Chap 5 - Urgences

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URGENCES
MEDICO-CHIRURGICALES
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HEMORRAGIES DIGESTIVES :
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE ET CONDUITE A TENIR
Jean-Pierre Vinel, Louis Buscail
Toute hémorragie digestive met en jeu le pronostic vital. Le diagnostic est en règle facile.
La conduite à tenir vise en premier lieu à maintenir ou restaurer un état hémodynamique correct par
des mesures générales de réanimation. Dès que l’état du patient le rend possible, une endoscopie
doit être faite : elle permet le plus souvent un diagnostic lésionnel et un traitement d’hémostase.
1) Définitions :
- Hématémèse : rejet par la bouche de sang rouge ou noir, dans des efforts de vomissements
- Méléna : émission de selles noires nauséabondes et caractéristiques correspondant à du sang
digéré. 80 % des hémorragies digestives sont révélées par un méléna.
- Rectorragies (ou hématochésie) : rejet de sang rouge, non digéré, par l’anus. Elles ont en général
pour origine une lésion rectale ; mais en cas de saignement très abondant toute hémorragie
digestive peut s’extérioriser sous forme de rectorragie
- Hémorragie digestive haute : toute hémorragie dont la source se situe en amont de l’angle de
Treitz, si bien qu’elle peut se manifester par une hématémèse
- Hémorragie digestive basse : hémorragie dont la source est située en aval de l’angle de Treitz.
Elle ne peut s’extérioriser que sous forme de méléna ou de rectorragie.
2) Conduite à tenir :
2-1 Affirmer le diagnostic :
Il est habituellement facile même si, parfois, peuvent se discuter une épistaxis déglutie, ou
une hémoptysie, plus rarement un vomissement teinté par des aliments ou des boissons.
Plus que sur l’interrogatoire, il repose sur l’examen des déjections et le toucher rectal. La mise
en place d’une sonde gastrique peut être utile mais la recherche de sang par bandelettes réactives
dans le liquide gastrique est sans valeur du fait d’un nombre très élevé de faux positifs.
2-2 Apprécier la gravité de l’hémorragie :
Le patient et sa famille tendent à surestimer l’abondance du saignement. A l’ inverse, une
partie importante du saignement peut ne pas être extériorisée. La gravité de l’hémorragie doit
donc s’apprécier sur les signes généraux :
- tachycardie et hypotension orthostatique
- pâleur, sueurs, froideur des extrémités, hypotension artérielle
- voire signes de choc avec pression sanguine artérielle inférieure à 80 mmHg.
La diminution de l’hématocrite et du taux d’hémoglobine est plus tardive : ce n’est
qu’après quelques heures que la restauration du volume circulant par appel d’eau et
d’électrolytes des espaces interstitiels abaisse ces paramètres..
2-3 Effectuer les premiers gestes d’urgence :
1- Installation du patient en position latérale de sécurité pour éviter l’inhalation en cas de
vomissements
2- mise en place d’un cathéter veineux de gros calibre
3- rétablissement ou maintien d’un état hémodynamique correct par perfusion de
colloïdes et dès que possible de sang si la déglobulisation le nécessite (Hématocrite ≤ 25%)
4- oxygénothérapie par voie nasale
5- surveillance des paramètres vitaux : pouls, tension artérielle, fréquence respiratoire,
diurèse…
6- prélèvement pour groupage sanguin, bilan d’hémostase (TP, TCA, plaquettes), FNS.
Seront aussi demandés : bilan électrolytique sanguin (l’urée sanguine s’élève de façon
isolée en cas d’hémorragie digestive haute) avec créatininémie et tests hépatiques.
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Dans tous les cas les patients doivent être surveiller en phase aiguë dans une
unité de soins intensifs sur les paramètres cliniques (pouls, TA) et biologiques
(hématocrite).
2-4 Rechercher la cause :
Toute lésion de la muqueuse digestive ou des glandes annexes (foie et voies biliaires, pancréas) peut
occasionner une hémorragie digestive. Les causes les plus fréquentes sont présentées dans le
tableau 1.
L’interrogatoire du patient et de son entourage, les antécédents, les données de l’examen
clinique fournissent le plus souvent une orientation.
L’endoscopie est pratiquée dès que l’état du patient le permet (volontiers après injection IV
d’érythromycine pour stimuler la vidange gastrique). C’est l’examen clé : elle permet le plus
souvent de localiser la source de l’hémorragie, de préciser sa nature et, en cas de saignement
actif, d’assurer l’hémostase par un procédé technique adapté : ligature ou sclérose de varices,
sclérose, électro- ou thermo-coagulation d’une lésion ulcérée….
2-5 Traiter la cause de l’hémorragie :
2-5-1 Hypertension portale :
En présence d’une cirrhose connue ou de signes faisant évoquer une hypertension
portale ou une maladie hépatique (circulation collatérale abdominale, splénomégalie,
ascite, ictère, hépatomégalie dure) un traitement par agents vasoactifs (terlipressine ou
somatostatine et dérivés) doit être instauré avant même la confirmation endoscopique : il
diminue les besoins en transfusions et la mortalité.
Après confirmation du diagnostic, les traitements suivants peuvent être utilisés :
- Hémostase endoscopique : sclérose (aetoxysclérol) ou ligature élastique de la varice qui
saigne
- agents vaso-actifs : terlipressine (une injection toutes les 4 heures), somatostatine ou
dérivés en perfusion
- sondes de tamponnement (de Blakemore ou de Linton) : c’est une technique
dangereuse et d’efficacité temporaire. Elles doivent être réservées aux hémorragies
incontrôlables, dans l’attente d’une geste de dérivation
- dérivation porto-systémique chirurgicale ou radiologique (TIPS).
Après que l’hémostase aura été assurée, le risque de récidive est tel qu’un traitement de
prévention sera mis en place :
- ß-bloquants non cardio-sélectifs
- et/ou éradication des varices par ligature endoscopique.
A ces gestes spécifiques, doivent être associées :
- une antibiothérapie à large spectre, dont il est montré qu’elle diminue la mortalité
- la prévention de l’encéphalopathie hépatique, (laxatifs type lactulose ou lactitol per os si
l’état de conscience du patient le permet ou par lavements).
2-5-2 Hémorragie ulcéreuse :
Un traitement antisécrétoire IV doit être instituté (Mopral® ou Eupantol® 40 mg /24
heures) jusqu’à la réalimentation orale où un relai per os est effectué associé à un traitement
éradicateur d’HP. Un contrôle endoscopie à l’issue du traitement médical s’impose. En cas
d’hémorragie active (saignement en jet ou « vaisseau visible » au cours de l’endoscopie
volontiers dans le territoire de l’artère gastro-duodénale ou coronaire stomachique et/ou
nécessité de nombreuses transfusions > 6 culots globulaires) un geste endoscopique
d’hémostase peut être effectué. Ce dernier est le plus souvent une injection de produit
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sclérosant par adrénaline ou mélange aetoxysclérol/ adrénaline et/ou mise en place de clips
homéostatiques. La récidive ou la persistance d’un hémorragie active fera discuter la chirurgie.
2-5-3 Autres lésions :
La lésion doit être trouvée, le plus souvent grâce à l’endoscopie (fiboscopie gastrique,
coloscopie, ou entéroscopie), plus rarement par d’autres techniques d’imagerie :
artériographie, tomodensitométrie, scintigraphie…
Les hémorragies s’arrêtent spontanément dans plus de 80% des cas. Un geste d’hémostase
peut être nécessaire par voie endoscopique, radiologique (embolisation) voire chirurgicale.
Il a également été démontré que les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) à fortes doses
limitait les besoins transfusionnels.
3) Les hémorragies digestives basses et rectorragies.
Elles sont environ dix fois moins fréquentes que les hémorragies digestives hautes et surviennent
principalement chez des personnes âgées.
L’interrogatoire et l’examen clinique permettent de préciser :
Les conditions de survenue (thérapeutique anti-coagulante ou anti-inflammatoire, prise de la
température à l’anus, introduction de corps étranger), les caractères (rectorragie isolée, sans
évacuation fécale, rectorragie accompagnant les selles ou les précédant), la fréquence (hémorragie
survenant à chaque selle, ou épisodiquement en particulier en cas de constipation), l’abondance :
depuis la petite hémorragie à l’essuyage jusqu’à l’évacuation abondante de sang parfois « cailloté ».
Le type de rectorragie peut orienter le diagnostic :
- la présence de sang sur le papier d'essuyage ou en dehors des selles, oriente vers une lésion anale,
- lorsque le sang est mélangé aux selles, on peut soupçonner l’existence d’une tumeur colique
gauche (polype ou cancer )
- lorsque le sang est à l’extérieur des selles une lésion ano-rectale est très souvent responsable.
La diverticulose colique est la première cause d’hémorragie digestive basse.
Si la diverticulose touche surtout le côlon sigmoïde, 50 à 70 % des hémorragies diverticulaires
proviennent du côlon droit et sont souvent provoquées par une érosion artérielle. Ces hémorragies
s’arrêtent le plus souvent spontanément mais récidivent dans 10 à 25 % des cas.
Le problème n’est pas celui de faire le diagnostic de diverticulose mais de trouver le diverticule
responsable de l’hémorragie ou de prouver l'origine diverticulaire de l'hémorragie.
La tomodensitométrie est souvent contributive en visualisant les diverticules et une zone de
saignement après injection de produit de contraste. Le diagnostic peut aussi être fait par
l’élimination d’autres lésions mais ceci peut être rendu difficile devant la présence
d’angiodysplasies, lésions fréquentes sur le même terrain. La coloscopie en urgence est rarement
probante mais peut parfois localiser approximativement le niveau de l’hémorragie (côlon droit ou
transverse). L’artériographie coelio-mésentérique peut être contributive en période hémorragique,
en visualisant le saignement et surtout en permettant une embolisation thérapeutique. Le traitement
chirurgical habituel est une colectomie segmentaire.
Les tumeurs malignes représentent la deuxième cause. Les lésions du côlon gauche et du rectum
sont le plus souvent impliquées (25% des cas).
Les angiodysplasies coliques se retrouvent dans 20 % des cas. Ce sont des lésions fréquentes
surtout chez les personnes âgées et leur découverte à l’occasion d’une rectorragie n’implique pas
nécessairement leur responsabilité qui peut être attribuée à une pathologie diverticulaire, l’inverse
étant aussi vrai (voir plus haut) !
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Les varices coliques sont dues à l’hypertension veineuse mésentérique.
Les varices ano-rectales sont des collatérales porto-systémiques entre les veines hémorroïdaires
supérieures (territoire porte) et les veines hémorroïdaires moyennes et inférieures (territoire
systémique).
Les saignements hémorroïdaires sont rarement abondants mais ils représentent une cause de
diagnostic théoriquement facile, impliquée dans 15 à 20 % des rectorragies. La banalité de
l’affection ne doit pas faire surévaluer ce diagnostic et amener la méconnaissance d’une pathologie
tumorale sus-jacente. Il s’agit le plus souvent de rectorragies répétées plus ou moins abondantes
après les selles, pouvant également survenir en dehors de la défécation. Les hémorroïdes qui
saignent sont essentiellement les hémorroïdes internes, les hémorroïdes prolabées ou encore les
thromboses hémorroïdaires externes et internes. Des cas particuliers sont représentés par les
saignements après intervention proctologique.
L’ulcération thermométrique sont rares actuellement.
4) un cas particulier : Hémorragies non diagnostiquées par l’endoscopie conventionnelle.
Hémorragies digestives obscures : à la recherche d’un diagnostic.
La gastroscopie et le coloscopie permettent de poser le diagnostic de la lésion responsable de
l'hémorragie chez plus de 90 % des patients. Toutefois, chez un petit nombre d'entre eux, le
diagnostic n'est pas obtenu par ces examens. On parle alors d'hémorragie obscure c'est-à-dire dont le
diagnostic n'est pas connu.
Parmi les hémorragies digestives obscures, on distingue les hémorragies "ouvertes" si le patient a
présenté un ou plusieurs épisodes hémorragiques cliniques et les hémorragies "occultes" devant un
saignement digestif chronique qui n'est décelé que par la présence d'une anémie ferriprive
chronique ou d'une sidéropénie. Dans tous ces cas, la lésion hémorragique siège fréquemment au
niveau de l'intestin grêle dont l'exploration endoscopique est difficile. Ces hémorragies
correspondent à environ 5% des hémorragies gastro-intestinales.
Pour explorer les causes rares d'hémorragie digestive, et plus particulièrement les hémorragies
d'origine intestinale, plusieurs examens sont utiles. Leur choix se fera en fonction de l'origine
suspectée de l'hémorragie et du contexte clinique ou si un bilan systématique est nécessaire, en
fonction de la fréquence des lésions.
Si l'on suspecte une lésion de l'intestin grêle, on pourra réaliser :
- une tomodensitométrie abdominale ou "entéro-scanner". Moins sensible que les explorations
endoscopiques, elle peut être proposée à la recherche d'une tumeur ou d'une sténose.
- une entéroscopie poussée. Permet l’examen de la partie proximale du jéjunum et par voie
rétrograde à partir du caecum, des 50 derniers cm de l'iléon. L'exploration de l'intestin grêle est donc
incomplète lors de cet examen qui permet toutefois de détecter des lésions ulcérées ou
inflammatoires, des tumeurs ou des malformations vasculaires et surtout de pratiquer un traitement
par plasma d’argon.
- une entéroscopie par vidéocapsule, en dehors de la période hémorragique, permet une exploration
endoscopique complète de l'intestin grêle (voir page XXX). Plusieurs études ont montré le gain
diagnostique de cette méthode par rapport à l'entéroscopie poussée.
- une artériographie sélective du tronc cœliaque ou de la mésentérique supérieure est indiquée en
seconde intention ou en cas de saignements répétés sans étiologie.
- enfin une laparotomie exploratrice associée ou non à une endoscopie peropératoire peut s’imposer
en dernier recours devant une hémorragie persistante ou massive.
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Hémorragies
digestives hautes
Causes
inflammatoires
Causes mécaniques
Causes néoplasiques
Causes Vasculaires
Hypertension portale
Hémorragies
digestives basses
Causes coliques
Causes ano-rectales
- ulcères (ou ulcérations) duodénaux ou gastriques
- œsophagite ulcérée
- syndrome de Mallory-Weiss
- tumeurs malignes œsophagiennes ou gastriques,
pancréatiques ou hépatiques
- tumeurs bénignes (polypes, léiomyomes…)
- angiodysplasies
- fistule aorto-duodénale
- varices œsophagiennes ou gastriques
- gastropathie congestive
- diverticules
- tumeurs malignes ou bénignes
- colites inflammatoires (RCH, Crohn)
- colites ischémiques
- colites aiguës infectieuses ou parasitaires
- angiodysplasies
- varices hémorroïdaires
- fissures
- fistules
- tumeurs
Tableau 1
Principales causes des hémorragies digestives
(les causes imprimées en gras représentent près de 90% des cas)
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Conduite à tenir devant une hémorragie digestive haute
Hospitalisation
Réanimation
Traitements vaso-actifs si suspicion de rupture de varices
ENDOSCOPIE
EN URGENCE
Ulcère gastro-duodénal
Sclérose
si saignement actif
IPP
Persistance
ou récidive
Arrêt
hémorragie
Varices oesophagiennes
ou cardio-tubérosiatires
Sclérose ou ligature
Ulcérations GD aiguës
Mallory –Weiss
Oesophagite
Tumeurs
Traitement
vaso-actif
2 à 5 jours
Arrêt
hémorragie
Chirurgie
Autres étiologies
Prévention
secondaire
Persistance
ou récidive
IPP
+/traitements
spécifiques
( Clip, Chirurgie)
TIPS
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APPENDICITES AIGUËS
Gilles Fourtanier
1- GENERALITES
1-1- Epidémiologie
On fait, chaque année en France environ 50 appendicectomies pour 10 000 habitants . Cette
incidence est 3 à 5 fois plus élevée que dans la plupart des pays occidentaux.
L'incidence des appendicites authentiques est plus faible car dans 15 % à 45 % des cas opérés il n'y
a pas de lésions d'appendicite aiguë. La difficulté du diagnostic et la crainte de laisser évoluer
gravement des lésions expliquent en grande partie et souvent justifient ce phénomène.
L'appendicite aiguë est rare chez l'enfant de moins de 3 ans, elle atteint surtout l'adolescent et
l'adulte jeune, elle n'est pas exceptionnelle chez le sujet âgé.
1-2- Physiopathologie
L'appendice contient normalement des germes. L'obstruction de sa lumière et la persistance de sa
sécrétion muqueuse entraînent une augmentation de la pression intraluminale qui favorise la
pénétration microbienne dans la muqueuse.
L'obstruction de la lumière appendiculaire est habituellement liée, chez l'enfant et l'adolescent, à une
hyperplasie lymphoïde à la suite d'une infection virale ou bactérienne digestive. Chez l'adulte
l'obstruction par un stercolithe, un corps étranger ou des parasites est plus souvent en cause.
1-3- Anatomopathologie
1-3-1- Lésions appendiculaires : elles se succèdent comme suit :
- Appendicite catarrhale :
Il y a d'abord œdème, hyperhémie, infiltrats de polynucléaires.
- Appendicite suppurée :
Ensuite le contenu de la lumière appendiculaire devient purulent.
- Appendicite gangréneuse :
Puis la pénétration microbienne entraîne une nécrose de toute la paroi, c'est l'appendicite
phlegmoneuse. Si l'évolution se poursuit, l'œdème va entraîner tout d'abord un obstacle au retour
veineux, puis à l'apport artériel entraînant l'apparition d'une appendicite gangréneuse.
- Appendicite perforée :
Cette gangrène pariétale provoque une perforation appendiculaire.
1-3-2- Lésions péritonéales
- Péritonite localisée :
Le péritoine réagit à l'infection appendiculaire par des adhérences inflammatoires autour de
l'appendice et des éléments de voisinage : anses grêles et grand épiploon. Ces adhérences
inflammatoires ont trois conséquences possibles :
- Former une véritable "tumeur inflammatoire" dont la traduction clinique est le "plastron".
- Cloisonner la région et localiser les conséquences d'une éventuelle perforation.
- Evoluer vers l'abcès appendiculaire.
- Péritonite généralisée :
Si ces phénomènes de défense n'ont pas le temps d'apparaître ou sont diminués, la perforation
survient en péritoine libre et entraîne une péritonite aiguë généralisée.
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2)- DIAGNOSTIC
2-1- Forme typique
Appendicite aiguë de gravité moyenne en position normale chez un adulte jeune.
2-1-1- Signes cliniques
- Signes fonctionnels :
Douleur de la Fosse Iliaque Droite (FID) : C'est le symptôme essentiel. Son mode de début est
habituellement progressif. Elle peut changer de localisation dans les premières heures : elle débute
parfois dans la région péri-ombilicale pour se localiser progressivement dans la fosse iliaque droite.
Elle est d'intensité modérée. L'anorexie est pratiquement toujours présente en particulier chez
l'adolescent et l'adulte jeune, plus difficile à faire préciser chez l'enfant.
Nausées et vomissements
Troubles du transit : habituellement constipation, parfois diarrhée.
- Signes généraux :
Elévation de la température : Elle est discrète, aux alentours de 38°, parfois un peu plus élevée
chez l'enfant. Une température au-dessus de 39° dès le début de la symptomatologie douloureuse
rend improbable le diagnostic.
Altération du faciès
- Signes physiques :
Inspection : la FID peut être immobile témoignant déjà d'une réaction péritonéale.
Palpation:
Douleur provoquée : Elle est en général diffuse à la FID, rarement localisée au point de Mac
Burney.
Défense : témoigne de la réaction péritonéale.
Signes accessoires : Signe de Blumberg (douleur par décompression brutale de la FID), signe de
Rowsing (douleur provoquée de la FID à la palpation de la fosse iliaque gauche), hyperesthésie
cutanée réveillée par l'effleurement de la FID : ces signes peuvent être trouvés à l'examen mais ils
n'aident pas au diagnostic.
Touchers pelviens : Ils devraient être réalisés systématiquement, ils peuvent réveiller une douleur
latéro-rectale ou vaginale droite mais ils sont souvent normaux au début de l'affection.
2-1-2- Signes paracliniques
- Signes d'imagerie
Le cliché de l'abdomen debout sans préparation :
Il est généralement normal.
Un niveau hydro-aérique cæcal ou de la dernière anse grêle, témoigne d'une réaction péritonéale.
Echographie et scanner : ces examens peuvent visualiser les lésions. Au scanner, un appendice
normal peut éliminer une appendicite ; cet examen s’il est possible a donc un grand intérêt.
- Signes biologiques
L'hyperleucocytose à polynucléaires n'est ni assez spécifique ni assez sensible pour aider au
diagnostic.
2-1-3- Evolution
Les lésions, au début de l'évolution, peuvent sans doute guérir spontanément ou avec un traitement
médical. Mais il ne faut pas compter sur cette éventualité favorable. Il faut au contraire avoir la
hantise de la survenue de complications.
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2-1-4- Complications
Péritonites aiguës généralisées :
Elles peuvent survenir d'emblée ou secondairement, progressivement (par diffusion) ou brutalement
(par perforation).
Ce sont les complications les plus fréquentes et les plus graves de l'appendicite aiguë.
La hantise de la péritonite aiguë conditionne pour une large part la conduite à tenir lorsque le
diagnostic d'appendicite aiguë est évoqué.
Péritonites aiguës localisées :
Elles se manifestent par un plastron.
Le plastron appendiculaire peut se résorber.
Il peut aussi évoluer vers l'abcédation ; l'abcès appendiculaire tend à s'évacuer vers l'extérieur, vers
l'intestin ou la grande cavité péritonéale ( péritonite en 3 temps de mauvais pronostic).
2-2- Formes cliniques
2-2-1- Formes Compliquées
Parfois le diagnostic d'appendicite aiguë se pose d'emblée devant une complication, que celle-ci
survienne précocement ou que le diagnostic ait été retardé.
- Péritonite appendiculaire
Sa fréquence a diminué avec la médicalisation de la pathologie abdominale aiguë. Elle se caractérise
par des signes fonctionnels et généraux intenses qui s'aggravent rapidement.
Un signe domine la symptomatologie et permet le diagnostic : la contracture généralisée.
Le toucher rectal est très douloureux, la contracture prédomine souvent dans la FID.
- Abcès appendiculaire
Il se manifeste par : une fièvre oscillante, une altération de l'état général et, lorsqu'il est accessible à
la palpation de la paroi ou aux touchers pelviens, par une masse douloureuse.
La polynucléose est très marquée.
L'échographie et le scanner visualisent l'abcès et guident un traitement percutané.
En l'absence de traitement, l’abcès va se rompre dans un viscère creux de voisinage ou plus
fréquemment dans la cavité péritonéale, entraînant une péritonite en 3 temps.
- Occlusion appendiculaire
L'appendicite aiguë peut se révéler par une occlusion du grêle fébrile.
L'occlusion appendiculaire s'observe surtout chez les personnes âgées ou en cas d’appendicite
mésocoeliaque..
2-2-2-Formes topographiques
- Appendicite pelvienne :
Les signes objectifs sont situés plus bas dans la FID ou au niveau sus pubien.
Aux symptômes habituels s'ajoutent des signes urinaires : dysurie ou rétention aiguë d’urine. Les
signes rectaux sont plus rares : faux besoins, ténesme, diarrhée. Le toucher rectal est essentiel : il
réveille une douleur latérorectale droite.
En cas d'abcès appendiculaire le toucher rectal permet de percevoir un bombement rénitent du culde-sac de Douglas. L'évolution sans traitement se fait en général spontanément vers la rupture dans
le rectum ou le vagin.
- Appendicite rétro-cæcale :
Le siège de la douleur est postérieur, parfois franchement lombaire. La palpation la réveille audessus de la crête iliaque.
Il peut exister une psoïtis : flexion douloureuse de la cuisse due à la contracture du psoas.
- Appendicite mésocœliaque :
Elle provoque un syndrome occlusif fébrile.
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- Appendicite sous hépatique :
Se traduit par une symptomatologie douloureuse siégeant dans l'hypochondre droit.
2-3- Formes selon le terrain
2-3-1- Appendicite du sujet âgé :
Elle se distingue de l'appendicite de l'adulte jeune par la fréquence des formes compliquées :
péritonites, occlusions, abcès, formes pseudo-tumorales et par un risque de mortalité.
2-3-2- Appendicites aiguës et grossesse :
La survenue d'une péritonite appendiculaire chez une femme enceinte est grave pour le pronostic de
la grossesse, alors qu'une appendicectomie pour une appendicite non compliquée est habituellement
sans conséquence. Il est donc primordial de porter un diagnostic et de prendre une décision
thérapeutique précocement.
Au cours du premier trimestre de la grossesse, l'appendice est en position normale et la
symptomatologie analogue à celle d'une appendicite typique. Le problème essentiel est alors de ne
pas rapporter la symptomatologie, en particulier les vomissements, uniquement à la grossesse.
Près du terme, l'appendice est refoulé par l'utérus gravide au niveau de l'hypochondre droit, de plus
les réactions de défense et les contractures sont moins nettes, enfin le refoulement de l'épiploon et
des anses grêles rendent le cloisonnement de la région appendiculaire beaucoup plus difficile et
donc la possibilité de survenue d'une péritonite aiguë généralisée plus fréquente.
2-4- Formes symptomatiques
2-4-1- Appendicite toxique
Très rare, on la rencontre chez l'enfant. La symptomatologie est peu évocatrice : d'une part, atteinte
majeure de l'état général avec prostration, altération du faciès, pouls très accéléré, pétéchies, parfois
méléna ou hématémèse ; d'autre part, douleur discrète de la FID, sans défense ni contracture,
température peu élevée. Le pronostic est grave.
2-4-2- La "crisette"
Cette dénomination imagée désigne une appendicite aux signes mineurs qui correspondent en
général à des lésions elles-mêmes mineures. Elles sont volontiers récidivantes. Elles posent avec
acuité le problème de l'indication opératoire.
2-4-3- Appendicite pseudo-tumorale
Les adhérences secondaires à la péritonite localisée forment parfois une masse sclérolipomateuse
autour de l'appendice.
Le tableau clinique est alors celui d'une tumeur de la fosse iliaque droite et ce n'est parfois qu'à
l'intervention ou même lors de l'examen histologique de la pièce que le diagnostic de cancer est
éliminé.
3) DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS
Ils sont très nombreux surtout devant un tableau clinique peu typique ce qui est souvent le cas.
- Une perforation d'ulcère gastro-duodénal ou une cholécystite aiguë posent des problèmes de
diagnostic en particulier avec les appendicites sous-hépatiques.
- Une sigmoïdite diverticulaire peut évoquer un syndrome appendiculaire lorsque la boucle
sigmoïdienne est située dans la FID.
- Une iléite terminale est un diagnostic différentiel qu'il faut évoquer chez l'adulte jeune.
L'interrogatoire peut retrouver des troubles du transit à type de diarrhée ; en fait le diagnostic n'est le
plus souvent fait qu'au cours de l'intervention.
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- Chez l'enfant, les douleurs abdominales posant des problèmes diagnostiques sont : l'invagination
intestinale aiguë, le diverticule de Meckel ou l'adénolymphite mésentérique.
- Chez la femme en période d'activité génitale avec une salpingite, plus rarement une grossesse
extra utérine, la rupture d'un kyste ou d'un corps jaune, ou la torsion d'un kyste de l'ovaire. Une
cœlioscopie permet de faire le diagnostic.
- Une crise de colique néphrétique droite est un problème diagnostique différentiel fréquent surtout
en cas d'appendice rétro-cæcal. Une échographie rénale ou une urographie intraveineuse pourront
affirmer le diagnostic. Au moindre doute de pyélonéphrite, il faut effectuer une recherche
leucocyturie.
- Une pneumonie basale droite ou une pleurésie peuvent entraîner des douleurs abdominales
évoquant une appendicite aiguë. Au moindre doute il faut, en particulier chez l'enfant, réaliser une
radiographie pulmonaire.
- D'autres syndromes infectieux, en particulier les fièvres éruptives, peuvent être précédés, avant
l'apparition des signes cutanés, d'une douleur de la fosse iliaque droite.
- L'hépatite virale peut être précédée, dans sa phase pré-ictérique de douleur de l'hypocondre droit
ou de la FID.
4) TRAITEMENT
Le traitement de l'appendicite aiguë est chirurgical, il se résume à l'appendicectomie. C'est une
intervention courante et simple. Elle n'en est pas pour autant toujours bénigne. Il y a de dramatiques
complications de l'appendicectomie. Pour rares qu'elles soient, elles doivent être présentes à l'esprit
de ceux qui portent l'indication de l'intervention et qui la pratiquent. Sa banalité ne doit pas faire
méconnaître les règles qui donnent à la chirurgie sa sécurité.
4-1- Place de la cœlioscopie :
On peut enlever l'appendice par cœlioscopie.
En général l'appendicectomie par une voie d'abord conventionnelle est peu traumatisante et le
bénéfice, en terme de traumatisme pariétal et de cicatrice, lié à la cœlioscopie, est minime. Il peut
être important dans les cas suivants :
• Chez des patients obèses qui, en chirurgie conventionnelle, nécessitent une longue incision.
• Lorsqu'il y a une incertitude diagnostique, en particulier chez la femme.
• En cas de péritonite aiguë généralisée car la cœlioscopie permet un lavage complet de la cavité
péritonéale et évite une longue laparotomie.
• Lorsque l'appendice est en position ectopique et qu’il y a un doute diagnostique.
4-2- Le drainage d'abcès appendiculaire :
En cas d'abcès appendiculaire collecté, il peut être judicieux de limiter le traitement au drainage de
la cavité. Ce drainage peut être chirurgical ou mieux percutané, sous contrôle échographique ou
tomodensitométrique. L'appendicectomie dans ces cas doit être pratiquée "à froid", quelques mois
plus tard, afin d'éviter une récidive de l'abcès.
4-3- Le traitement des péritonites aiguës généralisées :
Il faut faire une toilette péritonéale complète qui se fait au mieux par coelioscopie.
4-4- Les indications :
Lorsque le diagnostic d'appendicite aiguë est certain ou même probable, il faut intervenir sans
tarder.
302
Lorsque le diagnostic est hésitant, il faut éliminer avec soin les diagnostics différentiels en s'aidant
des explorations nécessaires mais sans perdre de temps.
Si le doute persiste il faut choisir entre les inconvénients d'une appendicectomie qui risque d'être
inutile et ceux d'une abstention qui peut être dangereuse. Ce choix est parfois difficile des points de
vue technique et éthique. La coelioscopie est alors un examen qui peut précéder l’appendicectomie.
303
APPENDICITE AIGUË DE L’ENFANT
Michel Juricic
1) INTRODUCTION
Exceptionnel avant 1 an, rare (mais possible) chez l’enfant de moins de 3-4 ans où elle
prend un aspect trompeur, fréquente après 5-6 ans.
Si la douleur abdominale du petit enfant doit faire rechercher systématiquement une
invagination intestinale aiguë, chez le grand enfant toute douleur abdominale a tendance a être
étiquetée « appendicite » par les familles voire par certains médecins.
Le problème quasi quotidien du médecin et du chirurgien va être donc de ne pas passer à
côté du diagnostic qui est rendu difficile par le caractère souvent trompeur de la symptomatologie
mais aussi de ne pas opérer de « l’appendicite » tout enfant qui a mal au ventre.
L’existence d’appendicite chronique est très discutée et paraît douteuse.
2) ANA-PATH
L’appendice est un organe lymphoïde borgne appendu au caecum.
L’appendicite survient lors de l’obstruction de sa lumière (stercolithe, parasites, hyperplasie
lymphoïde, constipation…) entraînant une stase et une surinfection.
Plusieurs stades sont décrits :
2,1 Appendicite aiguë catarrhale
-Inflammation limitée à la muqueuse
-Appendice congestif, rouge, oedematié et inflammatoire
-Réaction ganglionnaire de voisinage fréquente
2,2 Appendicite aiguë suppurée
-Appendice augmenté de volume, fausses membranes
-Présence de polynucléaires au sein des couches musculaires
2,2,1 Appendicite phlegmoneuse
-Appendice volumineux, infiltré
2,2,2 Appendicite abcédée
-Collection purulente dans la lumière, adhérent aux organes de
voisinage
2,3 Appendicite aiguë gangreneuse
-En partie ou totalité, perforation précoce
-Necrose ischiémique
2,4 Plastron
-Péritonite localisée avec agglutination d’anses grêles et d’epiploon
2,5 Abcés péri-appendiculaire
-Modalité évolutive du plastron
304
2,6 Péritonite généralisée
-Par perforation brutale de l’appendice en péritoine libre ou par diffusion.
3) CLINIQUE
3,1 Forme typique de l’appendicite aiguë iliaque droite de l’enfant de plus de 4 ans
3,1,1 Signes fonctionnels
-Douleurs de la fosse iliaque droite d’apparition progressive
-Nausées ou vomissements ou simple anorexie
-Constipation
3,1,2 Signes généraux
-Fièvre modérée à 38°-38°5
-Pouls accéléré
3,1,3 Signes physiques
-Douleur exquise dans la fosse iliaque droite (point de Mac Burney)
-Plus tardivement défense de la paroi abdominale voire parfois une
contracture
-Langue saburrale
-Toucher rectal (de réalisation difficile chez l’enfant) : douleur localisée à
droite et en haut.
3,2 Tableaux atypiques
3,2,1 Du fait de la localisation
La position de l’appendice présente de très nombreuses variations
anatomiques du fait d’une part de la rotation embryologique plus ou moins complète du
caecum et d’autre part de la situation de l’extrémité appendiculaire par rapport au caecum.
3,2,1,1 Appendicite rétro caecale
-Douleur plus postérieure, au dessus de la crète iliaque, voire
lombaire droite avec psoitis, pas de défense
3,2,1,2 Appendicite pelvienne
-Douleur sus pubienne, signes d’irritation vésicale ou rectale
(diarrhée), pas de défense
3,2,1,3 Appendicite sous hépatique
-Douleur haut située dans l’hypochondre droit
3,2,1,4 Les autres formes sont rares : appendicite herniaire, appendicite
gauche (situs inversus)
3,2,2 Du fait de l’âge : appendicite de l’enfant de moins de 3 ans
- les signes de début sont souvent très trompeurs : tableau de gastro
entérite fébrile, d’infection ORL ou respiratoire
- A un stade plus tardif, souvent révélateur, s’associent : altération de
l’état général, fièvre élevée, diarrhée, abdomen météorisé, défense voire contracture.
305
3,2,3 Du fait de la symptomatologie
3,2,3,1 Formes frustres
-Seule la douleur est présente, parfois de siège ectopique. La fièvre
peut manquer et les nausées remplacée par une simple inappétence. Ces formes peuvent
parfois correspondre à une appendicite débutante.
3,2,3,2 Signes trompeurs
-La diarrhée peut remplacer la constipation
-Des signes ORL ou pulmonaires (toux…)
-Localisation inhabituelle de la douleur.
3,3 Formes évoluées
3,3,1 Plastron appendiculaire
-Fièvre, Masse douloureuse mal limitée de la FID, blindage pariétal
3,3,2 Abcés appendiculaire
-Fait suite à un plastron avec signes cliniques marqués, défense ou contracture
localisée.
-L’abcés dans le petit bassin est une forme particulièrement trompeuse et
source d’errements diagnostics. Valeur du toucher rectal
3,3,3 Péritonite appendiculaire
-Présence de pus dans la cavité péritonéale, soit par diffusion d’un abcès
appendiculaire soit par perforation de l’appendice dans la cavité péritonéale
-Les signes cliniques sont marqués avec contracture généralisée de la paroi
abdominale
4) EXAMENS COMPLEMENTAIRES
Ces examens seront demandés en fonction de la symptomatologie. Devant un tableau
typique ils ne présentent pas d’intérêt mais seront utiles devant des tableaux
atypiques.
4,1 Biologie
4,1,1 CRP : le meilleur marqueur biologique d’un sepsis (cependant il ne faut pas
oublier qu’il s’agit d’un marqueur décalé qui augmente seulement 24 heures après le
début des signes)
4,1,2 NFS : augmentation des PNN (mais beaucoup de faux positifs du fait de la
démargination des leucocytes liée au stress et à la douleur)
4,1,3 Les autres examens ne présentent pas d’intérêt diagnostic positif mais peuvent
être utiles à la recherche des diagnostics différentiels d’une part et dans le cadre du
bilan pre-opératoire d’autre part : BES, BH, groupe Rh, enzymes hépatiques et
pancréatiques
4,2 Radiologie
4,2,1 ASP : il peut être normal mais il peut aussi montrer des signes le plus souvent
indirects
306
-Petit niveau hydroaérique de la FID (ileus reflexe)
-Grisaille de la FID
-Stercolithe appendiculaire (image calcifiée de la FID)
4,2,2 Echographie abdominale : (cet examen a un taux de fiabilité dépendant de
l’échographiste pouvant aller jusqu’à 90%. Il y a parfois des faux positifs et il
convient de ne pas oublier de toujours confronter les résultats à la clinique ; on
opère pas une échographie !)
-Appendice augmenté de volume, rigide, localisé à son extrémité ou en
entier, éventuellement abcédé
-Présence d’un coprolithe
-Appendice douloureux au passage de la sonde
-Epaississement des mésos au contact de l’appendice
-Epanchement de la gouttière pariéto-colique et du cul de sac de
douglas
Cependant cet examen est parfois rendu difficile par le morphotype de
l’enfant (obésité…) et l’interprétation en sera difficile
4,2,3 Tomodensitométrie : réservé aux grands enfants grassouillets ou en cas de
doute à l’échographie.
-Montre l’augmentation de volume de l’appendice et surtout l’infiltration de
la graisse peri-appendiculaire.
5) DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS = PIEGES DIAGNOSTICS
Se rapporter au chapitre sur les douleurs abdominales de l’enfant.
5,1 Adénite mésentérique
5,2 Infection urinaire
5,3 Pneumonie droite
5,4 Plus rarement : hépatite virale, purpura rhumatoide, gastro-entérite débutante, cause
ovarienne (kyste, torsion), parasites (giardia, ascaris…), diverticule de meckel, pancréatite
5,5 Constipation : doit être un diagnostic d’élimination.
Ces différents diagnostics se rencontrent dans au moins 50% des cas de douleurs
étiquetées « appendicite » initialement. C’est pourquoi un certain nombre d’examens
complémentaire peuvent prendre tout leurs sens devant une suspicion d’appendicite :
-Radiographie pulmonaire
-ECBU
-Enzymes hépatiques
-Coproculture, parasitologie des selles
-Echographie abdominale à la recherche d’adénopathies mésentériques
-Echographie pelvienne chez la grande fille (ovaire)
307
6) TRAITEMENT :
Le traitement est chirurgical. Il est réalisé en urgence dés le diagnostic d’appendicite
aiguë affirmé. En cas de doute diagnostic, et en l’absence de signe de gravité, il convient de différer
l’intervention et de surveiller l’évolution avec des examens cliniques répétés, ce qui permettra
d’affiner le diagnostic et évitera dans un grand nombre de cas d’enlever des appendices sains.
6,1 Appendicectomie
6,1,1 Incision transverse dans la FID (et non pas de Mac Burney)
-Cette incision peut être agrandie à la demande selon les lésions.
-Prélèvement du liquide pour analyse bactériologique
-Examen ana-path de la pièce
-Lavage péritonéal et drainage en cas de lésion suppurée
6,1,2 Coeliochirurgie
-Open laparoscopie (toujours chez l’enfant)
-Permet une meilleure toilette péritonéale notamment en cas d’abcès
appendiculaire ou de péritonite
-En cas d’erreur diagnostique permet d’explorer la cavité péritonéale
6,1,3 Laparotomie médiane
-Exceptionnelle, utilisée en cas de péritonite avec incertitude sur l’origine
(appendicite ? primitive ?…)
6,2 Suites opératoires
6,2,1 Antibiothérapie
6,2,1,1 Mono, bi ou triple antibiothérapie en fonction de la gravité:
-Formes simples : Beta Lactamine (augmentin R) +ou – aminoside
(amiklin R) dans les formes simples
-Formes sévères : Cephalosporine de 3e génération (claforan R)
associée à un aminoside et au metronidazole (Flagyl R)
6,2,1,2 Durée : 48 heures à 8 jours en fonction de la gravité
6,2,1,3 Adaptation en fonction de l’antibiogramme
Il faut se méfier notamment de la présence possible d’entérocoques
souvent sensibles seulement à l’Amoxicilline et résistants à
l’antibiothérapie initiale.
6,2,2 Réalimentation
En fonction de la reprise du transit intestinal, progressive
7)COMPLICATIONS DES APPENDICITES ET DES APPENDICECTOMIES
Ces complications ne sont pas rares nécessitant une surveillance post-opératoire
suffisante
7,1 Complications infectieuses, les plus fréquentes
308
7,1,1 Péritonite localisée
Correspond à un foyer infecté dans une partie de la cavité abdominale (abcès
sou phrénique, abcès du douglas…)
7,1,2 Lâchage du moignon appendiculaire
Rare. Entraîne un abcès dans la FID
7,1,3 Syndrome du 5e jour
Pathologie spécifique de l’enfant, souvent complication de l’appendicectomie
sur appendice sain, se traduisant par une douleur brutale au 5e jour avec fièvre
élevée, défense et ileus paralytique. (en relation avec une péritonite)
Nécessite une reintervention d’urgence pour réaliser une toilette péritonéale.
7,1,4 Péritonites généralisées à foyers multiples
Graves, correspondent à une appendicite insuffisamment drainée ou à un
syndrome du 5è jour négligé. Elles associent un syndrome infectieux sévère,
un syndrome occlusif et un syndrome péritonéal. Elles nécessitent un
traitement chirurgical par laparotomie médiane.
7,2 Complications occlusives
7,2,1 Précoces
Soit par agglutination d’anses, soit la classique invagination intestinale aiguë
post opératoire.
7,2,2 Tardives
Occlusion sur bride qui peut survenir n’importe quand après toute chirurgie
abdominale.
8) CONCLUSION
l’appendicite aiguë de l’enfant est une pathologie fréquente, souvent avec un tableau clinique
trompeur notamment chez l’enfant de moins de 3 ans, nécessitant une grande vigilance afin d’opérer
sans tarder pour éviter les formes graves mais aussi de ne pas opérer des appendices sains compte
tenu du risque de complication post opératoire.
309
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE
DEVANT UNE OCCLUSION INTESTINALE AIGUE
Bertrand Suc
L'occlusion intestinale aiguë se définit par l'arrêt du transit intestinal.
Cet arrêt du transit intestinal est lié soit à l'existence d'un obstacle organique et on parle alors
d’occlusion organique soit lié à une paralysie de l'intestin secondaire à une pathologie de voisinage
et on parle alors d’occlusion fonctionnelle, le tube digestif restant dans ce cas-là perméable de bout
en bout. On peut diviser la démarche diagnostique devant une occlusion intestinale en quatre
parties :
1 RECONNAITRE UNE OCCLUSION INTESTINALE AIGUE
2 APPRECIER LE RETENTISSEMENT GENERAL DE L'OCCLUSION
3 DIFFERENCIER UNE OCCLUSION FONCTIONNELLE D'UNE OCCLUSION ORGANIQUE
4 EN CAS D'OCCLUSION ORGANIQUE, RECONNAITRE LE SIEGE DE L'OCCLUSION
1) RECONNAITRE UNE OCCLUSION INTESTINALE
Le diagnostic positif de l'occlusion repose sur des signes cliniques et radiologiques.
1-1 Signes cliniques
Il existe quatre signes cliniques caractéristiques. L'importance relative de ces différents signes est
variable selon la cause et le siège de l'occlusion. Ceux sont :
‘une douleur abdominale à type de crampe dont l'intensité peut être très variable selon la cause de
l'occlusion, particulièrement intense en cas d’occlusion organique et surtout d’occlusion par
strangulation.
‘des vomissements.
‘l'arrêt des matières et des gaz en sachant que ce signe peut être masqué par la vidange de
l’intestin sous jacent sous la forme d’une diarrhée.
‘un météorisme qui est une distension aérique de l'abdomen caractérisé par la sonorité à la
percussion de l’abdomen.
1-2 Signes radiologiques
Classiquement l’ examen radiologique nécessaire et suffisant dans le diagnostic de l'occlusion est le
cliché d'abdomen sans préparation (ASP) fait en position debout ou, si le malade ne peut se lever,
couché en décubitus latéral. Le signe radiologique pathognomonique est l'existence de niveaux
liquides hydro-aériques dont la forme et le siège auront une valeur d'orientation diagnostique sur le
type et le siège de l'occlusion.
Plus récemment, en complément du cliché d'abdomen sans préparation, on réalise de plus en plus
souvent un scanner spiralé avec injection de produit de contraste qui a l'avantage, par rapport à
l’ASP, de faire en plus du diagnostic positif de l'occlusion, le diagnostic topographique mais aussi
bien souvent le diagnostic étiologique de l’occlusion. Cet examen est en train d’améliorer très
sensiblement la prise en charge par la rapidité et la richesse des informations qu’il fournit.
Dans certains cas, et en particulier pour préciser le diagnostic d’une occlusion colique, on pourra
être amené à demander une opacification à la gastrograffine.
2) APPRECIER LE RETENTISSEMENT
L'occlusion intestinale a des conséquences métaboliques importantes. Au cours de l'occlusion, il se
crée un "troisième secteur" qui correspond au stockage de liquides (eau et électrolytes) dans le
310
tube digestif. Ce stockage est dû à la fois à la l'obstacle et à la disparition des capacités de
réabsorption du segment intestinal en amont de l'obstacle. L'occlusion intestinale peut donc
entraîner des troubles biologiques plus ou moins marqués dont la forme typique est l'apparition
d'une déshydratation de type extra-cellulaire qui, si elle persiste, peut entraîner l'installation d'une
insuffisance rénale. De plus dans certaines occlusions par strangulation où il existe une souffrance
vasculaire du mésentère, il peut y avoir des perturbations de l'équilibre acido-basique lié à la
nécrose.
Devant toute occlusion il faut donc rechercher des signes de déshydratation extra-cellulaire :
‘par l'examen clinique : sensation de soif, pli cutané, chute ou pincement de la tension artérielle,
oligurie voire anurie (au mieux apprécier par la mise en place d’une sonde vésicale) ;
‘par la réalisation d’examens sanguins simples : numération globulaire, bilan électrolytique
Dans les occlusions hautes sur le tube digestif, les vomissements étant précoces, la déshydratation
peut être majeure et la perte des ions hydrogènes et chlores entraîne une alcalose hypochlorémique.
Dans les occlusions basses la déshydratation est plus tardive et la perte plus prononcée de
bicarbonates peut provoquer une acidose métabolique.
L'existence de ces troubles hydroélectrolytiques justifie bien sûr de les rechercher mais aussi de les
corriger avant d'envisager en particulier une intervention chirurgicale.
3) DIFFERENCIER UNE OCCLUSION FONCTIONNELLE D'UNE OCCLUSION
ORGANIQUE
Cette distinction est extrêmement importante car l'occlusion organique relèvera le plus souvent d'un
traitement chirurgical alors que l'occlusion fonctionnelle relèvera du traitement de la cause. Pour
cette distinction, on se base sur trois éléments :
3-1 le contexte clinique dans lequel s'est développé l'occlusion.
3-2 l'auscultation abdominale. Dans les occlusions fonctionnelles paralytiques il y a un
silence auscultatoire alors que dans l'occlusion organique il y a le plus souvent une
augmentation des bruits hydro-aériques du fait de la lutte de l'intestin contre l'obstacle.
3-3 La sémiologie radiologique et en particulier le scanner spiralé. En cas d'iléus
paralytique on trouvera des niveaux liquides et le plus souvent de l'air de manière diffuse
aussi bien dans l'intestin
grêle que dans le côlon.
Dans l’occlusion organique, les niveaux seront plus localisés à un segment d’intestin et le
scanner montrera précisément le siège et le type de l’obstacle.
Les occlusions fonctionnelles peuvent être de deux grands types :
- les occlusions paralytiques
Elles sont la conséquence d'un syndrome douloureux, le plus souvent rétropéritonéal. Les deux exemples classiques sont la colique néphrétique et le traumatisme de la
colonne vertébrale. Ces occlusions paralytiques doivent être traitées médicalement.
- Les occlusions inflammatoires
Elles sont la conséquence d'une suppuration intra-abdominale comme la cholécystite,
l’appendicite ou la sigmoïdite. Dans ce cas, l’occlusion sera bien souvent accompagnée d’un
syndrôme infectieux et on parlera d’occlusion fébrile. Le traitement de l'occlusion est alors
le traitement de la cause inflammatoire et peut faire parfois appel à la chirurgie.
311
Les occlusions organiques peuvent êrtre de deux grands types :
- Les occlusions par obstruction
Le meilleur exemple en est le cancer colique sténosant. Ces occlusions par obstacle se manifestent
par un hyperpéristaltisme intestinal visible et audible à l'auscultation. L'occlusion complète peut
être précédée par ce que l'on appelle le syndrome de Kœnig qui est une obstruction incomplète du
tube digestif marquée par des douleurs abdominales, des bruits hydro-aériques et le soulagement
du malade lors de la débacle des matières liquides et des gaz.
- Les occlusions par strangulation
Le meilleur exemple en est le volvulus (volvulus du grêle sur bride post-opératoire ou volvulus du
côlon sigmoïde). La douleur est là d'apparition brutale, intense, permanente. Il y a souvent un
météorisme asymétrique. La principale caractéristique de l'occlusion par strangulation est le risque
vasculaire. Le segment intestinal volvulé est menacé de nécrose et le traitement est donc très urgent.
4) RECONNAITRE LE SIEGE ET LA CAUSE DE L’OCCLUSION
En ce qui concerne le siège, il est très important de distinguer une occlusion du grêle d'une
occlusion colique et pour cela on s'aide des signes cliniques et radiologiques :
occlusion du grêle entraîne des vomissements précoces, un arrêt des matières et des gaz tardif,
une distension abdominale modérée, des signes de déshydratation extra-cellulaire marqués. Sur le
plan radiologique, les niveaux liquides sont plus larges que hauts et en position centrale dans
l'abdomen.
‘une
‘dans
l'occlusion colique, les vomissements sont tardifs, l'arrêt des matières et des gaz est précoce, la
distension abdominale est majeure, les signes de déshydratation sont modéré. Sur le plan
radiologique, les niveaux liquides sont plus hauts que larges et périphériques dans l'abdomen.
Après avoir précisé le siège, il faut essayer de reconnaître la cause mais dans un certain nombre de
cas, la cause ne sera mise en évidence que au moment de l'intervention chirurgicale.
Les causes les plus fréquentes et les plus caractéristiques sont :
brides post-opératoires ; elles surviennent chez des gens déjà opérés de l'abdomen quelque soit
le délai entre l'occlusion et la laparotomie antérieure, quelle que soit l’importance de la laparotomie.
La recherche d'une cicatrice à l'inspection du ventre est très importante ;
‘les
cancers colo-rectaux ; ils sont souvent précédés par une longue histoire de troubles du transit.
Le cancer du bas rectum peut être diagnostiqué par le toucher rectal. Actuellement l'endoscopie en
urgence et le lavement à la gastrograffine ont été avantageusement remplacés par le scanner spiralé ;
‘les
herniairee ; toutes les hernies pariétales peuvent se compliquer d'un étranglement. Il
faut donc dans l'examen clinique d'un patient en occlusion intestinale palper systématiquement les
orifices herniaires et les cicatrices abdominales à la recherche d'une éventration. Il n'y a aucun lien
entre le volume d'une hernie et l'existence ou non d'un étranglement ;
‘l’étranglement
volvulus coliques qui siègent le plus souvent sur le côlon sigmoïde mais peuvent aussi siéger sur
le côlon droit. Ces volvulus se développent chez des gens porteurs de dolicho-côlon ou de mégadolicho-côlon. Là encore le scanner spiralé ou le lavement à la gastrograffine peuvent faire
‘les
312
précisément le diagnostic et, en urgence, un traitement non chirurgical par détorsion endoscopique
peut être réalisé ;
biliaire, c'est la cause la plus classique mais la plus rare ; l'iléus biliaire est lié au passage
d'un calcul de la vésicule biliaire vers le duodénum par une fistule cholécystoduodénale, le calcul
venant s'enclaver dans l'iléon terminal. Le diagnostic peut être évoqué sur le cliché d'abdomen sans
préparation par l'association d'une occlusion intestinale, d'une aéro-bilie et d'une image de calcul se
projetant sur l’aire intestinale
‘l'iléus
‘Au
total, si l’occlusion intestinale reste le domaine de compétence du chirurgien digestif, on doit
noter l’importance croissante d’une prise en charge multidisciplinaire faisant intervenir aussi le
réanimateur, le radiologue et le gastro-entérologue.
OCCLUSION
OCCLUSION DU GRELE
Vomissements précoces
Déshydratation +++
OCCLUSION DU COLON
Vomissements tardifs
Déshydratation +
ORGANIQUE
FONCTIONNELLE
Bruits hydro-aériques présents
Niveaux hydro-aériques localisés
Bruits hydro-aériques absents
Niveaux hydro-aériques diffus
Niveaux hydro-aeriques
Plus larges que hauts
STRANGULATION
Douleur brutale
permanente
Hernies
Brides
Niveaux hydro-aeriques
Plus hauts que larges
OBSTRUCTION
Coliques
intermittentes
Tumeurs
Sténoses
INFECTION
Hyperthermie
REFLEXE
Douleur +++
Appendicite
Cholécystite
Salpingite
Sigmoïdite
Abcès sous hépatique
Colique
néphrétique
Traumatisme
vertébral
Conduite à tenir devant une occlusion intestinale
313
LES PERITONITES
Nicolas Carrère, Bernard Pradère
La péritonite aiguë se définit comme l’infection et/ou l’inflammation aiguë de la séreuse péritonéale.
Elle est due le plus souvent à la perforation d’un organe creux intra péritonéal ou bien à la diffusion d’une
infection localisée d’un viscère intra-péritonéal.
Elle peut être généralisée à l’ensemble de la cavité péritonéale ou localisée à une région seulement.
Le diagnostic est avant tout clinique.
Le traitement est médical et chirurgical.
La mortalité globale reste élevée, de l’ordre de 30 % selon la cause.
Tout retard de diagnostic et de traitement aggrave le pronostic.
1) ETIOLOGIES
- les péritonites primaires (ou primitives) : les plus rares (1-2%), elles sont dues à une contamination de
la cavité péritonéale par voie hématogène ou par diffusion des germes à travers la paroi digestive sans
lésion anatomique des organes intra péritonéaux, dans un contexte d’immunodépression le plus souvent.
Ces péritonites primitives sont représentées par l’infection d’ascite du cirrhotique, la tuberculose
péritonéale, les infections à pneumocoque…
- Les péritonites secondaires : les plus fréquentes, de nature communautaires ou nosocomiales, elles sont
dues à une lésion anatomique d’un viscère intra péritonéal : perforation d’un organe creux intra péritonéal
ou diffusion d’un foyer infecté localisé.
◊ Péritonites par perforation d’ulcère gastro-duodénal
(agression chimique dans un premier temps, puis septique)
◊ Péritonites par perforation colique : perforation d’un diverticule sigmoÏdien sur sigmoïdite,
perforation d’une tumeur colique, ou perforation diastatique en amont d’une tumeur, colite ischémique,
rectocolite hémorragique, syndrome d’Ogilvie
(agression hautement septique d’emblée, stercorale ou pyo-stercorale, gravité ++)
◊ Péritonites appendiculaires
◊ Péritonites biliaires (évolution d’une cholécystite aiguë)
◊ Péritonites par perforation de l’intestin grêle (sur occlusion, origine ischémique, maladie de
Crohn)
◊ Péritonites d’origine génitale : pelvipéritonites des salpingites aiguës
◊ Péritonites traumatiques : contusion ou plaie pénétrante de l’abdomen (lésions du colon ou du
grêle,…), cause instrumentale (perforation colique après coloscopie)
◊ Péritonites post-opératoires (fistule sur anastomose digestive)
- Les péritonites tertiaires ou « chroniques » dues à l’évolution compliquée de péritonites secondaires
(tableau de sepsis avec défaillance multi-viscérale)
2) DIAGNOSTIC POSITIF : péritonite généralisée par perforation d’organe creux
- Clinique
◊ Signes généraux :
- Fièvre en général élevée à 39-40°c, mais pas toujours présente (pas de fièvre dans les premières
heures suivant une perforation ulcéreuse)
314
- Signes de choc (pâleur, marbrures, tension artérielle pincée et hypotension, pouls filant,
dyspnée,…) après quelques heures d’évolution. Ils traduisent la gravité du tableau clinique liée à la
déshydratation (3°secteur) et à l’infection systémique (choc à germes Gram -)
◊ Signes fonctionnels :
- Douleur abdominale souvent brutale ou de majoration brutale, diffuse au moment du diagnostic.
Elle est permanente, en général très intense, non calmée par les antalgiques non morphiniques. Le type et
le siège initial peuvent orienter le diagnostic étiologique (douleur épigastrique en coup de poignard de la
perforation ulcéreuse, douleur débutant en fosse iliaque droite pour les péritonites appendiculaires,…)
- Nausées-vomissements, arrêt des matières et des gaz en rapport avec l’iléus (occlusion
fonctionnelle) réflexe. Eventuellement diarrhée au début.
◊ Signes physiques :
- Défense localisée puis généralisée, et surtout contracture abdominale +++. La contracture
abdominale (ou « ventre de bois ») est une réaction tonique spontanée involontaire douloureuse invincible
et permanente de la musculature abdominale (Henri Mondor)
- Douleur au cul de sac de Douglas au toucher rectal ou au toucher vaginal traduisant la présence
de liquide dans le cul de sac recto-vésical ou recto-vaginal.
- Disparition de la respiration abdominale à l’inspection
- Disparition de la matité hépatique à la percussion de l’hypochondre droit traduisant de
pneumopéritoine des perforations d’organe creux.
- Silence auscultatoire
- Paraclinique
◊ Radiographie de l’abdomen sans préparation : idéalement couché et debout de face avec un
cliché centré sur les coupoles diaphragmatiques, Elle met en évidence le pneumopéritoine des perforations
d’organe creux sous la forme d’un croissant gazeux sous-phrénique. Ce signe est spécifique mais peu
sensible. Il n’est notamment pas retrouvé lors des péritonites appendiculaires ou biliaires,…
◊ Echographie abdominale : Elle n’est en général pas utile pour le diagnostic. Si elle est réalisée,
elle met en évidence un épanchement liquidien intra-péritonéal et peut orienter vers l’étiologie (paroi
vésiculaire épaissie des cholécystites, appendice augmenté de volume,…)
◊ Tomodensitométrie abdominale sans et avec injection de produit de contraste.
Elle est utile dans les cas douteux pour le diagnostic positif (peu de signes péritonéaux,
doute sur un pneumopéritoine à l’ASP). Elle confirme alors la présence d’épanchement
intra-péritonéal liquidien ou gazeux. Elle est surtout utile au diagnostic étiologique en
mettant en évidence un aspect pathologique de l’organe responsable (remaniements
inflammatoires de la graisse péri-colique au cours des sigmoïdites ou de la région iléocæcale au cours des appendicites, syndrome de masse colique,...). Elle n’est le plus
souvent pas indispensable et ne doit pas retarder la prise en charge chirurgicale.
- Biologie :
Elle fait état d’un syndrome infectieux sévère (hyperleucocytose à PNN, syndrome inflammatoire), d’une
hémoconcentration (en rapport avec le 3° secteur) et des signes de gravité éventuels : acidose
métabolique, insuffisance rénale, hypoxie,…
3) FORMES CLINIQUES
315
◊ Péritonites asthéniques
Il s’agit de péritonites pour lesquelles la réaction pariétale abdominale est atténuée. Les signes
fonctionnels et notamment la douleur sont souvent très réduits, ce qui peut occasionner un retard de
diagnostic et en fait toute la gravité. On retiendra le cas des patients immunodéprimés (SIDA,
corticothérapie, grands vieillards) et des patients présentant une dilatation abdominale (ascite,
dialyse péritonéale).
◊ Péritonites aiguës localisées
Il s’agit de foyers infectés localisés à une région de la cavité abdominale sans diffusion à l’ensemble du
péritoine. Les facteurs de localisation de l’infection peuvent être anatomiques (arrière cavité des
épiploons,…), physiologiques (rôle de la déclivité dans les abcès du cul de sac de Douglas, ou des
mouvements respiratoires dans les abcès sous-phréniques), ou physiopathologiques (« isolement » d’une
infection diverticulaire ou appendiculaire par le grand épiploon et les anses grêles).
Sur le plan clinique, les péritonites localisées se traduisent par un syndrome infectieux et des signes
locaux (douleur, défense) en regard du site infecté.
L’évolution spontanée peut se faire rarement vers la guérison (ulcère perforé bouché), plus souvent vers
l’abcédation (abcès appendiculaire, sous-hépatique, sous-phrénique, du cul de sac de Douglas).
Au stade d’abcès intra-péritonéal, il existe un syndrome de suppuration profonde sévère avec fièvre
hectique (jusqu’à ≥ 39-40°c) et altération rapide de l’état général. Localement, les signes cliniques
dominés par la douleur, la défense, l’empâtement, dépendent aussi de la situation de l’abcès : signes
respiratoires pour les abcès sous-phréniques, signes urinaires et rectaux pour les abcès du cul de sac de
Douglas…
L’évolution vers la péritonite généralisée est également possible (rupture en péritoine libre d’un abcès
intra-péritonéal).
Les examens d’imagerie (Echographie, Tomodensitométrie) assurent le diagnostic en visualisant la
collection liquidienne intra-péritonéale. Ils permettent de réaliser des ponctions guidés dans un but
diagnostique (analyse bactériologique), et souvent thérapeutique (mise en place d’un drain percutané).
Certaines péritonites localisées se manifestent sous la forme d’une péritonite « plastique » (ou
« plastron ») du fait d’une réaction inflammatoire des organes de voisinage (épiploon, anses grêles). Sur le
plan clinique, le plastron réalise une masse palpable pseudo tumorale.
◊ Péritonites post-opératoires
Elles sont dues à une fistule anastomotique ou une plaie d’un viscère passée inaperçue. Leur diagnostic est
difficile, les signes fonctionnels digestifs étant d’interprétation difficile chez un opéré récent. Les signes
généraux sont souvent au premier plan (fièvre, troubles hémodynamiques). La mortalité globale est de
50%.
4) DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Il se pose devant tout syndrome douloureux abdominal fébrile d’origine digestive ou non, et les
syndromes abdominaux s’accompagnant de signes de choc : infarctus mésentérique, pancréatite
aiguë, anévrysme de l’aorte abdominale rompu, grossesse extra-utérine rompue.
5) PRINCIPES DU TRAITEMENT
Le traitement des péritonites aiguës est une urgence. Il est en règle médical et chirurgical. Le pronostic est
directement lié au délai de prise en charge, notamment après 6 heures d’évolution.
316
◊ Réanimation initiale :
Il faut traiter les défaillances viscérales et stabiliser les fonctions vitales avant l’intervention, sans la
retarder.
La mise en condition du patient fait appel au remplissage vasculaire, aux mesures de correction de
l’acidose métabolique, de l’insuffisance rénale et de l’insuffisance respiratoire éventuelles.
Certains gestes sont en général nécessaires en préopératoire : mise en place d’une sonde naso-gastrique,
d’une voie veineuse centrale, d’une sonde urinaire permettant de surveiller la diurèse horaire,
prélèvements biologiques du bilan préopératoire et hémocultures.
Une antibiothérapie parentérale probabiliste encadre le geste opératoire. Des associations d’antibiotiques
bactéricides actifs sur les entérobactéries et les germes anaérobies sont largement utilisées. Les résultats
des prélèvements biologiques per-opératoires permettent d’adapter secondairement cette antibiothérapie.
◊ Traitement chirurgical :
Le traitement chirurgical a pour but d’éradiquer tous les foyers septiques, de supprimer la cause de la
contamination bactérienne en traitant la lésion responsable, de nettoyer la cavité péritonéale pour éviter la
diffusion générale de l’infection et prévenir la formation d’abcès post-opératoires.
La voie d’abord chirurgicale est classiquement large, permettant d’explorer et laver toute la cavité
abdominale, mais la cœlio-chirurgie a pris une place déterminante notamment dans la prise en charge des
perforations ulcéreuses, des péritonites appendiculaires et biliaires.
Pour traiter la cause de la contamination, différentes techniques peuvent être utilisées selon l’organe lésé :
la suture, l’exérèse, l’extériorisation en stomie (iléostomie, colostomie, cæcostomie), la fistulisation
dirigée et le drainage. Les anastomoses ou les sutures en milieu septique sont à éviter en raison du risque
élevé de fistules. Les exérèses digestives (coliques surtout) sont donc habituellement associées à des
stomies, qu’il s’agisse de résection-exclusion comme dans l’intervention de Hartmann ou bien de
résection-anastomose protégée avec une stomie latérale d’amont…
◊ Cas particuliers - traitements spécifiques :
- Péritonites par perforation ulcéreuse :
Habituellement le traitement fait appel à la suture chirurgicale (souvent par voie cœlioscopique), mais une
alternative est représenté par le traitement médical pur (méthode de Taylor) : sonde naso-gastrique, antiulcéreux par voie intraveineuse, surveillance en milieu chirurgical. Certaines conditions sont nécessaires
pour tenter ce traitement médical : perforation datant de moins de 6 heures, patient à jeun au moment de la
perforation, diagnostic certain, absence de signes de péritonite généralisée, surveillance clinique possible
(pas de patient intubé, aliéné, ou en mauvais état général chez lesquels la palpation abdominale est
aléatoire).
- Abcès intra-abdominaux :
Le but du traitement est d’évacuer l’abcès et de drainer la cavité résiduelle. L’abord chirurgical est
classique ; il permet de traiter la cause de l’abcès dans le même temps mais impose une laparotomie.
Actuellement, le drainage percutané sous contrôle échographique ou tomodensitométrique est
préféré le plus souvent (drainage d’un abcès sous-phrénique post-opératoire,…). Il peut permettre de
traiter « à froid », quelques semaines plus tard et dans de meilleures conditions, l’organe lésé,
évitant ainsi une stomie quasiment obligatoire si l’intervention avait du être réalisée en urgence
(sigmoïdectomie réglée après drainage radiologique d’un abcès péri-colique sur diverticulite,…).
317
HERNIES PARIETALES DE L’ADULTE
(à l’exception des hernies diaphragmatiques)
Bertrand Suc
Les hernies pariétales correspondent à l’issue à travers un point faible de la paroi abdominale
du contenu de la cavité abdominale. Ces zones de faiblesse peuvent se situer selon l’âge, le sexe
et le terrain au niveau de l’ombilic, au niveau de l’aine (régions inguinale et crurale), au niveau de la
ligne blanche médiane ou externe. Ces 3 grands types de hernies sont de loin les plus fréqents
dominée par la hernie inguinale. Pour être complet, il faut cependant citer les hernies de la région
lombaire et les rares hernies pelviennes qui peuvent être classer en hernie ischiatique, obturatrice et
périnéale.
Quel qu’en soit le type, une hernie est constituée : d’un sac péritonéal, d’un contenu qui peut être de
l’épiploon ou du tube digestif, d’un collet qui est le nom donné à l’orifice par lequel se fait la hernie.
Quel qu’en soit le type, une hernie pariétale fait courir le risque de l’accident évolutif le plus sévère
qui est l’étranglement lorsque le sac péritonéal extériorisé par l’orifice herniaire (le collet) ne peut
réintégrer la cavité abdominale. L’étranglement fait courir le risque de nécrose ischémique dont la
gravité est variable selon le contenu du sac.
1/ Rappel anatomique
1-1) les hernies inguinales
Elles se définissent par la protrusion dans la région de l’aine d’un sac péritonéal dont l’orifice se
situe au-dessus de la ligne de Malgaigne qui est une ligne virtuelle tracée de l’épine iliaque
antérosupérieure à la symphyse pubienne et qui correspond à la projection du ligament inguinal.
On définit trois types de hernie inguinale. 1°/ la hernie inguinale directe qui se situe en dedans des
vaisseaux épigastriques et qui se fait directement à travers le fascia transversalis. C’est ce que l’on
appelle « la hernie de faiblesse ». 2°/ la hernie indirecte ou oblique externe qui se fait en dehors des
vaisseaux épigastriques dans le cordon avec un sac péritonéal. 3°/ les hernies mixtes qui associent
une hernie directe et une hernie oblique externe.
1-2) la hernie crurale ou fémorale
C’est une hernie de l’aine qui se fait au-dessous de la ligne de Malgaigne à travers l’orifice
musculopectinéal. C’est une hernie qui est souvent de petite taille, qui est plus fréquemment
rencontrée chez la femme âgée et souvent responsable d’épisode d’étranglement.
1-3) la hernie ombilicale
Elle résulte de la distension de la cicatrice ombilicale cerclée au niveau du plan aponévrotique par
l’anneau ombilical. Ce sont des hernies qui sont fréquentes dans la petite enfance mais aussi à l’âge
adulte chez l’obèse, chez la femme enceinte et chez le cirrhotique souffrant d’ascite.
1-4) les hernies de la ligne blanche médiane ou hernies épigastriques
Elles siègent dans la partie sus-ombilicale de la ligne blanche médiane. Leur taille est variable de
quelques mm à quelques cm et la hernie contient souvent de la graisse préperitonéale.
1-5) la hernie de la ligne blanche externe ou hernie de Spiegel
Ces hernies se font au bord latéral du muscle droit de l’abdomen entre les fibres aponévrotiques du
muscle transverse et oblique interne sur le trajet d’une ligne virtuelle appelée la ligne semi-lunaire
de Spigel. Ces hernies sont dites aussi interstitielles car elles sont recouvertes au moins par
l’aponévrose de l’oblique externe. Ces hernies ont 2 caractéristiques : elles sont parfois très
douloureuses sans être étranglées et elles sont souvent très difficiles à mettre en évidence à
l’examen clinique.
1-6) les hernies lombaires
Deux zones de faiblesse existent dans la région lombaire : le triangle de Jean Louis Petit et le
quadrilatère de Grynfelt. Ces hernies sont rares, dans l’enfance associées à d’autres malformations
et chez l’adulte favorisées par l’obésité ou au contraire la cachexie.
318
1-7) les hernies ischiatiques et obturatrices
Les hernies ischiatiques sont exceptionelles et se font à travers la grande ou la petite échancrure
sciatique pour se développer dans la fesse. Les hernies obturatrices siegent dans le canal obturateur
sous pubien. La femme âgée est statistiquement la plus souvent concernée par ce type de hernie et
la circonstance de découverte est l’étranglement dans la majorité des cas.
1-8) les hernies périnéales
On en décrit 2 grands types : les hernies antérieures concernant plutôt la femme et s’extériorisant
dans la grande lèvre et les hernies postérieures qui émergent à travers les muscles ischiococcygiens.
2/ Les signes de la hernie
2-1) Hernie non étranglée
Signes fonctionnels : à l’effort et plus particulièrement à la mise en tension des muscles de la paroi
abdominale ou à la marche. Gêne fonctionnelle avec parfois une sensation douloureuse et la
perception d’une voussure dans la région herniaire. Le patient ressent parfois une sensation de
gargouillement dans la région herniaire liée au contenu digestif du sac péritonéal.
Signes physiques : le malade est examiné debout puis couché et l’on recherche les signes d’une
hernie non compliquée, c’est-à-dire une tuméfaction indolore, réductible et impulsive à la toux.
Selon le type de la hernie, il sera important d’évaluer la morphologie globale du patient, l’état
cutané au niveau de la hernie et l’examen des autres orifices herniaires et en particulier en cas de
hernie de l’aine, l’orifice controlatéral.
2-2/ Hernie étranglée
L’étranglement herniaire modifie les caractères de la hernie. La hernie devient spontanément
douloureuse. A l’examen, la tuméfaction est irréductible et non impulsive à la toux. En fonction du
contenu du sac péritonéal, il peut s’associer des signes d’occlusion intestinale.
2-3/ Particularités cliniques en fonctions siège
Les hernies inguinales
Ce sont le plus souvent des hernies de l’homme et leur survenue récente chez un adulte âgé doit
faire rechercher un facteur favorisant : bronchite chronique, troubles prostatiques, cancer colorectal.
La hernie crurale
C’est plutôt une hernie de la femme âgée qui se présente dans plus d’un cas sur trois par un
étranglement herniaire.
La hernie ombilicale
C’est une hernie que l’on rencontre chez l’obèse mais aussi chez le cirrhotique décompensé sur le
mode de l’ascite et ces 2 formes cliniques ont un pronostic complètement différent. L’association de
la cirrhose et de l’ascite rend très difficile le traitement de la hernie ombilicale et ce d’autant plus
qu’il peut exister des lésions cutanées menaçantes.
Les hernies de la ligne blanche externe ou hernies de Spiegel
Elles sont très difficiles à diagnostiquer du fait du caractère interstitiel.
Les hernies obturatrices
Elles sont en général responsables d’un tableau d’occlusion intestinale avec un examen
clinique strictement négatif sur le plan pariétal.
3/ Diagnostic des hernies pariétales
Le diagnostic d’une hernie pariétale de l’adulte est un diagnostic essentiellement clinique qui repose
sur l’interrogatoire et l’examen clinique. Il est important d’examiner les patients debout puis couché
surtout pour les hernies de l’aine. Il est important d’examiner l’ensemble des autres orifices
herniaires. Dans de rares cas comme certaines hernies crurales à orifice étroit ou certaines hernies de
Spigel, on pourra être amené à demander une échographie ou un scanner de la paroi abdominale
comme une aide au diagnostic.
319
4/ Le traitement des hernies pariétales
4-1/ Les bases du traitement
La base commune au traitement de toutes les hernies pariétales de l’adulte est de réaliser
chirurgicalement la consolidation de la zone de faiblesse.
4-2/ Les moyens
Pour réaliser cette consolidation, on peut utiliser deux techniques :
1°/ le rapprochement musculo-aponévrotique autour de la zone de faiblesse.
2°/ L’utilisation d’un matériel prothétique pour le renforcement de la zone de faiblesse.
Ce traitement chirurgical peut se faire classiquement par un abord chirurgical direct en particulier
pour les techniques de rapprochement musculo-aponévrotique mais aussi plus récemment, par des
techniques cœlioscopiques qui font le plus souvent appel à la mise en place d’un matériel
prothétique.
4-3/ Indications
La décision d’une intervention sur une hernie pariétale de l’adulte repose sur la gêne fonctionnelle
provoquée par la hernie mais aussi sur le risque d’étranglement qui est probablement plus important
dans les cas de hernie crurale, les cas de hernie ombilicale à collet étroit ou les cas de hernie de la
ligne blanche médiane.
Dans la mesure du possible, une fois l’intervention décidée et en fonction du siège de la hernie, de
sa taille et de la morphologie du patient, on choisira classiquement l’utilisation des techniques de
rapprochement musculo-aponévrotique et on réservera les techniques de mise en place de matériel
prothétique au cas plus difficiles car ces techniques font courir un risque faible mais réel d’infection
sévère.
Sur le plan anesthésique, les trois techniques d’anesthésie que sont l’anesthésie locale, l’anesthésie
loco-régionale ou l’anesthésie générale sont possibles à la réserve de la taille et du siège de la hernie
mais aussi à la réserve de la mise en place de matériel prothétique par voie cœlioscopique qui
nécessite toujours une anesthésie générale.
4-4/ Résultats
Les résultats du traitement des hernies pariétales de l’adulte se jugent en terme de morbidité à court
terme qui comprennent les hématomes, les abcès de paroi et les infections de prothèse. A long
terme, le résultat devrait s’évaluer en terme de douleurs séquellaires et surtout de récidive herniaire
mais ce taux de récidive herniaire pour les hernies inguinales qui sont les plus fréquentes est très
difficile à évaluer car le suivi des malades n’est jamais exhaustif. Probablement, parmi l’ensemble
des hernies pariétales, le taux de récidive des hernies ombilicales opérées est très élevé.
320
HERNIES PARIETALES CHEZ L’ENFANT
Philippe Vaysse
Les hernies pariétales chez l’enfant concernent deux régions anatomiques principales : la
région inguino-fémorale et la région ombilicale. Dans la pratique, elles sont dominées en
fréquence par les hernies inguinales que nous développerons tout d’abord mais le médecin
généraliste ne saurait ignorer les hernies fémorales ( anciennement crurales ), les hernies ombilicales
ou des malformations plus complexes telles que le laparoschisis, l’omphalocèle ou l’exstrophie
vésicale .
LES HERNIES INGUINALES
1)- GENERALITES
Il s’agit de hernie oblique externe par persistance anormale d’un diverticule péritonéal ( processus
vaginal ) formant canal accolé au gubernaculum de la gonade ( testicule réalisant le gubernaculum
testis ou ovaire ). Le processus vaginal emprunte chez le fœtus le trajet inguinal au niveau duquel
il refoule les différents plans de la paroi abdominale qui est par ailleurs saine et tonique. ( voir
fichier cpvdia02 )
Chez le garçon, après la traversée de la paroi par le testicule ( 8 ème mois de la vie intra-utérine ) et
la migration de la gonade dans la bourse, la portion du diverticule péritonéal qui constitue, entre
abdomen contenant le péritoine et scrotum contenant la vaginale, le canal péritonéo-vaginal va se
fermer supprimant toute communication entre ces deux structures. Chez la fille, le canal péritonéal (
canal de Nück ) s’oblitère dans sa totalité. La fermeture spontanée du canal se fait soit avant la
naissance soit au cours des deux premières années de vie; cependant chez 20% des individus ne
présentant aucune symptomatologie évocatrice de sa persistance, il reste perméable tout au long de
la vie. ( voir fichier cpvdia02 )
La fréquence de la hernie inguinale chez l’enfant varie de 0,8% à 4,4%. Chez l’enfant prématuré
elle atteint 30%.
Le garçon est beaucoup plus souvent atteint que la fille ( 6 à 8 garçons pour une fille ).
La hernie siège à droite dans 60% des cas, à gauche dans 30% et elle est bilatérale dans 10% des cas
2) HERNIE INGUINALE NON COMPLIQUEE :
2-1 – Clinique et diagnostic :
Elle se présente sous la forme d’une tuméfaction inguinale, inguino-scrotale ou inguino-labiale
apparaissant ou se majorant en position debout ou à l’occasion des cris, des efforts ou de la toux (
impulsion à la toux ). C’est une tuméfaction molle habituellement indolore, lisse parfois
gargouillante à la pression. Lorsque l’enfant se calme, la tuméfaction disparaît soit spontanément
soit en exerçant une pression douce dans l’axe du canal inguinal.
Chez le garçon, il faut préciser la position du testicule car une gonade oscillante peut donner une
tuméfaction inguinale qui disparaît lorsqu’on abaisse le testicule dans la bourse. Par ailleurs une
hernie peut-être associée à une malposition testiculaire.
Au cours de l’examen, il est souhaitable de mettre en évidence l’extériorisation herniaire en
favorisant les situations d’hyperpression abdominale. Parfois cependant, on doit se contenter de la
321
simple perception clinique d’un cordon élargi et dissocié par comparaison avec le côté où aucune
symptomatologie n’a été observée. La palpation de l’orifice superficiel du canal inguinal à travers la
peau scrotale retournée sur l’index , habituellement désagréable et parfois douloureuse, est en règle
inutile.
Lorsque l’histoire clinique est évocatrice de l’existence d’une extériorisation herniaire intermittente
mais que l’examen ne la met pas en évidence, la herniographie par opacification du canal à l’aide
d’un produit de contraste injecté dans la cavité péritonéale a été proposée ; les risques qu’elle
comporte ( hématome intestinal responsable d’occlusion, cellulite…. ) conduisent à ne réserver son
utilisation qu’à des indications exceptionnelles et sa réalisation qu’à des opérateurs très
expérimentés.
2-2- Traitement :
* Avant l’âge de 1 an, étant donné la possibilité de fermeture spontanée du canal péritonéovaginal, il est envisageable de prescrire un bandage dont le but est d’éviter l’extériorisation du
contenu herniaire ; cette attitude qui paraît simple se heurte à plusieurs difficultés :
- la tolérance cutanée est souvent mauvaise
- l’efficacité dans le contrôle de l’extériorisation est souvent imparfaite
- la présence du bandage peut gêner la surveillance de l’extériorisation et se révéler
faussement rassurante
Aussi, l’indication opératoire est-elle portée rapidement devant une hernie difficile à réduire, une
hernie volumineuse qui peut-être source d’inconfort général ou digestif, une hernie survenant chez
un enfant dont la surveillance médicale peut-être difficile à réaliser pour des raisons géographiques
ou sociales.
* Passé l’âge de un an, l’intervention chirurgicale s’impose car la probabilité de fermeture
spontanée du canal péritonéo-vaginal est très réduite .
* Quel que soit l’âge, à la fois pour des raisons anesthésiologiques et pour des raisons
techniques ( fragilité du pédicule testiculaire, du déférent et de ses vaisseaux ) l’enfant doit être
confié à une équipe qui a l’habitude de ces problèmes. L’intervention consiste, par une incision dans
le pli abdominal inférieur, à fermer le canal péritonéo-vaginal en regard de l’orifice profond du
canal inguinal ; la partie distale du canal est respectée car sa dissection est inutile et dangereuse pour
les vaisseaux testiculaires ou le déférent et sa vascularisation. Il est également inutile d’envisager un
temps pariétal de réfection musculo-aponévrotique en dehors de la réparation simple des structures
traversées pour accéder à la zone de fermeture du canal péritonéo-vaginal. La cure chirurgicale peut
s’envisager en chirurgie ambulatoire.
* La présence d’une hernie inguinale unilatérale témoigne de la perméabilité du canal
péritonéo-vaginal homo-latéral. La perméabilité du canal péritonéo-vaginal contro-latéral ( 60%
avant 1 an ; 50% entre 1 et 2 ans ; 40% après 2 ans ) susceptible de permettre l’extériorisation
asynchrone d’une hernie inguinale contro-latérale a pu faire proposer l’exploration chirurgicale
bilatérale de principe dans le même temps opératoire. Aucun argument irréfutable ne justifie une
telle attitude systématique ; chez un enfant dont la symptomatologie est unilatérale, le caractère uni
ou bilatéral de l’intervention doit être discuté au cas par cas.
* Récidives : La récidive herniaire après traitement chirurgical d’une hernie inguinale non
compliquée est très faible et inférieure à 1 %. Le risque de récidive paraît plus important chez le
prématuré.
322
3) HERNIE IRREDUCTIBLE
A tout moment, une hernie peut devenir irréductible, ce qui correspond à deux situations :
l’engouement herniaire dans lequel la vascularisation des éléments herniés (tube digestif,
épiploon, ovaire ), n’est pas compromise et l’étranglement herniaire dans lequel il y a un risque
de nécrose du contenu herniaire. Chez l’enfant, l’engouement herniaire évolue en quelques heures
vers l’étranglement.
Cet accident d’irréductibilité surtout fréquent dans la première enfance peut même être révélateur.
3-1 Clinique
L’engouement herniaire s’accompagne d’irritabilité, de douleurs abdominales et parfois de
vomissements. La tuméfaction inguinale, inguino-scrotale ou inguino-labiale est tendue, peu
douloureuse, irréductible et occasionnellement, de manière trompeuse, transilluminable. Elle peut
être de petite taille et doit être systématiquement recherchée chez le nourrisson.
Les signes d’atteinte vasculaire intestinale témoignant de l’étranglement herniaire sont constitués
par une majoration des phénomènes douloureux et l’apparition de vomissements bilieux ou
fécaloïdes. La tuméfaction est douloureuse à la palpation et s’accompagne d’œdème et de rougeur
de la peau en regard en même temps que les signes d’occlusion intestinale se précisent. Il peut y
avoir du sang dans les selles.
Chez le garçon, le testicule peut être dur et augmenté de volume en raison de la stase veineuse et
lymphatique des vaisseaux du cordon comprimés par le contenu herniaire.
La radiographie de l’abdomen sans préparation révèle des signes d’occlusion et parfois une image
gazeuse pré-pubienne ou intra-scrotale témoin du contenu de l’intestin hernié.
3-2 Diagnostic
Chez un nourrisson grognon avec encombrement trachéo-bronchique ou épisode ORL aigu, il ne
faut pas retenir trop vite le diagnostic de kyste du cordon ou de kyste du canal de Nück mais penser
à la hernie irréductible. La transillumination n’est que de peu de secours pour les différencier.
L’échographie en retrouvant des structures digestives peut aider au diagnostic.
La torsion d’un testicule ectopique se traduit par des signes voisins mais la bourse est déshabitée.
L’erreur diagnostic ne retarde cependant pas l’intervention qui rectifiera le diagnostic.
Une lymphadénite inguinale ou fémorale a souvent été précédée par des lésions infectées dans le
territoire drainé. Le canal inguinal est habituellement libre. Dans le doute, une exploration
chirurgicale ne compromet pas l’évolution de l’adénite.
3-3 Traitement :
Une hernie irréductible sans signe évident de strangulation doit bénéficier d’une tentative de
réduction non chirurgicale. Le principe de cette réduction est d’obtenir un relâchement des muscles
de la paroi abdominale en calmant l’enfant ( Valium ou Narcozep intra-rectal ) et de favoriser la
réintégration spontanée en utilisant la position de Trendelenbourg ( décubitus dorsal, pieds surélevés
sur un plan incliné à 30-40 degrés ). Après 1 à 2 heures d’attente, si la hernie n’est pas
spontanément réduite, une tentative prudente de réduction manuelle ( taxis ) par pression douce dans
l’axe du canal inguinal est réalisée.
323
Avec une telle pratique, 80% des hernies peuvent être réduites. L’enfant doit être surveillé pendant
48 heures pour s’assurer de l’intégrité de l’intestin réduit et permettre la régression des phénomènes
inflammatoires locaux. La cure chirurgicale différée peut-être réalisée sans trop de difficulté dans
les 8 à 10 jours suivant la réduction.
Si la hernie ne peut être réduite ou si des signes d’étranglement sont présents, l’intervention
s’impose rapidement après avoir rééquilibré l’enfant sur le plan hydro-électrolytique et mis en route
une antibiothérapie à large spectre. Les viscères herniés sont contrôlés et traités si nécessaire. La
fermeture du canal péritonéo-vaginal est alors réalisée selon les mêmes principes que dans la hernie
non compliquée.
* Il est utile de revoir les garçons à distance de la prise en charge de ce problème, car une
hypotrophie ou même une atrophie testiculaire peut en résulter ( jusqu’à 2 % ). Ceci souligne
l’importance de résoudre rapidement l’irréductibilité non seulement pour protéger le contenu
herniaire mais aussi pour prévenir les conséquences testiculaires.
4) HERNIE DE L’OVAIRE
Quel que soit l’âge, la persistance du diverticule péritonéal le long du ligament rond peut permettre
l’extériorisation du contenu de la cavité péritonéale et donc de l’ovaire chez la fille.
4-1 Clinique :
Dans les premières semaines ou mois de vie, la maman au cours de la toilette ou le médecin au
cours de l’examen systématique peuvent être amenés à découvrir une petite masse nodulaire de la
taille d’une noisette inguinale ou souvent pré-pubienne, mobile, indolore, isolée ou persistant après
réduction d’une structure gargouillante. Ce nodule est parfois facilement réductible ; s’il est
irréductible, il ne faut pas effectuer de taxis afin de ne pas traumatiser l’ovaire ; la hernie et donc le
nodule peut-être bilatéral.
4-2 Diagnostic :
Le risque est de considérer ce nodule comme une adénopathie qui inciterait à l’abstention
chirurgicale. Une adénopathie est cependant habituellement moins mobile.
4-3 Traitement :
Quel que soit l’âge, le diagnostic de hernie de l’ovaire doit conduire à la cure chirurgicale dans les
jours qui suivent le diagnostic ; le geste est techniquement simple n’impliquant pas de risque local
particulier. L’intervention précisera s’il s’agit d’une hernie libre ou d’une hernie par glissement.
L’abstention chirurgicale expose au risque d’étranglement qui peut en quelques heures aboutir à la
nécrose de l’ovaire et de la trompe.
*Un enfant de phénotype féminin chez lequel on palpe une gonade en position inguinale ou dans la
grande lèvre peut en réalité être porteur d’une insensibilité totale aux androgènes ( anciennement
testicule féminisant ) ou d’un hermaphrodisme vrai. En cas d’insensibilité aux androgènes,
l’exploration chirurgicale révèle un testicule petit et ne retrouve pas de trompe ; en cas
d’hermaphrodisme vrai, l’exploration peut révéler une trompe et un ovotestis. Dans les deux cas, il
faut biopsier la gonade, réintégrer le contenu herniaire dans l’abdomen, réparer la hernie et
secondairement faire le point de l’anomalie de la différenciation sexuelle.
324
5) HERNIE INGUINALE DIRECTE
Exceptionnelle chez l’enfant, elle correspond habituellement à une récidive herniaire après
réparation d’une hernie inguinale oblique externe. La zone de faiblesse est située en dedans des
vaisseaux épigastriques et le traitement consiste à réparer le fascia transversalis.
HERNIE FEMORALE
( ancienne hernie crurale )
Très rare chez l’enfant ( 0,2 % des hernies de l’aine ) l’extériorisation herniaire se fait en dedans
de la veine fémorale et en arrière du ligament inguinal ( ancienne arcade crurale ). Elle est plus
fréquente chez la fille : 2 filles pour un garçon. Elle peut être bilatérale.
Elle se présente volontiers sous la forme d’une “ tumeur ” de la racine de la cuisse à la partie
médiale habituellement indolore et dont le caractère impulsif à la toux et la réductibilité sont
inconstants. Le risque est de considérer cette masse comme une adénopathie ( fréquente ) mais il n’y
a habituellement pas de lésion inflammatoire ou infectieuse dans le territoire de drainage
lymphatique. Il faut résister à la tentation de ponctionner et évoquer le diagnostic de hernie
fémorale.
Le traitement chirurgical consiste à fermer l’orifice en abaissant le ligament inguinal sur le ligament
pectiné ( ligament de Cooper ).
HERNIE OMBILICALE
Très fréquente, la hernie ombilicale correspond à une fermeture incomplète de l’anneau ombilical.
Le plus souvent, il ne s’agit que d’un retard de fermeture laquelle peut se produire jusqu’à l’âge de 4
à 5 ans.
1) CLINIQUE :
Elle se présente comme une tuméfaction indolore déplissant la cicatrice ombilicale lors des efforts,
des pleurs ou des cris. Elle est facilement réductible. La réduction permet d’évaluer la taille de
l’orifice aponévrotique admettant, le plus souvent, la pulpe de l’index, plus rarement, l’index luimême.
L’étranglement herniaire est rarissime.
2) TRAITEMENT :
Le contrôle de l’extériorisation herniaire peut-être aidé par un bandage simple avec une bande
Velpeau large prenant toute la hauteur de l’abdomen et maintenant un tampon souple fait d’une à
deux compresses pliées en 4.
Passé l’âge de 4 à 5 ans, l’indication de fermeture chirurgicale de l’anneau ombilical paraît justifiée.
Elle se fait par une incision péri-ombilicale dont la cicatrice se confond avec celle de l’ombilic.
325
MALFORMATIONS RARES DE LA PAROI ABDOMINALE MEDIANE
( OMPHALOCELE , LAPAROSCHISIS , EXSTROPHIE VESICALE )
Il s’agit de malformations dont la prise en charge commence, de plus en plus souvent, dans la
période fœtale
( diagnostic pré-natal ) mettant à contribution les équipes obstétricales et pédiatriques. Le
traitement parfois difficile s’impose dès la naissance et implique les équipes de chirurgie
pédiatrique, de réanimation et de néo-natologie médicales ; il relève d’équipes hautement
spécialisées. ( voir fichier cpvdia02 )
Prévalences :
Omphalocèle = Laparoschisis : 1 cas pour 5000 naissances
Exstrophie vésicale : 1 pour 10.000 à 30.000naissances
Pour Midi-Pyrénées : 25.000 à 30.000 naissances par an.
OMPHALOCELE
L’omphalocèle correspond à la persistance au delà de la 12ème semaine d’aménorrhée de la hernie
physiologique ; les viscères herniés ( anse ombilicale primitive ou foie ou les deux associés ) sont
morphologiquement et fonctionnellement normaux et recouverts d’un sac constitué par la gelée de
Wharton. La présence des viscères herniés compromet la muscularisation normale de la paroi
abdominale On distingue les petites omphalocèles ( type I ) contenant habituellement l’anse
ombilicale seule ou plus rarement le foie seul et les grandes omphalocèles ( type II ) contenant
l’anse ombilicale primitive et le foie. L’anomalie de muscularisation de la paroi abdominale est bien
sûr plus important dans l’omphalocèle de type II que dans l’omphalocèle de type I
Dans 50% des cas l’omphalocèle est associée à une autre anomalie structurale ( cœur, reins,
membres ou anomalies faciales, syndrome de Beckwith-Wiedman, pentalogie de Cantrell ou
complexe malformatif associant omphalocèle-exstrophie-imperforation anale-anomalie spinale =
O.E.I.S) ou chromosomique. Ces anomalies associées sont plus fréquentes dans les petites
omphalocèles que dans les grandes.
Le pronostic est lié aux anomalies associées et à la taille de l’omphalocèle.
Lorsque la grossesse a été conduite à son terme, la prise en charge chirurgicale dépend du type de
l’omphalocèle.
La réintégration et la fermeture idéale de la paroi dès la naissance sont la règle dans les petites
omphalocèles ( type I ). Habituellement, l’installation des fonctions digestives normales est rapide et
le pronostic ultérieur n’est lié qu’à d’éventuelles lésions associées en particulier dans le cadre du
Syndrome de Beckwith-Wiedemann..
Les volumineuses omphalocèles ( type II ) nécessitent une réintégration progressive qu’elle qu’en
soit la technique ( traction sur le cordon avec compression douce du contenu herniaire, création d’un
326
sac avec une prothèse ou constitution d’une éventration contrôlée ) et une réparation pariétale
différée de quelques jours ou de quelques mois. Les conséquences de l’hyperpression abdominale
précoces ou secondaires peuvent nécessiter une assistance ventilatoire ou un support nutritionnel
prolongé et conduire à une chirurgie antireflux secondaire.
L’espérance de vie des omphalocèles prises en charge à la naissance ( donc après interruption de
grossesse pour anomalies chromosomiques ou anomalies structurales graves ) est globalement de 80
à 90 % parfois après une période néo-natale difficile pour les volumineuses omphalocèles .
LAPAROSCHISIS
Le Laparoschisis ( = gastroschisis ) réalise une éviscération à travers un orifice latéro-ombilical
droit. L’intestin éviscéré baigne dans le liquide amniotique ; à la naissance il paraît souvent
raccourci avec une paroi épaissie et recouverte d’un enduit fibrineux qui semble se constituer à
partir de la 30 ème semaine d’aménorrhée et s’aggrave avec le temps. Le mécanisme de production
des lésions intestinales n’est pas très clair ; il semble bien que deux processus puissent en rendre
compte : d’une part une “ péritonite aseptique amniotique ” ( dans laquelle le rôle de l’urine fœtale,
du contenu du tube digestif ou des produits de desquamation épidermique ont pu être incriminés ) et
d’autre part un phénomène de constriction partielle par l’orifice pariétal entravant les circulations
lymphatique et veineuse de l’intestin extériorisé.
Les anomalies associées structurales ( en dehors des atrésies du grêle) ou chromosomiques ne sont
pas plus fréquentes que celles observées dans la population générale.
Le pronostic du laparoschisis est principalement lié à l’état de l’intestin extériorisé. Plusieurs
attitudes peuvent être proposées pour minimiser les conséquences de l’éviscération : soit une
naissance prématurée dès que des signes échographiques d’altération des parois intestinales
apparaissent, soit une amnio-infusion ou un amnio-échange soit les deux associés .
A la naissance, la prise en charge immédiate s’impose car les lésions intestinales s’aggravent
rapidement après la délivrance.
Dans le meilleur des cas, la réintégration complète avec fermeture immédiate de la paroi
abdominale permet d’espérer une récupération rapide des fonctions digestives.
Lorsque la réintégration immédiate n’est pas possible, une réintégration progressive avec fermeture
secondaire 8 à 10 jours plus tard est réalisée. Une assistance respiratoire de quelques jours est
souvent alors nécessaire ainsi qu’une assistance nutritionnelle qui peut se prolonger plusieurs
semaines.
L’espérance de vie d’un nouveau-né porteur d’un laparoschisis est de l’ordre de 85 à 90 %.
EXSTROPHIE VESICALE
L’exstrophie vésicale est une affection très rare résultant d’un défaut de fermeture de la paroi
abdominale sous-ombilicale intéressant également la ceinture pelvienne ( écart important des pubis
avec absence de symphyse pubienne ) et s’étendant jusqu’aux structures uro-génitales ( vessie,
urèthre et formations érectiles ). La réparation de cette anomalie est complexe nécessitant
habituellement plusieurs interventions chirurgicales ; elle ne permet pas de restaurer une fonction
génitale normale chez le garçon et laisse souvent persister une incontinence urinaire ( 20 à 30% des
cas ).
327
DOULEURS ABDOMINALES ET PELVIENNES AIGUES DE L’ENFANT
P.Galinier, E.Fournie-Gardini
La douleur abdominale est un des motifs de consultation les plus fréquents en pédiatrie. Les
étiologies sont très variées et regroupent pratiquement toutes les pathologies digestives,
médicales et chirurgicales. Mais les douleurs abdominales peuvent aussi être la manifestation
de maladies organiques extra-digestives, notamment lors des infections ORL du nourrisson,
ou représenter l’expression d’un conflit psychologique. Ainsi, quelle qu’en soit son intensité, ce
syndrome algique doit toujours êtres considéré avec la plus grande attention car il exprime toujours
une souffrance de l’enfant qu’il faut traiter.
1) DIAGNOSTIC
Face à la diversité des causes, la démarche diagnostique repose avant tout sur un interrogatoire
soigneux et un examen clinique rigoureux. Les examens paracliniques doivent être réservés aux
situations pour lesquelles il existe des signes d’organicité.
1-1-Examen clinique
L’interrogatoire est une étape essentielle
*Douleur aiguë ou récurrente ?
Dans un premier temps, il faut discerner une douleur abdominale aiguë, d’apparition récente et qui
n’existait pas auparavant, des douleurs abdominales récurrentes ou chroniques définies par la
survenue d’au moins trois épisodes algiques pendant une période d’au moins trois mois. En effet,
dans les douleurs abdominales aiguës, il faut avant tout éliminer une urgence chirurgicale alors que
les douleurs récurrentes admettent dans 80 % des cas une cause fonctionnelle.
*Douleur organique ou fonctionnelle ?
Ensuite, il faut s’attacher à rechercher des signes d’organicité en précisant par l’examen clinique et
l’interrogatoire, les caractéristiques de la douleur, ses facteurs déclenchants, les signes
d’accompagnement et son retentissement sur l’état général et la vie quotidienne.
Dans le cadre d’une douleur abdominale aiguë, ces signes d’organicité sont parfois difficiles à
retrouver et sont quelquefois méconnus. L’existence de troubles urinaires, même mineurs, comme
une dysurie avec une petite rétention urinaire depuis 24 à 48 heures ou une douleur à la défécation
sont parfois des signes péritonéaux.
La prise d’antibiotiques ou d’anti-thermiques dans les jours précédents doit être recherchée
systématiquement car ces médicaments peuvent dégrader une symptomatologie péritonéale.
L’anorexie, la perte de poids, la perte du sommeil et le caractère nocturne des douleurs sont
de très bons signes d’appel de pathologie organique. Les vomissements, surtout s’ils sont bilieux,
peuvent témoigner d’un syndrome occlusif. Le refus alimentaire chez un nourrisson équivaut à un
vomissement. L’existence d’une diarrhée doit faire évoquer une gastro-entérite banale mais, chez le
nourrisson, les syndromes occlusifs peuvent s’accompagner, dans les premières heures, de
l’émission de selles liquides par vidange du segment d’aval.
Il faut aussi faire préciser l’existence de fièvre et son intensité, l’état pubertaire et le cycle
menstruel, la topographie de la douleur, son irradiation et les facteurs déclenchants. Les enfants ne
savent généralement pas préciser ces caractères et indiquent souvent la région péri-ombilicale. La
notion d’un point douloureux précis extra-ombilical est souvent un signe d’organicité.
L’interrogatoire doit bien faire préciser les antécédents familiaux et personnels, notamment :
intervention chirurgicale abdominale, drépanocytose et anémie hémolytique chronique, maladie
328
ulcéreuse, reflux gastro-oesophagien, transit habituel… Il faut rechercher une notion de traumatisme
passé inaperçu ou oublié.
L’examen physique est capital
Il doit impérativement comprendre la mesure du poids et de la taille, et chez l’enfant de moins de
trois ans, le périmètre crânien.
Il est très important de déshabiller complètement l’enfant, de bien regarder la peau (purpura,
ictère), les régions inguinales (hernies), la vulve ou les bourses.
La palpation prudente et répétée débute dans une zone non douloureuse, apprécie les débords
hépatiques et spléniques, les orifices herniaires ou l’existence d’une masse abdominale.
Le toucher rectal apporte des informations capitales chez le grand enfant mais est souvent
spontanément douloureux et parfois inutile chez le nourrisson. Il peut faire le diagnostic de
rectorragies ou de méléna. L’examen proctologique attentif doit rechercher une fissure anale qui
oriente vers une constipation ou vers une maladie de Crohn. Le toucher rectal recherche aussi une
stase stercorale (normalement le rectum est vide). La constipation est volontiers méconnue car les
parents ne regardent pas toujours les selles de leurs enfants. De plus, un enfant souffrant de rétention
stercorale peut aller à la selle tous les jours en conservant un colon plein de matières.
L’examen doit ensuite être complet à la recherche d’infections extra-digestives notamment
ORL ou pulmonaires.
1-2-Examens complémentaires
Ils sont souvent plus utiles dans une douleur aiguë que dans les douleurs récurrentes. La
radiographie de l’abdomen sans préparation (ASP) (stase stercorale , coprolithe appendiculaire,
lithiase rénale) et l’examen cytobactériologique des urines sont certainement les examens à
demander en première intention. La bandelette urinaire est un examen très utile pour rechercher une
protéinurie, une glycosurie, une acétonurie, une leucocyturie, ou le présence de nitrites.
Les examens sanguins peuvent être utiles pour apprécier une hyperleucocytose ou une anémie
(numération formule sanguine), un syndrome inflammatoire (CRP : C Reactive Protein ; VS :
vitesse de sédimentation), une atteinte hépatique (bilan hépatique complet : TGO, TGP,
phosphatases alcalines, bilirubine totale et directe, et GT) ou pancréatique (amylasémie et
lipasémie).
L’échographie abdomino-pelvienne orientée par les signes cliniques existants peut être utile dans
les pathologies chirurgicales et pour faire le diagnostic d’adénolymphite mésentérique, de
pathologie gynécologique chez la fille, d’anomalies des voies urinaires (syndrome de la jonction
pyélo-urétérale) ou biliaires.
D’autres examens sont parfois nécessaires en fonction des signes cliniques ou de la persistance de la
symptomatologie malgré un traitement adapté (examen coprologique ou parasitologique des selles,
fibroscopie oesogastroduodénale et/ou coloscopie, transit baryté du grêle ou lavement baryté,
examens tomodensitométriques ...).
Dans tous les cas, la prescription d’examens complémentaires doit être ciblée. Il n’y a pas de
« bilan de débrouillage »!
329
2) ETIOLOGIES CHIRURGICALES
L’origine chirurgicale d’une douleur abdominale ou pelvienne de l’enfant peut être digestive,
urinaire ou génitale. L’interrogatoire et l’examen sont donc particulièrement ciblés sur ces trois
appareils, au cours d’un examen clinique complet ; recherche de cicatrice de laparotomie,
vérification de la vacuités des orifices herniaires, recherche de signes urinaires, palpation des
testicules dans les bourses, date des dernières règles et passé gynécologique chez l’adolescente.
L’interrogatoire tentera de caractériser la douleur (modalités d’apparition, évolution dans le temps,
localisation, irradiation, signes d’accompagnement).
On peut schématiquement distinguer trois types de pathologies par ordre d’urgence décroissante :
⇒ douleurs abdominales consécutives à un mécanisme vasculaire entraînant une
souffrance tissulaire ischémique
⇒ douleurs abdominales consécutives à un mécanisme obstructif
⇒ douleurs abdominales consécutives à un mécanisme infectieux
Les éléments cliniques donnent souvent une orientation diagnostique assez précise. Les examens
complémentaires simples utiles au diagnostic sont la radiographie d’abdomen sans préparation,
l’échographie abdominale ou abdomino-pelvienne chez la grande fille (qui devra être réalisée avec
la vessie pleine), la numération formule sanguine, le dosage de la CRP. La réalisation d’examens
plus spécifiques est adaptée aux situations particulières.
2-1-Douleurs abdominales consécutives à un mécanisme vasculaire
L’ischémie fait courir un risque de nécrose tissulaire, irréversible au delà de six heures sur des tissus
tels que l’intestin, le rein, le testicule, l’ovaire. La douleur est le plus souvent d’apparition brutale
chez un enfant apyrétique.
2-1-1) La hernie inguinale étranglée
Chez le nourrisson, l’étranglement herniaire conduit à une compression du contenu digestif hernié
mais aussi du pédicule spermatique dans le canal inguinal. Une hernie étranglée peut donc induire
une ischémie intestinale mais aussi testiculaire. L’enfant doit être orienté en milieu chirurgical dans
les plus brefs délais : si l’état local et général le permettent, une réduction par taxis sera tentée après
sédation par diazepam (Valium 0.5 mg/kg intra-rectal) ou midazolam (Hypnovel 0.3 mg/kg intrarectal), avec monitorage de la fréquence cardiaque et de la saturation périphérique en oxygène. La
sédation s’accompagne d’une myorelaxation entraînant un relâchement de l’orifice inguinal
profond, qui peut permettre la réduction de la hernie. En cas de succès, la hernie sera opérée
habituellement 48 heures plus tard, après diminution de l’oedème local. Un bandage herniaire, en
l’absence d’ectopie testiculaire, pourra être confectionné. La transillumination permet le diagnostic
différentiel entre une hernie et une hydrocèle. Toutefois une bourse transilluminable peut « cacher »
une hernie funiculaire (le contenu hernié reste dans le canal inguinal sans se prolonger dans les
bourses). En cas d’échec de la réduction sous sédation, l’enfant est opéré en urgence. Dans tous les
cas, même si la hernie a pu être réduite sous sédation, il existe un risque d’atrophie testiculaire
secondaire dont doivent être prévenus les parents.
2-1-2) Les autres hernies étranglées
Elles sont
intestinale.
l’épiploon.
une entité
rares, mais doivent néanmoins être recherchées, en raison du risque d’ischémie
La hernie ombilicale s’étrangle rarement et dans ce cas, contient habituellement de
La hernie crurale, une éventration, peuvent aussi s’étrangler. La hernie de l’ovaire est
particulière : elle concerne plus particulièrement la petite fille dans les premières
330
semaines de vie, en règle générale la douleur n’est pas au premier plan, le diagnostic doit aboutir à
une prise en charge chirurgicale en semi-urgence.
*Hernie inguinale étranglée = urgence ischémique intestinale mais aussi testiculaire
*Se méfier d’une transillumination positive faussement rassurante dans une hernie
funiculaire
2-1-3) L’invagination intestinale aiguë (IIA)
Il est classique de distinguer deux types d’IIA :
- IIA primitive qui représente 90 à 95% des IIA. C’est l’IIA du nourrisson.
- IIA secondaire dont le point de départ est une cause locale, ou bien qui s’intègre dans
une pathologie plus générale du tube digestif ou qui survient dans un contexte
particulier (IIA post-opératoire).
L’IIA est la première cause d’occlusion chez le nourrisson. Son incidence est difficile à préciser.
Les chiffres classiquement retenus sont de 2 à 4 pour 1000 naissances. L’Europe semble plus
touchée que les Etats Unis. Comme dans bon nombre d’affections digestives de l’enfant, il existe
une nette prédominance masculine (sex-ratio : 2/1).
L’IIA idiopathique du nourrisson survient classiquement entre 2 mois et 2 ans avec un pic de
fréquence entre 6 et 9 mois ( 65% dans la première année de vie ). Au-delà de la deuxième année de
vie ou chez le nourrisson de moins de 2 mois, l’IIA s’intègre plus volontiers dans le cadre des IIA
secondaires.
Il est classiquement retenu que les IIA surviennent, à la fin de l’automne et à la fin du printemps,
rythmées en cela par les infections virales.
L’IIA touche le nourrisson bien portant. Pour autant, aucune étude épidémiologique n’a pu
mettre en évidence de facteurs nutritionnels particuliers.
L’IIIA correspond à la pénétration de l’intestin d’amont dans l’intestin d’aval. Cette
imbrication de tuniques digestives forme le boudin d’invagination qui comporte une tête et un
collet. L’IIA est secondaire à un trouble du péristaltisme dont l’étiologie reste encore mal connue
*L’IIA du nourrisson : les troubles du péristaltisme sont vraisemblablement secondaires à
l’hyperplasie lymphoïde contemporaine de l’adénolymphite mésentérique. En effet la région iléocaecale est riche en plaques de Peyer (densité augmentée chez le garçon) et en ganglions
mésentériques. La densité de ces formations lymphoïdes décroît avec l’âge et au fur et à mesure que
l’on s’éloigne de la valvule de Bauhin en direction du grêle. L’hypertrophie d’une plaque de Peyer,
habituellement située sur le bord anti-mésentérique du tube digestif, sera le point de départ de l’IIA
en créant un obstacle au péristaltisme intestinal. L’origine virale est fortement suspectée sur des
données épidémiologiques (épidémies saisonnières) et sur la concomittance d’infection ORL ou
respiratoire dans les jours précédant l’IIA. Des données immunologiques et anatomo-pathologiques
viennent conforter ces constatations : la présence d’adénovirus dans les selles, l’appendice et les
ganglions mésentériques a été retrouvée associée de façon significative chez les nourrissons
présentant une IIA. Des infections à Herpès virus, à rotavirus, et à Yersinia enterocolytica ont été
également retrouvées. C’est probablement l’augmentation de la motricité intestinale (accélération
des complexes moteurs migrants) due à l’infection qui est à l’origine de l’invagination.
*L’IIA secondaire : elle est secondaire à des lésions pariétales localisées (diverticule de
Meckel, duplication digestive, polype, tumeur bénigne ou maligne, hétérotopie tissulaire) ou bien à
des lésions localisées s’intégrant dans des maladies plus générales du tube digestif (lymphome,
purpura rhumatoïde, syndrome hémolytique et urémique, mucoviscidose). De même une IIA peut
331
survenir chez un enfant aux décours de chimiothérapie
L’invagination post-opératoire constitue une entité particulière qui correspond le plus souvent à une
invagination iléo-iléale. Elle survient dans les suites d’interventions abdominales comprenant de
grandes mobilisations intestinales, des décollements ou des exérèses de masses tumorales
volumineuses.
Plus récemment, les essais de vaccination contre le rotavirus ont été interrompus aux Etats Unis en
raison de la survenue d’IIA dans les cohortes de malades impliqués.
Les différents types d’IIA tirent leur dénomination en premier du segment d’intestin invaginé, puis
du segment d’intestin intermédiaire entraîné et pour finir du segment invaginant. On distingue
donc :
-IIA iléo-colique trans-valvulaire : l’iléon terminal s’invagine dans le colon plus ou moins
loin.
-IIA iléo-coeco-colique : la valvule de Bauhin et l’appendice s’engagent dans le colon et
constituent la tête de l’invagination.
-IIA iléo-iléale ou colo-colique : ce sont des variétes rares de l’invagination du nourrisson.
-Invagination de l’appendice : c’est une forme exceptionnelle.
IIA iléo-colique trans-valvulaire et IIA iléo-coeco-colique représentent plus de 85 % des cas chez
le nourrisson
Le boudin de l’invagination comporte un collet et une tête. La tête est le point le plus avancé de
l’intestin invaginé et est le siège de l’obstacle sur lequel bute le péristaltisme intestinal. Comme
nous l’avons vu dans les formes anatomiques, la tête est généralement située près ou au niveau de la
valvule iléo-coecale. Le collet correspond au point de pénétration du segment invaginé. Au cours de
sa progression dans le sens péristaltique, la tête entraine le mésentère qui sera étranglé au niveau du
collet. La progression du boudin n’est limitée que par la longueur du mésentère et est favorisée par
les défauts d’accolement coliques. La superposition des tuniques intestinales engendre des
phénomènes de strangulation qui génèrent une stase veineuse et un œdème, qui à leur tour, majorent
la compression vasculaire. Par voie de conséquence des lésions muqueuses du segment invaginé
apparaissent et sont responsables de rectorragies. L’ischémie installée conduit à la nécrose
intestinale du segment invaginé : 2.5% de nécrose avant 48 h, 82 % après 72 h. Toutefois, l’IIA peut
être lâche, la striction peu importante. Ceci explique la bonne tolérance de certaines IIA et ce malgré
plusieurs jours d’évolution.
Y penser devant toute douleur abdominale aiguë du nourrisson suffit le plus souvent pour
faire le diagnostic . Le diagnostic clinique de l’IIA repose sur la triade classique des signes
révélateurs que sont : les crises douloureuses paroxystiques, les vomissements et les rectorragies.
- crises douloureuses paroxystiques : la douleur est le plus souvent le maître symptôme.
Elle sera évocatrice lorsqu’elle survient par accès paroxystiques séparés par des intervalles libres.
Elle peut réveiller l’enfant la nuit, le jour elle interrompt brutalement son activité, l’enfant crie,
replie ses jambes, son teint devient pâle. La crise cesse au bout de quelques minutes. Les crises
suivantes se succèdent à une fréquence variable. Il arrive fréquemment que le nourrisson émette une
selle normale au décours de cette première crise. Il s’agit en fait d’une vidange de l’intestin d’aval.
Le transit cessera ensuite ou bien persiste sous forme de selles diarrhéiques très trompeuses.
332
- vomissements : la première crise est souvent accompagnée d’un vomissement alimentaire.
Le refus du biberon est un très bon signe d’orientation car très fréquemment présent. Les
vomissements bilieux sont plus tardifs, ils correspondent souvent à des formes évoluées ou à des IIA
survenant sur le grêle proximal (iléo-iléale haute ou jéjuno-jéjunale).
- rectorragies : contrairement à une idée reçue, elles n’ont pas forcément une valeur
péjorative. Elles témoignent de lésions muqueuses superficielles liées à l’ischémie mésentérique.
Initialement on constatera des stries sanglantes rouges, des glaires sanglantes plus tardivement il
s’agira d’un saignement plus important (rectorragies ou maelena) qui pourra faire redouter des
lésions intestinales avancées.
Dans la plupart des équipes, le diagnostic est fait par échographie, mais le lavement opaque garde
ses indications et si la fiabilité de l’échographie est incertaine ou dans les cas de diagnostic douteux.
En dehors de contre-indication (complication péritonéale, troubles hémodynamiques), on tentera de
première intention une réduction radiologique ( hydrostatique à l’eau, aux hydrosolubles ou
pneumatique à l’air).En cas d’échec ou d’IIA secondaire une exploration chirurgicale sera
nécessaire.
La triade classique douleurs, vomissements, rectorragies n’est retrouvée que dans 25 à 48 %
des cas. L’invagination doit être systématiquement évoquée chez tout enfant de 2 mois à 2 ans
qui présente des douleurs abdominales.
2-1-4) Occlusion sur bride
Le diagnostic d’occlusion sur bride est le premier à évoquer devant un enfant qui présente des
douleurs abdominales et une cicatrice de laparotomie, avant même la constitution d’un tableau plus
complet d’occlusion du grêle. Toute intervention intra-péritonéale, même par un abord limité
(coelioscopie), peut créer des adhérences ou des brides à l’origine d’accidents occlusifs.
Les éléments qui orientent vers un mécanisme de strangulation, avec ischémie intestinale, plutôt que
vers une simple obstruction, sont un début brutal, une douleur très intense (ischémie intestinale
aiguë), un silence ou des signes de lutte à l’auscultation, une défense pariétale, un état de choc, des
signes d’occlusion sur les radiographies d’abdomen sans préparation, en enfin l’absence
d’amélioration sous aspiration gastrique aux examens cliniques et radiologiques répétés à quelques
heures d’intervalle. Il faut se méfier de la fausse amélioration liée à la constitution de la nécrose
intestinale complète, qui s’accompagne d’une diminution des douleurs.
L’intervention réalisée à temps permet d’éviter une mutilation digestive qui peut aller jusqu’à la
perte de tout le grêle.
Les occlusions du grêle sur bride congénitale, par hernie interne, sont à rapprocher de ce cadre.
Douleur abdominale + cicatrice de laparotomie = évoquer en premier lieu une occlusion sur bride
2-1-5) Volvulus du grêle sur malrotation
Cette pathologie est le plus souvent révélée en période néonatale par un syndrome occlusif
(nouveau-né vomissant jaune ou vert) à plat. Elle peut toutefois survenir chez le nourrisson ou
l’enfant, avec douleurs abdominales, vomissements bilieux. Dans la forme aiguë, la plus fréquente,
l’air contenu dans l’intestin volvulé s’est résorbé, et l’abdomen est plat. Dans la forme suraiguë,
l’ischémie intestinale est totale d’emblée, et l’intestin volvulé est distendu.
Le diagnostic est fait par écho-doppler des vaisseaux mésentériques, qui identifie l’anomalie de
position relative de l’artère et de la veine mésentériques supérieures, et peut suivre la spire de
torsion. Le TODG confirme le diagnostic en montrant la malposition de l’angle de Treitz, et la spire
333
de torsion intestinale. L’intervention urgente permet d’éviter, dans les cas où la torsion est serrée, la
perte de tout le grêle par ischémie mésentérique.
Douleur abdominale aigüe + vomissement bilieux = urgence chirurgicale jusqu’à preuve du
contraire
2-1-6) La torsion du testicule
Des douleurs de la fosse iliaque chez le grand enfant pré-pubère ou l’adolescent peuvent révéler une
torsion du pédicule spermatique. Elles peuvent correspondre à une projection de la douleur, ou à une
gêne du jeune homme à évoquer ses organes génitaux. C’est pourquoi la palpation des bourses
doit rester systématique dans l’examen d’une enfant qui se plaint de douleurs abdominales. Une
fois la bourse douloureuse identifiée, il faut s’efforcer d’éviter toute perte de temps (notamment par
des examens complémentaires) et montrer l’enfant au plus vite au chirurgien.
L’association douleur abdominale (en général de la fosse iliaque) et bourse vide homolatérale doit
faire évoquer la torsion d’un testicule ectopique. Toutefois cela reste une situation exceptionnelle.
Douleur scrotale = avis chirurgical urgent
Douleur abdominale + bourse vide homolatérale = évoquer une torsion de testicule ectopique
2-1-7) Urgences gynécologiques
Le diagnostic de torsion d’annexe doit être évoqué chez la grande fille ou l’adolescente qui présente
des douleurs abdomino-pelviennes brutales. La torsion survient habituellement sur une annexe
pathologique : kyste ovarien, voire tumeur ovarienne. La masse peut être palpée au toucher rectal
lorsqu’il est réalisable. L’échographie montre l’image de kyste ovarien échogène (= compliqué), et
le diagnostic est précisé par coelioscopie, qui permet de différencier une simple hémorragie intrakystique de la torsion d’annexe.
La grossesse extra-utérine rompue est classiquement révélée par un tableau de douleurs abdominopelviennes avec collapsus chez une adolescente. L’échographie montre l’hémopéritoine, la vacuité
utérine, et souvent la grossesse ectopique. D’une manière plus générale, les diagnostics
gynécologiques « de femme adulte » doivent être systématiquement évoqués chez l’adolescente,
avec en premier lieu celui de GEU, en raison du risque vital.
Douleurs abdomino-pelviennes chez la grande fille ou l’adolescente =Penser urgences
gynécologiques - Echographie pelvienne urgente
2-2-Douleurs abdominales consécutives à un mécanisme obstructif
On peut les regrouper en trois grands groupes : intestinales, hépatiques ou biliaires et urinaires.
2-2-3) Occlusion intestinale
La constitution d’un troisième secteur entraîne hypovolémie, oligurie, perturbations ioniques, et de
l’équilibre acido-basique. L’urgence est donc à la rééquilibration hydro-électrolytique de l’enfant,
parallèlement à la vidange digestive par sonde gastrique. La possibilité d’une pullulation
microbienne dans l’intestin en stase doit être prise en compte, pouvant conduire jusqu’à la
dérivation en urgence.
Ces occlusions peuvent être organiques (atrésie, sténose, duplication digestive, pathologie tumorale)
ou fonctionnelle (maladie de Hirschsprung) ou s’intégrant dans un contexte médical (iléus méconial
de la mucoviscidose).
334
2-2-4) Colique hépatique
Elle est le plus souvent la conséquence d’une lithiase vésiculaire. Chez l’adolescent les douleurs
abdominales sont classiquement sous costales droites survenant par crises plus ou moins espacées
avec une irradiation postérieure. Chez l’enfant plus jeune les douleurs sont mal localisées souvent
péri-ombilicale. Les nausées et les vomissements peuvent être associés. Il faudra rechercher un
ictère. Le diagnostic reposera essentiellement sur l’échographie abdominale.
2-2-5) Colique urinaire
Contrairement à l’adulte, les symptômes ne sont pas toujours évocateurs. Si l’élimination spontanée
des calculs existe, elle peut passer inaperçue chez le nourrisson. La crise de colique néphrétique
s’observe surtout chez le grand enfant. La douleur sera d’apparition brutale, postérieure, avec
fréquemment une irradiation vers la région inguinale et les organes génitaux externes.Le diagnostic
reposera sur un cliché de l’abdomen sans préparation et surtout sur l’échographie .On peut classer
les lithiases urinaires en trois catégories :
*Lithiases d’organes (25%) : uropathie sous jacente.
*Lithiases d’organisme (25%) : causes métaboliques
*Lithiase idiopathiques (50%)
2-2-6) Rétention urinaire ou biliaire infectée
Les rétentions urinaires ou biliaires infectées sont rares chez l’enfant, mais doivent être évoquées
devant un sepsis sévère et une dilatation des cavités urinaires ou des voies biliaires en amont d’un
obstacle. Le traitement médical est insuffisant pour contrôler le sepsis. La levée de l’obstacle et/ou
un drainage d’amont doivent être réalisés suivant les cas par voie percutante, endoscopique ou
chirurgicale.
2-3-Douleurs abdominales consécutives à un mécanisme infectieux
Dans les sepsis intra-abdominaux, l’urgence immédiate est rarement à la chirurgie. En effet, il s’agit
d’abord de stabiliser l’état de l’enfant, de restaurer une bonne hémodynamique, de relancer la
diurèse. La chirurgie, même si elle reste urgente, intervient en deuxième ligne comme traitement
étiologique du sepsis.
2-3-1 Appendicite
Devant une douleur de la fosse iliaque droite, il convient de rechercher en premier lieu une origine
extra-appendiculaire : urinaire, génitale, hépato-biliaire. Cette étape nécessite une anamnèse et un
examen clinique soigneux, complétés utilement par une échographie abdominale ou abdominopelvienne (grande fille).
Le diagnostic d’appendicite est porté sur un faisceau convergent d’arguments cliniques, biologiques
et radiologiques, avec, dans les cas initialement incertains, une observation de l’enfant en milieu
chirurgical, et des examens physiques répétés au minimum bi-quotidiens. L’évolution en 48
heures permet de distinguer l’appendicite des causes non chirurgicales de douleurs de la fosse
iliaque droite, et d’éviter des interventions inutiles et le recours à des examens plus invasifs. Le
choix de la technique d’appendicectomie (chirurgicale ou coelioscopique) dépend avant tout de
l’expérience de l’opérateur.
335
2-3-2 Péritonites
Le tableau classique, avec douleur abdominale violente, fièvre et ventre de bois, se rencontre chez le
grand enfant. Chez le jeune enfant (avant 4 ans) et le nourrisson, la péritonite est habituellement
révélée par une occlusion fébrile : gros ventre douloureux, fièvre et arrêt du transit. Le diagnostic est
souvent difficile. Il n’existe pas de contracture abdominale à cet âge, la paroi abdominale reste
dépressible. Parfois, l’irritation péritonéale peut être à l’origine d’une « fausse diarrhée » trompeuse,
et conduite à tort au diagnostic de gastro-entérite.
La principale cause de péritonite chez l’enfant est l’appendicite. Le diagnostic est aidé par l’ASP
(stercolithe, grisaille diffuse) et l’échographie (épanchement ou collection intra-abdominale, signes
d’appendicite).
Le diagnostic d’appendicite aiguë chez l’enfant de moins de 4 ans est difficile et souvent
retardé
2-3-3 – Autres urgences infectieuses abdominales
Des pathologies plus rares, telles que diverticule de Meckel, lymphangiome kystique, duplication
digestive, peuvent être révélées par un accident septique. Le tableau est celui d’une occlusion
fébrile, le diagnostic peut être suspecté à l’échographie et sera confirmé à l’intervention.
3) ETIOLOGIES MEDICALES
Il est en pratique utile de distinguer les enfants en fonction de l’âge, en raison d’une fréquence
différente des étiologies respectives des douleurs abdominales.
Dans tous les cas, il faut s’interroger en première intention sur une cause chirurgicale. Lorsque
celle-ci est écartée, la seconde question est l’existence ou non d’un syndrome infectieux, mais un
décalage thermique peut témoigner d’une bactériémie à point de départ digestif.
3-1 Avant 2 ans
Chez le nourrisson, le diagnostic des douleurs abdominales est difficile : l’enfant exprime sa douleur
par une agitation inhabituelle, des pleurs incessants, l’impossibilité de trouver le sommeil, des
mouvements stéréotypés des jambes, ou parfois des accès de pâleur.
Des douleurs abdominales aiguës sont souvent présentes au cours des infections extra-digestives
(rhinopharyngites, otites, bronchites, ou infections urinaires) et digestives (diarrhée aiguë). Leur
traitement est celui de la cause et les anti-thermiques prescrits à cette occasion s’avèrent en général
d’excellents antalgiques.
Les pleurs au cours des premières semaines de vie sont souvent attribués à des manifestations
douloureuses qui peuvent révéler :
- une oesophagite : vomissements avec parfois hématémèse, difficultés et
pleurs au cours des tétées, diminution des quantités ingérées, pleurs et
agitation nocturne, mauvaise prise pondérale, éventuellement anémie
microcytaire
- des coliques du nourrisson : douleurs après les repas, sans retentissement
sur l’appétit et la prise de poids, parfois ballonnement, pleurs surtout en
fin de journée, sommeil nocturne conservé
336
3-2 Après 2 ans
La démarche diagnostique doit prendre en compte l’existence ou non d’une fièvre, les signes
d’accompagnement (vomissements, diarrhée, constipation…), la localisation de la douleur, et ainsi
évoquer une ou plusieurs hypothèses, puis proposer d’éventuels examens complémentaires.
*Douleurs abdominales et fièvre
Les infections extra-digestives sont très souvent responsables de douleurs abdominales aiguës : les
infections ORL bactériennes ou virales, peuvent s’accompagner d’une réaction inflammatoire du
tissu lymphoïde du tube digestif et entraîner une adénolymphite mésentérique.
Les pneumopathies de la base avec une fièvre > 39°C s’accompagnent souvent d’une réaction
péritonéale trompeuse pouvant simuler une appendicite aiguë.
Les infections urinaires hautes (fébriles) ou basses (sans fièvre) peuvent s’exprimer chez l’enfant
par une douleur abdominale ce qui justifie de faire une bandelette urinaire au moindre doute.
Les méningites aiguës peuvent entraîner des douleurs abdominales chez l’enfant.
.
Les infections digestives : ce sont les diarrhées aiguës virales (essentiellement à Rotavirus) ou
bactériennes (Salmonella, Shigella, Campylobacter, Yersinia…). Rarement, les infections
parasitaires massives (ascaris, oxyures, lambliase) peuvent occasionner des douleurs abdominales.
Les colites inflammatoires, la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique, se révèlent
rarement par des douleurs abdominales isolées. D’autres signent orientent le diagnostic : diarrhée
récurrente, diurne et nocturne, volontiers glairo-sanglante, fissure anale, épreintes et ténesme,
anorexie et amaigrissement, empâtement abdominal localisé.
Une hépatite A peut s’accompagner d’une hépatomégalie douloureuse à la palpation. La présence
de selles décolorées et d’un ictère cutané et conjonctival impose de faire un bilan hépatique (TGO,
TGP, GGT, phosphatases alcalines, bilirubine totale, libre, et conjuguée) qui montre une élévation
franche et massive des transaminases, et un bilan d’hémostase (TP et TCA) à la recherche d’une
insuffisance hépatocellulaire (risque d’hépatite fulminante).
*Douleurs abdominales et amaigrissement
Le diabète insulino-dépendant : l’association polyurie, polydipsie, polyphagie et amaigrissement
est fréquente mais il existe souvent une anorexie. Les douleurs abdominales sont fréquentes lors de
la découverte du diabète et peuvent égarer le diagnostic qui sera fait par la mise en évidence d’une
hyperglycémie sanguine et d’une glycosurie avec acétonurie à la bandelette urinaire.
Les tumeurs abdominales peuvent être responsables d’un syndrome douloureux : la palpation
retrouve une masse abdominale ou pelvienne et le diagnostic sera approché par l’échographie
abdomino-pelvienne puis par un examen tomodensitométrique.
Une tumeur cérébrale doit être évoquée surtout si les douleurs s’accompagnent de céphalées et de
vomissements volontiers matinaux.
*Douleurs abdominales et HTA
Un phéochromocytome doit être évoqué devant des flush cutanés avec sueurs. Une masse
abdominale, exceptionnellement palpable, sera recherchée à l’échographie.
337
Une néphropathie doit être évoquée en présence d’oedèmes des membres inférieurs et des
paupières ou de prise de poids récente. La bandelette urinaire recherchera une protéinurie et une
hématurie. Il faut savoir que le syndrome hémolytique et urémique peut débuter par un tableau
digestif douloureux parfois pseudo-chirurgical. Le diagnostic est évoqué devant une anémie
hémolytique sévère avec présence de schizocytes, une thrombopénie, une anurie avec hyponatrémie
et hyperkaliémie.
*Autres douleurs d’origine digestive
Les gastrites et ulcères gastro-duodénaux sont responsables chez le grand enfant et l’adolescent
de douleurs parfois violentes situées au niveau de l’épigastre et de l’hypochondre droit. Plus
rarement, un méléna peut les révéler. Le caractère rythmé par les repas est moins net chez l’enfant.
Un contexte infectieux d’allure virale et/ou la prise d’aspirine ou d’anti-inflammatoires non
stéroïdiens est souvent retrouvée à l’interrogatoire. Le diagnostic repose sur l’endoscopie oesogastro-duodénale qui permet aussi la réalisation de biopsies antrales à la recherche d’Helicobacter
pylori.
L’oesophagite : la douleur est d’irradiation ascendante (pyrosis) et s’accompagne de dysphagie
avec parfois perte de poids. Son diagnostic repose sur l’endoscopie oesophagienne.
Une pancréatite aiguë entraîne des douleurs abdominales intenses, souvent épigastriques et à
irradiation postérieure. Ces douleurs, non ou peu calmées par les antalgiques habituels,
s’accompagnent de vomissements alimentaires, puis gastriques ou bilieux (iléus paralytique). Le
bilan pancréatique (amylasémie et lipasémie) permet de faire le diagnostic. Lorsque la pancréatite
n‘est pas d’origine traumatique, la recherche étiologique de première intention comprend un bilan
hépatique et une échographie abdominale à la recherche de lithiase vésiculaire ou cholédocienne (la
lithiase vésiculaire habituellement indolore peut être à l’origine d’un accident de migration).
Un hydrocholécyste peut se voir au cours d’une hépatite aiguë A ou au cours d’une migration
lithiasique.
Le purpura rhumatoïde peut débuter par des douleurs abdominales isolées non spécifiques.
L’apparition d’un purpura pétéchial déclive et/ou de douleurs articulaires permet de poser le
diagnostic. La constatation à l’échographie d’un ou plusieurs hématomes sur la paroi digestive
(augmentation de l’épaisseur de la muqueuse digestive), ou parfois d’invagination intestinale iléoiléale, permet d’évoquer ce diagnostic au début de la maladie. La constatation de rectorragies
extériorisées ou au toucher rectal impose la réalisation d’une échographie en urgence pour éliminer
une complication telle qu’un invagination intestinale aiguë.
La constipation est définie par un ralentissement du transit, des selles dures, volumineuses ou de
petite taille, des difficultés d’exonération, parfois il s’agit de « fausse diarrhée » sur fécalome. Elle
s’accompagne de douleurs abdominales souvent récurrentes, parfois calmées par l’émission de
selles. C’est une cause extrêmement fréquentes de motif de consultation en urgence pour « douleurs
abdominales aiguës ».
Les colopathies non spécifiques ou « colon irritable » du jeune enfant : le tableau habituel associe
une diarrhée non spécifique, contenant souvent des fragments d’aliments non digérés, parfois une
alternance de diarrhée et de constipation. Ce syndrome s’observe plus souvent chez le garçon que
chez la fille, et il s’agit volontiers d’enfant hyperactif. Le ballonnement abdominal est peu
important, l’état général est bon, et la courbe de croissance staturo-pondérale ne présente pas de
cassure franche. Dans 20 à 30 % des cas, la symptomatologie peut se résumer à des douleurs
abdominales isolées, prenant parfois un caractère aigu.
338
*Autres douleurs abdominales aiguës
La maladie périodique : une ethnie méditerranéenne et des douleurs récurrentes souvent fébriles
sont en faveur. Au cours d’une poussée, on retrouve un syndrome inflammatoire et une protéinurie
ou une hématurie.
Une pathologie orthopédique comme une ostéochondrite primitive de hanche, une épiphysiolyse,
ou une spondylodiscite, peut se manifester par des douleurs projetées en fosse iliaque. Dans ce cas,
la palpation de l’abdomen est normale mais la hanche ou le rachis sont raides et douloureux.
Une crise drépanocytaire peut se manifester par de violentes douleurs abdominales. Le contexte
familial et ethnique permet d’évoquer facilement le diagnostic.
Le syndrome de la jonction pyélo-urétérale est recherché au cours d’une échographie abdominopelvienne vessie pleine.
Une cétose de jeûne est facilement reconnaissable : les vomissements sont itératifs et le ventre est
souple. La bandelette urinaire retrouve des corps cétoniques sans glycosurie. Les vomissements et
les douleurs abdominales s’amendent en quelques heures de réhydratation orale fractionnée ou de
perfusion.
Une crise migraineuse peut parfois se manifester par des douleurs abdominales aiguës. Le
diagnostic est suspecté sur les antécédents familiaux de migraine.
*Les douleurs abdominales fonctionnelles
Ce sont les plus fréquentes des douleurs abdominales de l’enfant. Ce sont des douleurs qui peuvent
prendre l’aspect de douleurs aiguës et inhabituelles, mais qui sont en réalité, lorsque l’on reprend
l’interrogatoire, des douleurs récurrentes, évoluant depuis plusieurs mois. Elles sont soulagées par la
défécation, associées à une modification de la consistance des selles et à un ballonnement
abdominal. Il n’y a aucun retentissement sur l’état général et l’appétit, et les douleurs ne sont jamais
nocturnes. L’examen clinique perçoit parfois un cordon colique sensible. Les crises sont volontiers
déclenchées par des infections virales, ou des contrariétés.
*Les douleurs abdominales psychogènes
Fréquentes entre 6 et 12 ans, elles sont de topographie imprécise ou péri-ombilicale et ne
s’accompagnent d’aucun signe d’organicité. Elles sont souvent, par contre, décrites au sein d’un
riche cortège de signes fonctionnels : vertiges, lipothymie, palpitations, pâleur, céphalées…Elles
traduisent souvent un conflit émotionnel scolaire ou familial. La prise en charge psychologique est
essentielle pour ne pas majorer l’angoisse de l’enfant et de la famille par des examens
complémentaires inutiles.
339
SYNTHESE : douleurs abdominales chez l’enfant
Signes évocateurs d’organicité
♦
♦
♦
♦
♦
♦
♦
♦
♦
♦
cassure pondérale ou staturo-pondérale
douleur loin de l’ombilic, en FID
caractère nocturne des douleurs
vomissements bilieux ou matinaux
rectorragies et méléna
ictère
masse abdominale
défense abdominale
état de choc
fièvre
340
DOULEURS ABDOMINO-PELVIENNES AIGUES DE L’ENFANT : ALGORITHME
INTERROGATOIRE
Douleur aiguë ?
Signes d’organicité ?
EXAMEN PHYSIQUE
SOIGNEUX ET DETAILLE
OUI
CAUSES CHIRURGICALES
VASCULAIRES
OBSTRUCTIVES
Hernie étranglée
Occlusion
IIA
Lithiase biliaire
Occlusion sur bride
Lithiase urinaire
Volvulus (malrotation)
Torsion testicule
Torsion annexes
NON
TROUBLES DE LA MOTRICITE
INFECTIEUSES
Appendicite
Péritonites
Coliques du nourrisson
Colon irritable
Constipation
ORIGINE PSYCHOGENE
CAUSES MEDICALES
FEBRILES
AMAIGRISSEMENT
Infections ORL
Tumeurs
Pneumopathies
DID
Infections urinaires
Colites inflammatoires
Hépatite A
DOULEURS EPIGASTRIQUE
Oesophagite
Gastrites
Ulcères gastro-duodénaux
Pancréatite aiguë
AUTRES
Purpura rhumatoïde
Maladie périodique
Drépanocytose
Migraine
Cétose de jeûne
Cause orthopédique
Jonction pyélo-urétérale
341
DOULEURS ABDOMINALES AIGUES DE L’ADULTE
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE
Louis Buscail
Les impératifs :
- savoir rapidement diagnostiquer une urgence chirurgicale ou une affection médicale mettant
en jeu le pronostic vital.
- Si l’état du patient le permet : réaliser un examen clinique le plus complet possible.
- hiérarchiser les examens para-cliniques
- savoir prendre un décision thérapeutique et décider de l’orientation du patient (laparotomie,
coelioscopie, transfert milieu chirurgical, médical ou réanimation).
- Savoir poser un diagnostic dont l’avis et le éventuellement le traitement chirurgical devra
être urgent : en d’autres termes, ne pas retarder un traitement spécifique éventuel !
1) CLINIQUE
En L’absence de choc, de troubles de la conscience, ou de détresse respiratoire
INTERROGATOIRE
Caractères de la douleur : « type, début, intensité, localisation(s), migration,
irradiation(s), durée, continue ou avec rémission, facteurs d’exacerbation et de soulagement »
Signes associés : lipothymie, sueurs, nausées, vomissements, hémorragie digestive,
arrêt de matière et/ou des gaz, troubles urinaires, troubles gynécologiques.
Antécédents : contexte (tabac, alcool, vasculaire, pneumologique), médicaments
(AINS), chirurgie abdominale (biliaire), épisodes douloureux, troubles du transit, engouement
herniaire,rectorragies, ménorragies, date des dernières règles, problèmes urinaires, diabète, cancer,
chimiothérapie, radiothérapie.
L’AGE ET LE SEXE sont importants à considérer
SIGNES GENERAUX
Fièvre, pouls, TA,
INSPECTION
Attitude (agitation, chien de fusil), pâleur, météorisme, cyanose, dyspnée, psoïtis,
prostration.
PALPATION
Douleur provoquée, douleur à la décompression, défense pariétale, contracture, signe
de Murphy, perception d’une masse, orifices herniaires, recherche d’un anévrysme, pouls artériels
fémoraux.
PERCUSSION
Pneumopéritoine ?
AUSCULTATION
Bruits hydro aériques ? souffle vasculaire ? auscultation cardiaque (arythmie)
TOUCHERS PELVIENS
TR : Douleur au niveau du cul de sac de Douglas, à droite, à gauche ? sang ?
Méléna ?
TV : Douleur annexielle au niveau des culs de sac vaginaux.
2) LA BIOLOGIE :
342
- FNS – VS – plaquettes
- CRP
- Lipasémie – amylasémie
- Profil enzymatique hépatique
- Troponine (si doute sur infarctus)
- Bilan électrolytique sanguin et gazométrie (si état de choc, si suspicion d’infarctus
mésentérique ou d’embolie pulmonaire)
- Labstix, ECBU
- Béta HCG si suspicion de GEU
- Glycémie, recherche de corps cétoniques dans les urines si suspicion d’acido-cétose
diabétique
- Gazométrie (acidose en cas d’infarctus du mésentère ou de pancréatite aiguë, recherche de
signes d’embolie pulmonaire)
3) L’ELECTROCARDIOGRAMME :
Infarctus postéro-diaphragmatique avec douleurs
Embolie pulmonaire avec signes abdominaux
4) L’IMAGERIE MEDICALE
ABDOMEN SANS PREPARATION
Occlusion, volvulus, pneumopéritoine
RADIO PULMONAIRE
Pneumopathie avec douleurs de l’hypochondre droit, pneumopéritoine
ECHOGRAPHIE
Lithiase vésiculaire, cholécystite aiguë, dilatation des voies urinaires, calcul urinaire, masse
annexielle, salpingite, GEU, parfois abcès appendiculaire, anévrysme de l’aorte, masse
abdominale.
TOMODENSITOMETRIE ABDOMINALE
Infarctus entéro-mésentérique, occlusion par strangulation du grêle, sigmoïdite, abcès intraabdominal, occlusion colique, pancréatite aiguë (si coma ou vu tard).
OPACIFICATION DIGESTIVE (produits hydrosolubles)
Si occlusion colique
Echodoppler abdominal (si suspicion d’infarctus entéro-mésentérique)
COELIOSCOPIE EXPLORATRICE
Permet prélèvement de liquide, aborde les principaux organes intra-abdominaux et le petit
bassin.
5) LES ETIOLOGIES : cf tableau 1
343
TABLEAU 1 : prévalence des causes de douleurs abdominales en fonction du sexe
( d’après Flamant et al : in Traité de Gastro-entérologie, J-C Rambaud éditeur, Flammarion, 2000)
Classement par fréquence (%)
DIAGNOSTIC
SEXE MASCULIN
SEXE FEMININ
Appendicite aiguë
30,5
23
Occlusion
8
12,8
Colique néphrétique
4,6
8,8
Perforation ulcéreuse
5,8
1,6
Pancréatite aiguë
5,9
2
Sigmoïdite
2,1
2,2
Salpingite
-
4,5
Kyste de l’ovaire
-
3,3
GEU
-
2,6
Infection urinaire
0,4
3
Ulcère-gastrite
4,1
0,9
Péritonite
2,1
2,1
Hernie étranglée
2,2
3,3
Cancer digestif
1
1,1
Anévrysme aortique rompu
0,6
0,1
Foyer suppuré intra-abdom.
0,5
0,3
Pneumopathie
0,4
0,2
Autres*
23,6
26,4
(* : troubles fonctionnels gastro-intestinaux, colique hépatique, infarctus du myocarde,
diabète, maladie périodique, insuffisance surrénale aiguë, porphyrie, embolie pulmonaire…)
344
CONDUITE A TENIR DEVANT UNE MASSE ABDOMINALE
Philippe Otal
1) - DEFINITION
Masse liquidienne, solide ou mixte développée aux dépens d’un organe intra ou rétropéritonéal, à
l’exclusion des défects pariétaux (hernie, éventration) et des distensions abdominales
(épanchements intrapéritonéaux, météorisme, …)
2) – EVALUATION CLINIQUE
- signes fonctionnels :
o douleur ? gêne ? altération de l’état général ?
o signes d’appel orientant vers un point de départ digestif, urinaire,
gynécologique, … ?
- signes physiques :
o inspection (à jour frisant)
o palpation + percussion + auscultation
o toucher rectal, vaginal, combinés à la palpation abdominale
Î caractéristiques de la masse
siège → viscère diffusément augmenté de volume ?
→ masse développée aux dépens d’un viscère ?
→ masse à point de départ imprécis ? (intra/ rétropéritonéal)
volume - régularité – consistance – sensibilité - mobilité
3)– EVALUATION PARACLINIQUE
Echo-Doppler de première intention
siège : pas toujours facile si masse volumineuse
dimensions précises
nature (liquidienne, tissulaire, vascularisation)
bilan d’extension
local (extension aux structures voisines)
régional (adénomégalies, métastases hépatiques, ascite)
Souvent complétée par TDM
Nécessite impérativement une injection intraveineuse de produit de contraste iodé (songer
aux éventuelles contre-indications, à une préparation anti-allergique si nécessaire)
Caractérisation tissulaire : densités, comportement vasculaire
Caractérisation topographique : utilité des reconstructions multiplanaires (de qualité
excellente avec le scanner multicoupe)
Place actuelle de l’IRM
Contre-indications à la TDM (iode, grossesse)
Meilleure résolution en contraste (envahissement des structures adjacentes)
Multiplanarité : n’est plus un avantage sur le scanner depuis le multicoupe
5) – ORIENTATION DIAGNOSTIQUE
5-1 – MASSES INTRAPERITONEALES
5-1-1 – FOIE
Définition de l’hépatomégalie : hauteur > 12 cm sur la ligne médioclaviculaire
345
Examen clinique
séjour récent en zone tropicale ?
facteurs de risque d’hépatopathie alcoolique (en g/j)
de contamination par virus hépatotrope
bord inférieur du foie (dur, tranchant, mousse ?)
face antérieure (régulière, irrégulière ?)
caractère douloureux de la palpation ?
reflux hépato-jugulaire
ictère
signes d’insuffisance hépato-cellulaire
signes d’hypertension portale
Utilité de l’imagerie en coupe
dysmorphie hépatique (contours bosselés, hypertrophie foie gauche
hypertension portale : ascite, splénomégalie, collatéralité porto-systémique
hyperéchogénicité homogène de la stéatose (non spécifique)
masse(s) solide(s) ou liquide(s)
Orientation diagnostique
hépatomégalie mousse dans un contexte dysmétabolique, foie hyperéchogène :
stéatose
hépatomégalie fibreuses + insuffisance hépato-cellulaire + hypertension portale :
cirrhose
hépatomégalie + ictère +/- contexte dysimmunitaire :
hépatopathie choléstastique
hépatomégalie + anomalies bilan métabolique du fer ou du cuivre +/- ATCD familiaux :
maladies de surcharge
hépatomégalie + sepsis + suppuration intrapéritonéale + nodules liquidiens :
abcés hépatiques (amibiens ou à pyogènes)
hépatomégalie + cytolyse + facteurs de risque :
hépatopathie virale
hépatomégalie douloureuse + reflux hépatojugulaire + insuffisance cardiaques :
foie cardiaque
hépatomégalie multinodulaire (foie ‘‘marronné’’) + contexte carcinologique :
foie métastatique
hépatomégalie nodulaire sur cirrhose + élévation α FP :
carcinome hépato-cellulaire
hépatomégalie nodulaire chez le jeune asymptomatique, sur foie sain :
tumeur bénigne (hyperplasie nodulaire focale, adénome)
5-1-2 – VESICULE BILIAIRE
Normalement pas palpable
- vésicule tendue par obstruction de la voie biliaire d’aval (loi de Courvoisier-Terrier)
- cholécystite lithiasique : contexte infectieux + signes rétentionnels
- tumeur maligne : rares, blindage local
5-1-3 – RATE
Masse de l’hypochondre gauche mobile à l’inspiration, bord antérieur crénelé
Etiologie : cf hématologie
346
5-1-4 – PANCREAS
Organe profond, barré par le colon transverse
Les masses primitives sont donc rarement palpées et ont d’autres mode de découverte.
Les masses d’origine pancréatique qui sont accessibles à la palpation sont les pseudo-kystes,
conséquences d’une pancréatite aiguë ou chronique, développés parfois à distance de la région
pancrétique.
5-1-5 – TUBE DIGESTIF
Estomac – duodénum : les seules tumeurs suffisamment volumineuses pour être accessibles à la
palpation abdominale sont de nature conjonctive (au premier rang desquelles les léïomyomes et
léïomyosarcomes).
Intestin grêle : sont palpables les pseudo-masses des maladies infammatoires, en particulier les
iléites terminale de la maladie de Crohn (de façon schémpatique, fosse iliaque droite sensible de
l’adulte jeune en dehors d’un contexte d’appendicite aiguë).
Côlon : cancer colique, le diagnostic différentiel à discuter étant la sigmoïdite diverticulaire (fosse
iliaque gauche sensible du sujet âgé dans un contexte septique).
5-1-6 – MESENTERE - PERITOINE
Le plus fréquent = carcinose péritonéale
palpation de ‘‘gâteaux épiploïques’’ flottant dans l’ascite - contexte d’AEG
rechercher, en l’absence de symptomatologie digestive, un point de départ ovarien.
Plus rares : tumeurs mésentériques (solides ou liquides)
plus difficiles à topographier par l’examen clinique
6 – MASSES DEVELOPPEES AUX DEPART DE L’APPAREIL GENITAL FEMININ
-
Diagnostic différentiel : globe vésical
Origine utérine : fibrome utérin le plus souvent, le toucher vaginal combiné au palper
abdominal permet de transmettre les mouvements abdominaux au col utérin
Origine ovarienne : les masses ovariennes, lorsqu’elles sont volumineuses, peuvent
s’étendre du pelvis vers la cavité abdominale
o Le kyste ovarien est rénitent, mobile, sa mobilisation manuelle n’est pas transmise
au col utérin.
o Une tumeur maligne est suspectée si elle est douloureuse, s’il existe une ascite, une
altération de l’état général et surtout si l’imagerie (essentiellement échographie) met
en évidence son caractère partiellement ou totalement solide.
7– MASSES RETROPERITONEALES
7-1 – MASSES RENALES
Le rein est palpable soit lorsqu’il est ptosé soit lorsqu’il est augmenté de volume. Le contact
lombaire est défini par la transmission à la main postérieure (lombaire) d’une masse rénale
repoussée par la main antérieure (abdominale).
Le kyste du rein est une tumeur fréquente, parfois volumineuse, généralement découverte de façon
fortuite lors d’une échographie ou d’un scanner réalisé pour un motif indépendant.
La polykystose rénale survient dans un contexte familial, les deux reins sont très augmentés de
volume.
347
Les tumeurs solides du rein sont rarement suffisamment volumineuses pour être accessibles à la
palpation, elles sont plus souvent révélées par une hématurie.
Une hydronéphrose peut rendre le rein palpable, les touchers sont indispensables pour rechercher
le niveau de l’obstacle (prostate, appareil génital féminin).
7-2 – MASSES RETROPERITONEALES NON RENALES
Les tumeurs surrénaliennes suffisamment volumineuses pour être palpables sont les
corticosurrénalomes malins, généralement responsables d’une sécrétion endocrinienne (virilisme).
Les masses vasculaires palpables sont largement dominées par les anévrismes de l’aorte
abdominale (masse battante expansive, soufflante de la région ombilicale). La plupart sont sousrénaux (signe de De Bakey : le tranchant de la main peut être interposé entre la partie supérieure de
l’anévrisme et l’auvent costal). Le diagnostic est aisément confirmé par l’écho-Doppler (diagnostic
différentiel : aorte hyperkinétique de l’adulte jeune).
348
LES TRAUMATISMES DE L’ABDOMEN
Bertrand Suc
Il faut distinguer les traumatismes fermés (contusion) et les traumatismes ouverts (plaies). Cette
distinction est logique car le mécanisme lésionnel, la conduite à tenir diagnostique et la stratégie
thérapeutique peuvent être différentes.
1- EPIDEMIOLOGIE
La contusion de l’abdomen est plus fréquente que la plaie (2/3 des cas) et souvent secondaire à un
accident de la circulation. Les plaies représentent 20 % des blessés en pratique civile.
Les traumatismes de l’abdomen atteignent 6 fois sur 10 des sujets jeunes avec un pic de fréquence
entre 11 et 25 ans. Plus des 2/3 sont des hommes en raison de la fréquence des causes accidentelles
(accident de la voie publique, accident de travail).
Les organes atteints dans les traumatismes de l’abdomen sont présentés dans le tableau n°1.
Dans les plaies la reconstitution du trajet de la plaie est très importante (plaie par balle, orifice
d’entrée, orifice de sortie).
2- ETIOLOGIE
2-1- Les contusions
Le choc direct par percussion donne des lésions d’éclatement. Le choc indirect par décélération
brutale donne des lésions d’étirement, d’arrachement des ligaments des mésos et des pédicules
vasculaires des viscères intra-abdominaux.
2-2- Les plaies
En pratique civile les plaies sont secondaires aux armes blanches (couteau) et armes à feu de petit
calibre et avec projectile de faible vitesse. Les armes à feu provoquent des lésions liées à leur trajet
mais aussi liées aux ondes expansives accompagnant le projectile. Les explosions provoquent des
lésions par les éclats vulnérants mais aussi parfois par l’effet de souffle appelé « blast ».
3- ANATOMOPATHOLOGIE
3-1- Les lésions pariétales
Les contusions entraînent des ecchymoses. Les plaies par arme blanche posent le problème de leur
caractère pénétrant ou non dans la cavité péritonéale. Les plaies par projectile sont le plus souvent
représentées par un orifice d’entrée et un orifice de sortie.
3-2- Les lésions viscérales
3-2-1- Les organes pleins
Les contusions peuvent entraîner des hématomes sous-capsulaires, des fractures, et des lésions plus
profondes intéressant les structures vasculaires et canalaires.
349
3-2-2- Les organes creux
Ils sont le siège de plaies linéaires par arme blanche, de perforations multiples en cas de projectiles à
grande vitesse mais aussi de perforations liées au mécanisme de décélération.
3-3- Les lésions associées
Certaines associations lésionnelles sont fréquentes comme les lésions de la rate et du rein gauche,
les lésions du lobe gauche du foie, de la rate et du diaphragme.
4- DIAGNOSTIC
4-1- L’examen clinique
L’examen clinique en est le premier temps. On doit apprécier l’état des fonctions vitales et
rechercher des signes de choc hypovolémique. L’examen de la paroi thoraco-abdominale recherche
des points d’impact et en cas de plaie recherchera l’orifice d’entrée et un éventuel orifice de sortie.
La palpation abdominale recherche une contracture localisée ou généralisée qui témoigne le plus
souvent de la perforation d’un viscère creux.
La défense est d’interprétation plus difficile en particulier s’il existe une contusion pariétale. Une
défense localisée à l’hypochondre droit avec une irradiation à l’épaule droite peut faire évoquer une
lésion hépatique. Localisée à l’hypochondre gauche avec une irradiation dans l’épaule gauche elle
doit faire évoquer une lésion splénique. Un empâtement douloureux de la fosse lombaire associée à
une hématurie doit faire évoquer une atteinte rénale. Le toucher rectal peut permettre de retrouver
un cul-de-sac de Douglas douloureux évoquant une péritonite ou un comblement par un
épanchement sanguin.
4-2- Exploration biologique
La détermination du groupe sanguin et du Rhésus, la réalisation d’un hématocrite par microméthodes sont indispensables dès l’admission. On réalisera par la suite une numération globulaire et
une bandelette urinaire dans tous les cas. Les autres explorations seront orientées par la clinique.
4-3- Exploration radiologique
Il faut toujours faire pratiquer une radiographie thoracique de face, un cliché de l’abdomen sans
préparation de face, couché ou debout selon l’état du blessé et un cliché centré sur les coupoles.
Les signes que l’on peut mettre en évidence sont :
- un ou plusieurs traits de fracture sur les dernières côtes.
- un pneumopéritoine signant la perforation d’un organe creux.
- une grisaille diffuse de l’abdomen sans préparation témoignant d’un épanchement
liquidien
- une éventuelle présence d’un projectile intra-abdominal
4-4- L’échographie
Est actuellement toujours réalisée au lit du malade dans la salle d’Urgences. Celle-ci permettra
d’apprécier l’existence d’un épanchement liquidien intra-péritonéal, de mettre en évidence la
contusion d’un organe plein (foie, rate, rein), de rechercher l’existence d’un épanchement pleural ou
350
péri-cardique associé. L’espace rétro-péritonéal est très mal exploré par l’échographie en particulier
chez les patients présentant un iléus réflexe.
4-5- Le scanner
Dans la majorité des cas le scanner hélicoïdal sans puis avec injection de produit de contraste est
nécessaire pour une évaluation précise des lésions.
4-6- L’angiographie
L’angiographie n’est pratiquement plus réalisée en dehors de la suspicion d’une importante
hémorragie rétropéritonéale ou hépatique avec l’arrière pensée de la réalisation dans le même temps
d’une embolisation.
5- EXPLORATIONS INVASIVES
5-1- La Ponction-lavage
La ponction-lavage du péritoine est prônée par certaines équipes. Elle a pour objectif de confirmer
l’existence d’un épanchement sanguin ou d’un épanchement de liquide digestif dans la cavité
péritonéale.
5-2- La laparoscopie
La laparoscopie exploratrice est aussi utilisée par un certain nombre d’équipes. Ses limites sont
l’impossibilité de la réaliser chez un patient en collapsus hypovolémique et la faible performance
pour la mise en évidence de certaines perforations digestives.
6- INDICATIONS CHIRURGICALES
6-1- Il existe des indications opératoires formelles :
1/ le tableau de péritonite par perforation d’un organe creux.
2/ Le choc hypovolémique résistant au remplissage vasculaire si la cause du saignement
paraît accessible à un traitement chirurgical simple et efficace.
3/ Les plaies où la pénétration intra-péritonéale est évidente.
6-2- Il existe des indications discutables :
1/ les traumatismes du foie en particulier les contusions chez des patients ayant bien
réagi à la réanimation., pour lesquels le geste chirurgical nécessaire serait plus grave que
l’abstention.
2/ Les contusions spléniques chez les patients ayant bien réagi à la réanimation pour
lesquels on sait que la tentative de traitement conservateur est parfaitement licite eu égard aux
risques infectieux post-splénectomie.
3/ Les contusions rénales et les hématomes rétro et sous-péritonéaux pour lesquels, si
l’importance du saignement le rend nécessaire, une embolisation radiologique sera plus efficace que
le geste chirurgical.
6-3- Si une surveillance est décidée, elle doit se faire en milieu chirurgical. En effet,
l’éventualité d’une aggravation secondaire (rupture secondaire de la rate, perforation passée
inaperçue) n’est pas rare et doit conduire à une laparotomie.
351
Tableau n°1
Organes atteints lors des traumatismes de l’abdomen
(sur 100 patients lésions associées possible)
Contusions de l’Abdomen
Plaies de l’Abdomen
Grêle
48
Côlon
28
Foie
Rate
Estomac
16
12
11
Rein
Vessie
Rectum
8
7
7
Duodénopancréas
Gros vaisseaux
5
3
Rate
25
Foie
Rétropéritoine
Rein
Grêle
Vessie
Mésentère
Côlon
Duodénopancréas
Gros vaisseaux
Diaphragme
Estomac
15
13
12
9
5
5
4
4
2
2
1
TRAUMATISME FERME DE L’ABDOMEN
EVALUATION
CLINIQUE
INSTABILITE HEMODYNAMIQUE
OU PERITONITE
STABILITE
ECHOGRPAHIE – ASP – RX
THORAX
ARTERIO
TDM
PLP
Laparoscopie
Embolisatio
ABSTENTION SOUS
SURVEILLANCE
LAPAROTOMIE
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