun espace vectoriel de formes lin´eaires sur E.
Pour tout fF, la fonction pf:x7→ |f(x)|est une semi-norme sur E. On d´efinit alors
la topologie faible σ(E, F ) sur Ecomme la P-topologie o`u P={pf:fF}. On notera
souvent hf, xile nombre f(x).
Th´eor`eme 2.1. Une forme lin´eaire fsur Eest continue pour la topologie σ(E, F )si et
seulement si fF.
Il r´esulte imm´ediatement de la efinition que si fF, on a |f(x)|6pf(x) pour tout
xE, donc que fest continue pour σ(E, F ).
Inversement, si gest une forme lin´eaire continue pour σ(E, F ), il existe f1,f2,...fkdans
Fet Mtels que, pour tout x, on ait |g(x)|6M. supjpfj(x). En particulier, si xTjker(fj),
on a n´ecessairement g(x) = 0. Si on note Φl’application lin´eaire de Edans Kkd´efinie par
Φ(x) = (fj(x))j6k, et par Gle sous-espace Φ(E) de Kk, on remarque que si Φ(x) = Φ(y),
on a fj(xy) = 0 pour tout j, donc g(xy) = 0. Il en esulte qu’existe une unique fonction
ϕde Vdans Ktelle que g(x) = ϕ(Φ(x)). On voit ais´ement que cette fonction ϕest lin´eaire
et peut se prolonger en une forme lin´eaire ψsur Kk. On a alors
ψ(u1, u2, . . . , uk) = X
j6k
αjuj
avec des coecients αjdans K.
On en d´eduit que, pour xE,g(x) = ψΦ(x) = Pj6kαjfj(x), c’est-`a-dire que
g=Pj6kαjfjF.
Th´eor`eme 2.2. Si Eest un espace vectoriel muni d’une P-topologie et E0son dual, la
topologie faible σ(E, E0)(appel´ee topologie aaiblie de E) est moins fine que la P-topologie
initiale.
Puisque chaque ´el´ement de E0est continu pour la P-topologie initiale O, on voit
imm´ediatement que chaque semi-norme pfpour fE0est O-continue, donc que toute
boule pour la topologie σ(E,E0) est ouverte pour O, donc que la topologie aaiblie est
moins fine que O.
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