Prise en charge diagnostique de la suspicion
d’embolie pulmonaire
Questions — Réponses — Conclusion
"Vous semble-t-il logique de doser les D-dimères
par la méthode ELISAà toutes les suspicions d’embo-
lie pulmonaire ?
La réponse est non. Les D-dimères sont sensibles
mais non spécifiques. De nombreuses situations clini-
ques (inflammation, infection, nécrose) ou physiologi-
ques (grossesse) induisent une augmentation des
D-dimères. Au delà de 80 ans, les D-dimères sont
positifs dans 90 % des cas sans qu’il n’y ait de MVTE
documentée. Le seul intérêt de D-dimères est d’exclure
le diagnostic lorsque le seuil est inférieur à 500 ng/l,
compte tenu d’une excellente valeur prédictive négative
(100 %), mais sa valeur prédictive positive est mauvaise.
Enfin, la sensibilité étant de 98-99 %, il faut s’abstenir de
ce dosage lorsque la probabilité clinique est forte.
"Quels sont les éléments anamnestiques et clini-
ques qui doivent être retrouvés dans le dossier pour
argumenter le stratégie diagnostique adoptée ?
Les symptômes doivent être regroupés dans l’un des
trois grand syndromes précédemment cités. Les facteurs
de risques de la MVTE doivent être recherchés systéma-
tiquement. La présence d’un diagnostic alternatif plus
probable que l’embolie pulmonaire modère la suspicion
clinique d’EP. La présence de signes de gravités est
notée. Le médecin peut alors entreprendre une démarche
diagnostique dépendante de ces critères de gravité et de
la force de la probabilité clinique.
"Vous semble-t-il logique de commencer les explo-
rations d’une suspicion d’embolie pulmonaire sans
signe clinique de thrombose veineuse profonde par un
écho-Doppler ?
Dans 90 % des cas, le thrombus provient d’une
thrombose veineuse des membres inférieurs. La phlébo-
graphie permet de la retrouver dans 70 % des cas.
L’écho-Doppler veineux la retrouve dans 30 à 50 % des
cas selon que le patient est symptomatique ou non. La
rentabilité de cet examen non invasif et non coûteux est
bonne, sous réserve qu’il soit effectué avant tout autre
examen.
"Un angioscanner thoracique seul et interprété
comme normal devant une suspicion d’embolie pul-
monaire vous permet-il d’éliminer formellement le
diagnostic ?
La réponse est non. Toutes les études concordent
pour une sensibilité de l’angioscanner thoracique de
l’ordre de 70 %. Il y a donc 30 % de faux négatifs. En
couplant l’angioscanner à l’écho-Doppler veineux des
membres inférieurs, on peut, avec confiance, arrêter les
investigations sous réserve que la probabilité clinique ne
soit pas forte.
Par ailleurs, 10 % des angioscanners ne sont pas
contributifs du fait de problèmes techniques. Ils ne
doivent pas être considérés comme normaux et nécessi-
tent la poursuite des investigations.
"Quelles sont les circonstances pour lesquelles vous
devez recourir à l’angiographie pulmonaire ?
Contrairement à ce qui est souvent pratiqué, le
recours à l’angiographie pulmonaire reste indispensable
dans certaines situations qui représentent moins de 10 %
des cas.
L’angiographie pulmonaire doit être réalisée si la
probabilité clinique est forte et que l’écho-Doppler
veineux des membres inférieurs et l’angioscanner thora-
cique sont normaux ou non contributifs.
FMC
JEUR, 2003, 16, 46-47
©
Masson, Paris, 2003