Tools for Practice est fièrement soutenu par l’Alberta College of Family Physicians (ACFP). L’ACFP est un organisme professionnel bénévole qui représente en Alberta plus de 3 000 médecins de famille, résidents en médecine familiale et étudiants en médecine. Établi il y a plus de cinquante ans, l’ACFP s’efforce d’atteindre l’excellence en médecine familiale grâce à des activités de sensibilisation, à la formation médicale continue et à la recherche en soins primaires. www.acfp.ca 2 avril 2013 Réduction de l’apport en sodium pour traiter l’insuffisance cardiaque – aperçu des données probantes Question clinique : La restriction de l’apport en sodium améliore-t-elle les résultats des patients atteints d’insuffisance cardiaque systolique? Conclusion : Les facteurs qui régulent les mouvements du sodium et de l’eau chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque chronique sont encore mal compris. Bien qu’elle comporte d’importantes limites, une méta-analyse de six essais cliniques randomisés (ECR) montre une détérioration des résultats, notamment un nombre nécessaire pour obtenir un effet nocif (NNN) de 8 pour la mortalité toutes causes confondues. D’autres ECR sont nécessaires, car aucun n’a démontré les bienfaits cliniques de la réduction de l’apport en sodium pour traiter l’insuffisance cardiaque. Données probantes Revue systématique de six essais cliniques randomisés (ECR) réalisée en 2012 et portant sur 2 747 patients atteints d’insuffisance cardiaque systolique. Comparativement à 2 800 mg par jour, un régime à faible teneur en sodium de 1 800 mg par jour a entraîné une augmentation1 de ce qui suit : • Mortalité toutes causes confondues : risque relatif (RR) de 1,95 (1,66-2,29), NNN=8; • Décès attribuables à l’insuffisance cardiaque : RR de 2,23 (1,77-2,81), NNN=10; • Réadmissions à l’hôpital en raison de l’insuffisance cardiaque : RR de 2,10 (1,67-2,64), NNN=5. Limites : Études réalisées par un même groupe, observance incertaine, doses très élevées de diurétiques et application susceptible d’être limitée par le caractère inadéquat de la thérapie médicale de fond. Comportant des facteurs de confusion importants, des études d’observation font état de résultats variés : • • • 302 patients atteints d’insuffisance cardiaque ayant un apport en sodium plus élevé (plus de 3 000 mg par jour)2 : o Amélioration de la survie sans événement pour les classes I et II de la NYHA; o Réduction de la survie sans événement pour les classes III et IV de la NYHA. 182 patients atteints d’insuffisance cardiaque s’étant présentés à l’urgence pour une décompensation aiguë : o Ils n’étaient pas plus susceptibles d’avoir consommé des aliments à forte teneur en sodium au cours des trois jours précédents que les patients manifestant des symptômes non apparentés3. 123 patients atteints d’insuffisance cardiaque consommant plus de 2 800 mg de sodium par jour, comparativement à des quantités inférieures : o Fréquence accrue de l’insuffisance cardiaque en décompensation aiguë4. Contexte • La restriction de l’apport en sodium pour traiter l’insuffisance cardiaque repose sur la théorie voulant que la stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone et d’autres neurohormones entraîne la rétention de sodium et d’eau5. • Par contre, d’autres suggèrent que la restriction de l’apport en sodium peut en fait déclencher des réactions neuroendocrines compensatrices et provoquer l’exacerbation de l’insuffisance cardiaque6. • L’hyponatrémie est un puissant indice d’un pronostic sombre à long terme chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque7-9. • Les lignes directrices canadiennes et américaines recommandent de restreindre l’apport en sodium à 2 000 ou 3 000 mg par jour pour les patients atteints d’insuffisance cardiaque symptomatique et envisagent une restriction accrue pour les patients atteints d’insuffisance cardiaque modérée ou grave (consensus exprimé par des spécialistes ou de petites études)10,11. Auteurs Christina Korownyk, M.D., CCMF, et James McCormack, B. Sc. (pharmacie), Pharm. D. Références 1. Dinicolantonio JJ, Pasquale PD, Taylor RS, et al., Heart, 2012 Aug 21. Diffusion en ligne avant l’impression. 2. Lennie TA, Song EK, Wu JR, et al., J Card Fail, 2011, 17(4) : 325-330. 3. Borke JA, Wyer PC, J Emerg Med, 2013, 44(1) : 36-45. 4. Arcand J, Ivanov J, Sasson A, et al., Am J Clin Nutr, 2011, 93(2) : 332-337. 5. Schrier RW, Abraham WT, N Engl J Med, 1999, 341(8) : 577-585. 6. Paterna S, Fasullo S, Parrinello G, et al., Am J Med Sci, 2011, 342(1) : 27-37. 7. Lee DS, Austin PC, Rouleau JL, et al., JAMA, 2003, 290(19) : 2581-2587. 8. Lee WH, Packer M, Circulation, 1986, 73(2) : 257-267. 9. O'Connor CM, Hasselblad V, Mehta RH, et al., J Am Coll Cardiol, 2010, 55(9) : 872-878. 10. Arnold JM, Liu P, Demers C, et al., Société canadienne de cardiologie, Can J Cardiol, 2006, 22(1) : 23-45. 11. Heart Failure Society of America, J Card Fail, 2006, 12(1) : 10-38. Tools for Practice est un article bimensuel qui résume des données médicales probantes portant surtout sur des questions d’actualité et l’information destinée à modifier la pratique. L’article est coordonné par G. Michael Allan, M.D., CMFC, et le contenu est rédigé par des médecins de famille praticiens auxquels se joint à l’occasion un professionnel de la santé d’une autre spécialité médicale ou d’une autre discipline de la santé. Chaque article est évalué par les pairs, faisant en sorte qu’il maintienne des normes élevées de qualité, d’exactitude et d’intégrité scientifique. Si vous n’êtes pas membre de l’ACFP et souhaitez recevoir les articles par courriel, veuillez vous abonner à la liste de distribution à l’adresse http://bit.ly/signupfortfp. Les articles archivés sont disponibles sur le site Web de l’ACFP. Les opinions exprimées dans la présente communication sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue et la politique de l’Alberta College of Family Physicians.