Contributions à l`analyse des équations aux dérivées - IMJ-PRG

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Mémoire présenté à l’Université Paris-Diderot
pour l’obtention de l’habilitation à diriger des recherches
Spécialité : Mathématiques
Contributions à l’analyse des équations aux dérivées partielles :
oscillations, instabilités, bifurcations, propagation du chaos
par
Benjamin Texier
soutenu publiquement le 5 décembre 2012, après avis de
Isabelle
Gallagher
Jeffrey
Rauch
Professeur à University of Michigan
Saut
Professeur à l’Université Paris-Sud
Jean-Claude
Professeur à l’Université Paris-Diderot
devant le jury composé de
Jean-Yves
Chemin
Thierry
Colin
Laurent
Desvillettes
Professeur à l’Université Pierre-et-Marie-Curie
Professeur à l’Université de Bordeaux
Professeur à l’Ecole Normale Supérieure de Cachan
Isabelle
Gallagher
Professeur à l’Université Paris-Diderot
Thierry
Gallay
Professeur à l’Université Joseph-Fourier
Patrick
Jean-Claude
Gérard
Saut
Professeur à l’Université Paris-Sud
Professeur à l’Université Paris-Sud
TABLE DES MATIÈRES
I Autour du problème de Cauchy hyperbolique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5
1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7
2. De Euler-Maxwell à Zakharov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
3. Un théorème de Nash-Moser à paramètre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
4. Approximations de flots d’opérateurs pseudo-différentiels . . . . . . . . . . . . . . . . 31
5. Un critère de stabilité pour des oscillations haute-fréquence . . . . . . . . . . . . . . 35
6. Perte d’hyperbolicité pour des systèmes quasi-linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
7. Travaux en cours et perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
Appendice : calcul para-différentiel semi-classique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
II Ondes galopantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
8. Bifurcation de Hopf d’ondes de choc pour Navier-Stokes compressible . . 61
III De Newton à Boltzmann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
9. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
10. Hiérarchies BBGKY et Boltzmann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
11. Données admissibles et limite vers Boltzmann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
12. Réduction de Lanford et recollisions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
I AUTOUR DU PROBLÈME DE CAUCHY
HYPERBOLIQUE
CHAPITRE 1
INTRODUCTION
Dans cette première partie, pour des problèmes de Cauchy de la forme
(1.1)
∂t + A(ε, t, x, v, ∂x ) v = 0,
v(ε, 0, x) ∈ H s (Rd ),
avec
t ≥ 0, x ∈ Rd , ε > 0, v(ε, t, x) ∈ RN , s > s0 + d/2, s0 ∈ N,
on étudie la question de l’existence et de la régularité d’un flot local.
On traite donc exclusivement de phénomènes locaux en temps, pour des solutions régulières au sens Sobolev, en géométrie plate. Ce sont les données v(ε, 0, x) et les opérateurs A
qui sont singuliers, en un sens qu’on va décrire brièvement dans cette introduction.
Notons pour commencer qu’à ε fixé, dans le cas d’opérateurs différentiels d’ordre un :
X
A(t, x, v, ∂x ) = G(t, x, v) +
Aj (t, x, v)∂xj ,
1≤j≤d
avec G non différentiel, qui est le cadre commun à presque tous les chapitres de cette partie,
on connait une condition suffisante et une condition nécessaire pour une théorie locale.
La condition suffisante est la condition de symétrie :
(1.2)
Aj (t, x, ~u) = Aj (t, x, ~u)∗ ,
pour tous (t, x, ~u) ∈ R+ × Rd × RN ,
qu’on peut généraliser en une condition de symétrisabilité, et même de symétrisabilité microlocale (voir par exemple [71]). Sous l’hypothèse (1.2), il existe un flot local régulier. C’est
un théorème qu’on peut attribuer à Friedrichs [29], Kato [48], et Lax [58]. On a même un
résultat d’existence localement uniforme, au sens où pour tout R > 0, il existe un temps
d’existence T (R) > 0 commun aux solutions issues de données dans la boule BH s (0, R) =
{u0 ∈ H s , |u0 |H s ≤ R}, et le flot est continu BH s (0, R) → C 0 ([0, T (R)], H s ). Le fait qu’on
puisse associer aux boules de l’espace de départ un temps d’existence est une propriété assez
forte, puisqu’il existe des flots de champs de vecteurs qui ne la satisfont pas (1) .
1. Par exemple, dans X = C0 (N∗ ) le Banach des suites réelles (uk )k≥1 qui tendent vers 0, normé par
“ `
1 ´2 ”
|u|X = supk≥1 |uk |, on peut vérifier que le champ de vecteurs f : (uk )k≥1 ∈ X → k uk −
, où
2 + k≥1
x+ = max(x, 0), envoie X dans lui-même, et est localement Lipschitz. L’équation u0 = f (u) a donc un flot
local. La suite (ak0 )k0 ≥1 ⊂ X, définie par akk0 = δk0 ,k (symbole de Kronecker), a tous ses éléments dans la
boule unité, mais le temps maximal d’existence de la solution de u0 = f (u) issue de ak0 est 2/k0 . Il n’existe
donc pas de temps d’existence commun aux trajectoires issues de la boule unité.
8
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
La condition nécessaire est la condition d’hyperbolicité, qui énonce que le spectre du
symbole principal est réel :
X
(1.3)
sp
ξj Aj (t, x, ~u ⊂ R,
pour tous (t, x, ~u, ξ) ∈ R+ × Rd × RN × Rd .
j
A la suite de Lax [59] et Mizohata [74], de nombreux résultats (parmi lesquels [44, 19,
103, 102]) énoncent le fait que l’hyperbolicité est une condition nécessaire au caractère bien
posé du problème de Cauchy (1.1), éventuellement linéaire, avec des définitions variables de
“bien posé” (prise en compte de caractéristiques multiples, topologie C k ou Gevrey, etc.)
Le résultat de 1957 de Lax, par exemple, traite de stabilité dans les espaces C k , pour des
équations linéaires, par rapport à des termes sources et des perturbations des données. C’est
seulement en 2005 que Métivier [70] a prouvé que si la condition (1.3) n’est pas vérifiée, le
flot d’équations quasi-linéaires n’est pas régulier. Il s’agit d’une instabilité de type Hadamard
[36], c’est-à-dire un défaut de continuité Hölder dans les espaces de Sobolev, défaut qui a
lieu même si on admet des pertes arbitraires de dérivées.
Les problèmes que je vais décrire dans cette partie se situent en quelque sorte entre la
condition nécessaire (hyperbolicité) et la condition suffisante (symétrie) :
• j’étudie de grandes perturbations de systèmes symétriques dans les Chapitres 2 et 5,
avec des données rapidement oscillantes, ce qu’on appelle parfois de l’optique géométrique
sur-critique ; dans ce cadre l’existence et l’unicité d’une solution sont acquises à ε fixé et
l’enjeu est d’étendre le temps d’existence à [0, T (ε)] avec lim inf ε→0 T (ε) > 0.
• Le Chapitre 3 aborde le problème des itérations de Nash-Moser quand les estimations
douces et linéarisées sont singulières en un petit paramètre.
• Au Chapitre 4 je donne une construction de parametrix pour des équations paradifférentielles d’ordre zéro ; ces parametrix sont l’outil de base des preuves d’instabilité des
Chapitres 5 et 6.
• J’étudie le phénomène de perte d’hyperbolicité dans le Chapitre 6, c’est-à-dire des opérateurs qui sont hyperboliques jusqu’à un certain temps t0 , puis non-hyperboliques au-delà
de t0 .
• Enfin le Chapitre 7 est un chapitre de perspectives, dans lequel j’évoque en particulier l’utilisation de la formule de représentation du Chapitre 4 pour étendre des résultats
d’instabilité en hydrodynamique.
Dans tous les cas, la variable v dans (1.1) est une variable de perturbation. C’est-à-dire
que (1.1) dérive d’un système d’équations physiques, écrit dans l’inconnue u, et que v est
définie à partir de u par u = φ + εm v, pour une solution de référence φ donnée, et un certain
m ≥ 0. La solution de référence est une solution WKB (Chapitres 2 et 5) ou l’approximation
linéaire dans le cas de petites données (Chapitre 3), ou une solution de Cauchy-Kowalevskaya
(Chapitre 6).
Chapitre 2 et 5 : optique géométrique
Il est convenu d’appeler optique géométrique l’étude de solutions rapidement oscillantes
de systèmes hyperboliques, par analogie avec les équations de Maxwell dans le vide :
∂t B + ∇E = 0,
∇ · B = 0,
∂t E − ∇ × B = 0,
∇ · E = 0,
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
9
pour lesquelles l’ansatz amplitude-phase (B, E)(t, x) = (B̃(t, x), Ẽ(t, x))eik·x−ωt implique
i(−ω B̃ + k × Ẽ) + ∂t B̃ + ∇ × E = 0,
−i(ω Ẽ + k × B̃) + ∂t Ẽ − ∇ × B = 0,
et (ik + ∇) · (B̃, Ẽ) = 0. Dans l’approximation d’enveloppes lentement variables :
|∂t,x B̃| |(ω, k)||B̃|, |∂t,x Ẽ| |(ω, k)||Ẽ|,
on obtient au premier ordre les relations de dispersion et polarisation
k
k · Ẽ = 0,
k · B̃ = 0,
(1.4)
ω 2 = |k|2 ,
B̃ = × Ẽ,
ω
et à l’ordre suivant l’équation d’évolution pour l’amplitude Ẽ :
k·∇
k
∂t Ẽ − ∇ ×
× Ẽ = ∂t Ẽ −
Ẽ = 0,
ω
ω
qui est donc constante le long des courbes caractéristiques (rayons lumineux) de l’opérateur
de transport ∂t − ω −1 k · ∇.
Dans le cadre de l’optique géométrique, la question de l’existence d’un flot local pour
(1.1) est une reformulation de la question de la stabilité de solutions approchées dites solutions WKB. Les problèmes physiques sous-jacents décrivent la propagation d’impulsions
lumineuses à travers des matériaux ou des fluides. Les équations physiques qui décrivent ces
phénomènes sont de la forme
X
1
Aj (ε, u)∂xj u = F (ε, u).
(1.5)
∂t u + A0 u +
ε
1≤j≤d
P
Pour tout ε > 0, l’opérateur A0 /ε + j Aj (ε, u)∂xj satisfait la condition de symétrie
(1.2), c’est-à-dire que pour tout ε > P
0, pour tout vecteur fixé ~u ∈ RN et toute fréquence
d
ξ = (ξ1 , . . . , ξd ) ∈ R , la matrice A0 + j iξj Aj (ε, ~u) est anti-hermitienne. Le terme source F
est non différentiel ; il décrit des effets non-linéaires, c’est-à-dire qu’on suppose ∂u F (ε, 0) = 0.
On suppose que les flux sont lisses : (ε, u) → Aj (ε, u) ∈ C ∞ pour tout j, avec une dépendance
régulière en ε quand ε → 0; la dépendance des flux en l’inconnue u permet de tenir compte
de phénomènes de convection. A l’inverse, le terme source non-linéaire peut devenir non
borné dans la limite ε → 0, c’est-à-dire qu’on envisage (et c’est même l’hypothèse cruciale
des Chapitres 2 et 5) une situation du type
1
(1.6) F (ε, u) = B(u, u) + G(u),
B bilinéaire : RN × RN → RN , G ∈ C ∞ (RN ; RN ).
ε
La théorie classique pour (1.5)-(1.6) donne seulement un temps d’existence O(ε). On verra
au Chapitres 2 et 5 quelles hypothèses permettent alors, via la construction d’une solution
approchée WKB, d’étendre la théorie locale à des intervalles de temps indépendants de ε.
Voir aussi à ce sujet la discussion du point (1) page 11.
Les données sont de la forme
(1.7)
u(ε, 0, x) = εp <e a(x)eik·x/ε + εK ϕ(ε, x) .
La fréquence fondamentale k correspond à la couleur (ou la température) de l’impulsion
lumineuse. Le paramètre p ≥ 0 code la taille de l’amplitude a, qui pour simplifier est
supposée ici
de ε. (Le cas d’une amplitude dépendante de ε, par exemple
indépendante
x1 √
a(ε, x) = a √
, x2ε , x3 , avec a régulière, en notant k = (0, 0, 1) ∈ R3 , est en fait important,
ε
puisque les impulsions laser sont typiquement de cette forme ; voir par exemple [90]) Le
terme εK ϕ(ε, x) est compris comme une petite erreur initiale par rapport à la donnée WKB.
10
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Le paramètre ε qui apparaît dans l’opérateur hyperbolique en facteur de la matrice
constante A0 anti-hermitienne dans le membre de gauche de (1.5) est le même que la longeur
d’onde dans la phase oscillante. Cela traduit le fait qu’on considère un matériau ou un fluide
qui est transparent pour la couleur considérée. Autrement dit, les fréquences caractéristiques
de l’opérateur hyperbolique sont O(1/ε), comme les fréquences des données. Ces fréquences
caractéristiques sont définies comme l’ensemble des couples (τ, η) ∈ R × Rd avec τ fréquence
temporelle (pulsation) et η fréquence spatiale, telles que les ondes planes ei(η·x−τ t)/ε~v , avec
~v 6= 0, soient propagées par l’opérateur en v = 0, au sens où
X
1
Aj (ε, 0)∂xj ei(η·x−τ t)/ε~v = 0.
(1.8)
∂t + A0 +
ε
1≤j≤d
L’équation (1.8) est équivalente à
det
− iτ + A0 +
X
iηj Aj (ε, 0) = 0,
1≤j≤d
(1.9)
~v ∈ ker
− iτ + A0 +
X
iηj Aj (ε, 0) .
1≤j≤d
Quand A0 6= 0, les branches η → τ (η) de solutions de l’équation alǵebrique (1.9)(i) ne sont
pas homogènes de degré 1 ; cette situation est caractéristique des problèmes d’interaction
laser-matière.
Sous l’hypothèse de préparation, appelée ici polarisation par analogie avec la polarisation
de la lumière (1.4) :
X
(1.10) a(x) ∈ ker − iω + A0 +
ikj Aj (ε, 0) , pour tout x et pour un certain ω ∈ R,
1≤j≤d
où k est la fréquence fondamentale qui apparaît dans (1.7), il peut être possible de prouver
l’existence d’une solution WKB :
X
X
ua (ε, t, x) = ei(k·x−ωt)/ε u0,1 + c.c. +
εj
eiq(k·x−ωt)/ε uj,q ,
Hj ⊂ Z,
1≤j≤j0
q∈Hj
qui satisfait

X
1

Aj (ε, ua )∂xj v = F (ε, ua ) + εMa ra ,
 ∂t ua + A0 ua +
ε
1≤j≤d


ua (ε, 0, x) = εp <e a(x)eik·x/ε .
Les ensembles Hj des harmoniques secondaires sont en général finis quand A0 6= 0. Le
nombre j0 de termes correcteurs qu’il est possible de calculer dans le développement WKB
est lié la précision de l’approximation, c’est-à-dire à la taille du reste εMa ra .
La condition de polarisation (1.10) est une condition géométrique : elle énonce que l’amplitude doit pointer dans une direction propre associée à β = (ω, k), pour une certaine
fréquence temporelle caractéristique ω associée au nombre d’onde fondamental k.
L’intérêt d’une telle approximation réside en particulier dans la description d’un système
d’équation plus simple que le système original pour les amplitudes dominantes u0,±1 . Ces
systèmes sont en général indépendants du petit paramètre ε, mais sont aussi de plus petite
taille, puisque seules les composantes de l’amplitude qui appartiennent au noyau de −iω +
A0 + A(ik) sont O(1). Mais cette approximation n’est valable, c’est-à-dire en particulier
utilisable pour des simulations numériques, que si la solution approchée décrit effectivement
avec une bonne approximation la solution exacte issue d’une donnée proche, c’est-à-dire
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
11
si l’erreur initiale εK ϕ dans (1.7) n’est pas rapidement amplifiée par le système. C’est la
question de la stabilité de la solution WKB vis-à-vis de petites perturbations initiales.
L’examen de la stabilité de ua est donc celle de la croissance éventuelle de la variable de
perturbation
(1.11)
u =: ua + εm v,
qui satisfait le problème de Cauchy

1
1 X

Aj (ε, ua + εm v)ε∂xj v − G(ua , ∂x ua , v) = 0,
 ∂ t v + A0 v +
ε
ε
(1.12)
1≤j≤d


v(ε, 0, x) = εK−m ϕ(ε, x).
où, dans le cas de termes convectifs affines : Aj (ε, ~u) = AjP
(ε, 0) + ∂v Aj (ε, 0) · ~u, le terme non
différentiel G est G(ua , ∂x ua , v) := ε−m F (u) − F (ua ) − 1≤j≤d Aj (ε, u)∂xj ua − εMa −m ra .
Le problème de Cauchy (1.12) est bien sûr un cas particulier de (1.1).
La question est donc celle du caractère localement bien posé de (1.12). Des paramètres
importants en sont :
(1) La taille εp de l’amplitude initiale. Si par exemple F a la forme F (ε, v) =
−1
ε B(v, v), avec B bilinéaire RN × Rn → RN , comme c’est le cas pour le système d’EulerMaxwell, alors en posant v = εp ṽ, le terme source non-linéaire pour l’équation en ṽ est
εp−1 B(ṽ, ṽ).
L’amplitude p = 1 est l’amplitude critique, pour laquelle le temps d’existence donné par
la théorie hyperbolique symétrique est O(1). Dans ce cadre, on s’attend à observer des effets
non-linéaires en temps O(1), c’est-à-dire à dériver une équation non-linéaire pour le terme
principal du développement WKB.
Les amplitudes p < 1, en particulier p = 0, sont sur-critiques. Dans ce régime, l’estimation
H s standard, avec s > 1 + d/2, donne via Gronwall un taux de croissance exponentiel qui
tend vers l’infini quand ε → 0, l’existence d’une solution WKB n’est pas garantie. On
présente ce cas plus en détail dans l’introduction du Chapitre 2. Les Chapitres 2 et 5 sont
consacrés à des cas sur-critiques.
On peut faire une analogie très parlante avec des familles d’équations différentielles ordinaires :
1
iα
ε > 0, α ∈ R, y(0) ∈ C.
(1.13)
y0 + y = y2 ,
ε
ε
Quand α = 0 et y(0) ∈ R, par exemple y(0) > 0, le temps maximal d’existence est y(0)−1 .
Quand α =
6 0, on obtient après factorisation des oscillations :
1
−1
y(t) = eiαt/ε
− 2α−1 eitαt/ε sin αt/(2ε)
.
y(0)
En particulier, les solutions sont globales dès que |y(0)| < |α|/2. C’est-à-dire qu’étant donnée
une amplitude O(1), si les oscillations sont suffisamment fortes, il y aura suffisamment
d’annulation (“exponential cancellation” en Anglais) pour que l’effet du grand terme nonlinéaire (1/ε)y 2 soit amorti.
Si on croit en cette analogie, alors la question de la théorie locale dans le cadre de
l’optique sur-critique va faire intervenir une compétition entre les grands termes sources
et les oscillations rapides, et on s’attend à une tendance vers la stabilité à mesure que les
oscillations augmentent en fréquence.
12
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
(2) L’amplitude εK de la perturbation. On veut pouvoir choisir K assez petit pour
un théorème de stabilité. A l’inverse un résultat d’instabilité, c’est-à-dire de croissance en
temps court t∗ (ε), sera d’autant plus fort que K pourra être choisi grand, et que t∗ (ε) sera
petit.
(3) La dépendance de ϕ en (ε, x). A la suite de Joly, Métivier et Rauch [23, 45, 46]
beaucoup de résultats de l’optique géométrique (parmi lesquels [54, 18, 24, 89, 17, 14, 65],
un bon survol du domaine est donné dans l’article [25]) surmontent le problème de la
dépendance singulière du terme principal du développement :
sup a(x)eik·x/ε H s (Rd ) = ∞,
ε>0
en considérant une représentation de la solution par le biais de profils, qui dépendent des
variables indépendantes (ε, t, x, θ) ∈ R+ × R+ × Rd × T, et dont la trace en θ = (k · x − ωt)/ε
est la solution du problème de départ :
(1.14)
u(ε, t, x) = u(ε, t, x, θ) θ=(k·x−ωt)/ε .
Cette représentation permet de désingulariser les données, au sens où supε>0 a(x)eiθ H s (Rd ×T)
est fini dès que a ∈ H s , mais le problème de Cauchy (1.12) n’admet une telle représentation
que si ϕ(ε, x) s’écrit sous la forme (1.14).
Utiliser une représentation en profils implique donc de considérer une classe relativement
restreinte de perturbations initiales.
Dans le Chapitre 2, plutôt que des profils on considère des ε-dérivées. C’est-à-dire qu’on
considère les familles de normes
(1.15)
kukHεs := (1 + ε| · |2 )s/2 û(·)L2 (Rd ) .
Alors bien sûr supε>0 a(ε, x)eik·x/ε ε,s < ∞, et les données ne sont plus singulières. L’inconvénient de cette approche tient à la taille de l’injection de Sobolev correspondante :
H s ,→ L∞ ,
s > d/2,
|u|L∞ ≤ ε−d/2 Cd kukHεs .
On perd donc typiquement un facteur ε−d/2 dans les estimations non-linéaires :
(1.16)
kuvkHεs ≤ Cd |u|L∞ kvkHεs + kukHεs |v|L∞ .
Une façon d’y remédier est de se donner une marge via l’amplitude de la donnée εK−m
pour v. Et donc ce qu’on perd d’un côté, en considérant des perturbations d’une forme plus
générale, on le perd de l’autre, en devant choisir des perturbations relativement petites.
Ce point de vue (Sobolev semi-classique, pas de profils, perturbations générales mais
petites dans L∞ ) est celui adopté au Chapitre 2.
Les Chapitres 2 et 5 traitent d’optique géométrique surcritique.
Après avoir présenté la position du problème après Joly, Métivier et Rauch dans l’introduction du Chapitre 2, je prouve une extension de leur résultat à des systèmes quasi-linéaires
avec une singularité non préparée, c’est-à-dire un terme source non triangulaire par bloc.
Dans le Chapitre 5, je donne un cadre qui permet d’obtenir un critère de stabilité assez
général. C’est-à-dire que je mets en évidence un indice de stabilité scalaire Γ, tel que Γ > 0
implique l’instabilité et Γ < 0 implique la stabilité. Le cas dégénéré Γ = 0 recouvre plusieurs
situations, l’une d’entre elles étant traitée au Chapitre 2. La preuve d’instabilité du Chapitre
5 utilise la construction générale d’approximation de flots du Chapitre 4.
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
13
Chapitre 3 : un théorème de Nash-Moser à paramètre
L’étude du Chapitre 2 fait intervenir un calcul para-différentiel. Suivant l’idée, un peu
vague, que le calcul para-différentiel est en quelque sorte équivalent à la méthode de NashMoser (idée partiellement formalisée par Hörmander dans [39]), je prouve dans le Chapitre 3
un théorème de Nash-Moser à paramètre. La question est de savoir si des itérations de NashMoser peuvent donner un résultat d’existence pour des familles d’équations qui dépendent
singulièrement d’un petit paramètre, comme par exemple (1.5) avec une non-linéarité de la
forme (1.6).
On formalise ce problème de la façon suivante : on considère des familles de Banach
{Es }s∈R d’espaces de départ et {Fs }s∈R , d’espaces d’arrivée, qui sont emboîtés les uns
dans les autres : Es0 ,→ Es et Fs0 ,→ Fs pour s ≤ s0 , et pour lequelles on a une famille
Sθ : Es → Es , paramétrée par θ > 0, d’opérateurs de régularisation, c’est-à-dire qui per0
mettent de gagner de la “régularité" : |Sθ u|Es0 . (1 + θs −s )|u|Es , pour s ≤ s0 , tout en
0
approximant l’identité : |Sθ u − u|Es ≤ θs−s |u|Es0 . On se donne des familles d’applications
Φε ∈ C 2 (Es , Fs−m ), pour un certain m (qui correspond pour (1.1) à l’ordre de l’opérateur
différentiel), qui satisfont des estimations douces. On suppose qu’on peut résoudre les équations linéarisées dans un voisinage de l’origine, au sens suivant : pour u assez petit dans un
espace de départ, pour f donné dans un espace d’arrivée, l’équation (Φε )0 (u)v = f a une
unique solution v = V (u, f ) qui satisfait la borne |v|Es . ε−κ (kf kFm+r |u|Es+r + kf kFs+r ),
ce qui signifie qu’on perd à la fois de la régularité et des puissances de ε. Les paramètres
κ > 0 et r ≥ 0 décrivent ces pertes. On suppose enfin que les équations sont écrites comme
des équations de perturbation autour d’une solution approchée, c’est-à-dire que Φε (0) est
assez petit.
Le résultat, particulièrement simple même si un peu compliqué à énoncer précisément du
fait du grand nombre de paramètres, affirme que si la solution approchée est suffisamment
précise, et si dans les itérations de Nash-Moser
(1.17)
uε0 := 0,
uεj+1 := uεj + Sθjε vjε ,
vjε := −V uεj , Φε (uεj ) ,
on régularise suffisamment vite, c’est-à-dire en choisissant θε qui diverge très vite vers l’infini
quand ε → 0, alors les itérations (1.17) convergent vers une solution u de Φε (u) = 0.
Des systèmes de Schrödinger quasi-linéaires donnent un exemple d’utilisation de ce résultat. Cela fait suite à un article récent de Métivier et Rauch [72], qui posent la question :
étant donné un système d’ordre un qui n’est pas hyperbolique, donc dont le problème de
Cauchy est mal posé, peut-on en ajoutant à ce système de petits termes dispersifs d’ordre
deux obtenir un système bien posé ?
La réponse que donnent Métivier et Rauch est simple : oui, sous certaines conditions de
non-résonance, ou, plus généralement, des conditions de transparence (compatibilité entre
les termes d’ordre un et deux), tout à fait analogues aux conditions de transparence décrites
dans les Chapitres 2 et 5. C’est-à-dire, en simplifiant un peu, que si les opérateurs de
Schrödinger ne résonnent pas entre eux, alors les termes non symétriques d’ordre un peuvent
ête éliminés par le biais d’une réduction à une forme normale.
Notre application consiste à injecter un petit paramètre dans le problème, à travers les
données : on considère des données petites dans L∞ et grandes au sens Sobolev, et on vérifie
que le résultat de Métivier et Rauch s’étend à de telles données, via notre théorème de
Nash-Moser.
14
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Chapitre 4 : approximation de flots d’opérateurs pseudo-différentiels linéaires
Dans cette partie, je développe l’outil fondamental pour la preuve des théorèmes d’instabilité des Chapitres 5 et 6 : une formule de Duhamel pour des équations pseudo-différentielles
linéaires.
On considère des problèmes de Cauchy
(1.18)
∂t w + opψ
ε (M )w = 0,
w(ε, 0, x) ∈ H s ,
où opψ
ε (M ) est l’opérateur para-différentiel associé au symbole M en quantification semiclassique. Pour une définition du calcul para-différentiel et des énoncés, en particulier des
théorèmes d’action et de composition, on pourra par exemple se réferer à l’Appendice page
57.
On suppose que M est d’ordre 0 : M ∈ Γ0r , avec une grande régularité spatiale r. Il faut
donc comprendre (1.18) comme un avatar d’un problème de type (1.1), après éventuellement
des étapes de projection et de réduction à une forme normale (comme dans le Chapitre 2)
et surtout une étape de localisation en fréquence, c’est-à-dire que l’inconnue w dans (1.18)
est typiquement définie par w = opε (χ)v, où v satisfait par exemple une équation du type
(1.1), et χ ∈ Cc∞ (Rdξ ) est une troncature en fréquence.
On remarque que (1.18) est une équation différentielle dans H s . En effet, les théorèmes de
Calderón-Vaillancourt affirment que l’opérateur opψ
ε (M ) étant d’ordre 0, il agit continûment
dans H s . (En fait, si w est issue d’une localisation en fréquence, le symbole M est à support
compact, et opψ
ε (M ) est même d’ordre −∞, mais pas uniformément en ε.) Donc l’existence
et l’unicité d’une solution de (1.18) découlent simplement de Cauchy-Lipschitz.
Dans le cas
autonome (M indépendant du temps), on peut noter S(t) = exp − topψ
(M
)
le flot donné
ε
par Cauchy-Lipschitz.
Le Chapitre 4 donne un cadre dans lequel l’opérateur solution S est bien approximé par
opψ
ε (S0 ), où S0 est le flot symbolique, c’est-à-dire la solution de l’équation différentielle en
dimension finie :
∂t S0 + M (t, x, ξ)S0 = 0,
S0 (τ ; τ ) ≡ Id.
Dans le cas autonome, S0 (τ ; t, x, ξ) = exp(−(t − τ )M (x, ξ)), et donc on a prouvé l’approximation
ψ
(1.19)
exp − topψ
ε (M ) ' opε exp(−tM ) .
On remarque ici que l’hypothèse sur l’ordre de M est cruciale : en effet, si M n’est pas
d’ordre zéro, alors eM n’est pas un symbole. En effet, les symboles admissibles pour la
théorie pseudo-différentielle se comportent comme des polynômes pour ξ grand, au sens où
leurs propriétés de décroissance (au sens large) s’améliorent par dérivation. Ce n’est le cas
pour eM que si M est d’ordre zéro.
Je conclus le Chapitre 4 en comparant le type de croissance qu’on peut obtenir par la
formule de représentation (1.19) et par l’inégalité de Gårding.
Les chapitres 5 et 6 donnent deux exemples de théorème d’instabilité basés sur une
telle formule de representation. L’instabilité est une instabilité spectrale, pour le symbole.
C’est-à-dire que si le spectre de la famille de matrices M rencontre le demi-plan gauche
−tM
(parties réelles négatives), alors e−tM est exponentiellement croissant, et opψ
) aussi.
ε (e
Cela donne des critères d’instabilité en théorie très simples à vérifier, puisque portant sur
des spectres en dimension finie, par opposition aux conditions spectrales portant sur les
opérateurs différentiels linéarisés autour d’une solution de référence (voir la discussion dans
le Chapitre 7).
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
15
Chapitre 6 : perte d’hyperbolicité et instabilité
Pour des équations d’ordre 1 sans petit paramètre :
X
(1.20)
∂t u +
Aj (u)∂xj u = F (u),
1≤j≤d
on suppose que la condition d’hyperbolicité (1.3) est satisfaite le long d’une solution de
référence φ(t, x) pour t ≤ t0 mais pas pour t > t0 . C’est-à-dire, en fixant t0 = 0, qu’on
suppose que φ est une solution locale en temps et en espace, régulière, telle que
X
(1.21)
sp
ξj Aj (φ(0, x)) ⊂ R,
1≤j≤d
pour tout (x, ξ) dans un voisinage d’un certain (x0 , ξ0 ) mais pour t > 0 arbitrairement petit :
X
(1.22)
sp
ξ0j Aj (φ(t, x0 )) ∩ C \ R 6= ∅.
1≤j≤d
Ce problème a pour origine l’article de Lerner, Morimoto et Xu [63] qui étudient l’équation de Burgers avec un forçage complexe :
∂t u + u∂x u = i,
u(0, x) ∈ R pour tout x.
Le résultat d’instabilité de [63] est spectaculaire : il affirme que s’il existe une solution locale
en temps et en espace qui est C 2 , alors la donnée est analytique. En particulier, si on se
donne u0 ∈ Cc∞ , non triviale, alors on ne peut pas résoudre localement dans C 2 . Cela peut se
comprendre comme une perte de régularité d’un éventuel flot. C’est un résultat comparable
à celui de Lebeau [60] pour le problème de Kelvin-Helmholtz pour Euler 2d.
Le but est donc de d’écrire la transition de l’hyperbolicité (1.21) vers la non-hyperbolicité
(6.3). On remarquera que sous l’hypothèse (1.21), avec le résultat de Métivier ([70], cité
page 8), le problème de Cauchy en t0 = t est mal posé, pour tout t > 0 petit.
Donc il ne fait aucun doute qu’une équation (1.20) qui admet une solution φ telle que
(1.22) soit vraie n’aura pas de flot régulier. Comment décrire précisément le défaut de
régularité ? La preuve de [70] ne permet pas de passer à la limite de (1.22) vers (1.21).
Notre résultat affirme que la transition de l’hyperbolicité vers la non-hyperbolicité s’accompagne d’une perte de régularité du flot tout à fait similaire à celle mise en évidence par
Métivier dans le cas non-hyperbolique.
C’est un résultat qui étend l’analyse de [63] à des systèmes, et qui contient une nouvelle
preuve du résultat de [70], preuve qui n’utilise pas l’analyticité. L’argument essentiel en est
la construction de parametrix du Chapitre 4.
CHAPITRE 2
DE EULER-MAXWELL À ZAKHAROV
Je donne ici un résumé de l’article [91]. Le résultat est un théorème général d’optique
quasi-linéaire sur-critique, dont l’application au système d’Euler-Maxwell donne une justification du système modèle de Zakharov.
2.1. Optique sur-critique : position du problème après Joly, Métivier et Rauch
Dans un des derniers articles de leur longue collaboration, Joly, Métivier et Rauch ont
donné en 2000 [46] une analyse asymptotique de solutions rapidement oscillantes de systèmes
de la forme
 X (1) 1


∂
+
L
+
Aj ∂xj u1 = 0,

t
0

ε

1≤j≤d
(2.1)
X (2) 1
1



∂
+
M
+
Aj ∂xj u2 = B(u1 , u1 ),
t
0


ε
ε
1≤j≤d
où les opérateurs sont hyperboliques à coefficients constants (voir la condition (1.2) page 7 ;
(1)
(2)
dans ce contexte : L0 et M0 anti-symétriques et Aj et Aj symétriques pour tous j). Le
terme source B est bilinéaire, et pour simplifier les notations on le suppose ici symétrique :
B(u, v) ≡ B(v, u).
Les systèmes (2.1) sont semi-linéaires avec terme source triangulaire.
Pour (2.1), l’amplitude critique des solutions est O(ε) (les notions d’amplitude critique et
sur-critique ont été introduites dans la discussion du point (1) page 11). C’est l’amplitude
qui conduit en temps O(1) à des effets non-linéaires. Le point de départ de Joly, Métivier
et Rauch dans [46] est l’observation suivante : il existe une classe de systèmes issus de la
physique, en particulier les équations de Maxwell-Bloch, pour lesquels l’amplitude critique
conduit à des équations limites qui sont linéaires.
Introduisons des notations compactes pour expliquer ce phénomène : on pose
X (1)
L(ε∂) = L0 + L1 (ε∂) = L0 + ε∂t +
Aj ε∂xj , L(i(τ, η)) = L0 + L1 (iτ, iη)
1≤j≤d
M (ε∂) = M0 + M1 (ε∂) = M0 + ε∂t +
X
1≤j≤d
(2)
Aj ∂xj ,
M (i(τ, η)) = M0 + M1 (iτ, iη).
18
CHAPITRE 2. DE EULER-MAXWELL À ZAKHAROV
Etant donnée une phase β = (τ, η) ∈ R × Rd , on note P (β) le projecteur orthogonal sur
le noyau de ker L(iβ). Si ce noyau est non trivial, on dit que β est une phase caractéristique pour L. De la même manière, on note Q(β) le projecteur orthogonal sur le noyau
(éventuellement réduit à {0}) de ker M (iβ).
On considère des données rapidement oscillantes d’amplitude critique :
(2.2)
u1 (ε, 0, x) = ε <e a(x)eik·x/ε ,
u2 (ε, 0, x) = 0,
et on cherche des solutions sous forme de profils (voir l’équation (1.14) page 12 dans l’introduction) :
(u1 , u2 )(ε, 0, x) = (u1 , u2 )(ε, t, x, θ) θ=(k·x−ωt)/ε .
On note maintenant β = (ω, k) ∈ R × Rd la phase fondamentale. Ici le nombre d’onde k est
donné, et ω va être choisi convenablement dans la suite.
Une condition suffisante pour que (u, v) résolve (2.1) est que leurs profils soient solutions
de
1
1
1
L(β∂θ )u1 + L1 (∂)u1 = 0,
M (β∂θ )u2 + M1 (∂)u2 = B(u1 , u1 ).
ε
ε
ε
On développe les profils en puisances de ε. Du fait de la forme des équations et des données
les profils sont des polynômes trigonométriques en θ. On a donc le double développement
en ε et θ :
X
u1 , u2 (ε, t, x, θ) = εp
εm u1,m , u1,m (t, x, θ)
(2.3)
0≤m≤M
(2.4)
=ε
p
X
εm
0≤m≤M
X
eipθ (u1,m,p , u2,m,p )(t, x).
p∈Hm ⊂Z
D’après (2.2), p = 1. On injecte (2.4) dans (2.3) pour obtenir une cascade d’équations WKB.
A l’ordre O(1) on trouve les équations
L(pβ)u0,p = 0,
(2.5)
M (pβ)v0,p = 0.
On choisit β caractéristique pour L, et on suppose pour simplifier que ker L(pβ) est non trivial seulement si p ∈ {−1, 1}. A l’inverse on suppose que ker M (pβ) est non trivial seulement
si p = 0. Alors de (2.5) on déduit
(2.6)
u0,p = P (pβ)u0,p ,
p ∈ {−1, 0, 1},
v0,p = 0 pour p 6= 0,
v0,0 = Q(0)v0,0 .
On remarque que la condition (2.6) impose une condition sur la donnée a : on doit avoir
nécessairement la condition de polarisation a = P (β)a, a∗ = P (−β)a∗ , en notant a∗ l’amplitude conjuguée de a. Et donc le choix de ω est contenu dans le choix des données, via la
polarisation.
A l’ordre O(ε) on trouve les équations
(2.7) L(pβ)u1,p + L1 (∂)u0,p = 0,
M (pβ)v1,p + M1 (∂)v0,p =
X
p1 +p2 =p
p1 ,p2 ∈{−1,1}
On projette maintenant (2.7) sur les noyaux non triviaux, pour trouver
(2.8)
P (pβ)L1 (∂)P (pβ)u0,p = 0,
p ∈ {−1, 1},
Q(0)M1 (∂)Q(0)v0,0 = Q(0)B P (β)u0,1 , P (−β)u0,−1 .
L’équation (2.8) est une équation de transport à la vitesse de groupe :
(2.9)
P (pβ)L1 (∂)P (pβ) ≡ ∂t + ∇λ(k) · ∂x P (pβ),
B(u0,p1 , u0,p2 ).
2.1. OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE APRÈS JOLY, MÉTIVIER ET RAUCH
19
comme dans le calcul pour Maxwell de la page 9. Ici λ est un paramétrage local régulièr
de la variété caractéristique de L au voisinage de la phase caractéristique β = (ω, k). La
relation (2.9) se trouve déjà dans l’article de Lax de 1957 [58]. J’ai clarifié dans ma thèse
les liens entre opérateurs de transport et de diffusion (et opérateurs d’ordre supérieur) de
l’optique et développements de Taylor sur la variété caractéristique, pour des points non
singuliers comme pour des points singuliers sur la variété [89]. (Et donc en toute généralité
pour obtenir une relation du type (2.9) il n’est pas nécessaire de supposer que β est un point
régulier sur la variété ; voir la thèse de David Lannes [54], et ma thèse [89]).
L’observation cruciale de [46] est la suivante : pour Maxwell-Bloch, on a la relation
(2.10)
Q(νβ)q P ((ν − ν 0 )β)·, P (ν 0 β) · ≡ 0,
ν, ν 0 ∈ Z.
Joly, Métivier et Rauch appellent transparence faible cette propriété d’annulation. Notons
qu’il y a seulement un nombre fini de conditions non triviales dans (2.10) : pour presque
tous les ν, les projecteurs sont en fait triviaux. Une conséquence immédiate de (2.10) est
que l’équation de transport (2.8)(ii) est triviale.
Joly, Métivier et Rauch envisagent alors le régime surcritique p = 0 dans (1.14), l’idée
étant de forcer l’apparition d’effets non-linéaires en temps O(1) en considérant des amplitudes qui sont a priori trop grandes pour le système (2.1). On peut à nouveau penser à
l’analogie (1.13) (page 11) avec une équation différentielle.
Sous la condition (2.10), on se pose donc la question de l’existence de solutions WKB
avec p = 0, et de leur stabilité.
Joly, Métivier et Rauch apportent des réponses assez complètes à ces questions, dans le
cadre de (2.1) :
• une autre condition d’annulation, strictement plus forte que (2.10), donne le caractère
bien posé des équations limites, et donc l’existence de solutions WKB,
• une troisième condition d’annulation, strictement plus forte que les deux précédentes„
garantit la stabilité des solutions WKB. Cette condition est
Q(τ 0 , η + pβ)B P (pβ)~u, P (τ, η)~v ≤ C τ 0 − τ − ω |u||v|,
(2.11)
pour tous p ∈ {−1, 1}, pour tout (τ, η) ∈ Rd+1 , tous ~u, ~v ∈ RN .
La relation τ 0 − τ − ω = 0 est dite relation de résonance, et le membre de gauche dans
l’inégalité (2.11) est appelé coefficient d’interaction. La relation de compatibilité (2.11) dit
donc que les résonances se factorisent dans le coefficient d’interaction.
La preuve du fait que (2.11) implique la stabilité passe par une réduction à une forme
normale. Je serai à amené à décrire ce type de réduction plus loin dans ce Chapitre, et donc
je ne détaille pas la preuve de [46].
Dans la suite de ce Chapitre, je vais présenter un résultat de stabilité dans un cadre où une
propriété strictement moins forte que (2.11) est satisfaite, pour des systèmes quasi-linéaires
avec
√ des termes convectifs qui sont seulement perturbatifs, dans le cas de termes sources en
1/ ε qui ne sont pas triangulaires.
Dans le Chapitre 5, je vais montrer comment généraliser la condition (2.11) en un critère
de stabilité.
20
CHAPITRE 2. DE EULER-MAXWELL À ZAKHAROV
2.2. Une classe de problèmes singuliers
J’étudie ici la classe de systèmes quasi-linéaires

1
1 X
1

Aj (ε, u)∂xj u = B(u, u),
 ∂ t + 2 A0 +
ε
ε
ε
(2.12)
1≤j≤d


u(ε, 0, x) = a(x) + εK ϕ(ε, x),
correspondante à un régime d’optique géométrique sur-critique. Ici le terme principal dans
la donnée n’est pas oscillant. Les flux Aj dépendent de la solution u, mais seulement de
(0)
(1)
(0)
manière perturbative : Aj (ε, u) = Aj + εAj (u), avec Aj constant. En tenant compte du
(1)
facteur multiplicatif 1/ε, les termes quasi-linéaires dans (2.12) sont donc Aj (u)∂xj u. Mais
comme on va travailler avec des normes semi-classiques (1.15), c’est-à-dire qu’on envisage des
variations rapides en x pour la perturbation ϕ, et donc pour la solution u, il faut comprendre
(1)
ces termes quasi-linéaires comme (1/ε)Aj (u)ε∂xj u, et ils sont donc singuliers.
Pourquoi ces échelles ? La réponse est donnée dans les deux paragraphes suivants : dans ce
régime asymptotique, un développement WKB pour Euler-Maxwell donne le système limite
de Zakharov. (Cela n’est absolument pas visible à l’oeil nu.) Plus tôt dans ma thèse [90], j’ai
vérifié que les solutions d’amplitude critique conduisent pour Euler-Maxwell à des équations
limites linéaires, et donc l’analyse esquissée au paragraphe 2.1 de ce chapitre montre que le
régime sur-critique est pertinent.
2.2.1. Exemple : Euler-Maxwell. — Le point de depart est le systeme adimensionné,
introduit dans ma thèse [90] :















∂t B + ∇ × E = 0,
1 ne
θi
(e ve − eni vi ),
ε
θe
1
∂t ve + θe (ve · ∇)ve = −θe ∇ne − (E + θe ve × B),
ε
(EM)


∂
n
+
θ
∇
·
v
+
θ
(v
·
∇)n
=
0,

t e
e
e
e e
e




θi


∂t vi + θi (vi · ∇)vi = −α2 θi ∇ni +
(E + θi vi × B),



εθ
e


∂t ni + θi ∇ · vi + θi vi · ∇ni = 0.
∂t E − ∇ × B =
où (B, E) ∈ R3+3 est le champ électro-magnétique, (ve , vi ) ∈ R3+3 sont les vitesses des
électrons et des ions, et (ne , ni ) ∈ R1+1 sont les fluctuations de densité des électrons et
des ions, par rapport à une densité de référence supposée uniforme. Les paramètres sont
ε = 1/(ωp t0 ), où ωp est la fréquence plasma électronique et t0 un temps caractéristique
pour l’implulsion laser, θe = (γe Te /(c2 me ))1/2 et θi = (γe Te /(c2 mi ))1/2 , où c est la vitesse
de la lumière, Te et Ti les températures électroniques et ioniques, γe et γi sont les chaleurs
spécifiques, et α = Ti /Te , et me et mi les masses. L’asymptotique qu’on considère est
ε → 0 avec θi = O(ε), pour simplifier θi = ε. Les paramètres θe et α aussi sont petits, mais
typiquement pas du même ordre que ε et θi . On pose ũ = (B, E, ve , ne , vi , ni /α) ∈ R14 . Alors
dans les échelles u(t, x) := εũ(εt, x), le système d’Euler-Maxwell prend la forme (2.12).
2.2.2. Solution approchée WKB : système de Zakharov, défaut de transparence
et effet fantôme. — On cherche une solution à (2.12) sous la forme (2.4), avec ici k = 0
puisqu’on suppose l’amplitude a indépendante de ε.
21
2.2. UNE CLASSE DE PROBLÈMES SINGULIERS
Les échelles de (2.12) sont différentes des échelles de (2.1), et les équations WKB formelles
sont un peu compliquées à présenter. Je vais en donner seulement ici la conclusion :
• La transparence faible (de type (2.10)) n’est pas vérifiée. Il est nécessaire, pour pouvoir
écrire un développement WKB, de supposer ne0 = ni0 = 0, c’est-à-dire de considérer des
fluctuations de densité qui sont O(ε2 ) et non O(ε).
• Le système limite apparaît comme un système couplé en (E0,±1 , ni1,0 ), c’est-à-dire un
couplage entre l’enveloppe du champ électrique et le terme basse-fréquence de la fluctuation
de densité. C’est un couplage haute-fréquence/basse-fréquence, mais aussi un couplage entre
terme principal et correcteur. Rappelons en effet qu’avec nos notations le premier indice
dans E0,±1 , ni1,0 , correspond à la position dans le développement en puissances de ε, et le
deuxième au mode de Fourier. Il se produit un couplage entre des termes d’ordre différent
en ε. C’est l’effet fantôme de l’école de Kyoto [86, 88], qui s’explique précisément par le
défaut de transparence mentionné plus haut : la fluctuation de densité ni1,0 apparaît avec un
facteur O(ε) dans le développement WKB, c’est donc un “fantôme” qui n’est pas observable
dans la limite ε → 0, mais qu’on peut observer indirectement par son effet sur le champ
E0,± .
Le système limite est le système de Zakharov (avec p ∈ {−1, 1}) :

 −2ip∂t E0,p + θ2 ∇(∇ · E0,p ) − ∇ × (∇ × E0,p ) − 1 E0,p =
ni1,0 E0,p
e
θe2
(2.13)

(∂t2 − (α2 + 1)∆)ni1,0 = −∆|E0,p |2 .
• Le système (2.13) fait apparaître une équation de Schrödinger, qui est une approximation diffractive, c’est-à-dire quand 3 échelles sont présentes, comme dans (2.12) [45],
des équations de Maxwell, et simultanément une équation d’ondes, qui est l’approximation
ondes-longues à deux échelles d’Euler. Cela est lié au fait que θi = ε, ce qui implique que la
vitesse acoustique est O(ε), et donc l’approximation optique géométrique pour l’acoustique
intervient à la même échelle de temps que l’approximation optique diffractive pour Maxwell.
2.2.3. Résultat. — On suppose pour (2.12) :
• une structure hyperbolique, avec comme dans Euler-Maxwell (voir la Figure 2.1) une
décomposition en modes haute-fréquence de type Klein-Gordon et modes acoustiques :
X
X
X
iλj (ε~u)Πj (ε~u) .
(2.14)
A0 +
iξj Aj (ε~u) =
iλj (ε~u)Πj (ε~u) +
1≤j≤d
j0 +1≤j≤N
1≤j≤j0
|
{z
modes Klein-Gordon
}
|
{z
modes acoustiques
}
On note Π0 le projecteur total
et Πs le projecteur total sur les
P sur les modes Klein-Gordon,
P
modes acoustiques : Π0 = 1≤j≤j0 Πj , Πs = j0 +1≤j≤N Πj . (On suppose pour simplifier
les notations qu’il y a N modes pour tout ξ, en pratique ces modes peuvent se croiser,
comme on le voit sur la Figure 2.1.)
La variété caractéristique est représentée Figure 2.1. La vitesse acoustique est O(ε). Les
fréquences Klein-Gordon sont toujours supérieures ou égales à la fréquence plasma
ωp , fixée
p
à 1 après adimensionnement. La branche Klein-Gordon la plus rapide est 1 + |ξ|2 . Elle
correspond à une polarisation transverse, doncpà de la lumière et aux oscillations associées des
électrons. La branche Klein-Gordon lente est 1 + θe2 |ξ|2 . Elle correspond à une polarisation
longitudinale, et sa composante électromagnétique est le champ créé par le plasma.
• l’existence d’une solution WKB précise (c’est-à-dire qu’on peut construire des correcteurs jusqu’à un ordre élev́e) ;
22
CHAPITRE 2. DE EULER-MAXWELL À ZAKHAROV
ω
ξ
Figure 2.1. La variété caractéristique pour Euler-Maxwell linéarisé autour de 0.
• une séparation des résonances : les résonances Klein-Gordon/acoustique sont bassefréquences, les résonances Klein-Gordon/Klein-Gordon sont localisées autour de fréquences
“moyennes”, et les résonances acoustiques/acoustiques sont haute-fréquences.
Qu’est-ce qu’une résonance ? Ici la bonne définition est : un petit diviseur dans une équation homologique. Les conditions de résonance sont seulement implicitement contenues dans
(2.12). Elles apparaissent explicitement dans les changements de variable (réduction à une
forme normale) qui ont pour but de désingulariser (2.12). J’explique cela plus en détail dans
le paragraphe 2.3 plus bas ; voir en particulier l’équation (2.24).
• Enfin on suppose une forme partielle de transparence : on suppose que les coefficients
d’interaction acoustique/KG sont transparents, mais pas les coefficients KG/acoustique,
que les résonances Klein-Gordon/Klein-Gordon sont symétrisables, et que les résonances
acoustiques sont transparentes. Comme pour les résonances, je donnerai à ces hypothèses
une formulation plus précise dans l’ébauche de preuve au paragraphe 2.3.
Ces hypothèses, taillées sur mesure pour Euler-Maxwell, impliquent la stabilité :
Théorème 2.1. — Sous les hypothèses ci-dessus, la famille de solutions WKB ua est stable
vis-à-vis de perturbations initiales de la forme εK ϕ(ε, x), avec ϕ bornée dans des normes
semi-classiques (1.15), et K assez grand en fonction de d.
Pour la condition sur K, voir la discussion dans l’introduction, en particulier les points
(3) et (4) page 12. La stabilité est une estimation uniforme en temps sur tout intervalle de
définition de la solution approchée, c’est-à-dire pour Euler-Maxwell sur tout intervalle sur
lequel on a existence pour Zakharov :
1
2
sup sup E − (E0,1 eiωp t/ε + c.c.) + |ni − εni1,0 | . ε,
ε
0≤t≤t0 x
où t0 est un temps d’existence et E est le champ électrique dans Euler-Mawell, et ni la
fluctuation de densité ionique. Et les autres variables du champ et du plasma ? On a aussi
|B − Ba | . ε, où Ba est le champ magnétique WKB, qui se déduit de E0,1 par polarisation,
etc.
2.3. SCHÉMA DE LA PREUVE
23
2.3. Schéma de la preuve
Je vais utiliser dans ce paragraphe les notations introduites dans l’Appendice page 57
pour le calcul-paradifférentiel. En particulier, la notation opψ
ε (σ) désigne l’opérateur paradifférentiel associé au symbole σ en quantification semi-classique.
Les équations de perturbation en la variable v définie par u =: ua + εm v s’écrivent

 ∂ v + 1 opψ (A(εu))v = 1 opψ (B(u ))v + op (D(u ))v + εRε ,
a
a
t
ε
ε2 ε
ε ε
(2.15)

ε
u̇(0, x) = εφ (x).
P
Ici A(εu) est une notation pour la famille de matrices A0 + 1≤j≤d iξj Aj (εu(t, x)), c’est
P
donc le symbole de l’opérateur différentiel A0 + 1≤j≤d Aj (εu)∂xj . Dans le terme source B
P
(1)
est le symbole d’ordre zéro défini par B = B(u0 ) − j ∂u Aj (0) · ∂xj u0 , où B(u0 )u :=
B(u0 , u) + B(u, u0 ). Le symbole D est un symbole d’ordre 0, qui fait intervenir en particulier
B(u1 ), c’est-à-dire la contribution du premier correcteur WKB au terme source.
Le terme de reste Rε contient les termes non-linéaires qui sont non différentiels, le reste
ε
ra associé à la solution WKB, et aussi les restes para-différentiels, c’est-à-dire par exemple
A(εu, ε∂x ) − opψ
ε (A(εu)), dont l’action dans les espaces de Sobolev est donnée par la Proposition 0.4. Pour simplifier les notations, on ignore ce terme dans la suite. Le traitement
des termes non-linéaires non différentiels se fait donc entièrement par des estimations de
type Moser (1.16) et (3.4). Notons que même si m est grand, on ne peut pas considérer la
contribution de εm v dans opψ
ε (A(εu)) comme étant négligeable, puisque A est d’ordre un.
Structure du terme source dominant
Pour comprendre le couplage entre A et B, il faut regarder B dans une base adaptée à
l’opérateur :
Π0 BΠ0 Π0 BΠs
B∼
.
Πs BΠ0 Πs BΠs
Toute la preuve est basée sur l’observation suivante, résultat d’un calcul élémentaire mais
fastidieux pour Euler-Maxwell : autour des résonances KG/acoustique, le coefficient d’interaction Π0 BΠs est grand, alors que le coefficient Πs BΠ0 est petit.
Premier changement de variable : projection et changement d’échelle
En accord avec ce qui précède, on pose
1
(χε Πs (εu))v,
V = (v0 , vs ).
(2.16)
v0 = opψ
vs = opψ
ε (Π0 (εu))v,
ε ε
Ici χε est en quelque sorte une troncature en fréquences : égale à un pour les basses fréquences, correspondantes aux résonances Klein-Gordon/acoustiques (dont un exemple est
donné à la Figure 2.2), et égale à ε au-delà, en particulier dans le régime des résonances
Klein-Gordon/Klein-Gordon.
Le système de taille 2N en V a la forme
1
1 ψ
1 ψ
(2.17)
∂t V + 2 opψ
ε (iA)V = 2 opε (B)V + opε (D)V,
ε
ε
ε
0
0
où A est le symbole diagonal par blocs : A = diag (Π0 A, Πs A), et où B =
,
Πs BΠ0 0
et D est d’ordre zéro comme B. Les variables v0 et vs sont donc couplées par des termes
d’ordre 0 seulement. Le terme singulier principal est maintenant O(1/ε2 ), du fait du facteur
1/ε dans la définition de vs . Donc on s’est ramené en quelque sorte à un régime du type
Maxwell-Bloch, comme dans l’introduction de ce chapitre.
24
CHAPITRE 2. DE EULER-MAXWELL À ZAKHAROV
Dans le calcul qui mène à (2.17), on utilise à plusieurs reprises le résultat de composition
des opérateurs para-différentiels :
(2.18)
ψ
ψ
2
opψ
ε (σ1 )opε (σ2 ) = opε (σ1 σ2 + εσ1 ]σ2 ) + ε (. . . ),
et bien sûr ici le reste (. . . ) dépend de la solution u, donc il est nécessaire d’avoir des
estimations précises sur son action dans les espaces de Sobolev. Cette estimation précise
est donnée par la Proposition 0.5. On utilise ici de manière cruciale la quantification semiclassique : (2.18) est un développement en puissances de ε, c’est-à-dire que le terme sousprincipal σ1 ]σ2 est non seulement d’ordre inférieur en tant que symbole pseudo-différentiel,
mais aussi apparaît dans (2.18) avec un facteur ε.
Deuxième changement de variable : forme normale
On pose
−1
W := (Id + opψ
V,
ε (M ))
avec M à déterminer dans une classe de symboles para-différentiels d’ordre 0. Alors l’équation satisfaite par W est conjuguée de l’équation satisfaite par V :
1
−1
ψ
opψ
∂t W = 2 (Id + opψ
ε (M ))
ε B + εD − iA (Id + opε (M ))W
ε
(2.19)
−1
− (Id + opψ
opψ
ε (M ))
ε (∂t M )W.
On cherche M sous forme triangulaire inférieure, comme le terme source principal B.
ψ
Donc Id + opψ
ε (M ) est inversible, d’inverse Id − opε (M ), et on peut expliciter l’équation
en W :
1
1 ψ
1 ψ
2
(2.20)
∂t W + 2 opψ
ε (iA)W = 2 opε B − [A, M ] − ε ∂t M W + opε (E)W,
ε
ε
ε
où E est un symbole d’ordre zéro.
On voit ainsi apparaître l’équation homologique :
2
2
(2.21)
opψ
ε B + εE − [A, M ] − ε ∂t M = O(ε ).
Que signifie O(ε2 ) dans le membre de droite ? Un opérateur négligeable R est ici n’importe
quel opérateur qui agit comme un opérateur d’ordre zéro, uniformément en ε, avec une norme
qui ne fait intervenir que kukHεs , en particulier pas de normes de u d’ordre supérieur :
(2.22)
kRZkHεs . C(kukHεs )kZkHεs ,
pour tout Z ∈ H s .
Donc dans le membre de droite de (2.21), O(ε2 ) signifie qu’on veut résoudre à ε2 R près,
pour n’importe quel R satisfaisant (2.22).
P
2
Le terme source est oscillant : B = ± e±iωt/ε B± , et on cherche M sous cette forme :
P ±iωt/ε2
M =
B± . On passe de l’équation satisfaite par les opérateurs (2.21) à une
±e
équation satisfaite par les symboles :
(2.23)
B + εE − [A, M ] − ε2 ∂t M = O(ε2 ),
et on commence par résoudre au premier ordre :
B − [A(0), M ] − ε2 ∂t M = O(ε),
où A(0) est le symbole A évalué en u = 0. On projette (2.24) suivant les modes propres de
A, pour trouver, avec p ∈ {−1, 1}, et i ≤ j0 , j0 + 1 ≤ j :
(2.24)
i pω + λi (0, ξ) − λj (0, ξ) Πi (0, ξ)Mp Πj (0) = Πi (0, ξ)Bp (t, x, ξ)Πj (0, ξ).
C’est ici qu’apparaît enfin la relation de résonance pω + λi (0, ξ) − λj (0, ξ) = 0. On souhaite
bien sûr résoudre (2.24) en divisant le coefficient d’interaction Πj Bp Πj par la phase ipω +
25
2.3. SCHÉMA DE LA PREUVE
ω
O(ε)
ξ
Figure 2.2. Résonance KG/acoustique.
λi (0, ξ) − λj (0, ξ). Cela est possible exactement quand une relation tout à fait semblable à
la condition de compatibilité (2.11) est satisfaite.
La preuve n’est pas terminée. Il faut en particulier tenir compte des symboles sousprincipaux, et de la contribution des termes convectifs, puisqu’on veut résoudre (2.23) à
O(ε2 ) près.
Problèmes techniques :
Je termine ce paragraphe en mentionnant des problèmes techniques qui apparaissent dans
la preuve :
• Pourquoi des opérateurs para-différentiels ? Essentiellement parce qu’on a besoin d’estimations du type (2.22) pour pouvoir négliger un terme. Précisément :
• • les symboles sous-principaux sont singuliers, donc ne peuvent pas être considérés
comme des restes. Les termes sous-principaux font intervenir des dérivées en x des symboles,
comme on le voit dans (2.18). Un opérateur pseudo-différentiel d’ordre zéro qui dépend de
∂x u a une norme H s → H s qui dépend typiquement de k∂x ukHεs : on ne peut en effet pas
espérer mieux que l’estimation de produit (1.16). À l’inverse, un opérateur para-différentiel
d’ordre zéro qui dépend de x à travers ∂x u a une norme H s → H s en |∂x u|L∞ , voir la
Proposition 0.3.
ψ
• • Ensuite du fait des projections opψ
ε (Π0 ) et opε (Πs ). Si on utilise seulement les termes
ψ
ψ
ψ
principaux opε (Π0 (0) et opε (Πs (0)), ou même seulement opψ
ε (Π(εua )) et opε (Πs (εua )),
alors on ne diagonalise pas exactement le terme principal A0 + A(εu, ε∂x ), ce qui donne lieu
à un couplage d’ordre un entre les composantes de V. Donc il faut diagonaliser exactement
ψ
en considérant opψ
ε (Π0 (εu)). Mais alors l’opérateur d’ordre zéro opε (∂t (Π0 (εu)) dépend de
u à travers ∂t u, et donc à travers ∂x u, et on est ramené au point précédent.
• On pourrait arguer du fait que ces potentielles pertes de dérivées sont artificielles :
l’approche standard consiste à dériver s fois les équations de perturbation, puis à effectuer
des estimations en petite norme, ici L2 . Dans cette approche, il apparaît des commutateurs
avec ∂xα , qui sont des termes d’ordre inférieur et donc estimés typiquement par les estimations
26
CHAPITRE 2. DE EULER-MAXWELL À ZAKHAROV
classiques de commutateurs. Ici du fait du changement de variable singulier en ε (2.16), ces
termes deviennent singuliers en ε, et bien que d’ordre inférieur, ne peuvent pas être négligés.
• Les résonances Klein-Gordon/acoustiques ont lieu pour de très basses fréquences O(ε).
On ne peut bien sûr pas simplement couper ce régime de fréquences puisque les termes
sources correspondants sont grands. Le problème qui surgit est le suivant : les paramétrages
locaux sur la variété caractéristique (les valeurs propres λi ), et les projecteurs propres associés, ne sont pas très réguliers près des basses fréquences. Essentiellement on a des équations
d’ondes : λj ∼ |ξ|, pour j0 + 1 ≤ j ≤ N et |ξ| ∼ 0. C’est problématique puisqu’on utilise le
calcul symbolique (2.18), qui est une forme de développement de Taylor des symboles.
La solution consiste à remarquer que les symboles en question s’écrivent tous comme des
produits p(εu(t, x))q(ξ). Dans ce régime basse-fréquence, on peut négliger la contribution de
v, et considérer seulement p(εua (t, x))q(ξ). Alors pour de tels symboles avec des variables
séparées, on peut écrire un calcul symbolique à la main, pour lequel seulement des dérivées
spatiales des symboles apparaissent dans le contrôle des normes d’opérateurs et des normes
de reste. Dans un cadre pseudo-différentiel il est assez naturel d’échanger des dérivées en
ξ contre des dérivées en x. C’est ce qu’on fait ici, le coût en étant simplement d’avoir à
supposer un peu plus de régularité pour ua , et donc pour la donnée.
2.4. Données oscillantes
Je donne dans ce paragraphe une description des équations homologiques dans le cas de
données oscillantes. On sort du cadre du Théorème 2.1, mais cela sera utile au Chapitre 5.
On suppose que le terme source est oscillant en temps et en espace :
X
B=
eip(k·x−ωt/)ε Bp (t, x, ξ),
p∈H
où H ⊂ Z est un ensemble
fini d’harmoniques caractéristiques. On cherche alors M sous
P
cette forme : M = p∈H eip(k·x−ωt/)ε Mp (t, x, ξ).
On veut expliciter le symbole principal de l’opérateur dans le membre de droite de (2.19),
où intervient en particulier
X
ψ
ip(k·x−ωt)/ε
opψ
opψ
opψ
ε (A)opε (M ) =
ε (A)e
ε (Mp ).
p∈H
Un calcul rapide en Fourier montre que
(2.25)
ikx/ε
opψ
f = eikx/ε opψ
ε (σ) e
ε (σ(· + k))f,
où le symbole dans le membre de droite est σ(x, ξ + k) : la composition à droite par l’exponentielle oscillante a introduit une translation en fréquence.
Donc on obtient
X
ψ
opψ
eip(k·x−ωt)/ε opψ
ε (A)opε (M ) =
ε (A(· + k)Mp ) + O(ε) ,
p∈H
et l’équation homologique (2.24) devient
(2.26)
B − A(0, · + k)M − M A(0) − ε∂t M = O(ε).
Dans ce cadre les relations de résonance sont
pω + λj (ξ + k) − λi (ξ) = 0.
CHAPITRE 3
UN THÉORÈME DE NASH-MOSER À PARAMÈTRE
Ce chapitre est un résumé de l’article [98], en collaboration avec Kevin Zumbrun. Nous
donnons un théorème de Nash-Moser à paramètre, en suivant la preuve remarquablement
simple donnée par Xavier Saint-Raymond dans [82]. Un exemple d’application est donné
par des systèmes de Schrödinger quasi-linéaires.
3.1. Cadre
On se donne des familles de Banach {Es }s∈R , {Fs }s∈R , et une famille d’équations
(3.1)
Φε (uε ) = 0,
uε ∈ Es ,
paramétrée par ε ∈ (0, 1). On suppose que pour un certain m ≥ 0
(3.2)
Φε ∈ C 2 (Es , Fs−m ),
pour tout s.
Dans les applications, m est l’ordre de l’opérateur différentiel qui se cache dans Φε , et les
Es et Fs sont des Sobolev ou des produits de Sobolev. En général, il faut supposer (3.2)
seulement pour les s0 suffisamment grands. En effet, dans l’estimation douce de produit
(1.16) c’est seulement pour s > d/2 que le majorant s’exprime en termes de normes Sobolev.
En général, il faut aussi supposer (3.2) vraie seulement pour des s pas trop grands, puisque se
cache dans Φε une solution approchée, c’est-à-dire qu’on comprend (3.1) comme une famille
d’équations de perturbations autour d’une solution approchée (voir la discussion générale au
Chapitre 1, en particulier page 11), pour laquelle on veut pouvoir envisager une régularité
seulement finie.
On note la norme | · |s dans Es et la norme k · ks dans Fs . On suppose que les normes
sont définies de sorte que les injections Es0 ,→ Es et Fs0 ,→ Fs pour s ≤ s0 aient des normes
σ 0 −σ
σ
σ0
inférieures à un : |·|s ≤ |·|s0 , k·ks ≤ k·ks0 , et qu’on peut interpoler : | · |s+σ . | · |s σ0 | · |s+σ
0,
0
0
0
pour 0 < σ < σ , avec la notation |u|s . |v|s pour |u|s ≤ C|v|s , avec C > 0 indépendant
de u et v.
On suppose aussi l’existence d’une famille d’opérateurs de régularisation : Sθ : Es → Es
0
0
pour θ > 0, tels que pour s ≤ s0 , |Sθ u − u|s . θs−s |u|s0 , |Sθ u|s0 . (1 + θs −s )|u|s . Dans les
Sobolev, on vérifie facilement que les opérateurs de troncature haute-fréquence conviennnent.
28
CHAPITRE 3. UN THÉORÈME DE NASH-MOSER À PARAMÈTRE
La première hypothèse donne des bornes douces pour Φε et ses premières dérivées.
C’est-à-dire qu’on suppose, pour tous u, v ∈ Es+m :
(3.3)
kΦε (u)ks ≤ C0 (1 + |u|s+m ),
k(Φε )0 (u) · vks ≤ C1 (ε−γ |v|s0 +m |u|s+m + |v|s+m ),
et aussi une borne tout à fait similaire pour (Φε )00 . La première inégalité (3.3)(i) indique
simplement que Φε agit comme un opérateur différentiel ou pseudo-différentiel d’ordre m.
La seconde inégalité (3.3)(ii) fait intervenir une perte ε−γ , et aussi un “petit” indice s0 .
Pourquoi cette perte et qu’est-il raisonnable de supposer pour les constantes C0 et C1 ?
Comme indiqué dans le Chapitre 1 (voir en particulier la discussion page 12), on veut pouvoir
prendre des exemples dans des Sobolev munis de normes semi-classiques (1.15). Avec ces
normes, on a l’inégalité douce (1.16), mais l’injection H s ,→ L∞ a une grande norme ∼ ε−d/2
(voir encore la discussion page 12 dans le Chapitre 1). L’estimation de Moser non-linéaire
(3.4)
f ∈ C ∞ , f (0) = 0,
kf (u)kHεs . C(|u|L∞ )kukHεs ,
fait donc intervenir une constante C ε−d/2 kuk
d/2+
Hε
, avec d/2+ > d/2.
On suppose donc pour C0 et C1 seulement des bornes uniformes dans un petit voisinage
de l’origine : supε>0 sup|u|Es .εγ (C0 , C1 ) < ∞.
0
La deuxième hypothèse énonce le fait que si u est assez petit en norme basse, alors
(Φε )0 (u) a un inverse à droite. C’est-à-dire qu’on peut résoudre en v les équations (Φε )0 (u)v =
f. On suppose que cela se fait avec un mauvais contrôle de l’action de l’inverse à droite,
dans lequel il peut apparaître à la fois des pertes en ε et des pertes de dérivées.
Précisément, on suppose qu’il existe un indice de perte de régularité r ≥ 0, et un indice
de perte de puissance de ε : κ ≥ 0, tels que pour tout s, pour u dans un petit voisinage de
l’origine : |u|s0 +m+r . εγ , l’application (Φε )0 (u) : Es+m → Fs ait un inverse à droite Ψε (u) :
(Φε )0 (u)Ψε (u) = Id :
Fs → Fs ,
tel que pour tout g ∈ Fs+r0 ,
(3.5)
|Ψε (u)g|s . ε−κ (kgks0 +m |u|s+r + kgks+r ).
On peut vérifier que dans le cadre très favorable d’opérateurs quasi-linéaires symétriques
d’ordre un, l’estimation (3.5) est satisfaite, avec γ = 1+d/2, κ = 2+d/2, r = 1. Evidemment
dans ce cadre les pertes sont artificielles : on sait bien qu’il ne faut pas tenter de résoudre
des équations quasi-linéaires par linéarisation.
La troisième hypothèse exprime le fait que les équations (3.1) sont des équations de
perturbation autour d’une famille de solutions approchées : on suppose que pour un certain
k ≥ 0, on a la borne kΦε (0)ks . εk .
En quoi cette hypothèse décrit-elle l’existence de solutions approchées ? Etant donnée
Φε ∈ C 2 (Es , Fs−m ) s’il existe une famille uεa ∈ Es1 de solutions approchées de (3.1), au sens
où kΦε (uεa )ks . εk , alors les translatées Φ̃ε := Φε (uεa + ·) satisfont kΦ̃ε (0)ks . εk . De même
les deux premières hypothèses sont stables par translation.
29
3.3. EXEMPLE D’APPLICATION
3.2. Résultat
Théorème 3.1 (Existence). — Sous les hypothèses ci-dessus, si la famille de solutions
approchées est assez précise, c’est-à-dire si k > 2γ + κ, alors la suite
uε0 := 0,
(3.6)
uεj+1 := uεj + Sθjε vjε ,
vjε := −Ψε (uεj )Φε (uεj ),
est bien définie et converge, quand j → ∞ à ε fixé, vers une solution uε de (3.2).
La preuve donne une suite θjε qui diverge très vite vers l’infini : θjε = ε−ζj , pour un certain
ζ > 0 à choisir en fonction des paramètres du problème. Par ailleurs, la preuve demande
beaucoup de régularité, c’est-à-dire qu’on doit travailler dans des Ep , avec p qui tend vers
l’infini quand k − (2γ + κ) tend vers 0.
Dans [3], Alvarez-Samaniego et Lannes donnent un théorème de Nash-Moser pour des
familles d’opérateurs dont les fréquences caractéristiques sont O(1/ε). Mais ils se placent
dans un régime d’optique critique, et non sur-critique, et supposent en particulier qu’après
factorisation des oscillations, les équations linéariśees peuvent se résoudre avec une perte de
régularité, mais sans perte en ε (voir l’Hypothèse 2 de [3]).
3.3. Exemple d’application
Nous considérons des systèmes de la forme
X
(3.7) ∂t vj + iλj ∆x vj =
bjj 0 (v, ∂x )vj 0 + cjj 0 (v, ∂x )v̄j 0 ,
1 ≤ j ≤ n,
t ≥ 0, x ∈ Rd ,
1≤j 0 ≤n
0
0
avec d ≥ 2. Les coefficients λj sont supposés réels et distincts deux
P à deux, et bjj et cjj sont
des opérateurs différentiels d’ordre un : (bjj 0 , cjj 0 )(v, ∂x ) = 1≤k≤d (bkjj 0 (v), ckjj 0 (v))∂xk ,
avec des coefficients bkjj 0 , ckjj 0 qui sont homogènes d’ordre ` en v, où l’indice d’homogénéité
` est supérieur à 2.
On suppose :
(3.8)
pour tout j, j 0 tels que λj + λj 0 = 0, on a cjj 0 = cj 0 j . Pour tout j, =m bjj ≡ 0.
Ces conditions sont des conditions de compatibilité, tout à fait analogues aux conditions
de transparence (2.11).
Un exemple de tel système est donné par
(
∂t v1 + i∆v1 = b12 (v, ∂x )v2 + c11 (v, ∂x )v̄1 + c(v)∂x v̄2 ,
∂t v2 − i∆v2 = b22 (v, ∂x )v2 + c(v)∂x v̄1 + c22 (v, ∂x )v̄2 ,
avec b22 réel.
Métivier et Rauch donnent dans l’article [72] (Théorème 1.5 ; voir aussi [70], Théorème
8.1.2) un théorème d’existence et d’unicité locale pour (3.7) sous l’hypothèse (3.8).
Les données que nous considérons sont
(3.9)
v(ε, 0, x) = εσ a(ε, x),
avec σ > 0, et a de la forme a(ε, x) = a0 (x/ε), ou bien a(ε, x) = a0 (x)eix·ξ0 /ε , pour une
certaine fréquence ξ0 ∈ Rd , avec un profil a0 ∈ H s̄ , avec s̄ très grand (voir la remarque qui
suit l’énoncé du théorème au sujet de la nécessité de prendre des données très régulières).
Le temps d’existence associé à ces données dans le théorème de Métivier et Rauch tend
vers 0 quand ε → 0; pour s > σ, les normes Sobolev H s de telles données sont en effet
grandes à la limite ε → 0.
30
CHAPITRE 3. UN THÉORÈME DE NASH-MOSER À PARAMÈTRE
Le résultat est le suivant :
Théorème 3.2. — Sous l’hypothèse 3.8, si le produit σ` (amplitude de la donnée fois degré
d’homogénéité des coefficients) est assez grand, alors les solutions de (3.7) issues de (3.9)
sont définies sur des intervalles de temps indépendants de ε.
L’article [98] contient bien sûr un énoncé plus précis, avec une condition sur σ` explicite,
en fonction des paramètres du problème. Le Théorème 3.2 énonce donc le fait qu’on peut
pousser le temps d’existence pour certaines solutions singulières de Métivier et Rauch par
le biais de Nash-Moser, si on est prêt à supposer beaucoup de régularité pour les données.
La preuve passe par une réduction à une forme normale, comme dans le Chapitre 2. La
solution approchée est ici l’action du flot libre de Schrödinger sur la donnée, c’est-à-dire
t
A(∂x ) := diag (λ1 , . . . , λn , −λ1 , . . . , −λn ) ∆x .
ua (ε, t, x) = εσ exp −i 2 A(ε∂x ) a(ε, x),
ε
CHAPITRE 4
APPROXIMATIONS DE FLOTS D’OPÉRATEURS
PSEUDO-DIFFÉRENTIELS
Ce chapitre est un résumé du preprint [92].
4.1. Cadre
On cherche à décrire les solutions de problèmes de Cauchy para-différentiels linéaires :
(4.1)
v(0) ∈ H s , f ∈ L∞ ([0, T (ε)], H s (Rd )),
∂t v = opψ
ε (M )v + f,
v(ε, t, x) ∈ RN ,
dans l’intervalle [0, T (ε)], avec T (ε) = T∗ | ln ε|, pour T∗ > 0. On utilise ici les notations
de l’Appendice page 57, en particulier la notation opψ
ε (σ) pour désigner l’opérateur paradifférentiel associé au symbole σ en quantification semi-classique.
Le but est de décrire des résultats d’instabilité. Dans le cas trivial opψ
ε (M ) = M < 0,
la croissance de la solution v est en e−tM , et donc le temps limite d’observation O(| ln ε|)
est le temps au bout duquel le facteur d’amplification sera O(ε−k ), pour un certain k. Si la
donnée est O(εσ ), alors il faut choisir T∗ assez grand, en fonction de M et σ, pour observer
une instabilité.
Pourquoi (4.1) ? On peut penser à l’opérateur opψ
ε (M ) comme étant issu d’opérations
de projections et localisations, à partir d’un opérateur différentiel matriciel. Par exemple,
si on considère W solution du système (2.20) page 24, et si on se donne une troncature en
fréquence χ ∈ Cc∞ (Rdξ ), alors opε (χ)W satisfait une équation de la forme (4.1).
On fait une hypothèse de bornes uniformes en temps pour le symbole M :
α β
∂x ∂ M (ε, t, x, ξ) ≤ Cα,β (1 + |ξ|2 )−|β|/2 ,
α, β ∈ Nd , Cα,β > 0,
(4.2)
ξ
uniformément en ε, en temps et en espace. C’est en vue d’appliquer un théorème de type
Calderón-Vaillancourt qu’on borne des dérivées de M (voir la Proposition 0.3 page 58).
Le point important dans (4.2) est l’uniformité en temps. Un symbole M ∈ Γ0∞ qui est
indépendant du temps satisfait (4.2).
4.2. Flot symbolique
Le flot symbolique est défini comme la solution sur [0, T (ε)] de la famille d’équations
différentielles linéaires
(4.3)
∂t S0 + M S0 = 0,
où x et ξ sont des paramètres.
S0 (τ ; τ ) = Id,
32
CHAPITRE 4. APPROXIMATIONS DE FLOTS
Si M ne dépend pas de t, la solution de (4.3) est S0 (τ ; t) = exp − M (t − τ ) . Si M ne
dépend pas de ξ, alors opψ
ε (M ) est l’opérateur de multiplication par M (t, x), et (4.1) est
une équation différentielle en dimension finie, dont l’opérateur solution est S0 .
On note Σ l’opérateur solution de (4.1), qui satisfait par définition
∂t Σ + opψ
ε (M )Σ = 0.
(4.4)
Nous allons montrer que opψ
ε (S0 ) est une bonne approximation de Σ.
On commence par remarquer qu’on a les bornes, pour α, β ∈ Nd , pour un certain
m(α, β) ≥ 0 :
(4.5) ∂xα ∂ξβ S0 (τ ; t, x, ξ) ≤ Cα,β (1 + |t − τ |m(α,β) ) exp (t − τ )CM ,
CM = sup M,
ε,t,x,ξ
Ces bornes sont simplement déduites de (4.3) par Gronwall. On a par exemple
Z t
|S0 (τ ; t)| ≤
|M (t0 )||S0 (τ, t0 )| dt0 ,
τ
dont on déduit directement (4.5) pour α = β = 0 par Gronwall. Puis on peut exprimer ∂x S
en fonction de ∂x M et S, par
Z t
∂x S0 = −
S0 (t0 ; t)(∂x M )(t0 )S0 (τ ; t0 ) dt0 .
τ
De même pour les dérivées d’ordre supérieur.
Dans quelle mesure l’opérateur opψ
ε (S0 ) approche-t-il l’opérateur solution (4.4) ? On calcule
ψ
ψ
∂t opψ
ε (S0 ) = opε (∂t S0 ) = −opε (M S0 ).
Ensuite par le calcul symbolique (voir la Proposition 0.5 page 58) :
ψ
ψ
ψ
2
opψ
ε (M S0 ) = opε (M )opε (S0 ) − εopε (M ]S0 ) − ε (. . . ),
P
où M ]S0 := M ]1 S0 = |α|=1 (−i)∂ξα M ∂xα S0 , en accord avec la notation (0.13) page 58.
On a obtenu
(4.6)
ψ
ψ
ψ
2
∂t opψ
ε (S0 ) + opε (M )opε (S0 ) = εopε (M ]S0 ) + ε (. . . ).
Le terme principal dans l’erreur est donc εopψ
ε (M ]S0 ). Ce terme est-il petit ?
La Proposition 0.3 nous dit que l’action
de opψ
ε (M ]S0 ) dans les espaces de Sobolev
β
est contrôlée par le sup en (x, ξ) de ∂ξ (M ]S0 ), pour |β| ≤ d. Par (4.2) et (4.5), on a
β
∂ (M ]S0 ) . etCM , à des facteurs multiplicatifs près qui croissent comme des polynômes
ξ
en t, donc comme des puissances de | ln ε|.
Le produit εetCM est petit seulement pour des temps d’observation T∗ assez petits : la
condition εeT∗ | ln ε|CM 1 impose en effet T∗ 1/CM . Et donc sur [0, T (ε)], on ne va
pouvoir observer d’amplification seulement pour des solutions qui ne sont pas trop petites
initialement : si v(0) = O(εσ ), il faudra choisir σ < 1 pour avoir v(T∗ | ln ε|) grand.
Pour pouvoir envisager le cas de données très petites, on introduit un correcteur S1 , défini
par
(4.7)
∂t S1 + M S1 + M ]S0 = 0,
S1 (t0 ; t0 ) = 0.
Alors, par le calcul symbolique,
∂t opε (S0 + εS1 ) + opε (M )opε (S0 + εS1 ) = ε2 opε M ]2 S0 + M ]S1 + ε3 (. . . ),
P
où M ]2 S0 = − |α|=2 ∂ξα M ∂xα S0 .
(4.8)
4.3. RÉSULTAT
33
En comparant (4.6) et (4.8), on voit qu’on a gagné formellement une puissance de ε dans
l’erreur au membre de droite : le correcteur S1 (4.7) a absorbé le terme M ]S0 .
On peut bien sûr pousser ce développement en puissances de ε à un ordre aussi élevé
que le permet la régularité de M. On définit donc S2 , . . . , Sq0 comme la solution du système
triangulaire
X
(4.9)
∂t Sq + M Sq +
M ]q1 Sq2 = 0,
Sq (τ ; τ ) = 0,
q1 +q2 =q
dans l’intervalle [0, T (ε)]. On vérifie, à nouveau par application du lemme de Gronwall, que
les correcteurs et leurs dérivées ont le même taux de croissance exponentiel CM que S0 .
X
εq Sq , on a donc, pour q0 assez grand, c’est-à-dire CM T∗ < q0 ,
En posant S =
0≤q≤q0
l’égalité
(4.10)
ψ
ψ
ψ
∂t opψ
ε (S) + opε (M )opε (S) = εopε (ρ(τ ; t)),
avec les bornes
(4.11)
CM (t−τ )
kopψ
kwkHεs ,
ε (S(τ ; t)kHεs . C(| ln ε|)e
et
(4.12)
kopψ
ε (ρ(τ ; t))wkHεs . C(| ln ε|)kwkHεs ,
les normes Sobolev semi-classiques étant définies en (1.15), avec une fonction C qui croît
polynômialement.
4.3. Résultat
Théorème 4.1. — L’unique solution du problème de Cauchy (4.1), avec M satisfaisant
(4.2), est donnée par
Z t
ψ
0
ζ
0
(4.13) v = opε (S(0; t))v(0) +
opψ
f (t0 ) + εζ R2 (t0 )v(0) dt0 ,
ε (S(t ; t)) Id + ε R1 (t )
0
avec ζ := q0 − CM T∗ , où les termes d’erreur R1 et R2 satisfont les bornes uniformes en
temps : k(R1 , R2 )(t)kL2 →L2 . | ln ε|∗ .
Dans l’énoncé du Théorème 4.1, q0 est le nombre de correcteurs qui interviennent dans
la construction de S, CM est défini en (4.5), et T∗ est introduit au début du paragraphe 4.1.
L’existence et l’unicité d’une solution à (4.1) est donnée par le théorème de Cauchys
Lipschitz, l’opérateur opψ
ε (M ) étant un champ de vecteur dans tous les H . (Voir en effet
la borne (4.2) et la Proposition 0.3 page 58.)
Le contenu du théorème est donc de donner une description de la solution. Avec (4.10)
et les bornes (4.11) et (4.12), la preuve en est particulièrement simple.
En effet, v définie par
Z t
ψ
0
0
0
(4.14)
v := opε (S(0; t))v(0) +
opψ
ε (S(t ; t))g(t ) dt
0
est solution si et seulement si, pour tout t,
(Id + εr(t))g = f − εopψ
ε (ρ(0; t))v(0),
Z t
0
0
0
où r est l’opérateur intégral linéaire r(t) : v →
opψ
ε (ρ(τ ; t ))v(t ) dt . La borne (4.12) im-
(4.15)
0
plique l’inversibilité de Id + εr(t) dans l’algèbre de Banach des applications linéaires de H s
34
CHAPITRE 4. APPROXIMATIONS DE FLOTS
vers H s . On résout donc (4.15) : g = (Id + εr(t))−1 f − εopψ
ε (ρ(0; t))v(0) , et on obtient
ainsi (4.13).
4.4. Comparaison avec Gårding
On utilisera la représentation (4.13) dans des cas où M prend des valeurs négatives et la
solution de (4.1) est amplifiée. La représentation (4.13) va nous permettre en particulier de
suivre l’amplification maximale, via la choix d’une donnée.
Par exemple, si le symbole −M est indépendant du temps, scalaire, et a un maximum
positif en (x0 , ξ0 ), on choisira une donnée petite, rapidement oscillante à la fréquence ξ0 et
localisée autour de x0 : quelque chose comme v(ε, 0, x) = εK eix·ξ0 /ε θ(x), avec θ troncature
autour de x0 , telle que θ(x0 ) = 1. Alors l’action de l’opérateur solution sur la donnée est
grossièrement évaluée comme suit :
ψ
opψ
ε (S(0; t)v(ε, 0, x) = opε (S0 (0; t)v(ε, 0, x) + ε(. . . )
Z
K ix·ξ0 /ε
=ε e
S(0; t, x, ξ0 + εξ)θ̂(ξ) dξ + ε(. . . )
= εK eix·ξ0 /ε S(0; t, x, ξ0 )θ + ε(. . . )
' εK e−tM (x0 ,ξ0 ) + ε(. . . ),
et on a obtenu un taux de croissance maximal −M (x0 , ξ0 ).
En fait, on peut tout à fait obtenir un tel taux de croissance maximal sans passer par la
construction d’un opérateur solution, via l’inégalité de Gårding, qui affirme que si a ∈ Γ0r
et <e a ≥ 0, alors l’opérateur <e opε (a) est positif, à un opérateur d’ordre 0 et d’amplitude
ε près. (En fait le reste est régularisant, mais cela nous importe peu ici.)
Cette discussion vaut aussi bien dans le cas scalaire que dans le cas des systèmes : si le
maximum des parties réelles du spectre de −M est atteint en (x0 , ξ0 ), on va choisir une
donnée qui pointe dans une direction spectrale associée. On a aussi une version matricielle
de l’inégalité de Gårding, qui va donner le même taux d’amplification optimal : si A ∈ Γ0r et
<e A ≥ 0 (avec <e A = (A + A∗ )/2), alors <e opε (A) est positif à O(ε) près, l’erreur étant
d’ordre zéro.
Quel est donc l’intérêt du Théorème 4.1 ? Une réponse possible est la suivante : il nous
permet de traiter le cas matriciel quand les éléments spectraux sont peu réguliers, par
exemple dans le cas d’un maxium spectral pour le symbole autour d’une valeur propre non
semi-simple. Avec Gårding, il faut en effet isoler la partie positive de l’opérateur, c’est-à-dire
projeter sur les modes croissants. Une telle projection ne sera typiquement pas régulière si
les valeurs propres ne sont pas régulières. A l’inverse, une condition de croissance pour le flot
symbolique peut être vérifiée même dans une situation où on n’a pas de régularité spectrale.
Les Chapitres 5 et 6 apportent des exemples de telles situations.
CHAPITRE 5
UN CRITÈRE DE STABILITÉ POUR DES OSCILLATIONS
HAUTE-FRÉQUENCE
Dans ce chapitre, correspondant au preprint [66] en collaboration avec mon étudiant
Lu Yong, nous donnons un cadre dans lequel la condition de transparence (2.11) peut être
raffinée en un critère de stabilité.
5.1. La condition de type Levi-Lax
Considérons un problème de Cauchy hyperbolique symétrique avec des données rapidement oscillantes.
On isole une relation de résonance : ω − λi (ξ + k) + λj (ξ) = 0, voir le paragraphe 2.4
du Chapitre 2. On suppose que l’ensemble des fréquences ξ qui satisfont une telle relation
est borné. C’est presque toujours le cas quand les valeurs propres ne sont pas homogènes
d’ordre un, donc dès que A0 6= 0 (avec la notation (1.5)). On se donne χ ∈ Cc∞ (Rdξ ) une
troncature autour de telles fréquences résonantes.
On imagine alors que par des changements de variables adéquats, on peut se ramener à
l’étude du système d’interaction en (v1 , v2 ) ∈ R2 :
√
1
v1
v1
iµ1
− εb12
√
(5.1)
∂t
+ opψ
= f,
v2
εb21
iµ2
v2
ε ε
où µ1 (ξ) = χ(ξ) λi (ξ + k) − ω , µ2 = χλj , de sorte que la résonance correspond à un
croisement des modes : µ1 = µ2 . La fonction χ est une troncature lisse. Les coefficients
d’interaction bij (t, x, ξ) sont scalaires, et on suppose le produit b12 b21 réel. Le terme source
f représente les termes d’interaction d’ordre inférieur, les petits termes non-linéaires, les
ε
restes para-différentiels, etc. Il joue le rôle joué par opψ
ε (D) + εR dans (8.19).
√
iµ1
− εb12
√
Comment décrire la solution de (5.1) ? Le symbole M :=
a pour
εb21
iµ2
spectre
1/2
1
i
(5.2)
µ± := µ1 + µ2 ±
4εb12 b21 − (µ1 − µ2 )2
.
2
2
Donc, si b12 b21 > 0 en une fréquence résonante : µ1 − µ2 = 0, le spectre de M renconte le
demi-plan instable {<e z < 0}. C’est bien le demi-plan gauche qui est instable ici puisque
M se trouve dans le membre de gauche de (5.1).
36
CHAPITRE 5. UN CRITÈRE DE STABILITÉ
Alors, si dans (5.1) on identifie symboles et opérateurs, c’est-à-dire qu’au lieu de (5.1) on
considère la famille d’équations différentielles paramétrée par ξ :
√
1
y1
y1
iµ1
− εb12
√
(5.3)
∂t
= 0,
+
εb21
iµ2
y2
y2
ε
on s’attend à pouvoir mettre en évidence une croissance de (y1 , y2 ).
Deux questions se posent donc :
(a) dans le cadre plus favorable de (5.3) (problème en dimension finie), si b12 b21 > 0, comment prouver la croissance exponentielle de la solution autour d’une fréquence résonante ?
(b) dans quelle mesure peut-on se fier à l’analogie entre (5.1) et (5.3) ?
Nous apportons des réponses à ces deux questions dans ce chapitre. La question (a) est
élémentaire, mais en observant en détail le spectre de M (5.2) on découvre une difficulté :
les résonances µ1 − µ2 = 0, c’est-à-dire les fréquences
√ pour lesquelles on s’attend à prouver
une croissance exponentielle, sont à une distance O( ε) des points de croisement µ− = µ+ .
Et en les points de croisement, les valeurs propres ne sont pas différentiables, et les vecteurs
propres associés non plus. On ne peut donc pas répondre simplement à la question (a) par
diagonalisation pour les fréquences résonantes. Par ailleurs, le fait que les valeurs propres
ne soient pas régulières dans un voisinage de la résonance est précisément ce qui justifie le
recours à la formule de représentation du Chapitre 4 (voir à ce sujet le paragraphe 4.4 page
34).
La réponse à la question (b) est donnée essentiellement par la construction du Chapitre
4.
La condition de signe pour b12 b21 est une condition de type Levi-Lax [57] : elle porte sur
le symbole sous-principal en un point de faible hyperbolicité (valeurs propres non séparées :
µ1 = µ2 ).
Et si b12 b21 < 0 ? Alors on peut symétriser (5.1), et prouver un résultat de stabilité. Le
signe de b12 b21 donne donc un critère de stabilité pour (5.1) (c’est-à-dire pour les solutions
WKB sous-jacentes). Je vais donner dans ce chapitre un cadre qui permet effectivement de
se ramener à des systèmes d’interaction de ce type.
5.2. Cadre
Pour des systèmes (qu’on suppose semi-linéaires simplement pour simplifier les notations),
avec des échelles un peu différentes de celles du Chapitre 2 :

X
1
1

A(ε, u)∂xj u = √ B(u, u)
 ∂t u + A0 +
ε
ε
(5.4)
1≤j≤d


u(ε, 0, x) = <e a(ε, x)eik·x/ε + εK ϕ(ε, x),
nous faisons l’hypothèse que A(∂x ) + A0 a une décomposition spectrale lisse :
X
(5.5)
A0 + A(iξ) :=
iλj (ξ)Πj (ξ),
1≤j≤J
d
pour un certain J fixé, pour tout ξ ∈ R , avec des valeurs propres réelles lisses λj et des
projecteurs propres lisses Πj . C’est-à-dire qu’il peut se produire des points de croisement
sur la variété caractéristique, mais on suppose que ces points de croisement ne conduisent
pas à des pertes de régularité.
5.3. RÉSULTATS
37
On suppose qu’il existe une solution WKB approchée précise ua , avec la donnée ua (ε, 0, x) =
<e a(x)eik·x/ε . On note
P u0 le terme principal de ua , qu’on décompose en harmoniques oscillantes : u0 (ε, t, x) = ± ei±(k·x−ωt)/ε u0,± , avec la condition de polarisation
(5.6)
u0,± = P (±β)u0,± ,
β = (ω, k), Im P (β) = vect (e+ ), Im P (−β) = vect (e− ).
On suppose pour simplifier les notations que P (β) et P (−β) sont de rang 1, générés par les
vecteurs constants ~e+ et ~e− .
On note Rij les ensembles résonants, définis par
Rij := ξ ∈ Rd , ω = λi (ξ + k) − λj (ξ) .
˜ avec ξ˜ = ξ − κ,
Notons que Rij 6= Rji , et que si ξ ∈ Rij , alors −ω = λj (ξ˜ − k) − λi (ξ),
de sorte que les ensembles Rij comprennent, éventuellement à translation près, toutes les
résonances envisagées au paragraphe 2.4 du Chapitre 2.
Les familles de matrices Πi (ξ + k)B(~e+ )Πj (ξ) et Πj (ξ)B(~e− )Πi (ξ + k), sont appelées
coefficients d’interaction associés à la résonance (i, j).
Un coefficient d’interaction Πi (· + k)B(~e+ )Πj ou Πj B(~e− )Πi (· + k) est dit transparent si
la condition de compatibilité (2.11) est satisfaite, c’est-à-dire si
|Πi (ξ + k)B(~e+ )Πj (ξ)| ≤ C|λi (ξ + k) − ω − λj (ξ)|,
ou
|Πj (ξ)B(~e− )Πi (ξ + k)| ≤ C|λi (ξ + k) − ω − λj (ξ)|,
pour un certain C > 0, pour tout ξ ∈ Rd . Bien sûr c’est seulement dans un voisinage de Rij
que ces conditions ne sont pas trivialement satisfaites.
On fait une première hypothèse qui dit que tous les coefficients d’interaction sont transparents, sauf ceux associés à la résonance (1, 2). C’est une hypothèse assez forte, mais qui a
le mérite de s’énoncer simplement :
Hypothèse 5.1. — On suppose que
(i) pour tous (i, j) 6= (1, 2), les coefficients d’interaction associés à la résonance (i, j) sont
transparents,
(ii) l’ensemble R12 est borné,
(iii) pour tout ξ dans un voisinage de R12 , les coefficients d’interaction associés à la
résonance (1, 2) sont de rang au plus un.
On verra plus bas une hypothèse plus générale. La condition (ii) est satisfaite par exemple
dès que λ1 et λ2 sont des branches non bornées et non asymptotiques. La condition (iii) est
là simplement pour simplifier les considérations d’algèbre linéaire dans la preuve.
5.3. Résultats
Dans le cadre décrit ci-dessus, le signe du maximum, pris sur l’ensemble résonant, de la
trace du produit des coefficients d’interaction
(5.7)
Γ := sup tr Π1 (ξ + k)B(~e+ )Π2 (ξ)B(~e− )Π1 (ξ + k)
ξ∈R12
donne un critère de stabilité pour ua :
38
CHAPITRE 5. UN CRITÈRE DE STABILITÉ
Théorème 5.2. — Sous l’hypothèse de décomposition spectrale lisse (5.5), et sous l’Hypothèse 5.1 :
• si Γ > 0, étant donné K > 0, on peut trouver T∗ > 0, tel que, pour une certaine
∞
d
famille
√ ϕ(ε, ·) ∈ Cc (R ) de perturbations initiales, si la solution u de (5.4) est définie sur
[0, T∗ ε| ln ε|], alors pour tout 0 < α < K :
(u − ua )(t) ∞
L
= +∞.
(5.8)
sup
sup
√
εα
0<ε≤ε0 0≤t≤T∗ ε| ln ε|
• Si Γ < 0, alors pour K assez grand (en fonction de d), la solution de (5.4) est définie
sur un intervalle [0, T ], avec T > 0 indépendant de ε, et on a l’estimation
|u − ua |L∞ ([0,T ],Hεs ) ≤ CT εK .
Dans le cas instable, on décrit donc des déviations de taille O(εα ), avec α > 0. Ces
déviations sont petites, mais instantanées, et la déviation relative, par rapport à la donnée,
est arbitrairement grande : on décrit une instabilité d’Hadamard et pas une instabilité de
Lyapunov.
Toujours dans le cas stable, on peut prouver un résultat d’existence en temps
√
O( ε| ln ε|) (à la Lannes-Rauch [56]), et une estimation de déviation par rapport à la
solution approchée, estimation plus faible que (5.8), sur un intervalle d’existence (voir le
Théorème principal de [66]).
Toujours dans le cas instable, on peut
√ prouver en suivant Lannes et Rauch [56] l’existence
sur des intervalles de la forme [0, T0 ε| ln ε|], ce qui correspond à une amélioration d’ordre
O(| ln ε|) du temps d’existence donné par la théorie classique. Mais typiquement T0 est plus
petit que le temps d’instabilité T∗ .
On a implicitement supposé que la trace du produit des coefficients d’interaction est
réelle. Dans le cas complexe, la bonne définition de l’indice de stabilité est le maximum de
la partie réelle et de la valeurs absolue de la partie imaginaire de la trace du produit.
On pourrait objecter que l’hypothèse de transparence (Hypothèse 5.1) est très forte. C’est
vrai : il est en fait difficile de construire un exemple non trivial avec autant de transparence !
Une version plus faible, et typiquement satisfaite par les systèmes issus de la physique, est
la suivante :
Hypothèse 5.3. — On suppose qu’il existe un ensemble d’indices J ⊂ {1, · · · , J}2 tel que
(i, i) ∈
/ J pour tout i, et par ailleurs :
(i) pour tout (i, j) ∈ J , Rij n’est pas vide, et les coefficients d’interaction associés ne
sont pas transparents ; à l’inverse pour tout (i, j) ∈
/ J , les coefficients d’interaction
(i, j) sont transparents ;
(ii) l’ensemble ∪(i,j)∈J Rij est borné.
(iii) pour tous (i, j) 6= (i0 , j 0 ) dans J , l’intersection (Rij +pk)∩Ri0 j 0 est vide pour |p| ≤ 2,
(iv) enfin, pour tout ξ dans un voisinage de ∪(i,j)∈J Rij , les coefficients d’interaction
(i, j), avec (i, j) ∈ J , sont de rang au plus un.
L’indice de stabilité est alors
(5.9)
Γ := sup
sup tr Πi (ξ + k)B(~e+ )Πj (ξ)B(~e−1 )Πi (ξ + k) .
(i,j)∈J ξ∈Rij
Le résultat s’étend à ce cadre : on a la même conclusion en remplaçant dans le Théorème
5.2 l’Hypothèse 5.1 par l’Hypothèse 5.3.
5.4. SCHÉMA DE LA PREUVE DANS LE CAS INSTABLE : Γ > 0
39
5.4. Schéma de la preuve dans le cas instable : Γ > 0
Je donne ici une idée de la preuve dans le cas instable. Une courte remarque sur le cas
stable est faite à la fin de ce paragraphe.
On fait l’Hypothèse 5.1, et on travaille avec la variable perturbative v définie par u =
ua +εα v. Le terme source est alors B(ua )v = B(ua , v)+B(v, ua ). En fait seul compte B(u0 ),
la contribution des termes correcteurs du développement WKB étant petite.
On travaille par l’absurde
√ en niant le résultat qu’on veut obtenir. On suppose que si
l’existence de v sur [0, T∗ ε| ln ε|] est acquise, alors on a la borne uniforme
(5.10)
sup
sup
√
0<ε<ε0 0≤t≤T1
|v(t)|L∞ (Rd ) < ∞.
ε| ln ε|
Le but est alors de chercher la bonne perturbation ϕ qui va amener à une contradiction.
Remarquons qu’avec l’estimation a priori (5.10), la preuve est complètement linéaire !
Premier changement de variable : projection et translation en fréquence
On pose
(5.11)
V1 := e−i(k·x−ωt)/ε opε (Π1 )v,
Le système en V = (V1 , . . . , VJ ) ∈ R
(5.12)
JN
Vj := opε (Πj )v,
2 ≤ j ≤ J.
est
1
i
∂t V + opε (A)V = √ opε (B)V + F,
ε
ε
où le symbole A est la matrice diagonale
A := diag λ1 (· + k) − ω, λ2 , λ3 , . . . , λJ ,
avec |F |L2 . |V |L2 , uniformément en ε et t, du fait de (5.10).
On remarque que les résonances (1, 2) sont des points de croisement dans le spectre du
symbole A.
Deuxième changement de variable : réduction à une forme normale
On élimine les couplages entre les composantes (V1 , V2 ) et (V3 , . . . , VJ ) par réduction à
forme normale, tout à fait comme au Chapitre 2.
Pour un Q d’ordre 0 adéquat, dont l’existence est garantie par le point (i) de l’Hypothèse
√
√ −1 √
5.1, et pour la variable W (t) := Id + εQ( εt)
V ( εt) (noter le changement d’échelle
en temps), le système devient
√
i
(5.13)
∂t W + √ opε (A)W = opε (B)W + εF̃ ,
ε
χB[1,2] 0
en négligeant les petits termes sources, où B :=
, la troncature χ0 étant
0
0
2N ×2N
supportée dans un voisinage de R12 . La matrice B[1,2] ∈ R
est définie par
0
Π1 (· + k)B(~e+ )Π2
B[1,2] :=
.
Π2 B(~e− )Π1 (· + k)
0
Le terme source F̃ est borné dans L2 comme F plus haut.
Troisième changement de variable : localisation micro-locale
Avec la condition de polarisation (5.6), on remarque que
(5.14)
tr Π1 (ξ + k)B(u01 (0, x))Π2 (ξ)B(u0,−1 (0, x))Π1 (ξ + k) = |a(0, x)|2 γ(ξ),
40
CHAPITRE 5. UN CRITÈRE DE STABILITÉ
où a est l’amplitude de la donnée WKB, et
γ(ξ) := tr Π1 (ξ + k)B(~e+ )Π2 (ξ)B(~e− )Π1 (ξ + k) .
Par continuité de a et décroissance à l’infini (du fait de sa grande régularité Sobolev), et
par compacité de R12 et l’hypothèse Γ > 0, il existe (x0 , ξ0 ) tel que
(5.15)
|a(0, x0 )| = sup |a(0, x)| > 0,
x∈Rd
γ(ξ0 ) = sup γ(ξ) > 0.
ξ∈R12
On se donne une localisation spatiale δ ∈ Cc∞ (Rdx ), avec δ ≡ 1 dans un voisinage de x0 ,
une localisation fréquentielle χ ∈ Cc∞ (Rdξ ), avec χ ≡ 1 dans un voisinage de ξ0 , et on pose
(5.16)
W1 := opε χ δW ,
W2 := opε χ (1 − δ)W ,
W3 := 1 − opε (χ) W,
de sorte que W = W1 + W2 + W3 .
Le système en (W1 , W2 , W3 ) est

√
1
M 0


W1 = εf1 ,
∂t W1 + √ opε



0
Ã
ε



√
i
(5.17)
∂t W2 + √ opε A)W2 = opε (B2 )W2 + εf2 ,

ε




√
i


∂t W3 + √ opε (A)W3 = εf3 ,

ε
où M est le symbole défini au paragraphe 5.1 de ce chapitre, avec les notations
√
b12 := χ(ξ)u0 ( εt, x)Π1 (ξ + k)B(~e+ )Π2 (ξ),
√
b21 := χ(ξ)u0 ( ε, x)∗ Π2 (ξ)B(~e− )Π1 (ξ + k).
Par ailleurs, Ã := diag(λ3 , . . . , λJ ), et B2 := (1√− δ)B̌. Les termes sources fi sont bornés
dans L2 , uniformément en ε et t. Les facteurs ε devant les fi viennent du changement
d’échelle en temps. Dans bij , on peut remplacer u0 par sa donnée a, à une erreur près qui
est absorbée dans la source f1 . (En fait ce n’est pas tout exactement comme cela qu’il faut
définir M et B2 pour que (5.17) soit correct, puisque par composition des opérateurs les
troncatures bougent un peu. Il faudrait une troncature χ̃, identiquement égale à un sur le
support de χ, et de même δ̃.)
Approximation du flot singulier
Nous isolons l’équation en W1 . Pour pouvoir appliquer le théorème de représentation du
ψ
Chapitre 4, et obtenir ainsi une approximation du flot de opψ
ε (M ) par opε (S), où
(5.18)
1
∂t S + √ M S = 0,
ε
S(τ, τ ) = Id.
il faut obtenir des bornes pour S, c’est-à-dire répondre à la question (a) du paragraphe 5.1
plus haut.
Notons aussi que la situation est plus singulière qu’au Chapitre 4 : ici les variations de
S en ξ sont rapides, donc il n’y a pas d’espoir d’obtenir des bornes uniformes en ε pour
∂ξβ S. La solution consiste à utiliser un théorème de Calderón-Vaillancourt qui fait intervenir
seulement des dérivées en x du symbole, par exemple le théorème de Hörmander (Proposition
0.3).
5.4. SCHÉMA DE LA PREUVE DANS LE CAS INSTABLE : Γ > 0
41
Notons que la situation est un peu différente du paragraphe 5.1 : ici M est une matrice
carrée de taille JN. On a fait l’hypothèse que les bij sont de rang un. Donc le spectre de M
est facile à calculer, c’est
1/2
1
i
4εtr (b12 b21 ) − (µ1 − µ2 )2
,
(5.19)
iµ1 , iµ2 , µ± := µ1 + µ2 ±
2
2
avec les multiplicités algébriques N − 1, N − 1, 1, 1.
Avec de l’algèbre linéaire élémentaire (mais pas triviale, puisque les valeurs propres se
croisent, comme évoqué dans la discussion de la question (a) page 36 plus haut), nous
prouvons la borne
(5.20)
|∂xα S(τ, t)| . exp (t − τ )γ + ,
α ∈ Nd ,
où le taux de croissance γ + est donné par γ + := |a(0, x0 )| supξ∈Rh12 γ(ξ)1/2 , l’ensemble Rh12
étant défini comme l’ensemble des résonances à distance au plus h > 0 de R12 . Quand
h → 0, le taux γ + tend vers |a(0, x0 )|γ(ξ0 ).
On ne peut pas espérer contrôler uniformément les dérivées en ξ. Donc pour borner
l’action de opψ
ε (S), c’est le théorème Calderón-Vaillancourt d’Hörmander [40] qu’il va falloir
utiliser plutôt que celui de Hwang [41] (voir la Proposition 0.3).
On déduit de la Proposition 0.3 et de la borne (5.20) l’estimation en W1 :
Z t
+
0
+
|W1 (t)|L2 . etγ |W1 (0)|L2 +
e(t−t )γ |f1 (0 t)|L2 dt0 .
0
Pour l’équation en W2 on utilise directement la Proposition 0.3 pour borner |opψ
ε (B2 )W2 |L2 .
L’astuce consiste à choisir δ ≡ 1 sur un très grand voisinage de x0 , de sorte que |a| est très
petit (par décroissance à l’infini) sur le support de 1 − δ. Cela donne un taux de croissance
c0 > 0 qu’on peut rendre aussi petit qu’on veut par choix de δ. L’estimation pour W3 est
triviale. On trouve donc
Z t
0
|(W2 , W3 )(t)|L2 . etc0 |(W2 , W3 )(0)|L2 +
e(t−t )c0 |(f2 , f3 )(t0 )|L2 dt0 .
0
On déduit des bornes ci-dessus, de Gronwall et de (5.10) la borne supérieure
(5.21)
+
|(W1 , W2 , W3 )(t)|L2 . εK−α etγ .
Borne inférieure pour l’action sur la donnée
On procède comme indiqué dans le paragraphe 4.4 du Chapitre 4. Il va suffire de trouver
une donnée telle W2 (0) = W3 (0) = 0, et
(5.22)
−
tγ
kopψ
,
ε (S(0; t))W1 (0)kL2 (B(x0 ,ρ) ≥ Ce
ρ > 0,
avec γ − très proche de γ + . De (5.22) et de la borne supérieure du paragraphe précédent, on
déduit
Z t
√
0
+
0 +
K−α tγ −
e(t−t )γ εK−α et γ dt0
|W1 (t)|L2 (B(x0 ,ρ) ≥ Cε
e
− ε
0
(5.23)
√
+
−
K−α tγ −
0
≥ Cε
e
1 − C εet(γ −γ ) ,
et il suffit de choisir les localisations de sorte que γ + − γ − soit assez petit, en fonction
du temps final d’observation T∗ et donc de la taille K de la perturbation initiale, pour
finalement obtenir |W1 (T∗ | ln ε|)|L2 (B(x0 ,ρ)) → ∞ quand ε → 0, ce qui contredit la borne
supérieure (5.10).
42
CHAPITRE 5. UN CRITÈRE DE STABILITÉ
Une donnée qui convient pour (5.22) est
(5.24) ϕ(ε, x) := eix·(ξ0 +k)/ε ϕ̃(x)~e0 ,
~e0 ∈ ran Π1 (ξ0 + k)B(~e+ )Π2 (ξ0 )B(~e− )Π1 (ξ0 + k),
où ϕ̃ est une troncature spatiale, telle que ϕ̃ ≡ 1 dans un petit voisinage de x0 . En effet,
avec le choix (5.24), on vérifie facilement que
√
W̃1 (0) = (ϕ̃(x), 0, . . . , 0),
W1 (0) = εK−α eix·ξ0 /ε W̃1 (0) + O( ε),
et c’est par un simple développement de Taylor en ξ qu’on va trouver :
Z
ψ
ix·ξ0 )/ε
ix·(ξ0 +k)/ε
opε (S(0; t)) e
eix·ξ S(0; t, x, ξ0 + εξ)F W̃1 (0) (ξ) dξ
W̃1 (0) = e
= eix·(ξ0 +k)/ε S(0; t, x, ξ0 )W̃1 (0) + O(ε),
et il suffit donc de choisir W̃1 (0) qui pointe dans une bonne direction spectrale pour S. On
vérifie facilement que le vecteur ~e0 défini en (5.24) est un bon choix.
Cas stable : Γ < 0
Les deux premières étapes de la preuve (projection, translation, forme normale) sont
identiques. Il s’agit ensuite de symétriser le terme source singulier. On vérifie que l’hypothèse
Γ < 0 suffit à définir un symétriseur micro-local, qui est ici un simple multiplicateur de
Fourier.
5.5. Exemples
Le but initial de ce projet était de prouver un résultat d’instabilité pour la limite hautefréquence pour Euler-Maxwell, ce qui prolongerait le résultat du Chapitre 2. Nous avons
pour le moment vérifié l’application de notre résultat à des systèmes de type Klein-Gordon
semilinéaires. Ici le second membre est en quelque sorte artificiel, mais bien sûr le membre de
gauche (les opérateurs de Klein-Gordon) ressemble fortement au système d’Euler-Maxwell
(voir le Chapitre 2 et en particulier la Figure 2.1 page 22) :





0
0
∂x
0



(3) (3) 

0
ε−1 ωp  u1 =  ε−1/2 (u(3)
,
∂t u1 +  ∂x


1 + u2 )u2

−1

0 −ε ωp
0
0





0
0
θe ∂x
0



(2) (3) 
2

0
ε−1 ωp  u2 =  ε−1/2 (−(u(1)
∂ u +  θe ∂x
,


1 ) + u2 u2 )
 t 2
−1
0
− ε ωp
0
0
(1)
(2)
(3)
avec ωp > 0 et 0 < θe < 1, en notant uj = (uj , uj , uj ) ∈ R3 .
CHAPITRE 6
PERTE D’HYPERBOLICITÉ POUR DES SYSTÈMES
QUASI-LINÉAIRES
Ce chapitre est un résumé du preprint [64], en collaboration avec Nicolas Lerner et Toan
Nguyen. Nous montrons qu’un défaut d’hyperbolicité, même faible, implique un défaut de
régularité du flot.
6.1. Perte d’hyperbolicité
On veut comprendre ce qu’il y a de général dans la perte d’hyperbolicité qui se manifeste
pour Burgers complexe : ∂t u + u∂x u = i, voir la discussion page 15 dans l’introduction.
On considère des systèmes quasi-linéaires d’ordre un :
X
(6.1)
∂t u +
Aj (u)∂xj u = F (u),
1≤j≤d
pour lesquels on veut décrire le phénomène de perte d’hyperbolicité :
X
ξj Aj (φ(0, x)) ⊂ R,
(6.2)
sp
1≤j≤d
pour tout (x, ξ0 ) dans un voisinage d’un certain (x0 , ξ0 ) mais t > 0 arbitrairement petit :
X
(6.3)
sp
ξ0j Aj (φ(t, x0 )) ∩ C \ R 6= 0.
1≤j≤d
où φ est une solution locale en temps et en espace, définie au voisinage de x0 et régulière.
Dans le cas de Burgers complexe ∂t u + u∂x u = i, on peut faire une analogie avec l’opérateur à coefficients constants ∂t + it∂x . En effet, c’est la croissance de la partie imaginaire de
u qui est responsable de l’instabilité, via la terme de convection, et cette partie imaginaire
est supposée nulle en t = 0, ce qui correspond à (6.2). On remarque que les
solutions de
∂t u + it∂x u = 0 croissent lentement en temps : û(t, ξ) = û(0, ξ) exp t2 ξ/2 . On s’attend
donc dans le cadre (6.2)-(6.3) à observer des instabilités lentes, en tout cas plus lentes que
dans le cas elliptique.
Cette perte d’hyperbolicité est à mettre en rapport avec les instabilités du Chapitre 5 :
là on étudiait comment des termes d’ordre 0 pouvaient jouer un rôle déstabilisant dans des
situations d’hyperbolicité faible, ici on étudie comment des termes d’ordre 1 peuvent déstabiliser une solution de référence. On s’attend donc ici à observer des phénomènes beaucoup
plus violents que ceux du Chapitre 5, où on ne pouvait prouver qu’une petite déviation en
O(εα ), avec α > 0, de la solution approchée.
44
CHAPITRE 6. PERTE D’HYPERBOLICITÉ
Les questions posées sont donc :
• étant donné un système (6.1) d’ordre un, comment formuler le phénomène de perte
d’hyperbolicité, c’est-à-dire le passage de (6.2) à (6.3) ?
• comment se traduit la perte d’hyperbolicité en terme de non-régularité du flot ?
En fait il faudrait parler d’un hypothétique flot ici : on va faire l’hypothèse que tout se
passe mal, et donc on ne pourra typiquement pas prouver de résultat d’existence (1) .
Le point de départ est une solution de référence φ de (6.1). Il faut en effet bien partir
de quelque chose, et s’il n’existe pas de solution du tout, alors le problème de Cauchy pour
(6.1) est certainement mal posé. On suppose que φ est locale en temps et en espace, et
régulière. En mécanique des fluides, on peut penser à un flot de cisaillement, et en optique
à une solution approchée de type WKB. Si les coefficients de (6.1) sont analytiques, alors
on peut choisir la solution de Cauchy-Kowalevskaya.
Toute la discussion qui suit porte sur
P
le symbole principal A(φ(t, x), ξ) = 1≤j≤d ξj Aj (φ(t, x)) de l’opérateur linéarisé en φ.
Première version : bifurcation hors de l’axe réel
On envisage dans un premier temps une condition du type
(6.4)
λ(0, x, ξ) ∈ R,
pour (x, ξ) ∼ (x0 , ξ0 ),
et
∂t =m λ(0, x0 , ξ0 ) 6= 0,
pour une valeur propre λ du symbole A(φ(t, x), iξ). Cette condition exprime le caractère
hyperbolique en t = 0 dans un voisinage de (x0 , ξ0 ), et une bifurcation vers le complémentaire
de la droite réelle en t = 0. Il s’agit bien d’une bifurcation dans le spectre puisque par réalité
des coefficients les valeurs propres sont conjuguées, et donc λ et λ̄ quittent simultanément
l’axe réel.
Le point λ(0, x0 , ξ0 ) est donc un point de croisement dans le spectre. Et on n’a typiquement pas de paramétrage régulier quand
la valeur
propre au point de croisement n’est pas
0 1
semi-simple. L’exemple canonique est
au voisinage de x = 0, avec pour valeurs
x 0
√ √
propres {− x, x}. Donc la condition différentielle (8.11) est problématique.
Deuxième version : développement en série fractionnaire
On peut envisager de remplacer (8.11) par une condition intégrale :
Z t
(6.5)
=m λ(τ, x, ξ) dτ = γ(t, x, ξ)t`+1 ,
γ(0, x0 , ξ0 ) > 0, ` ≥ 0,
0
avec une fonction taux de croissance γ continue en (0, x0 , ξ0 ). La condition (6.5) est admissible en effet pour des λ qui admettent un développement fractionnaire (développement de
Puiseux) au voisinage du croisement, ce qui est justement ce qui se produit dans le cas non
semi-simple (2) L’exemple canonique en est une illustration.
Par exemple, pour le système d’Euler compressible en une dimension d’espace
(
∂t u + ∂x v = 0,
(6.6)
∂t v + ∂x p(u) = 0,
1. Dans un cadre analytique, sous une hypothèse de non-hyperbolicité, Métivier prouve un résultat d’existence en même temps qu’un résultat de non-régularité du flot [70].
2. Au contraire, pour des opérateurs différentiels d’ordre un, en un point de croisement semi-simple les
valeurs propres sont Lipschitz. C’est un résultat de Kato [48], que j’ai re-prouvé dans ma thèse [89].
6.1. PERTE D’HYPERBOLICITÉ
45
avec une équation d’état de type Van der Waals, au sens où p0 change strictement de signe,
le symbole principal est
0
1
(6.7)
A(φ(t, x), ξ) = ξ
.
p0 (u(t, x)) 0
Les valeurs propres sont λ± = ±ξ(p0 (u(t, x)))1/2 . Si la donnée initiale est telle que pour
un certain x0 , on ait p0 (u(0, x0 )) < 0, alors on peut appliquer le théorème de Métivier : le
problème de Cauchy est mal posé.
On s’intéresse ici au cas limite, tel que p0 ≥ 0 initialement, et pour un certain x0 , la
donnée satisfait p0 (u(0, x0 )) = 0. Alors si on suppose de plus ∂x v(0, x0 )p00 (u(0, x0 )) > 0, qui
est une autre condition portant seulement sur la donnée, on obtient
1/2
(6.8)
=m λ+ (t, x0 , ξ) = ξt1/2 ∂x v(0, x0 )p00 (u(0, x0 ))
+ o(t1/2 ),
qui est un développement en puissances fractionnaires, comme dans l’exemple canonique.
La condition (6.5) est satisfaite.
Troisième version : le temps de sortie de l’axe réel dépend de (x, ξ)
Avec la condition (6.5), on peut donc considérer des croisements qui ne sont pas semisimples. Mais cette condition n’est pas satisfaisante, parce qu’elle suppose que la perte
d’hyperbolicité a lieu en t = 0 dans tout un voisinage de (x0 , ξ0 ). Typiquement ce n’est pas
ce qui se passe.
Pour voir cela, on peut revenir au système d’Euler compressible. On suppose à nouveau p0 ≥ 0 initialement, avec p0 (u(0, x0 )) = 0, et p00 (u(0, x0 ))∂x v(0, x0 ) > 0. En utilisant
l’équation (7.8), on trouve donc que ∂t (p0 (u))(0, x0 ) 6= 0.
Et donc, par application du théorème des fonctions implicites, dans un voisinage de
(t, x) = (0, x0 ), l’ensemble {p0 (u) = 0} est le graphe d’une application t? lisse (c’est-à-dire
aussi régulière que p(u)).
Cette courbe de transition x → t? (x), définie localement dans un voisinage de x0 , paramètre la perte d’hyperbolicité : pour t < t∗ (x) on a p0 (u) > 0, et donc =m λ± ≡ 0, alors que
pour t > t∗ (x) on a p0 (u) < 0, et donc =m λ± 6= 0. Le long de la transition t = t∗ (x), on a
p0 (u) ≡ 0, et les valeurs propres se croisent λ− = λ+ = 0.
Cet exemple montre que dans le cas général, pour (x, ξ) proche de (x0 , ξ0 ), et différent de
(x0 , ξ0 ), on ne peut pas s’attendre à une perte d’hyperbolicité se produisant en t = 0, mais
plutôt en un certain temps t? (x, ξ). En particulier la condition (6.5) doit être remplacée par
Z t
(6.9)
=m λ(τ, x, ξ) dτ = γ(t, x, ξ)(t − t∗ (x, ξ))`+1 , γ(0, x0 , ξ0 ) > 0, ` ≥ 0,
t∗ (x,ξ)
pour un certain point distingué (x0 , ξ0 ), pour une certaine valeur propre λ de A(φ(t, x), ξ),
avec une fonction temps de transition t∗ ≥ 0, qui satisfait t∗ (x0 , ξ0 ) = 0.
Quatrième version : croissance du flot symbolique
La condition (6.9) n’est toujours pas assez générale. En effet, quand les valeurs propres
ne sont pas régulières, les vecteurs propres ne sont typiquement pas non plus réguliers.
(En règle générale, les vecteurs propres sont moins réguliers que les valeurs propres.) Donc
pour pouvoir traiter le cas non semi-simple, il ne faut pas faire l’hypothèse d’une projection
spectrale lisse associée à un valeur propre instable.
46
CHAPITRE 6. PERTE D’HYPERBOLICITÉ
L’observation suivante va faire un lien avec le Chapitre 4. Pour Euler compressible avec loi
d’état de Van der Waals, on considère le flot symbolique, c’est-à-dire l’équation différentielle
dont le champ est le symbole A(φ(εt, x), ξ) (noter le changement d’échelle en temps) :
0
iξ
∂t S +
S = 0,
S(τ ; τ ) = Id.
ip0 (u(εt, x))ξ 0
On note (y, z) une colonne de S. Alors y est solution de
y 00 + ξ 2 p0 (u(εt, x))y = 0.
En x = x0 , en supposant à nouveau
p0 (u(0, ·)) ≥ 0,
(6.10)
p0 (u(0, x0 )) = 0,
α = p00 (u(0, x0 ))∂x v(0, x0 ) > 0,
un développement de Taylor en temps donne p0 (u(εt, x)) = −εtα + O(εt)2 . En posant
ỹ(t) = y t/(εtξ 2 α)1/3 ,
on obtient
ỹ 00 = tỹ + O(ε4/3 t2 )ỹ,
3/2
(2/3)t
si bien que ỹ peut se décrire
. On en déduit
à l’aide de la fonction d’Airy : ỹ(t) ∼ e
2
1/2
3/2
, en x = x0 . On note qu’on trouve le même ` et le même γ en
S(t) ∼ exp 3 (εα) |ξ|t
explicitant la quantité (6.9) pour cet exemple.
La conclusion qu’on tire de cet exemple est qu’on va pouvoir exprimer un défaut d’hyperbolicité en termes de croissance du flot symbolique.
6.2. Hypothèse : croissance du flot symbolique
Le flot associé au symbole A(φ(t, x), ξ) est défini comme la solution de la famille d’équations différentielles linéaires
(6.11)
∂t S(τ ; t, x, ξ) + A(φ(εt, x), iξ)S(τ ; t, x, ξ) = 0,
S(τ ; τ ) ≡ Id,
où (x, ξ) est un paramètre. On se donne t? une fonction temps de sortie de l’axe réel qui est
assez plate en un point distingué dans le cotangent (x0 , ξ0 ) :
∂xα ∂ξβ t∗ (x0 , ξ0 ) = 0,
pour 0 ≤ |α| + |β| ≤ m − 1, pour un certain m > d.
On se donne 0 ≤ ` < 2m
d −1. Le paramètre ` va correspondre à un degré de dégénérescence
du problème. Pour reprendre l’analogie du paragraphe 6.1, on a ` = 1 pour ∂t + it∂x , et
donc plus généralement ∂t + itk ∂x correspond au cas ` = k. (Voir aussi la remarque (b) qui
suit l’énoncé de l’hypothèse principale, et les exemples au paragraphe 6.5 plus bas.)
Etant donnée γ(x, ξ) ≥ 0 une fonction taux de croissance, qui est continue en (x0 , ξ0 ), on
note
`+1
.
(6.12)
eγ (τ ; t, x, ξ) := exp ε` γ(x, ξ) (t − t∗ (x, ξ)/ε)`+1
+ − (τ − t∗ (x, ξ)/ε)+
Avec ces notations, notre hypothèse consiste à dire que pour tout T∗ > 0, pour un certain
h > 0, un certain ρ > 0, pour ε assez petit, les bornes suivantes sont vraies :
• pour un certain ~e fixé, pour |x − x0 | ≤ εh , avec h < (1/d(1 + `)), la borne inférieure
(6.13)
eγ − (0; T (ε), x, ξ0 ) . |S(0; T (ε), x, ξ0 )~e |
• pour |x − x0 | + |ξ − ξ0 | ≤ ρ, la borne supérieure
(6.14)
|∂xα ∂ξβ S(τ ; t, x, ξ)| . | ln ε|N (α,β) eγ + (τ ; t, x, ξ),
α, β ∈ Nd , N (α, β) ≥ 0,
6.2. HYPOTHÈSE : CROISSANCE DU FLOT SYMBOLIQUE
47
uniformément en (x, ξ), ε ∈ (0, ε0 ), et t ∈ [0, T (ε)], où le temps maximal d’observation T (ε)
est défini par
(6.15)
ε` T (ε)`+1 = T∗ | log ε|.
On suppose que les taux de croissance γ − et γ + sont très proches et positifs autour de
(x0 , ξ0 ).
Quelques remarques au sujet de cette hypothèse dont la formulation est très complexe :
• Dans les cas ` = 0, ` = 1/2, ` = 1, nous donnons dans [64] des conditions suffisantes
pour que l’hypothèse ci-dessus soit satisfaite. Ces conditions, très simples, portent sur le
spectre de A et le développement de Taylor de son polynôme caractéristique P (λ, t, x, ξ) =
det (λId − A(φ(t, x), ξ). L’hypothèse sur le spectre du flot symbolique est donc, au moins en
théorie, facilement vérifiable dans les cas pas trop dégénérés (petites valeurs de `).
Le cas ` = 0 correspond à un défaut initial d’hyperbolicité. Cela correspond à la condition
P (λ0 , 0, x0 , ξ0 ) = 0 avec λ0 ∈
/ R. C’est la situation considérée par Métivier [70], qui apparaît
donc comme un cas particulier dans notre cadre.
Le cas ` = 1/2 correspond aux conditions P (λ0 , 0, x0 , ξ0 ) = 0, ∂λ P (λ0 , 0, x0 , ξ0 ) = 0 (ces
conditions signifiant que λ0 est valeur propre double) et (∂λ2 P ∂t P )(λ0 , 0, x0 , ξ0 ) > 0, où λ0
est réel. En particulier, nous avons une condition ouverte, donc stable par perturbation, qui
garantit que notre hypothèse est vérifiée. Comme indiqué au paragraphe 6.1, les équations
d’Euler compressible avec loi d’état de Van der Waals rentrent ce cadre.
• Cette formulation de l’hypothèse sur le flot symbolique n’est en fait pas assez générale !
2
Par exemple, à l’opérateur ∂t +∂x +it∂x on associe le flot symbolique S = e−itξ+εt ξ , et donc
2
|∂ξ S| = teεt ξ . Pour des temps long t = ε−1/2 , on a donc une borne supérieure pour ∂ξ S
bien moins bonne que la borne supérieure pour S. Rappelons qu’une hypothèse cruciale du
Chapitre 4 est justement que les fonctions ∂xα ∂ξβ S aient des bornes supérieures comparables.
La solution consiste à suivre le transport, c’est-à-dire à factoriser ∂t + ∂x . La bonne version
de l’hypothèse de croissance du flot symbolique, présentée en détail dans le preprint [64],
fait figurer une telle opération de factorisation.
• Cette hypothèse, bien que portant sur un objet “linéaire” (l’opérateur linéarisé autour
de φ) est non-linéaire : elle fait intervenir tous les termes de l’équation via des valeurs de
φ en des temps t > 0. Mais en fait la dépendance en φ dans (6.11) est une dépendance en
φ(εt), et donc seule la connaissance du développement de Taylor de φ en t = 0 est nécessaire
à sa vérification. Donc il n’est pas nécessaire de connaître la solution de référence φ pour
vérifier l’hypothèse (sinon cette hypothèse serait d’une utilité très limitée), mais seulement
des conditions de type préparation, du type (6.10), sur la donnée φ(0).
• Le temps final T (ε) est d’autant plus long que ` est grand. On peut à nouveau penser
aux opérateurs linéaires ∂t + it` ∂x, pour lesquels la croissance du flot symbolique, dans les
échelles (6.11), sera en exp ε` t`+1 . Le temps final d’observation T (ε) est le temps au bout
duquel l’exponentielle croissante dans (6.14) est de taille comparable à celle de l’inverse
d’une toute petite donnée d’amplitude εK : avec la définition de T (ε) (6.15), on aura
εK exp γε` T (ε)`+1 = εK−γT∗ = 1/2,
si T∗ est choisi de sorte que K − γT∗ < 0.
48
CHAPITRE 6. PERTE D’HYPERBOLICITÉ
6.3. Résultat
Théorème 6.1. — Sous l’hypothèse décrite au paragraphe 6.2 plus haut, il n’existe pas de
voisinage U of φ(0) dans H m (B(x0 , δ0 )), tel que le système (6.1) ait un opérateur solution
S : U → L∞ ([0, T ], H s (B(x0 , δ))),
qui satisfait l’estimation de continuité Hölder
kS(t, u0 ) − S(t, φ(0))kH s (B(x0 ,δ))
< +∞.
(6.16)
sup
ku0 − φ(0)kα
u0 ∈U
H m (B(x0 ,δ0 ))
0≤t≤T
Ici m est arbitrairement grand, et T > 0 est arbitrairement petit. Le résultat est vrai pour
tout α ∈ (1/2, 1]. Le paramètre δ0 > 0 est choisi de telle sorte que φ soit définie dans la boule
B(x0 , δ0 ). On peut choisir δ arbitrairement petit dans (0, δ0 ). L’indice s est strictement plus
grand que 1 + d/2. On peut remplacer H s par L2 ∩ W 1,∞ sans modifier la preuve.
6.4. Les deux idées de la preuve
Exploiter les bornes supérieures et inférieures pour le flot symbolique. Les
bornes (6.13) et (6.14) pour le flot symbolique ressemblent beaucoup à une hypothèse
d’instabilité spectrale. On a en quelque sorte identifié une valeur propre instable (borne
inférieure (6.13)), qui n’est pas loin d’être le plus grand élément dans le spectre (borne
supérieure (6.14), avec un taux de croissance γ + à peu près égal à γ − ). Mais cette instabilité spectrale est vraie pour les symboles. Elle est beaucoup plus facile à vérifier que des
conditions portant sur des spectres d’opérateurs différentiels, mais donne relativement moins
d’information.
La construction du Chapitre 4 permet justement de transcrire l’information spectrale
symbolique contenue dans (6.13) et (6.14) en des estimations pour la solution du système
d’équations aux dérivées partielles.
La dernière étape de la preuve consiste à utiliser l’inégalité anti-triangulaire en bornant
par en-dessous l’action du flot sur la donnée, et à borner par au-dessus le terme de convolution en temps qui correspond à l’action de l’opérateur solution sur les termes d’erreur,
linéaires et non-linéaires. Cette dernière étape est tout à fait semblable à la dernière étape
de la preuve décrite au Chapitre 5 page 41.
Raffiner les estimations a priori. Le Théorème 6.1 affirme en substance qu’il n’y a pas
d’estimation a priori possible pour le système d’équations que nous considérons. Et donc,
comme au Chapitre 5, la première étape de la preuve consiste à nier la conclusion (6.16) du
résultat.
Nous considérons les familles de données
u(ε, 0, x) = φ(0, x) + εK <e eix·ξ0 /ε θ~e ,
où θ est à support compact autour de x0 , et ξ0 est la fréquence et ~e le vecteur qui apparaissent
dans la borne inférieure (6.13). Alors ku(ε, 0) − φ(0)kH m (B(x0 ,δ0 )) = O(ε(K−m) ). Donc dès
qu’on choisit K > m, étant donné un voisinage U de l’origine dans H m , pour ε assez petit
u(ε, 0) − φ(0) appartient à U.
On suppose donc
(6.17)
ku(ε, t) − φ(t)kH s (B(x0 ,δ)) ≤ Cεα(K−m) ,
uniformément en t ∈ [0, T (ε)],
où le temps final d’observation T (ε) dépend de ε et ` et est défini en (6.15).
49
6.5. EXEMPLES
L’estimation a priori (6.17) est très faible. Elle énonce en particulier le fait qu’en passant
de t = 0 à t > 0, il se produit une perte instantannée de puissances de ε : on passe de
εα(K−s) à εα(K−m) : la perte est donc de εα(m−s) , et m peut être très grand, alors que s
est simplement plus grand que 1 + d/2. L’hypothèse “spectrale” sur la croissance du flot
symbolique S, et le résultat
du Chapitre 4 nous incitent à penser que la croissance de u sera
plutôt en exp γe` t`+1 .
On va utiliser la formule de représentation donnée par le Chapitre 4, et une procédure de
localisations successives, pour raffiner la borne a priori (6.17).
Par le Théorème 4.1, et un changement d’échelle en temps, on obtient une représentation
de la forme
Z
t
0
0
0
opψ
ε (S(t ; t))f (t ) dt ,
où u1 est une variable micro-localisée : u1 = opε (χ) ϕu , avec χ troncature autour de ξ0
et ϕ troncature autour de x0 . Le facteur multiplicatif ε devant le terme de Duhamel est
du au changement d’échelle en temps. Le terme source f comprend des erreurs linéaires et
non-linéaires, et satisfait la même borne a priori que u.
Avec la borne supérieure (6.14) pour S, par exemple en posant ` = 1 pour simplifier les
notations, cela donne la borne
Z t
+
2
0 2
K γ + εt2
ku1 (εt)kL2 (B(x0 ,δ)) . ε e
+ε
εγ ε(t −(t ) ) εα(K−s) dt0 ,
u1 (εt) = opψ
ε (S(0; t))u1 (0) + ε
0
0
et donc
(6.18)
ku1 (εt)kL2 (B(x0 ,δ)) . ε1+K(α−s) eγ
+
εt2
.
L’idée consiste maintenant à tronquer à nouveau l’équation en u1 , pour obtenir une
variable u2 plus micro-localisée, avec essentiellement la même donnée que u1 . L’équation
en u2 fait intervenir un terme source en u1 , pour lequel on utilise (6.18), et on obtient
2
ku2 (εt)kL2 (B(x0 ,δ)) . ε2+α(K−s) eεt .
2
Après un nombre fini k d’étapes, on a obtenu kuk (εt)kL2 (B(x0 ,δ)) . εK eεt , qu’on peut
comparer à l’estimation (5.21) page 41, et on est alors en mesure de conclure la preuve.
6.5. Exemples
En plus du système d’Euler compressible
(
∂t u + ∂x v = 0,
∂t v + ∂x p(u) = 0,
avec une équation d’état de type Van der Waals (c’est-à-dire p0 qui n’est pas partout positive), nos hypothèses sont satisfaites en particulier par certains systèmes de type Burgers :
u1
u1 −b(u)2 u2
u1
F1 (u1 , u2 )
∂t
+
∂x
=
,
u2
u2
u1
u2
F2 (u1 , u2 )
où b ≥ 0 et F2 non identiquement nulle, et par le système de Klein-Gordon-Zakharov (avec
α 6= 0 et |c| < 1) :

u
v
α 0
n
v

 ∂t
+ ∂x
+
∂x
= (n + 1)
,

v
u
0 0
m
−u

n
m
α 0
u
0

 ∂t
+ c∂x
+
∂x
= ∂x
.
m
n
0 0
v
u2 + v 2
50
CHAPITRE 6. PERTE D’HYPERBOLICITÉ
Dans chaque cas, des hypothèses de préparation sur la donnée φ(0) sont nécessaires pour la
vérification de notre hypothèse sur le flot symbolique.
CHAPITRE 7
TRAVAUX EN COURS ET PERSPECTIVES
7.1. Instabilités hydrodynamiques
Les résultats classiques d’instabilité en hydrodynamique sont basés sur une analyse spectrale de l’opérateur linéarisé autour d’un flot de cisaillement us (x, 0) où x est une direction
spatiale donnée. Friedlander, Strauss et Vishik [28] prouvent une instabilité dans H s , avec
s > 2 pour Euler en deux dimensions d’espace. Grenier [35] prouve un résultat semblable
dans L∞ . Hwang et Guo [42] prouvent un résultat d’instabilité de Rayleigh-Taylor dans L2 .
Gérard-Varet et Dormy [32] étudient les équations de Prandtl et prouvent un résultat de
non-continuité du flot linéarisé dans les Sobolev, avec pertes arbitraires de dérivées. Dans
tous ces résultats, la vérification de l’instabilité spectrale passe par l’écriture d’une décomposition en modes normaux, c’est-à-dire une transformation de Fourier, continue ou discrète
selon la géométrie du problème, dans les variables transverses au flot de cisaillement.
Je voudrais essayer de comprendre dans quelle mesure une approche micro-locale pourrait
affaiblir cette hypothèse très forte de structure pour la solution de référence. Les preuves
des Chapitres 5 et 6 sont en effet valables tout aussi bien pour une solution de référence
de type cisaillement que pour une solution de référence qui dépend de toutes les variables
d’espace. (L’hypothèse de régularité de la solution de référence est cependant essentielle
dans les preuves, ainsi que celle qui porte sur la structure des oscillations dans le Chapitre
5.)
Prenons l’exemple de l’équation de Prandtl. C’est un exemple qui m’intéresse d’autant
plus que Hong et Hunter écrivent dans leur article [43] que l’approche symbolique n’y est
pas pertinente (j’y reviens plus bas). Les équations s’écrivent
(
∂t u + u∂x u + v∂y u − ν∂y2 u = 0,
(7.1)
∂x u + ∂y v = 0,
où ν > 0 est un coefficient de viscosité. Le domaine spatial est R2+ := {z = (x, y) ∈ R2 , y ≥
0}, et on impose une condition de Dirichlet pour le flot de vitesses : u|y=0 = 0, v|y=0 = 0,
et la condition de couche limite limy→+∞ u = 0.
Pour les équations linéarisées autour d’une solution de référence us (t, x, y), écrites dans
les variables (u̇, v̇) (ici les conventions usuelles m’obligent à abandonner la notation v pour
la variable de perturbation), après les opérations suivantes :
• factorisation du terme advectif et changement d’échelle en temps : (U, V )(t, x, y) :=
(u̇, v̇)(ε2 t, X(ε2 t, x, y), y), avec ∂t X = us (t, X, y), X(0, x, y) = x, (noter que l’opération de
factorisation a déjà rencontrée au Chapitre 6 ; voir la discussion page 47),
52
CHAPITRE 7. TRAVAUX EN COURS ET PERSPECTIVES
• localisation en espace et prolongement par zéro : (ũ, ṽ)(t, x, y) := (θU , θV )(t, x, y), pour
(x, y) ∈ R2 , où θ est une localisation lisse en y et la barre indique un prolongement par zéro
au-delà du support de θ,
• localisation en fréquences : (u, v) := opε (χ)(ũ, ṽ), où χ ∈ Cc∞ (R2ξ,η ), avec (ξ, η) variable
de Fourier de (x, y),
on obtient une équation de la forme
(7.2)
∂t u + opψ
ε (µ)u = εf ,
où le symbole µ est, en simplifiant un peu,
2
u0s ξ
0
µ := χ(ξ, η) −
+
ν
ξ
−
tu
η
,
s
ξ − tu0s η
u0s := ∂y us ,
et le terme source comprend un grand nombre de termes d’erreur, linéaires et non-linéaires.
Bien sûr, la question se pose de savoir où localiser, en espace comme en fréquences. (On
a pris soin ici de localiser loin de ξ = tu0s η, ce qui permet d’exprimer v en fonction de u, et
de se ramener à une équation scalaire.)
Peut-on appliquer le traitement du Chapitre 4 à l’équation (7.2) ? Le flot symbolique
est ici simplement l’intégrale en temps de µ. En supposant us indénpendant du temps, on
trouve dans le cas non visqueux ν = 0 :
Z t
η
0
0
.
µ(t , x, y, ξ, η)dt = ln
η − tu0s ξ
0
C’est-à-dire que la croissance éventuelle générée par opψ
ε (µ) n’est pas exponentielle ! Il y a
une interaction subtile entre le terme non-local (qui produit le numérateur dans µ, dans le
cas ν = 0) et le terme d’advection (qui produit le dénominateur).
Pour les équations (7.1) linéarisées autour d’un flot de cisaillement us = us (y), Hong et
Hunter (Proposition 5.1, [43]) prouvent un résultat d’existence, d’unicité et de régularité
par rapport aux données (avec perte d’une dérivée en x). Ils trouvent en fait une formule
explicite pour la solution ! Et remarquent ensuite que pour cette équation linéaire l’analyse
de Fourier obtenue en gelant les coefficients, ce qui correspond exactement à une analyse
micro-locale, mène à
u0 ξ
ξ
v̂ = − û,
∂t + us iξ û − s û = 0,
η
η
ce qui laisse penser qu’on va observer une instabilité très forte, et ce qui est donc faux.
J’ai du mal à croire que cette remarque disqualifie l’approche micro-locale, mais elle
indique en tout cas que l’instabilité pour Prandtl provient d’une interaction subtile entre
advection, terme non-local, et diffusion. C’est ce que montre la preuve de Gérard-Varet et
Dormy, dans le cas d’un flot de cisaillement.
7.2. Relaxation visqueuse
Il s’agit d’un travail en cours avec Marta Strani, qui termine actuellement sa thèse à La
Sapienza sous la direction de Corrado Mascia.
On s’intéresse ici aux questions suivantes :
• Peut-on observer numériquement le résultat d’instabilité de Lerner, Morimoto et Xu
[63] pour Burgers complexe : ∂t u + u∂x u = i, avec des données réelles ?
• Quelle peut être l’influence de termes dissipatifs d’ordre deux sur les instabilités des
Chapitres 5 et 6 ?
53
7.2. RELAXATION VISQUEUSE
2.8
2.4
2
1.6
1.2
0.8
0.4
0
0.25
0.5
0.75
1
1.25
1.5
1.75
2
2.25
2.5
Figure 7.1. Une solution de (7.4).
Nous avons écrit un code de Lax-Friedrichs pour ∂t u + u∂x u = i, avec des conditions aux
bords périodiques, et, dans le cas de données réelles à notre grande surprise nous n’avons
d’abord vu qu’une croissance linéaire en temps pour la partie imaginaire de la solution,
comme si le code ne faisait que résoudre ∂t <e u + a∂x <e u = 0, avec a réel, et simultanément
∂t =m u = 1.
C’est seulement en changeant l’échelle d’observation que nous avons vu apparaître une
croissance exponentielle de la solution. Cela donne un début de réponse à la première question : l’instabilité instantanée de [63] n’est pas toujours observable numériquement.
L’explication en est bien sûr la diffusion numérique contenue le schéma. C’est-à-dire qu’en
essayant de simuler Burgers complexe, on approche en fait les solutions de
(7.3)
∂t u + u∂x u − ε∂x2 u = i.
Au paragraphe 6.1, je proposais une analogie avec l’opérateur différentiel linéaire ∂t + it∂x
pour comprendre Burgers complexe. On peut ici poursuivre l’analogie, et considérer
(7.4)
(∂t u + it∂x u − ε∂x2 )u = 0.
Pour (7.4), on trouve par Fourier :
û(t, ξ) = û(0, ξ) exp
t2
2
ξ − εtξ 2 ,
et donc pour de grandes fréquences :
û(t, ξ0 /ε) = û(0, ξ0 /ε) exp
tξ0 t
− ξ0
.
ε 2
Les fréquences ξ0 /ε sont amplifiées, mais seulement après le temps d’attente t(ξ0 ) = 2ξ0 .
La figure 7.1 est le tracé d’une solution de (7.4). La figure 7.2 est une simulation numérique
de t → |=m u(t)|L∞ /t, où u est la solution de (7.3) issue d’une donnée initiale oscillante :
u(ε, 0, x) = cos(2πN (ε)x), pour un certain N (ε) > 0.
La ressemblance entre les Figures 7.1 et 7.2 est frappante, et suggère que l’analogie avec
l’opérateur à coefficients constants est pertinente.
54
CHAPITRE 7. TRAVAUX EN COURS ET PERSPECTIVES
7
6
5
4
3
2
1
0.0
0.1
0.2
0.3
0.4
0.5
0.6
m ax of v(t)/ t
Figure 7.2. Simulation numérique d’une solution de (7.3).
Pour valider ces calculs numériques, nous considérons le problème de Cauchy

 ∂t u + u∂x u − ε∂x2 u = i,
x
(7.5)

,
u(0, x) = a
ε
avec a ∈ W 1,∞ , et nous voulons prouver les points suivants :
(a) les solutions sont définies et bornées sur des intervalles de temps O(1),
(b) pour des temps ultérieurs la solution croit exponentiellement.
Il doit être possible de prouver (a) par des estimations élémentaires. Un début d’argumentation pour (b) pourrait être le suivant : les changements de variable u(t, x) = v(t/ε, x/ε),
puis v = v1 + iεv2 (avec v1 , v2 ∈ R) conduisent au système de Burgers complexe
v1
v1 −ε2 v2
v1
v1
0
(7.6)
∂t
+
∂x
− ∂x2
=
.
v2
v2
v1
v2
v2
1
En rajoutant l’opérateur αId, avec α > 0, dans les deux membres de (7.6), on a donc un
propagateur dont le symbole a pour spectre iξv1 + α ± ε|v2 |ξ + ξ 2 . En particulier, la partie
réelle du spectre est partout positive (pas d’amplification) exactement quand
(7.7)
ε|v2 (t, x)| ≤ 2α1/2 .
Nous observons
alors que, du fait de la structure conservative de Burgers complexe, on a
Z
l’identité
=m u(t, x) dx ≡ t. Donc (par exemple si x ∈ T), l’inégalité (7.7) ne pourra pas
être vraie pour tout temps, et on observera une croissance de la partie imaginaire.
Dans ce cadre essentiellement scalaire, l’inégalité de Gårding devrait pouvoir se substituer
à la construction du Chapitre 4 (voir à ce sujet la discussion du paragraphe 4.4 page 34).
Il resterait alors la question, probablement plus difficile, de décrire la transition, en particulier de calculer approximativement le temps d’attente.
7.4. STABILISATION NON-LINÉAIRE
55
7.3. Sortie de la zone elliptique pour Van der Waals
Je décris ici un projet en collaboration avec Peter Wittwer.
Pour les équations d’Euler compressible en variables Lagrangienne, en une dimension
d’espace :
(7.8)
∂t u + ∂x v = 0,
∂t v + ∂x p(u) = 0,
avec une équation d’état de type Van der Waals, par exemple p0 (u) = u(u2 − 1), de sorte
que p0 ≥ 0 pour |u| ≥ 1 et p0 < 0 pour |u| < 1, le théorème Lax-Mizohata de Métivier [70],
déjà mentionné plusieurs fois ici, et en particulier page 8, montre que pour des données qui
rencontrent la zone elliptique |u| < 1, le problème de Cauchy est instable.
Le résultat du Chapitre 6 ne fait qu’étendre ce résultat à la frontière de la zone elliptique : pour des données qui rencontrent la fermeture de la zone elliptique : |u| ≤ 1, il
existe des conditions ouvertes sous lesquelles le problème de Cauchy est instable. Ces conditions ouvertes sont les conditions de signe sur le développement de Taylor du polynôme
caractéristique ; voir la discussion page 47.
Dans [70], Métivier pose la question suivante : peut-on prouver un résultat de sortie de la
zone elliptique ? C’est-à-dire, si des solutions rencontrent la zone elliptique, peut-on prouver
qu’elles s’en échappent ?
La question peut être formulée soit pour une version avec viscosité de (7.8), pour laquelle
on pourra prouver un résultat d’existence locale, ou bien pour des solutions de (7.8) qui
sont exponentiellement décroissantes en Fourier.
Nos tests numériques (avec un schéma de Lax-Friedrichs et des conditions au bord périodiques) vont dans le sens d’une sortie de la zone elliptique ; un exemple est donné Figure
7.3. Ici la donnée u(0, x) = 1.1 + .25 sin(4πx), v(0) = −2 est à cheval sur la zone elliptique et
la zone hyperbolique. Il se produit des transitions entre les deux régions de la zone hyperbolique : de u < −1 à u > 1 et réciproquement. Quand le temps augmente, ces transitions
deviennent de plus en plus brutales, et notre simulation n’est probablement plus valable
au-delà d’un certain temps, à partir duquel il faudrait probablement décrire les transitions
par des maillages adaptatifs.
L’analyse des Chapitres 4 à 6 peut-elle répondre à la question ? Si |u(t, x0 )| < 1, alors
u est amplifié au voisinage de x0 , donc tend à devenir plus grand que 1 en valeur absolue.
Mais les résultats des Chapitres 5 et 6 ne sont pas pas locaux en espace. Une première
question serait donc de savoir si on peut obtenir avec l’analyse du Chapitre 6 un résultat
d’amplification local.
7.4. Stabilisation non-linéaire
Ce projet est en collaboration avec Thierry Gallay et Kevin Zumbrun.
Pour un champ de vecteurs f en dimension finie, l’examen du spectre du linéarisé f 0 (z0 )
autour d’un équilibre z0 nous donne souvent un résultat de stabilité ou d’instabilité au sens
de Lyapunov. (Souvent, c’est-à-dire sauf quand le spectre instable est neutre : sp f 0 (z0 )∩{z ∈
C, <e z ≥ 0} ⊂ iR.)
En dimension infinie, cela n’est plus vrai : en toute généralité, la stabilité linéaire n’implique pas la stabilité non-linéaire, et l’instabilité linéaire n’implique pas l’instabilité nonlinéaire. Mais sous des hypothèses sur le spectre et la régularité du champ de vecteurs, on
peut vérifier l’une ou l’autre des implications. Par exemple, Henry montre ([37], Théorème
5.1.5) que si f est différentiable au sens de Fréchet, satisfait f (0) = 0 est approché par son
56
CHAPITRE 7. TRAVAUX EN COURS ET PERSPECTIVES
1.00
0.95
0.90
0.85
0.80
0.75
0.70
0.65
0.60
0.00
0.02
0.04
0.06
0.08
0.10
0.12
percentage of grid points outside elliptic zone
Figure 7.3. Pourcentage de points de la grille en-dehors de la zone elliptique,
en fonction du temps, pour une solution de (7.8) issue d’un polynôme
trigonométrique.
application tangente à un ordre sur-linéaire, alors l’instabilité linéaire implique l’instabilité
non-linéaire de l’origine.
Notre but est d’exhiber un exemple de flot linéairement instable et non-linéairement
stable.
Beale et Schaeffer ont obtenu dans l’article [4] des résultats partiels dans cette direction,
en particulier pour l’équation de Cauchy-Riemann régularisée (∂t + i∂x )u = k∂x uk2L2 (T) ∂x2 u.
Ces résultats sont partiels dans la mesure où le flot n’est pas régulier dans les espaces de
Sobolev d’indices élevés (il est même discontinu en l’origine de H s vers H r si r < 3/2; voir
le théorème 2.6 de [4]).
On ne s’attend a priori pas à trouver des exemples Fréchet associés à des équations quasilinéaires d’ordre un. En effet, les flots d’opérateurs quasi-linéaires, d’ordre un, symétriques
hyperboliques ne sont pas uniformément continus en général (voir par exemple Tzvetkov
[99]).
APPENDICE : CALCUL PARA-DIFFÉRENTIEL
SEMI-CLASSIQUE
Cet appendice donne une liste de définitions et résultats relatifs au calcul para-différentiel.
Mes notes de cours de M2 [93] contiennent des preuves très détaillées. On peut aussi se
référer à [41, 40, 73, 71, 55].
Définition 0.1. — Pour m ∈ R et k ∈ N, on note Γm
k l’ensemble des symboles à valeurs
matricielles a = a(x, ξ) tels que pour tout β ∈ Nd , pour tout ξ ∈ Rd , chaque coefficient de
de la matrice ∂ξβ a(·, ξ) appartient à W k,∞ , et il existe Cβ > 0, tel que pour tout ξ ∈ Rd ,
sup ∂xα ∂ξβ a(·, ξ)L∞ ≤ Cβ hξim−|β| .
0≤|α|≤k
L’opérateur pseudo-différentiel associé à a est défini en quantification semi-classique par
Z
(0.9)
op(a)u := eix·ξ a(x, ξ)û(ξ) dξ.
On note (hε u)(x) = ed/2 u(εx), et on rappelle que les normes Sobolev semi-classiques sont
définies en (1.15). On a les identités
(0.10)
opε (a) := h−1
ε op(ã)hε ,
ã(x, ξ) := a(εx, ξ),
kukHεs = khε ukH s .
Etant donné φ0 ∈ Cc∞ (Rd ), 0 ≤ φ0 ≤ 1, et des réels 0 < A < B < 2A, tels que
(0.11)
φ0 ≡ 1 pour |ξ| ≤ A, et φ0 ≡ 0 pour |ξ| ≥ B,
on pose φj (ξ) := φ0 (2−j ξ)−φ0 (2−(j−1) ξ), pour j ≥ 1, de sorte que le support de φj est inclus
dans la couronne {A2j−1 ≤ |ξ| ≤ B2j }, et φj ≡ 1 dans la couronne {B2j−1 ≤ |ξ| ≤ A2j }.
La fonction ψ : Rd × Rd → R définie par
X
ψ(η, ξ) =
φ0 (2−k+N η)φk (ξ)
k≥0
est appelée troncature admissible de Bony.
Définition 0.2. — Etant donnée une troncature admissible de Bony ψ et a ∈ Γm
k , on
appelle symbole para-différentiel associé à a le symbole
(0.12)
aψ (x, ξ) := F −1 ψ(·, ξ)â(·, ξ) (x) = F −1 ψ(·, ξ) ? a(·, ξ) (x),
où la convolution a lieu dans la variable spatiale x, la fonction lisse F −1 ψ(·, ξ)(x) étant
la transformée de Fourier inverse de ψ dans sa première variable η. L’opérateur pseudodifférentiel opψ (a) = op(aψ ) est appelé opérateur para-différentiel associé à a en quantification classique.
58
APPENDICE : CALCUL PARA-DIFFÉRENTIEL SEMI-CLASSIQUE
On définit l’opérateur para-différentiel associé à a en quantification semi-classique par
−1
ψ
opψ
ε (a) := hε op (ã)hε , où ã(x, ξ) := a(εx, ξ).
Notons que les opérations a → ã et a → aψ ne commutent pas :
ψ −1
ψ
f
ψ
opψ
hε 6= h−1
ε (a) = hε op ã
ε op a )hε = opε (a ),
si bien que l’opérateur para-différentiel associé à a en quantification semi-classique n’est pas
opε (aψ ). Le symbole classique de opψ
ε (a) est
Z
x
, εξ = F −1 ψ(y, εξ)a(x − εy, εξ) dy.
(x, ξ) → F −1 ψ ? ã
ε
On pose Mm
k,k0 (a) =
sup
d
d
hξi−(m−|β|) |∂xα ∂ξβ a(x, ξ)|.
(x,ξ)∈R ×R
|α|≤k,|β|≤k0
Les théorèmes de type Calderón-Vaillancourt (d’après [11]) donnent des conditions suffisantes pour qu’on opérateur agisse dans L2 :
Proposition 0.3 (Action). —
– Etant donné a ∈ Γ0d+1 , on a pour tout u ∈ L2 la borne
X
kopε (a)ukL2 ≤ Cd
sup |∂xα a(·, ξ)|L1 (Rdx ) kukL2 .
|α|≤d+1 ξ∈R
d
– Pour tout m, s ∈ R, k ∈ N, pour un certain C = C(m, s, k) > 0, pour tout a ∈ Γm
k ,
s+m
s
s+m
ψ
→ H , et pour tout u ∈ H
, on a la
l’opérateur opε (a) est linéaire continu H
borne
m
kopψ
ε (a)ukHεs ≤ CM0,d (a)kukε,s+m .
Proposition 0.4 (Reste). — Pour tout r ∈ N∗ , s ≥ r, il existe C = C(r, s) > 0, tel que
pour tout a ∈ H s , pour tout ε > 0, pour tout u ∈ L∞ ,
a − opψ
s ≤ Cεr k∂xr akε,s−r |u|L∞ .
ε (a) u
Hε
m2
1
Proposition 0.5 (Composition). — Pour tout m1 , m2 , r ∈ N∗ , a1 ∈ Γm
r , a2 ∈ Γr , on
a l’égalité
X
ψ
r ψ
opψ
εt opψ
ε (a1 )opε (a2 )u =
ε a1 ]t a2 u + ε Rr (a1 , a2 ),
0≤t<r
avec la notation
a1 ]t a2 =
(0.13)
X (−i)|α|
∂ξα a1 ∂xα a2 ,
α!
|α|=t
et un reste
qui satisfait pour un certain d ≤ d∗ ≤ 2d + r + 1, un certain C =
C(m1 , m2 , s, r) > 0, pour tout s ∈ R et tout u ∈ H s+m1 +m2 −r ,
ψ
Rr (a1 , a2 )u s ≤ C Mm1∗ (a1 )Mm2 (a2 ) + Mm1∗ (a1 )Mm2 (a2 ) kukε,s+m +m −r .
1
2
0,d
r,d
r,d
0,d
H
Rrψ (a1 , a2 )
ε
II ONDES GALOPANTES
CHAPITRE 8
BIFURCATION DE HOPF D’ONDES DE CHOC POUR
NAVIER-STOKES COMPRESSIBLE
Je présente ici un travail en collaboration avec Kevin Zumbrun [94, 95, 96, 97].
Les ondes dites galopantes sont des ondes de détonation qui oscillent périodiquement en
temps au cours de leur propagation dans un mélange réactif gazeux. Nous montrons qu’une
hypothèse spectrale de type bifurcation de Hopf permet de décrire ce phénomène, pour une
classe de systèmes hyperboliques-paraboliques, qui contient en particulier les équations de
Navier-Stokes compressible.
8.1. Introduction
Les ondes dites galopantes sont des ondes de détonation qui oscillent périodiquement en
temps au cours de leur propagation dans un mélange réactif gazeux ; elles sont observées
expérimentalement par exemple pour des chaleurs de réaction élevées [27].
Nous avons traité la question de la description mathématique de ce phénomène unidimensionnel d’abord pour le système modèle dit de Majda, qui est une version simplifiée des
équations de Navier-Stokes avec réaction, puis pour des systèmes de lois de conservations
avec viscosité artificielle, et enfin pour des systèmes hyperboliques-paraboliques, en donnant
pour chacune de ces classes de systèmes des résultats d’existence et d’unicité de solutions
périodiques dans un voisinage d’une famille d’ondes progressives [94, 95, 96]. Dans l’article
[97], nous étendons le résultat présenté ici au système de Navier-Stokes avec réaction.
Nous considérons ici une famille de systèmes hyperboliques-paraboliques dépendants d’un
paramètre de bifurcation, et montrons qu’une hypothèse spectrale de type bifurcation de
Poincaré-Hopf permet de décrire les ondes galopantes. L’objet de ce travail est donc, à partir
d’une hypothèse sur l’opérateur linéarisé, de prouver l’existence de solutions périodiques
pour les équations non-linéaires. L’opérateur linéarisé en question est issu de la linéarisation
du système d’équations autour d’une famille d’ondes progressives. Le fait que, pour un tel
opérateur, la distance dans le plan complexe entre l’origine et le spectre essentiel soit nulle
(“absence of spectral gap”) rend impossible la construction classique d’une variété centrale.
Nous surmontons cette difficulté en effectuant une réduction de Lyapunov-Schmidt, à partir
d’une description précise de la fonction de Green de l’opérateur linéarisé, à la suite de [106]
et [69].
La question de la vérification de cette hypothèse spectrale a été étudiée numériquement
dans [47], par des développements formels dans [10], et par l’étude de fonctions d’Evans
dans [67, 68].
62
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
En plus de cette hypothèse spectrale, nous faisons des hypothèses de structure, qui sont
satisfaites par les équations de Navier-Stokes compressible et par les équations de la magnétohydrodynamique.
Mentionnons enfin deux approches différentes pour l’étude de bifurcations vers des solutions périodiques en l’absence de trou spectral, par Kunze et Schneider [52] et Sandstede et
Scheel [87].
8.2. Hypothèses et énoncé du théorème
Soit une famille à un paramètre de lois de conservations, en une dimension d’espace et
avec viscosité partielle :
(8.1)
∂t u1 + ∂x F1 (ε, u) = 0,
∂t u2 + ∂x F2 (ε, u) = ∂x (b(ε, u)∂x u2 ).
L’inconnne u := (u1 , u2 ) ∈ Rn−r × Rr dépend du temps t ∈ R+ , de la position x ∈ R, et du
paramètre réel ε ∈ (−ε0 , ε0 ), pour un certain ε0 > 0. Le flux F := (F1 , F2 ) et la matrice de
viscosité b sont supposés assez réguliers, c’est-à-dire C k0 , avec k0 ≥ 5. On suppose connue
une famille de solutions stationnaires u(x, t) = ūε (x) = (ūε1 , ūε2 )(x) de (8.1), qui satisfont
lim ūε (x) = uε± ∈ Rn .
(8.2)
x→±∞
Concernant la structure du système (8.1), nous faisons les hypothèse suivantes :
(A1) Le flux F1 est une fonction linéaire de u :
F1 (ε, u) = F11 (ε)u1 + F12 (ε)u2 ∈ Rn−r ,
et pour tous (ε, u) ∈ (−ε0 , ε0 ) × Rn , la matrice b(ε, u) ∈ Rr×r est de rang r.
(A2) Il existe une application C k0
0
A11 (ε, u)
0
(ε, u) 7→ A0 (ε, u) =
∈ Rn×n
0
A022 (ε, u)
à valeurs définies positives, telle que A011 F11 soit symétrique et A0 b soit définie positive,
pour tous ε, u.
Nous faisons de plus les hypothèses suivantes sur les états à l’infini uε± et sur les limites
en ±∞ de l’opérateur linéarisé autour de ūε :
(H1) Le spectre de F11 (ε) est réel, semi-simple, non nul, et de multiplicité indépendante
de ε.
(H2) Le spectre de la matrice
F11 (ε)
F12 (ε)
,
Aε± :=
∂u1 F2 (ε, uε± ) ∂u2 F2 (ε, uε± )
est réel, simple, et non nul, et de multiplicité indépendante de ε.
ε
ε
(H3)
> 0, tel que, si λ est une valeur propre de iξAε± − ξ 2 B±
, où B±
:=
Il existe θ 2
0
0
θξ
et ξ ∈ R, alors <λ ≤ 1+ξ
2.
0 b(ε, uε± )
L’onde stationnaire ūε satisfait
(8.3)
0
b(ε, u)u02
= F (ε, u) + C.
8.2. HYPOTHÈSES ET ÉNONCÉ DU THÉORÈME
63
Les hypothèses (A1), (A2) et (H1) impliquent en particulier que (8.3) est une équation
différentielle résolue en u2 , dont le linéarisé autour de ūε s’écrit
u02 = b(ε, ūε )−1 a(ε, ūε )u2 ,
(8.4)
où
−1
a := ∂u2 F2 (ε, ūε ) − ∂u1 F2 (ε, ūε )F11
F12 − (∂u b(ε, ūε ) ·)(ūε2 )0 .
D’après (8.2), uε+ et uε− sont des points d’équilibre de (8.3), de sorte que C = F (ε, uε− ). Par
ailleurs, un calcul de déterminant par blocs donne det Aε± = det F11 (ε) det a(ε, uε± ), et donc
d’après (H1) et (H2), det a(ε, uε± ) 6= 0, si bien que ūε converge exponentiellement vers uε±
en ±∞, et ∂xk ūε converge exponentiellement vers 0 en ±∞, pour k ≤ k0 + 1.
ε
ε
Soit U−
et S+
les variétés instable et stable en (uε− )2 et (uε+ )2 de (8.3) (vue comme une
ε
ε
équation différentielle sur Rr ), et U−
et S+
les sous-espaces associés, dont on note d− et
d+ les dimensions ; d− est donc le nombre de valeurs propres positives de a(ε, uε− ) et d+ le
nombre de valeurs propres négatives de a(ε, uε+ ). Les hypothèses (H1) et (H2) et le Lemme
1.2 de [69] impliquent que d+ et d− ne dépendent pas de ε, et que
n − (i− + i+ ) = r − (d− + d+ ),
(8.5)
où i− est le nombre de valeurs propres positives de Aε− et i+ le nombre de valeurs propres
négatives de Aε+ .
Nous faisons l’hypothèse (où Tx désigne l’espace tangent en x) :
(H4)
(i) d− + d+ = r + 1, et
ε
ε
ε
ε
(ii) pour tout u ∈ U−
∩ S+
, dim(Tu U−
+ Tu S+
) = r.
Avec l’égalité (8.5), l’hypothèse (H4)(i) peut se lire i+ + i− = n + 1, et signifie donc que
le choc ūε est de type Lax.
ε
ε
.
∩ S+
Une orbite globale de (8.3) qui tend vers (uε± )2 en ±∞ prend ses valeurs sur U−
ε
ε
L’hypothèse (H4)(ii) signifie que l’intersection U− ∩ S+ est transverse, ce qui implique que
ε
ε
est une sous-variété de Rr , de codimension égale à
∩ S+
U−
ε
ε
codim U−
+ codim S+
= r − 1,
d’après (H4)(i). Remarquons par ailleurs que le caractère autonome de (8.1) implique en
particulier que les translatés de ūε sont tous solutions de (8.3). Une conséquence de (H4)
est donc
ε
ε
U−
∩ S+
= {ūε (x), x ∈ R},
(8.6)
c’est-à-dire que l’ensemble des orbites globales de (8.3) qui satisfont (8.2) est l’ensemble des
translatés de ūε .
ε
ε
∩ Tūε2 (x) S+
. Soit
Sous l’hypothèse (H4), pour tout x, (ūε2 )0 (x) génère Tūε2 (x) U−
{(ūε2 )0 (x), w1− (x), . . . , wd−− −1 (x)},
(8.7)
ε
une base de Tūε2 (x) U−
, et
(8.8)
{(ūε2 )0 (x), w1+ (x), . . . , wd++ −1 (x)},
ε
une base de Tūε2 (x) S+
. Alors (d’après (H4)(i)) le déterminant
(8.9)
γ(x) = det (ūε2 )0 , w1− , . . . , wd−− −1 , w1+ , . . . , wd++ −1 (x),
est bien défini, et l’hypothèse de transversalité (H4)(ii) implique
γ(x) 6= 0,
pour tout x ∈ R.
Réciproquement, supposons (H4)(i), et soit {x 7→ wj− (x)}1≤j≤d− −1 une famille d’appliε
cations telle que pour tout x, (8.7) est une base de Tūε2 (x) U−
, et une famille d’applications
64
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
ε
{x 7→ wk+ (x)}1≤k≤d+ −1 , telle que pour tout x, (8.8) est une base de Tūε2 (x) S+
. Alors pour tous
−
+
j, k, wj et wk sont des solutions de l’équation linéarisée (8.4) qui satisfont lim−∞ wj− = 0,
et lim+∞ wk+ = 0. Le déterminant γ correspondant est un Wronskien ; il s’annule identiquement sur R ou ne s’annule jamais. On en conclut que, sous l’hypothèse (H4)(i), si on
suppose de plus (8.6), alors la condition algébrique
γ(x0 ) 6= 0,
pour un certain x0 ∈ R,
est équivalente à la condition de transversalité (H4)(ii).
Soit L(ε) l’opérateur linéarisé autour de l’onde de référence ūε :
L(ε)u := −∂x (Aε u) + ∂x (B ε ∂x u),
(8.10)
où
ε
A u :=
F11 (ε)u1 + F12 (ε)u2
∂u F2 (ε, ūε ) · u
−
0
(∂u b(ε, ūε ) · u)(∂x ūε )2
,
et
B ε :=
0
0
0
b(ε, ūε )
.
L’opérateur L(ε) est asymptotiquement constant à l’infini :
ε
L(ε) → L± (ε) := ∂x (Aε± ·) + ∂x (B±
∂x ·),
x → ±∞,
ε
sont les matrices qui apparaissent dans les énoncés des hypothèses (H2) et
où Aε± et B±
(H3).
L’hypothèse cruciale pour la description des ondes galopantes est la suivante :
(PH) Dans l’intersection d’un voisinage de {<λ ≥ 0} \ {0} avec une assez grande boule
centrée en l’origine, l’équation aux valeurs propres de L(ε) dans L2 ,
(L(ε) − λ)u = 0,
a exactement deux solutions de multiplicité une, λ± = γ(ε) ± iτ (ε), avec γ(0) = 0,
τ (0) 6= 0, γ 0 (0) 6= 0.
On peut montrer (en bornant la norme de la résolvante par des estimations d’énergie,
voir par exemple la Proposition 4.7 de [104]) que L(ε) n’a pas de valeur propre dans un
domaine de la forme {<λ ≥ −θ0 , |λ| ≥ R}, où θ0 > 0 et R > 0. Dans l’hypothèse (PH),
« assez grande » se réfère donc à R et θ0 . Sous l’hypothèse (PH), nous savons donc que
les seules valeurs propres de L(ε) dans {<λ ≥ −θ0 } \ {0} sont (γ ± iτ )(ε). Par ailleurs, le
spectre essentiel est confiné dans un domaine du plan complexe de la forme
{λ,
<λ ≤ −θ1 |=λ|2 /(C + |=λ|2 )},
pour θ1 > 0 et C > 0, et donc, pour ε assez petit, les valeurs propres λ± (ε) sont séparées
du spectre essentiel.
Etant donnée ω(x) > 0 une fonction poids, on note Lpω l’espace des distributions f ∈ S 0
telles que ωf ∈ Lp . On munit L2ω du produit scalaire (f, g)L2ω := (ωf, ωg)L2 . On note, pour
k ∈ N, Hωk l’espace de Sobolev des distributions f ∈ S 0 telles que ω∂xj f ∈ L2 , pour tout
0 ≤ j ≤ k. On note k · kk,ω la norme de Hωk , c’est-à-dire
kf kk,ω :=
k
X
j=0
kω∂xj f kL2 .
65
8.3. EXEMPLE
Soit une fonction poids η, telle que pour un certain η0 > 0, un certain C > 0, et pour
1 ≤ k ≤ k0 ,
(8.11)
(8.12)
2 1/2
1 ≤ η ≤ eη0 (1+x
)
,
η −1 ∈ L∞ ,
η(x) ≤ Cη(x − y)η(y),
η −1 ∂xk η ∈ L∞ ,
pour tous x, y,
et
η −2 ∈ L1 (R).
(8.13)
Alors kf ks,η ≤ Ckηf ks,1 , et pour s ≥ 1, kf gks,η2 ≤ Ckf ks,η kgks,η par l’inégalité de Moser.
Nous allons utiliser les espaces
(8.14)
X1 := Hη2 ,
X2 := Hη2 ∩ ∂x (Hη12 ).
On définit une norme sur X2 par
(8.15)
k∂x f kX2 := k∂x f k2,η + kf k1,η2 .
Enfin, étant donnés deux espaces de Banach X et Y, on note L(X, Y ) l’espace des applications continues de X vers Y, normé par kf kL(X,Y ) := supkukX =1 kf (u)kY ; L(X) désigne
L(X, X).
Théorème 8.1. — Soit ūε et (8.1) une famille d’ondes stationnaires et de systèmes satisfaisants les hypothèses (A1)-(A2), (H1)-(H4) et (PH). Pour η0 > 0 assez petit, il
existe C > 0 et r0 > 0, tels que si η est une fonction poids satisfaisant (8.11), (8.12)
et (8.13), il existe deux fonctions continues r → ε(r), r → T (r), définies sur (−r0 , r0 ),
telles que ε(0) = 0, T (0) = 2π/τ (0), et une famille de solutions globales {ur }|r|<r0 de (8.1)
pour les valeurs ε = ε(r) du paramètre de bifurcation, telles que pour tout |r| < r0 , ur est
T (r)-périodique en t, et, pour tout t ≥ 0,
(8.16)
C −1 r ≤ kur (·, t) − ūε(r) k2,η ≤ Cr.
Le Théorème 8.1 n’est pas un résultat d’instabilité asymptotique de la famille d’ondes
stationnaires ūε . L’estimation (8.16) signifie en effet que l’onde galopante ur est assez loin,
pour tout temps, de la solution stationnaire uε(r) . (On peut cependant montrer directement
que, pour ε > 0, la solution stationnaire ūε est orbitalement non-linéairement instable, en
utilisant le trou spectral entre (γ ± iτ )(ε) et le reste du spectre de L(ε).)
8.3. Exemple
Un exemple simple de système physique satisfaisant les hypothèses (A1)-(A2) et (H1)(H4) est celui des équations de Navier-Stokes compressible isentropique en coordonnées
lagrangiennes, qui s’écrit
(8.17)
∂t v − ∂x u = 0,
∂t u + ∂x p(v) = ∂x ((ν/v)∂x u),
où ρ > 0 est la densité et v = 1/ρ, u est la vitesse de l’écoulement, et p la pression. Le
nombre ν > 0 est un coefficient de viscosité.
On considère une famille d’ondes progressives u(x, t) = ūε (x − s(ε)t) solutions de (8.17).
Dans le référentiel de l’onde progressive, le système s’écrit
(8.18)
∂t v − s(ε)∂x v − ∂x u = 0,
∂t u − s(ε)∂x u + ∂x p(v) = ∂x ((ν/v)∂x u).
66
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
On pose u1 = v et u2 = u. Alors (A1) et (H1) sont vérifiées. L’hypothèse (A2) est
ε
vérifiée, avec A0 = Id. Un calcul direct montre que, si ∂v p(v̄±
) < 0 pour tout ε ∈ (−ε0 , ε0 ),
alors (H2) et (H3) sont satisfaites. La preuve de l’existence de profils de Lax transverses,
satisfiant (H4), remonte à Gilbarg [31].
Les équations de Navier-Stokes non isentropique (et les équations de la magnétohydrodynamique) satisfont aussi (A1)-(A2), (H1)-(H3) (voir le paragraphe 5 de [96], et les
exemples A.6 et A.8 de l’appendice A de [105]).
Les équations de la dynamique des gaz écrites en coordonnées euleriennes ne satisfont
pas (A1). Elles ne satisfont pas non plus l’estimation non-linéaire cruciale du Corollaire 8.3
(voir l’appendice de [96]).
La vérification numérique de (PH), et plus généralement des conditions de stabilité spectrale énoncées en particulier dans [69], est un projet de Kevin Zumbrun et ses collaborateurs,
notamment Blake Barker, Matt Johnson, Jeff Humpherys et Greg Lyng.
8.4. Remarques
La formulation de (A1)-(A2) ci-dessus correspond à une version légèrement plus forte
des hypothèses de structure de [69] (voir les remarques 1.3 et 3.5 de [96]). L’hypothèse de
linéarité (A1) est cruciale en vue de l’obtention d’estimations non-linéaires sans pertes de
dérivées ; les équations de Navier-Stokes compressible écrites en coordonnées euleriennes ne
satisfont pas (A1). Voir à ce sujet l’appendice de [96].
Les hypothèses (H1)-(H3) sont celles de l’article [69], qui donne une description de la
fonction de Green de l’opérateur linéarisé «réduit» ((1−Π)L(ε), où Π est un projecteur sur
le plan des vecteurs propres de bifurcation), description que nous utilisons au paragraphe
8.5.4.
L’hypothèse (H3) est la condition de dissipativité de Kawashima-Shizuta [50].
L’analyse de [96] couvre le cas des profils de choc sur-compressifs (correspondants à
i > n + 1), et contient donc une version plus faible de (H4).
La fonction d’Evans Dε associée à L(ε) est définie comme le Wronskien des fonctions qui
engendrent les sous-espaces instables et stables de l’équation
(L(ε) − λ)u = 0,
en −∞ et +∞ respectivement ; Dε est une fonction analytique, dont les racines dans le
complémentaire du spectre essentiel de L(ε) sont les valeurs propres de L(ε). Pour ε0 assez
petit et |ε| < ε0 , les valeurs propres (γ ± iτ )(ε) sont loin du spectre essentiel. L’hypothèse
(PH) est donc une hypothèse d’annulation de Dε .
Le Théorème 1.4 de [69] affirme que, sous les hypothèses (A1)-(A2), (H1)-(H4), le
choc ūε est linéairement orbitalement stable si et seulement si Dε a exactement une seule
racine simple dans {<λ ≥ 0}, en λ = 0. L’hypothèse (H4) signifie en particulier que Dε a
une racine simple en λ = 0. Sous les hypothèses (A1)-(A2), (H1)-(H4), l’hypothèse (PH)
exprime donc le fait que le système effectue une transition de la stabilité (orbitale) linéaire
vers l’instabilité linéaire.
Le Théorème 8.1 est un résultat d’existence. Le théorème prouvé dans [96] contient un
résultat d’unicité. Nous prouvons en particulier dans [96] que si ūε est une famille de chocs
de Lax, les solutions périodiques décrites dans le Théorème 8.1 sont les seules solutions
périodiques de (8.1) dans un voisinage de ūε , à des translations en x, t près.
2 1/2
Les fonctions poids η = 1 + |x| [95] et η = eη0 (1+x
(8.13)
)
[96] satisfont (8.11), (8.12) et
67
8.5. EBAUCHE DE PREUVE
Les hypothèses (A1)-(A2) et (H1)-(H3) sont aussi satisfaites par les équations de la
magnétohydrodynamique (voir le paragraphe 5 de [96]).
8.5. Ebauche de preuve
On cherche d’abord la solution u comme une perturbation de l’onde de référence ūε , en
posant u = ūε + u̇, où u̇ dépend bien sûr de ε. Si u est une solution de (8.1), alors u̇ satisfait
∂t u̇ − L(ε)u̇ = ∂x Q(ε, ūε , u̇),
(8.19)
avec un reste de Taylor Q qui s’exprime en fonction de b et F2 .
8.5.1. Estimations non-linéaires. —
Lemme 8.2. — La solution u̇ de (8.19) issue d’une donnée initiale u0 assez petite dans
Hηs satisfait l’estimation, pour 1 ≤ s ≤ k0 ,
Z t
ku̇2 (t0 )k2s+1,η dt0 ≤ Cku0 k2s,η ,
(8.20)
ku̇k2s,η +
0
uniformément en (ε, t) ∈ [−ε0 , ε0 ] × [0, T0 ].
La preuve de ce lemme passe par des estimations élémentaires, beaucoup plus simples
que les estimations à la Kawashima de [69].
On pose
Z t
0
(8.21)
N (ε, t, u0 ) :=
e(t−t )L(ε) ∂x Q(ε, ūε , u̇) dt0 .
0
Une conséquence directe du Lemme 8.2 est le résultat suivant :
Corollaire 8.3. — La solution u̇ de (8.19) issue d’une donnée initiale u0 assez petite dans
H s satisfait l’estimation, pour 1 ≤ s ≤ k0 ,
kN ks,η2 ≤ Cku0 k2s,η ,
(8.22)
uniformément en (ε, t) ∈ [−ε0 , ε0 ] × [0, T0 ].
Le Corollaire 8.3 est faux dans le cas d’un système hyperbolique ; dans le cas strictement
parabolique, il découle d’estimations classiques pour le semi-groupe.
L’opérateur L(ε) est fermé, de domaine H 2 dense dans L2 . On peut montrer par une
estimation d’énergie (voir par exemple la preuve de la Proposition 3.6 de [104]) que la
norme d’opérateur dans L2 de (λ − L(ε))−k , pour tout k ≥ 1, est contrôlée par C|λ − γ0 |−k ,
pour γ0 > 0 assez grand, et λ > γ0 . On en déduit (voir par exemple le Théorème 5.3,
chapitre 1, de [78]) que L(ε) génère un semi-groupe C 0 (dans la terminologie de Pazy, voir
définition 2.1, chapitre 1, de [78]), qui pour t ∈ [0, T0 ], satisfait ketL(ε) kL(L2 ) ≤ C.
Lemme 8.4. — Pour toute fonction poids ω > 0, le semi-groupe généré par L(ε) satisfait
l’estimation
Z
x tL(ε)
(8.23)
ketL(ε) kL(L2 ) ≤ C,
(e
∂x f )(x0 ) dx0 2 ≤ Ckf kL2 ,
ω
−∞
uniformément en (ε, t) ∈ [−ε0 , ε0 ] × [0, T0 ].
Lω
ω
68
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
Preuve.. — La première estimation est une version à poids de l’estimation classique qui
précède l’énoncé du Lemme. Pour prouver la deuxième estimation, on pose
Z x
(etL(ε) ∂x f )(x0 ) dx0 ;
U=
−∞
alors U satisfait
∂t U = L] (ε)U = −Aε ∂x U + B ε ∂x2 U,
U (0) = f,
]
avec les notations de (8.10). L’opérateur L (ε) génère un semi-groupe C 0 , qui satisfait
]
]
ketL (ε) kL(L2ω ) ≤ C, et U = etL (ε) f, d’où la deuxième estimation.
Nous allons utiliser le Corollaire 8.3 sous la forme suivante :
Corollaire 8.5. — La solution u̇ de (8.19) issue d’une donnée initiale u0 assez petite dans
H s satisfait les estimations
kN kX2 ≤ Cku0 k2X1 ,
(8.24)
k∂u0 N kX2 ≤ Cku0 kX1 ,
uniformément en (ε, t) ∈ [−ε0 , ε0 ] × [0, T0 ].
8.5.2. Choix de coordonnées. — Soit Π le projecteur de L2 (R) sur le plan {φε+ , φε− }
des vecteurs propres de L(ε) associés aux valeurs propres de bifurcation (γ ± iτ )(ε) définies
dans l’hypothèse (PH), parallèlement à l’orthogonal du plan {φ̃ε+ , φ̃ε− } des vecteurs propres
de l’adjoint de L(ε) associés aux valeurs propres (γ ∓ iτ )(ε). On note
Πf = (φ̃ε− , f )L2 φε− + (φ̃ε+ , f )L2 φε+ .
(8.25)
L’hypothèse d’hyperbolicité des états à l’infini (A1) (et la localisation du spectre essentiel,
décrite à la suite de l’hypothèse (PH)) implique que les vecteurs propres φε± et φ̃ε± sont
exponentiellement décroissants à l’infini, et donc, si dans (8.11) η0 est assez petit, alors
φ̃ε± , φε± ∈ Hη2 , et pour tout f ∈ L2 ,
kΠf k2,η ≤ Ckf kL2 .
(8.26)
Les coefficients de L(ε) étant réels et les valeurs de u0 et u̇ étant réelles, on choisit φε−
égal au complexe conjugué de φε+ , et on pose
Πu̇ = w1 <φε+ + w2 =φε+ ,
(8.27)
(1 − Π)u̇ = v,
et
Πu0 = a1 <φε+ + a2 =φε+ ,
(8.28)
2
(1 − Π)u0 = b.
0
On note a = (a1 , a2 ) ∈ R , et w = (w1 , w2 ) ∈ C ([0, T0 ], R2 ). Les coordonnées (w, v) de u̇
satisfont le système
∂t w = (γ(ε) + τ (ε)J)w + Π∂x Q(ε, ūε , u̇),
(8.29)
∂t v = (1 − Π)L(ε)v + (1 − Π)∂x Q(ε, ūε , u̇),
0 −1
.
1 0
Remarquons qu’on peut adapter la preuve du Corollaire 8.5 au cas d’une équation dont
l’opérateur d’évolution est (1 − Π)L(ε) et dont le terme de reste non-linéaire a la forme
(1 − Π)∂x Q. Cette adaptation peut se faire d’une part en écrivant (1 − Π)L = L − ΠL, où
ΠL apparaît comme une correction d’ordre 0, et d’autre part en écrivant
où J =
(8.30)
φε± = ∂x Φε± ,
8.5. EBAUCHE DE PREUVE
69
où les Φε± sont exponentiellement décroissants à l’infini, ainsi que leurs dérivées jusqu’à
l’ordre k0 + 1, ce qui permet d’écrire (1 − Π)∂x Q sous la forme ∂x Q̃, pour un certain Q̃ qui
vérifie les mêmes bornes que Q. Le terme non-linéaire dans la formulation de Duhamel de
l’équation en v est donc redevable du Corollaire 8.5. (L’égalité (8.30) est une conséquence de
ε
ε
la forme conservative
R ε de L(ε) et de l’équation aux valeurs propres L(ε)φ± = (γ ± iτ )(ε)φ± ,
qui impliquent R φ± = 0.)
Proposition 8.6. — La solution (w, v) de (8.29) issue de (a, b), pour |a| + kbkX1 assez
petit, satisfait les bornes, pour t ∈ [0, T0 ],
kv(t)kX1 ≤ C(kbkX1 + |a|2 ),
(8.31)
et
C −1 |a| − Ckbk2X1 ≤ |w(t)| ≤ C(|a| + kbk2X1 ).
(8.32)
Preuve.. — La formule de Duhamel pour v s’écrit
Z t
0
t(1−Π)L(ε)
e(t−t )(1−Π)L(ε) (1 − Π)∂x Q dt0 ,
v=e
b+
0
et par le Corollaire 8.5 et la remarque qui précède la Proposition 8.6,
Z
t (t−t0 )(1−Π)L(ε)
e
(1 − Π)∂x Q dt0 ≤ CT0 ku0 k22,η ,
2,η
0
d’où (8.31), la contribution de la condition initiale étant bornée par (8.23). De même,
Z t
|w| ≤ C(|a| +
kQkL2 dt0 ),
0
d’où (8.32).
8.5.3. Application de premier retour de Poincaré. — La solution de (8.29) issue de
(a, b), qui vérifie les estimations de la Proposition 8.6, est T -périodique si et seulement si
(w, v)(T ) = (a, b), ce que nous écrivons
f (ε, T, a, b) = 0,
(8.33)
g(ε, T, a, b) = 0,
où (f, g) est l’application de premier retour de Poincaré, définie par
(8.34)
f (ε, T, a, b) = (Id − R(ε, T ))a − N1 (ε, T, a, b),
g(ε, T, a, b) = (Id − S(ε, T ))b − N2 (ε, T, a, b),
où
(8.35)
R(ε, T ) := eT (γId+τ J) ,
S(ε, T ) := eT (1−Π)L(ε) .
et
Z
T
R(ε, T − t)Π∂x Q(ε, ūε , u̇)(t) dt,
N1 (ε, T, a, b) =
0
(8.36)
Z
N2 (ε, T, a, b) =
T
S(ε, T − t)(1 − Π)∂x Q(ε, ūε , u̇)(t) dt.
0
Nous allons résoudre (8.33) en résolvant d’abord l’equation en dimension infinie g = 0.
70
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
8.5.4. Estimations ponctuelles de la fonction de Green. — L’objet de ce paragraphe
est d’établir la Proposition suivante, où on note
Ω = [−ε0 , ε0 ] × (0, +∞).
Proposition 8.7. — Sous les hypothèses du Théorème 8.1, (Id − S(ε, T )) a un inverse à
droite
(Id − S(ε, T ))−1 : X2 → H 2 ,
qui appartient à L(X2 , X1 ), localement uniformément en (ε, T ) ∈ Ω.
Le semi-groupe généré par (1 − Π)L(ε) (voir la discussion qui précède le Lemme 8.4)
satisfait la formule de représentation inverse de Laplace, pour γ > γ0 ,
Z γ+iR
(8.37)
S(ε, t)f = lim
etλ (λ − (1 − Π)L)−1 f dλ,
R→∞
γ−iR
Hη2 ,
où, pour f ∈
la convergence a lieu dans L2 ([0, ∞[t , L2η ) (voir la Proposition 6.24 de
l’appendice A de [104]). La fonction de Green G et le noyau de la résolvante Gλ de (1−Π)L(ε)
sont définis comme des distributions sur D(R2x,y ), par
G(ε, x, t; y), φ(x)ψ(y) D0 ,D(R2 ) := φ(x), et(1−Π)L(ε) ψ(x) D0 ,D(Rx ) ,
x,y
et
Gλ (ε, x, y), φ(x)ψ(y)
D 0 ,D(R2x,y )
:= φ(x), (λ − (1 − Π)L(ε))−1 ψ(x) D0 ,D(Rx ) ,
de sorte qu’on a en particulier
S(ε, t)f = G(ε, x, t; y), f (y)
(8.38)
D 0 ,D(Ry )
.
De (8.37), on déduit, pour γ > γ0 (voir la Proposition 2.5 de [69]),
Z γ+iR
(8.39)
G(ε, x, t; y) = lim
etλ Gλ (ε, x, y) dλ,
R→∞
γ−iR
D(R2x,y ).
En utilisant l’analyticité de Gλ , on peut déformer le contour d’intégration, et
dans
obtenir, pour ν0 , µ > 0 assez petits, G = GI + GII , avec
I
GI :=
etλ Gλ (ε, x, y) dλ,
Γ
GII := lim
R→∞
Z
−ν0 −iµ
eλt Gλ (ε, x, y) dλ +
−ν0 −iR
Z
−ν0 +iR
eλt Gλ (ε, x, y) dλ ,
−ν0 +iµ
où Γ est le grand arc de cercle, orienté positivement, du cercle de centre 0 et de rayon
p
ν02 + µ2 , qui relie le point −ν0 − iµ au point −ν0 + iµ. La composante GI de G représente
la contribution des hautes fréquences, alors que le terme GII représente les basses fréquences.
On note SI et SII les opérateurs dont les noyaux (au sens de (8.38)) sont GI et GII , de
sorte que S = SI + SII .
P∞
Lemme 8.8. — Sous les hypothèses du Théorème 8.1, la série n=0 SII (ε, nT ) est absolument convergente dans L(X1 ), localement uniformément en (ε, T ) ∈ Ω.
Preuve.. — D’après la Proposition 7.1 de [69], pour 0 ≤ j ≤ 2, ∂xj GII se décompose en une
somme de termes « hyperboliques » de la forme
O(e−νt )δx−αt (−y)∂yj ,
ν > 0,
71
8.5. EBAUCHE DE PREUVE
où α est une valeur propre de F11 , et de termes de reste en O(e−ν(|x−y|+t) )∂yj . On en déduit
directement la convergence de la suite
Z
N
X
∂xj GII (·, N T ; y)f (y) dy 2 ,
L
η
n=0
pour f ∈ X1 , uniformément en (ε, T ), pour T loin de zéro.
P∞
Lemme 8.9. — Sous les hypothèses du Théorème 8.1, la série
n=0 SI (ε, nT ) converge
2
dans L(∂x (L∞
),
H
),
localement
uniformément
en
(ε,
T
)
∈
Ω,
et
sa limite appartient à
2
η
L(∂x (L∞
),
X
),
localement
uniformément
en
(ε,
T
)
∈
Ω.
2
1
η
2
Preuve.. — Pour prouver le premier énoncé, il suffit de prouver la convergence dans L(L∞
η2 , L )
des suites d’opérateurs de noyaux, pour 0 ≤ j ≤ 2,
I X
N
N
X
j
∂x ∂y GII (x, T ; y) =
eλnT ∂xj ∂y Gλ (x, y) dλ = g1 + g2,N ,
Γ n=0
n=0
où
I 1
∂xj ∂y Gλ (x, y), dλ,
λT
Γ 1−e
I
1
∂xj ∂y Gλ (x, y) dλ.
g2,N (x, y) :=
e(N +1)T λ
λT
1
−
e
Γ
Le premier terme correspond à une estimation en temps court. Le contour Γ étant loin
du spectre essentiel, la borne élémentaire
g1 (x, y) :=
|∂xj ∂y Gλ (x, y)| ≤ Ce−ν|x−y| ,
j ≤ 2, λ ∈ Γ, ν > 0,
donne g1 = O(e−ν|x−y| ), et donc
Z
Z
g1 (x, y)f (y) dy 2 ≤ η(x)|f (x − y)|e−ν|y| dy 2
L
Lη
(8.40)
−ν|·|
)kL2 ,
≤ C (ηf ) ∗ (ηe
d’après (8.12). Si, dans (8.11), η0 satisfait η0 < ν, alors on déduit directement de (8.40) la
borne
Z
g1 (x, y)f (y) dy 2 ≤ Ckη 2 f kL∞ kη −1 kL2 ,
(8.41)
L
η
d’après (8.13).
A partir de la description de G donnée dans la Proposition 7.1 de [69], on peut montrer
(voir la Proposition 2.5 de [96] pour plus de détails) que le terme g2,N est borné, comme
GI (ε, x, (N + 1)T ; y), par une somme de termes « excités » de la forme
Z (y+α(N +1)T )/√C(N +1)T
2
−ν|x|
eN (x, y) := O(e
)
e−z dz,
−∞
de termes « diffusés » de la forme
2
sN (x, y) := (1 + (N + 1)T )−1/2 e(x−y−α(N +1)T )
/C(N +1)T
et de termes de reste, de la forme
rN (x, y) := O(e−ν(|x|+|y|) ) + O(e−ν(|x−y|+(N +1)T ) ).
,
72
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
1
L’injection L∞
η 2 ,→ L implique que
Z
lim
eN (x, y)f (y) dy = O(e−ν|x| ),
N →∞
R
par convergence dominée. Si η0 < ν, la suite eN (x, y)f (y) dy converge donc dans L2η .
Par ailleurs,
Z
sN (x, y)f (y) dy 2 = (1 + N T )−1/2 e(· −N T )/CN T ∗ f 2
L
L
≤ CN −1/4 kf kL1
tend vers 0 quand N tend vers l’infini.
2
Enfin, l’opérateur de noyau rN est somme d’un terme constant, qui appartient à L(L∞
η 2 , Lη )
2
d’après (8.40) et (8.41), et d’un terme exponentiellement décroissant en N en norme L(L∞
η 2 , Lη ).
PN
On en déduit
convergence de la suite n=0 SII (ε, nT ) dans L(X2 , H 2 ), et aussi l’apPla
∞
partenance de n=0 SII (ε, nT ) à L(X2 , X1 ) (car le seul terme qui a prori ne converge pas
dans L(X2 , X1 ) est le terme diffusé, dont la limite est nulle).
Preuve de la Proposition 8.7. — Soit f ∈ X2 ,→ ∂x (L∞
η 2 ). D’après les Lemmes 8.8 et 8.9, la
PN
2
suite n=0 S(ε, nT )f converge dans H , et
(Id − S)
N
X
S(ε, nT )f = f − S(ε, (N + 1)T )f
n=0
converge vers f en norme H 2 . Par ailleurs, il découle du Lemme 8.4 que S ∈ L(H 2 ). Donc
f = lim (Id − S)
N →∞
N
X
S(ε, nT )f = (Id − S)
n=0
∞
X
S(ε, nT )f,
n=0
P∞
ce qui établit que (Id − S)−1 := n=0 S(ε, nT ) est un inverse à droite de Id − S sur X2 , qui
par ailleurs appartient à L(X2 , X1 ) d’après les Lemmes 8.8 et 8.9.
Remarquons que cette description de la fonction de Green (GII dans le Lemme 8.9)
comme somme de termes excités, diffusés et de termes de reste, se retrouve à l’identique
dans le cas élémentaire de l’équation de Burgers. Voir l’exemple 8.6 de [106].
8.5.5. Réduction. —
Proposition 8.10. — Pour tout T0 > 0, il existe a0 > 0 et une fonction continue
β:
(ε, T, a) ∈ R × (0, T0 ] × R2 → β(ε, T, a) ∈ X1 ,
définie pour |ε| + |a| ≤ ε0 + a0 , telle que
g(ε, T, a, β(ε, T, a)) ≡ 0,
et qui satisfait la borne
(8.42)
kβkX1 ≤ C|a|2 ,
localement uniformément en (ε, T, a) ∈ [−ε0 , ε0 ] × (0, T0 ] × BR2 (0, a0 ).
8.5. EBAUCHE DE PREUVE
73
Preuve.. — On pose
T (b) = (Id − S(ε, T ))−1 N2 (ε, T, a, b).
(8.43)
où (Id − S(ε, T ))−1 est donné par la Proposition 8.7. Le Corollaire 8.5 et la remarque qui
précède la Proposition 8.6 donnent la borne
kN2 kX2 ≤ C(|a| + kbkX1 )2 ,
(8.44)
si bien qu’avec la Proposition 8.7, on peut affirmer que T envoie une petite boule de X1
dans elle-même, pour ε et a assez petits. Le Corollaire 8.5 donne aussi la borne
k∂b N2 kX2 ≤ C(|a| + kbkX1 ),
(8.45)
dont on déduit directement le caractère contractant de T , pour |a| + kbkX1 assez petit. On
note β le point fixe de T dont l’existence découle du Théorème du point fixe de Banach.
Par définition de (Id − S)−1 , on a bien g(ε, T, a, β) = 0. Enfin (8.42) découle directement de
(8.44) et de l’équation β = T (β).
La solution de (8.43) est unique, mais pour tout élément ω du noyau de Id − S, ω + β est
une solution de g = 0. La question de l’unicité des solutions périodiques de (8.1) issues de
conditions initiales proches de ūε est brièvement mentionnée au paragraphe 8.4.
8.5.6. Bifurcation. — L’équation réduite est
f∗ (ε, T, a) := f (ε, T, a, β(ε, T, a)) = 0.
2
En identifiant C et R , on note en coordonnées polaires a = reiθ0 , avec r ∈ R. Il est loisible
de choisir θ0 = 0.
Proposition 8.11. — Il existe deux fonctions continues r → ε(r), r → T (r), définies sur
un voisinage de l’origine dans Rr , telles que ε(0) = 0, T (0) = 2π/τ (0), et
f∗ (ε(r), T (r), r) ≡ 0.
Preuve.. — On considère (8.29) sur [0, T0 ], ε et T étant fixés, avec pour données initiales
(a, b) = (r, B(ε, T, r)). D’après (8.32) et (8.42), si r est assez petit, w ne s’annule pas sur
[0, T0 ]. On utilise donc des coordonnées polaires (ρ, θ) dans le plan R2w , dans lesquelles
(8.29)(i) devient
(8.46)
ρ0 = γρ + n1 ,
θ 0 = τ + n2 ,
où, |n1 | ≤ C|Π∂x Q|, |n2 | ≤ Cρ−1 |Π∂x Q|, et donc, d’après (??), (8.20) et (8.42),
(8.47)
|n1 | ≤ C1 (ρ2 + r2 ),
|n2 | ≤ C2 |r|.
L’équation f∗ = 0 s’écrit (ρ, θ)(T ) = (r, 2π). Une solution triviale est donnée par r = 0.
Pour sélectionner la solution non triviale, on pose pour r 6= 0,
Z T
Z T
γT
γ(T −t) n1
¯
dt , τ T +
n2 dt .
(8.48)
f (ε, T, r) := e − 1 +
e
r
0
0
et f¯(ε, T, 0) := (eγT − 1, τ T ). La fonction f¯ est alors une fonction continue de ses argu¯
¯
ments. On remarque
que f (0, 0, 0) =
0, que f (ε, T, 0) est différentiable en (ε, T ) = 0, et que
0
−τ
(0)
(∂ε,T f¯)(0, 0, 0) =
est inversible d’après (PH). On peut donc appliquer
γ 0 (0)
0
le théorème du point fixe de Brouwer (voir par exemple le Lemme 2.27 de [95]), qui donne
l’existence d’une application continue de r 7→ (ε, T )(r), définie sur un voisinage de l’origine,
et solution de f¯ = 0, et donc de f∗ = 0. Pour r = 0, l’équation en θ devient θ0 = τ, si bien
que θ(T (0)) = 2π implique T (0) = 2π/τ (0).
74
CHAPITRE 8. BIFURCATION DE HOPF
8.5.7. Conclusion : existence des ondes galopantes. — Soit un rayon initial r assez
petit. Considérons le système (8.29), pour la valeur ε(r) du paramètre de bifurcation, où
ε(·) est la fonction définie à la Proposition 8.11, avec la condition initiale
(w, v)(0) = (r, β(ε(r), T (r), r)).
Alors (w, v) est T (r)-périodique en temps, et la solution ur de (8.1) (pour ε = ε(r)) qui est
issue de la condition initiale
ε(r)
u0 = ūε(r) + r<φ+
+ β(ε(r), T (r), r),
est T (r)-périodique en temps. On remarque, d’après (8.42), que si C0 > 0 est assez grand
et |r| est assez petit,
(8.49)
C0−1 |r| ≤ ku0 − ūε kHη2 ≤ C0 |r|.
Alors (8.31), (8.32) et (8.42) entrainent l’estimation (8.16).
III DE NEWTON À BOLTZMANN
CHAPITRE 9
INTRODUCTION
Dans cette partie, je résume la preuve du Théorème de Lanford que nous avons récemment
écrite avec Isabelle Gallagher et Laure Saint-Raymond [30].
Le Théorème de Lanford donne une justification des approximations, historiquement formulées par Boltzmann [7], qui mènent pour un gaz raréfié d’une description microscopique
par une dynamique Newtonienne réversible, à une description mésoscopique par une dynamique irréversible via l’équation de Boltzmann.
Cette approximation est valide dans le régime de Boltzmann-Grad N ε2 = O(1), où N est
le nombre de particules, et ε la distance caractéristique des interactions, sur des intervalles
de temps d’une longueur qui est de l’ordre de grandeur du temps moyen entre deux collisions.
9.1. Grands systèmes Newtoniens
On considère l’évolution au cours du temps d’un grand nombre de particules Newtoniennes numérotées de 1 à N, dont on note xi les positions et vi les vitesses :
X
(9.1)
∂t xi = vi ,
mi ∂t vi =
Fj→i ,
1 ≤ i ≤ N.
j6=i
La constante mi est la masse de la particule numéro i et Fj→i représente la force exercée
par j sur i. L’espace est configurations est
n
o
(9.2) ΩN := ZN = (XN , VN ) = (x1 , . . . , xN , v1 , . . . , vN ) ∈ R6N , xi 6= xj pour i 6= j .
La limite thermodynamique est la limite N → ∞.
Deux problèmes apparaissent immédiatement :
(1) comment passer à la limite alors que l’espace des configurations dépend de N ?
(2) quelles sont les grandeurs qui sont susceptibles de décrire la limite ?
On pose mi ≡ 1, et on considère des champs conservatifs : Fj→i = −c∇Φ(xj − xi ), où
suivant le signe du paramètre réel c le champ est répulsif ou attractif.
Une façonX
de répondre à la question (1) est de considérer la mesure empirique µN définie
par µN :=
δ(xi ,vi ) , où (xi , vi )1≤i≤N est une trajectoire de (9.1). Alors la mesure µN (t)
1≤i≤N
appartient pour tout t à l’espace des mesures de probabilité sur l’espace des configurations
à une particule.
78
CHAPITRE 9. INTRODUCTION
La mesure empirique est une grandeur bien adaptée à la description de la limite de champ
moyen dans laquelle N → ∞ alors que le produit cN reste O(1), pour simplifier cN ≡ 1.
En effet, dans ce régime on déduit formellement de (9.1) l’équation
(9.3)
∂t µN + v · ∂x µN + F ∂v µN = 0,
F = cN ∇Φ ? µN ,
l’opération de convolution ayant lieu dans la variable spatiale.
L’équation (9.3) est l’équation de Vlasov, pour laquelle on peut prendre comme inconnue
une densité continue f (t, x, v)dxdv, à laquelle on peut penser comme une approximation
de la mesure empirique f dxdv ' µN , une connaissance exacte de µN étant impossible en
pratique.
La limite de champ moyen cN ≡ 1 est donc un régime asympotique dans lequel le nombre
de particules tend vers l’infini alors que la force des interactions tend vers 0, et une densité
de probabilité approximant la mesure empirique apparaît comme une grandeur adaptée à
la description de cette limite.
Nous allons ici nous intéresser à un autre régime asymptotique, dans lequel la force des
interactions est constante alors que la longueur caractéristique des interactions tend vers 0
quand N → ∞.
En notant ε > 0 la longueur caractéristique des interactions, et en changeant d’échelles :
t → t/ε, xi → xi /ε, le système Newtonien devient
dvi
1X
xi − xj
dxi
=
v
,
=
−
∇Φ
,
1≤i≤N.
i
(9.4)
dt
dt
ε
ε
j6=i
L’hypothèse de localisation des interactions signifie que Φ est à support compact, par
exemple à support dans la boule unité. Dans les échelles du système (9.4), cela signifie
que la particule j affecte l’accélération de la particule i seulement si |xi − xj | ≤ ε.
Plutôt que le point de vue déterministe de la mesure empirique, nous allons adopter un
point de vue probabiliste pour répondre aux questions (1) et (2). Etant donné un invariant
dynamique de (9.4), c’est-à-dire une fonction fN telle que
(9.5)
fN t, (xi (t))1≤i≤N , (vi (t))1≤i≤N ≡ fN 0, (xi (0))1≤i≤N , (vi (0))1≤i≤N ,
où (xi , vi )1≤i≤N est une trajectoire du système Newtonien (9.4), on obtient par différentiation en temps l’équation de Liouville
N
X
X 1
xi − xj
(9.6)
∂t fN +
vi · ∇xi fN −
∇x Φ
· ∇vi fN = 0.
ε
ε
i=1
1≤i6=j≤N
Z
Si fN est positive et initialement normalisée : fN ≥ 0, fN (0, ZN )dZN = 1, alors le caracZ
tère Hamiltonien de (9.4) assure que fN est normalisée pour tout temps : fN (t, ZN )dZN ≡ 1,
et on peut donc comprendre fN comme une densité de probabilité.
Dans l’hypothèse de symétrie
(9.7)
fN (t, Zσ(N ) ) = fN (t, ZN ),
σ ∈ groupe symétrique d’ordre N ,
qui traduit le caractère indiscernable des particules, on peut espérer décrire un comportement moyen par le biais de la première marginale de fN :
Z
(1)
(9.8)
fN (t, z) = fN (t, z, ZN −1 )dz2 . . . dzN .
9.1. GRANDS SYSTÈMES NEWTONIENS
79
Dans (9.8), le domaine d’intégration est l’ensemble des (z2 , . . . , zN ) tels que (z, z2 , . . . , zN ) ∈
ΩN , et donc dépend en particulier de z.
Quelles sont les grandeurs qui satisfont (9.5) ? On peut associer à un domaine D ⊂ ΩN
la probabilité P (t, D) qu’au temps t la configuration ZN appartienne à D. À D fixé la
probabilité P est invariante par le flot ϕN de (9.4) : P (t, D) ≡ P (0, ϕN
−t D). On suppose
que cette probabilité est absolument continue par rapport à Lebesgue, avec une densité p.
Alors, le Jacobien du flot Hamiltonien étant égal à un, l’invariance de P par le flot implique
précisément (9.5) pour la densité p. Donc on peut comprendre fN comme la densité de
(1)
probabilité du système de particules ; la quantité fN (t, z)dz est alors la probabilité que la
particule numérotée 1 se trouve dans le petit cube [z, z + dz] ⊂ R6 à l’instant t.
Le résultat présenté ici affirme que dans un certain régime asymptotique, appelé régime de
Boltzmann-Grad, certaines données de l’équation de Liouville (9.6) génèrent des solutions
dont la suite des premières marginales tend faiblement vers une solution de l’équation de
Boltzmann. Et on peut renverser le point de vue : si f0 est une donnée pour Boltzmann qui
décroit comme une Gaussienne en vitesse, uniformément en espace, alors on peut construire
des familles de données de la famille d’équations (9.6), données qui génèrent des solutions
dont les premières marginales tendent faiblement vers la solution de Boltzmann issue de f0 .
Les données en question pour l’équation de Liouville (9.6) sont indépendantes, en un
certain sens décrit dans le Chapitre 11. Une propriété tout à fait similaire d’indépendance,
ou de décorrélation, est cruciale dans la dérivation historique de l’équation de Boltzmann
(voir par exemple le paragraphe 2.2 du livre de Cercignani, Illner et Pulvirenti [12]).
Le régime de Boltzmann-Grad est N ε2 = O(1), pour simplifier N ε2 ≡ 1. Une façon de
comprendre ce régime est de penser aux particules comme à des sphères de taille O(ε), le
paramètre ε étant le rayon de la zone d’interaction définie par une particule. Alors une
particule isolée voyageant à une vitesse O(1) dans un intervalle de temps O(1) décrit un
cylindre de taille O(ε2 ). Dans un domaine total
de taille O(1), la probabilité que deux de
N (N − 1)/2 × O(ε2 )2
∼ (N ε2 )2 = O(1). Le régime de
ces cylindres s’intersectent est
O(1)
Boltzmann-Grad est donc un régime tel qu’en temps O(1) il se produise O(1) collisions.
Le résultat de convergence est seulement local en temps. C’est la partie existence de
la preuve (existence pour les hiérarchies BBGKY et Boltzmann associées à (9.6), voir le
Chapitre 10) qui est le facteur limitant, et non la partie convergence. Le temps d’existence
est proportionnel à l’inverse de N ε2 (et il dépend bien sûr de la taille de la donnée dans
une norme adaptée), et donc, d’après ce qui précède, proportionnel au temps moyen entre
deux collisions. C’est-à-dire qu’on n’est capable de justifier la limite que dans un intervalle
de temps dans lequel il se produit typiquement un petit nombre de collisions.
Est-il raisonnable de considérer des interactions à courte portée ? Physiquement, les deux
régimes de champ moyen et de Boltzmann-Grad sont probablement simultanément valides,
c’est-à-dire qu’on peut imaginer que les particules proches interagissent via un potentiel
qu’on peut décrire comme étant à support compact, et que les particules moins proches
sont perçues à travers un champ moyen, de sorte qu’il serait probablement pertinent de
considérer un couplage entre Boltzmann et Vlasov.
80
CHAPITRE 9. INTRODUCTION
apse line δy’
δw’
ω
ρ
* δw
θ
α
δy
9.2. Equation de Boltzmann
L’équation de Boltzmann s’écrit
∂t f + v · ∂x f = Q(f, f ),
(9.9)
où f (t, x, v) apparaît dans le théorème de Lanford (voir page 83) comme une limite faible de
(1)
la première marginale fN (9.8) de la solution fN de l’équation de Liouville (9.6). L’opérateur
de collision est défini par
Z
Q(f, f )(t, x, v1 ) =
1ν·(v2 −v1 )>0 ν · (v2 − v1 )
S2 ×R2
(9.10)
× f (t, x, v10 )f (t, x, v20 ) − f (t, x, v1 )f (t, x, v2 ) dνdv2 ,
en notant (v10 , v20 ) les vitesses pré-collisionelles, déduites des vitesses post-collisionelles (v1 , v2 )
par l’opération de scattering inverse définie au paragraphe suivant. (Je note ici avec des
primes les vitesses pré-collisionnelles ; c’est la convention utilisée en particulier dans [12],
dans [30] ce sont les vitesses post-collisionnelles qui sont notées avec des primes.)
J’aborde brièvement dans ce paragraphe les points suivants :
• la question, bien connnue, de l’existence et de la description d’un opérateur de scattering
pour décrire les collisions,
• la question, moins connue, de l’existence d’un changement de variable sur la sphère
pour passer de la formulation (9.10) de l’opérateur de collision à une formulation dans les
variables vitesse et angle de déflection.
9.2.1. Scattering. — On néglige les collisions à trois particules. Plusieurs arguments sont
possibles pour justifier cette approximation. Ils sont décrits au paragraphe 10.5.
On considère donc une dynamique (9.1) à deux particules :
ẋ1 = v1 ,
v̇1 = ∇Φ(x2 − x1 ),
ẋ2 = v2 ,
v̇2 = −∇Φ(x2 − x1 ),
Quand x2 − x1 et v2 − v1 ne sont pas colinéaires, c’est une dynamique planaire dans l’orthogonal de (x2 − x1 ) × (v2 − v1 ). Les configurations pré-collisionelles sont définies par
|x02 − x01 | = ε,
(x02 − x01 ) · (v20 − v10 ) < 0,
et les configurations post-collisionelles par
|x2 − x1 | = ε,
(x2 − x1 ) · (v2 − v1 ) < 0.
Il est facile de voir que sous une hypothèse de monotonie pour le potentiel radial Φ, il
existe un opérateur de scattering bijectif
(9.11)
(x01 , v10 , x02 , v20 ) ∈ {pré-col} −→ (x1 , v1 , x2 , x2 ) ∈ {post-col}
9.2. EQUATION DE BOLTZMANN
81
où les configurations post-collisionnelles sont données en fonctions des configurations précollisionnelles par les formules
ετ∗ 0
x1 := x01 − ω · (x02 − x01 ) ω +
(v1 + v20 ) ,
v1 := v10 − ω · (v20 − v10 ) ω,
2
(9.12)
ετ∗ 0
x2 := x02 + ω · (x02 − x01 ) ω +
(v + v20 ),
v2 := v20 + ω · (v20 − v10 ) ω
2 1
qui font intervenir le temps microscopique d’interaction τ∗ et la direction ω ∈ S2 de la droite
passant par le centre de masse et le point de distance minimale ρ∗ .
Le temps d’interaction est défini par
Z 1
−1/2
E − EJ 2 ρ−2 − 4Φ(ρ)
dρ.
(9.13)
τ∗ := 2
ρ∗
Ici E est l’énergie de la configuration, et J est le facteur d’impact :
(9.14)
E := |v1 − v2 |2 = |v10 − v20 |2 ,
v20
− v10
x02
J := | sin α|,
− x01 .
où π − α est l’angle orienté entre
et
Le moment cinétique est aussi préservé
au cours de l’interaction, si bien que α est l’angle orienté entre v2 −v1 et x2 −x1 . La distance
minimale ρ∗ entre les particules 1 et 2 est définie par
ρ∗ (E, J) := max ρ ∈ (0, 1), EJ 2 ρ−2 + 4Φ(ρ) = E .
Le demi-angle de déviation des positions θ est l’angle entre x2 − x1 et ω :
Z 1 1/2
−1/2
E J
E − EJ 2 ρ−2 − 4Φ(ρ)
dρ ,
(9.15)
θ=
2
ρ
ρ∗
Avec ces notations, on peut maintenant donner un sens précis à l’opérateur de collision
(9.10) : étant donné ν ∈ S2 et des vitesses v1 , v2 telles que ν · (v2 − v1 ) > 0, si on pose
x2 = x1 + εν, alors la configuration (x1 , v1 , x2 , v2 ) est post-collisionelle, et les vitesses précollisionnelles (v10 , v20 ) sont données par l’inverse de (9.11).
9.2.2. Changement de paramètre sur la sphère. — Nous allons changer de variable
sur la sphère, de manière à donner une description de l’opérateur de collision (9.10) en terme
de l’angle de déviation ω qui intervient dans la description du scattering (9.12).
Des vitesses v1 et v2 sont données. Un point x2 est donné sur la sphère de centre x1 et de
rayon ε. Sur cette sphère, nous mesurons la latitude par l’angle avec v2 − v1 . La longitude
est donnée par ψ ∈ S1 . Dans ce système de coordonnées, le vecteur ν = ε−1 (x2 − x1 )
a pour coordonnées (α, ψ), avec les notations du paragraphe précédent, et le vecteur ω a
pour coordonnées (α + θ, ψ). On se limite à la demi-sphère ν · (v2 − v1 ) > 0, de sorte que
α ∈ [0, π/2]. On note Θ = α + θ. L’angle Θ décrit [0, π/2] quand α décrit [0, π/2].
On a donc
dν = sin αdα dψ,
dω = sin ΘdΘdψ.
Par définition de α,
ν · (v2 − v1 ) = |v2 − v1 | cos α,
si bien que
ν · (v2 − v1 ) dν = |v1 − v2 | cos α sin α dαdψ = |v1 − v2 | JdJdψ ,
par définition de J en (9.14). Nous obtenons
ν · (v2 − v1 ) dν = |v2 − v1 |J∂Θ J dΘdψ,
et définissons alors la section efficace b par
(9.16)
b(|v2 − v1 |, Θ) := |v2 − v1 |J∂Θ J(sin Θ)−1 .
82
CHAPITRE 9. INTRODUCTION
On notera un peu abusivement b(|v2 − v1 |, ω) pour b(|v2 − v1 |, Θ).
Avec ces notations, on a donc
(9.17)
ν · (v2 − v1 )dν = b(|v2 − v1 |, ω)dω.
Avec (9.16) se pose la question de la nullité éventuelle de ∂J Θ. C’est-à-dire : l’angle de
déviation est-il une fonction monotone du paramètre d’impact ? Cette question ne semble
pas avoir été soulevée dans la littérature.
J’ai longuement essayé, sans succès, de vérifier ∂J Θ 6= 0, en pensant pouvoir vérifier le
résultat seulement de manière asymptotique, c’est-à-dire pour un taux de décroissance s
assez grand, avec Φ(x) ∼ |x|−s χ(x), la fonction χ étant une troncature lisse de sorte que Φ
soit supporté dans la boule unité.
La réponse nous a été donné par Mario Pulvirenti, Chiara Saffirio et Sergio Simonella
[80]. Par un changement de variable très astucieux, que nous reproduisons au paragraphe
3.3.1 de [30], ils parviennent à prouver que ∂J Θ 6= 0 pour J ∈ (0, 1) et E > 0, avec ∂J Θ → 0
quand J → 1, c’est-à-dire que la section efficace n’est pas bornée dans la limite des collisions
rasantes, sous la condition
(PSS)
ρΦ00 (ρ) + 2Φ0 (ρ) ≥ 0,
qui est en quelque sorte une condition de convexité. Avec (PSS), la section efficace (9.16)
est bien définie et localement bornée pour Θ ∈ (0, π/2 et |v2 − v1 | > 0, et on arrive à la
forme usuelle de Boltzmann :
Z
(9.18)
∂t f + v1 · ∂x f =
f (v10 )f (v20 ) − f (v)f (v2 ) b(|v − v2 |, ω)dv2 dω.
Rd ×S2+
Notons qu’on pourrait a priori se passer de ce changement de variable, et décrire une
limite vers la forme (9.9) de l’équation de Boltzmann, limite qui n’utiliserait donc pas la
condition (PSS). Nous verrons au Chapitre 12 l’utilisation que nous faisons de la formulation
(9.18).
9.3. Enoncé vague
Nous disons qu’un potentiel Φ : R3 \ {0} → R est admissible s’il satisfait les conditions
suivantes :
• régularité C 2 : cela permet d’avoir une dynamique microscopique bien définie par
Cauchy-Lipschitz, puique ∇Φ est alors C 1 ,
• symétrie radiale : Φ(x) = Φ(|x|) garantit ∇Φ(x1 − x2 ) = −∇Φ(x2 − x1 ), et donc la
conservation de la quantité de mouvement,
• positivité : nous considérons des interactions répulsives ; cela nous est nécessaire pour
établir l’existence du scattering sous la forme donnée au paragraphe 9.2.1 ;
• décroissance stricte : c’est aussi nécessaire pour l’existence du scattering du paragraphe
9.2.1 (cependant e cas, physiquement intéressant, de potentiels non monotones ne semble
pas inaccessible ; le scattering serait plus complexe, et l’opérateur de collision limite n’aurait
pas une représentation aussi simple que (9.18)) ;
• support dans la boule unité : la section efficace n’est sinon pas intégrable en ω (voir à
ce sujet [101], Chapitre 1, Section 1.4 ; pour des potentiels à longue portée voir [1, 21]),
• non borné dans la limite x → 0 : cela garantit que le temps de scattering est uniformément borné (voir la Proposition 3.2.1 de [30]),
• condition (PSS) : voir le paragraphe précédent, et le Chapitre 12.
9.4. PLAN DE LA PREUVE ET RÉFÉRENCES
83
Je donne ici une version informelle du résultat. La version précise nécessite l’introduction
des hiérarchies satisfaites par les familles de marginales, et attendra donc le Chapitre 11.2.
Théorème 9.1. — Etant donnée f0 ∈ C 0 (R3 \{0}×R3 ; R) telle que pour un certain β > 0,
Z
2
f0 ≥ 0,
f0 (z)dz = 1, sup eβ|v| /2 |f0 (x, v)| < ∞,
x,v
étant donné un potentiel Φ admissible, pour un certain T > 0 :
• il existe une famille de données “indépendantes” (f0,N )N ≥1 de Liouville (9.6), qui génèrent une famille de solutions fN de (9.6) sur [0, T ], et dont les premières marginales
Z
(1)
f0,N (z) = f0,N (z, ZN −1 )dZN −1
convergent localement uniformément vers f0 ;
• il existe une unique solution f de Boltzmann (9.18) issue de f0 sur [0, T ],
(1)
• et une forme de convergence faible fN * f a lieu uniformément sur [0, T ].
9.4. Plan de la preuve et références
Les étapes essentielles de la preuve ont été identifiées bien avant notre travail.
Elles consistent en :
• l’écriture, à partir de l’équation de Liouville (9.6) du système des équations intégro(s) (N )
différentielles couplées satisfaites par la famille des marginales fN 1≤s≤N , avec fN = fN
solution de Liouville, système dit híerarchie BBGKY ;
• l’examen des corrélations d’ordre supérieur, problème spécifique au cas des interactions
potentielles non localisées ;
• un résultat d’existence uniforme, c’est-à-dire avec un temps d’existence indépendant de
N pour BBGKY ;
• la production de données initiales admissibles, et la description de l’ensemble des données limites admissibles ;
(s)
• l’utilisation d’une formule de Duhamel itérée pour exprimer fN au temps t en fonction
(s+k)
de la famille des données fN
(0) 1≤k≤N −s ;
• et enfin l’étude des pseudo-trajectoires décrites par cette formule de Duhamel qui
donnent lieu à des pseudo-recollisions.
Parmi les contributions importantes, on peut citer celles de Boltzmann [7], Grad [34],
Lanford [53], King [51], Cercignani, Illner, Pulvirenti [12], Spohn [84, 85], Ukai [100],
Cercignani, Gerasimenko, Petrina [13], Pulvirenti, Saffirio, Simonella [80].
CHAPITRE 10
HIÉRARCHIES BBGKY ET BOLTZMANN
10.1. Formulation de la hiérarchie BBGKY
Le point de départ est l’équation de Liouville satisfaite par la fonction de distribution à
N particules :
X
X 1
xi − xj
∇Φ
·
∇
LN
f
:=
∂
+
v
·
∇
−
vi fN = 0 .
t
i
xi
Φ N
ε
ε
1≤i≤N
1≤i6=j≤N
Le domaine de définition de fN est ΩN défini en (9.2). La marginale tronquée d’ordre s est
définie par
Z
(s)
s (XN )fN (t, Zs , zs+1 , . . . , zN ) dzs+1 · · · dzN ,
(10.1)
fN (t, Zs ) :=
1DN
R6(N −s)
avec la notation
(10.2)
n
o
s
DN
:= XN ∈ R3N , ∀(i, j) ∈ [1, s] × [s + 1, N ], |xi − xj | > ε .
C’est une définition pas complètement intuitive, dans laquelle on demande aux particules
“de la tête”, numérotées de 1 à s, de ne pas appartenir à la zone d’interaction définie par les
particules “de la queue", numérotées de s + 1 à N.
L’utilisation de ces marginales tronquées, à la suite de King [48], permet de dériver une
hiérarchie similaire à la hiérarchie BBGKY pour les sphères dures. Un des inconvénients de
la définition (10.1) est que les marginales tronquées ne sont pas des marginales, au sens où
Z
(s)
(s+1)
e
(10.3)
fN (Zs ) 6=
feN
(Zs , zs+1 ) dzs+1 ,
R6
s+1
s
n’est pas inclus dans DN
. Cependant, en notant f˜N les
tout simplement parce que DN
marginales définies à partir de fN par
Z
(s)
feN (t, Zs ) :=
fN (t, Zs , zs+1 , . . . , zN ) dzs+1 · · · dzN ,
R6(N −s)
on vérifie facilement la borne
(1)
(1)
(2)
k(feN − fN )(t)kL∞ (R6 ) ≤ C(N − 1)ε3 kf˜N (t)kL∞ (Ω2 ) ,
si bien qu’on s’attend à ce que les marginales tronquées et les marginales aient le même
comportement asymptotique. (On le vérifie effectivement, voir [30], en particulier le Lemme
7.1.3 et le Corollaire 7.2.3.)
86
CHAPITRE 10. HIÉRARCHIES BBGKY ET BOLTZMANN
(s)
Notre but ici est de décrire une formulation faible de l’équation satisfaite par fN . Nous
intégrons contre une fonction test φ ∈ Cc∞ ([0, ∞) × R6s ) :
Z
N
s (XN )φ(t, Zs )L
(10.4)
1DN
Φ fN (t, ZN )sZN dt = 0.
R+ ×R6N
Du fait de la troncature, dans l’intégrande ci-dessus, la somme double dans LN
Φ est une
somme sur les (i, j) tels que (i, j) ∈ [1, s]2 ou (i, j) ∈ [s + 1, N ]2 . Via la formule de Green, les
gradients en espace vont donner lieu à des termes de bord. On pose pour i ≤ s et s + 1 ≤ j :
n
o
ΣsN (i, j) := XN ∈ R3N , |xi − xj | = ε et ∀(k, `) ∈ [1, s] × [s + 1, N ] \ {i, j}, |xk − x` | > ε ,
c’est-à-dire qu’on demande à exactement une paire de se trouver à une distance ε, alors que
toutes les autres paires n’interagissent pas. L’ensemble ΣsN est donc seulement une partie
s
s
de la frontière de DN
. Une autre partie de la frontière de DN
correspond aux configurations
s
où trois particules interagissent simultanément. Cette partie est négligeable dans ∂DN
.
La mauvaise nouvelle est que ΣsN (i, j) va en général rencontrer l’ensemble de troncature
associé à toutes les marginales d’odre supérieur :
s+m
ΣsN (i, j) ∩ DN
6= ∅,
(10.5)
i ≤ s, s + 1 ≤ j, 1 ≤ m,
(s)
si bien qu’il apparait des corrélations d’ordre élévé : l’équation en fN aura un terme source
(s+m)
intégral qui dépend de fN
, pour m ≥ 1.
La figure 10.1 donne un exemple d’une telle configuration. On voit sur cette figure que ces
configurations sont en fait assez improbables, les conditions |xi − xs+1 | = ε et (par exemple)
|xs+1 − xs+2 | ≤ ε devant être vérifiées simultanément. On a donc espoir de prouver que les
termes de corrélations correspondants sont petits dans le scaling considéré ; cela sera vérifié
en (10.12) page 88 plus bas.
A partir de (10.4), la formule de Green donne
N Z
X
s (XN )φ(t, Zs )vi · ∇x fN (t, ZN ) dZN dt
1DN
i
i=1
(10.6)
R+ ×R2dN
=−
s Z
X
i=1
R+ ×R2ds
(s)
fN (t, Zs )vi · ∇xi φ(t, Zs ) dZs dt
s Z
X
1
i,s+1
ν i,s+1 · (vs+1 − vi ) φ(t, Zs )fN (t, ZN ) dσN
dVN dt .
+ √ (N − s)
2
i=1 O
où O = R+ × RdN × ΣsN (i, s + 1) et ν i,j :=
xi − xj
.
|xi − xj |
La formulation faible de Louville est donc
Z
Z
(s)
s
fN (t, Zs )LΦ φ(t, Zs ) dZs dt +
R+ ×R2ds
R2ds
(s)
fN (0, Zs )φ(0, Zs ) dZs
s Z
N −sX
i,s+1
=− √
ν i,s+1 · (vs+1 − vi ) φ(t, Zs ) fN (t, ZN )dσN
dVN dt
2 i=1 O
(s+m)
Du fait de (10.5), l’intégrale sur O s’exprime en fonction des fN
arrive à
N
−s
X
(s)
(s+m)
(10.7)
LsΦ fN (t, Zs ) =
Cs,s+m fN
m=1
, avec m ≥ 1. On en
10.1. FORMULATION DE LA HIÉRARCHIE BBGKY
87
Figure 10.1. Configuration donnant lieu à des corrélations d’ordre élevé.
où les opérateurs de collision sont définis par
(s+m)
Cs,s+m fN
m
:= mCN
−s
(t, Zs )
s Z
X
i=1
(m−1)
(s+m)
ν s+1,i ·(vs+1 − vi )Ghi,s+1i (fN
Sε (xi
)(t, Zs+1 )dσi (xs+1 )dvs+1 ,
)×Rd
avec les notations
(0)
(s+1)
Ghi,s+1i (fN
)(t, Zs+1 ) :=
Y
(s+1)
(t, Zs+1 ),
1|xs+1 −xj |>ε fN
1≤j≤s
j6=i
(m−1)
(s+m)
Ghi,s+1i (fN
Z
(s+m)
)(t, Zs+1 ) :=
∆m−1 (xs+1
)×Rd(m−1)
(. . . ) fN
(t, Zs+m )dZ(s+2,s+m) ,
m ≥ 2,
où
• (. . . ) est un produit de fonctions caractéristiques, qui fait intervenir en particulier la
paire (i, s + 1); je ne donne pas la forme précise de cette fonction puisqu’elle est destinée
à être simplement majorée par 1 au paragraphe 10.3 page 88, une description précise est
donnée au paragraphre 4.4 de [30].
• ∆m−1 (xs+1 ) est l’ensemble des collections de points {xs+2 , . . . , xs+m } avec |xj −xj+1 | ≤
ε à renumérotation près, pour j ∈ [s + 1, s + m − 1].
On appelle hiérarchie BBGKY la famille des équations (10.7). Il sera pratique d’utiliser
(s)
des notations vectorielles dans la suite. Nous notons donc FN := (fN )1≤s≤N , et ϕs le flot
du système newtonien à s particules, si bien qu’il y a équivalence entre gs (t, ϕst (x, v)) ≡
88
CHAPITRE 10. HIÉRARCHIES BBGKY ET BOLTZMANN
gs (0, x, v) et LsΦ gs ≡ 0. On note aussi
(10.8)
(H(t)FN )s :=
(s)
Hs (t)fN
=
(s)
fN
◦
ϕs−t ,
(CN FN )s :=
N
−s
X
(s+m)
Cs,s+m fN
,
m=1
Alors par définition les solutions mild de la hiérarchie sont
Z t
H(t − τ )CN FN (τ ) dτ ,
(10.9)
FN (t) = H(t)FN (0) +
(s)
FN = (fN )1≤s≤N .
0
10.2. La hiérarchie Boltzmann associée
0
L’opérateur de collision limite Cs,s+1
est défini par
Z
s
X
0
Cs,s+1
f (s+1) (t, Zs ) :=
1ν·(vs+1 −vi )>0 ν · (vs+1 − vi )
i=1
× f
(s+1)
0
(t, . . . , xi , vi0 , . . . , xi , vs+1
) − f (s+1) (t, . . . , xi , vi , . . . , xi , vs+1 ) dνdvs+1 ,
0
où (vi0 , vs+1
) est déduit de (vi , vs+1 ) par scattering inverse, comme au paragraphe 9.2.
0
On note C0 l’opérateur vectoriel associé : (C0 F )s = Cs,s+1
f (s) . On note ϕ0s le transport
libre à s particules, et S l’opérateur vectoriel associé :
(10.10)
S(t)F s := Ss (t)f (s) = f (s) ◦ ϕ0s
−t ,
La hiérarchie limite est alors définie par
Z t
(10.11)
F (t) = S(t)F (0) +
S(t − τ )C0 F (τ ) dτ ,
F = (f (s) )1≤s .
0
10.3. Espaces fonctionnels et estimations de continuité pour les opérateurs de
collision
On borne brutalement l’action des opérateurs de collision par
X Z
(s+m)
(s+m)
m
∞
|Cs,s+m fN
(Zs )| ≤ mCN
|f
|
L
−s N
1≤i≤s
|vs+1 | + |vi |.
Sε (xi )×∆m−1 (xs+1 )×Rdm
Il apparait clairement la nécessité d’introduire des poids en vitesse pour faire converger l’intégrale ci-dessus. L’intégrale spatiale a un domaine qui s’exprime en fonction des ensembles
∆m−1 , dont la taille est évaluée comme suit :
Z
1
dxs+2 . . . dxs+m ≤ ε(m−1)d exp Cm ,
(10.12)
(m − 1)! ∆m−1 (xs+1 )
où C > 0 est le volume de la boule unité.
La preuve de (10.12), donnée au Lemme 5.1.1 de [30], passe par l’examen des densités
ζ n exp(−ζ|Λ|) Y
ϕn (Xn ) :=
1Λ (xi ).
n!
1≤i≤n
Avec (10.12), on obtient
Sε (xi ) × ∆m−1 (xs+1 ) . (m − 1)!ε2 ε3(m−1) exp(Cm).
et on trouve donc le facteur multiplicatif :
m
2 3(m−1)
mCN
≤ (N − s)m ε3m−1 ≤ εm−1 N ε2
−s × (m − 1)!ε ε
m
.
89
10.4. THÉORÈME D’EXISTENCE ET D’UNICITÉ POUR LES HIÉRARCHIES
On en conclut que dans des espaces fonctionnels adaptés, on va pouvoir négliger les grandes
corrélations, c’est-à-dire les opérateurs Cs,s+m avec m ≥ 2.
Etant donné ε ≥ 0, β > 0, s ≥ 1, et une fonction gs : Ωs → R, on pose
(10.13)
|gs |ε,s,β := sup |gs (Zs )| exp βEε (Zs )
Zs ∈Ωs
où pour ε > 0, la fonction Eε est le Hamiltonien
X |vi |2
X
(10.14)
Eε (Zs ) :=
+
Φε (xi − xk ) ,
2
1≤i≤s
with Φε (x) := Φ
1≤i<k≤s
et pour ε = 0, la fonction E0 est le Hamiltonien libre : E0 (Zs ) :=
x
ε
,
X |vi |2
.
2
1≤i≤s
Pour ε ≥ 0 et β > 0, on désigne par Xε,s,β l’espace de Banach des fonctions continues
Ωs → R dont la norme | · |ε,s,β est finie.
Etant donnée une suite de fonctions G = (gs )s≥1 , où gs : Ωs → R, et ε ≥ 0, β > 0, µ ∈ R,
on pose
kGkε,β,µ := sup |gs |ε,s,β exp(µs) .
s≥1
Pour ε ≥ 0, β > 0, et µ ∈ R, on désigne par Xε,β,µ l’espace de Banach des suites
G = (gs )s≥1 , avec gs ∈ Xε,s,β et kGkε,β,µ < ∞.
L’estimation de continuité est alors :
Proposition 10.1. — On a la borne
perte en s et |v|
(10.15)
{
zX }|
(s+m)
Cs,s+m f (s+m) (Zs ) ≤ Cm,β εm−1
(1
+
|v
|)
e−βEε (Zs ) |fN
|ε,β .
i
N
1≤i≤s
(s) Pour 0 < ε < ε0 (µ, β), pour tout 0 < β < β et µ0 < µ, FN = fN 1≤s≤N ,
(10.16)
kCN FN kε,β 0 ,µ0 ≤ Cβ,µ (β − β 0 )−1 + (µ − µ0 )−1 kFN kε,β,µ .
0
La preuve de la Proposition 10.1 est élémentaire, à partir de (10.12) et des définitions
des normes plus haut (le résultat correspondant dans [30] est la Proposition 5.3.1). Les
0
opérateurs de collision limites Cs,s+1
et C0 satisfont des estimations tout à fait similaires.
10.4. Théorème d’existence et d’unicité pour les hiérarchies
Muni de l’estimation de continuité de la Proposition 10.1, on va résoudre la hiérarchie
BBGKY (et la hiérarchie Boltzmann), dans sa forme mild (10.9), en prouvant tout simpleZ t
ment le caractère inversible de l’opérateur linéaire Id −
H(t − τ )CN · dt dans des espaces
0
introduits au paragraphe précédent.
Les normes ont été définies de sorte que le transport potentiel soit une isométrie :
kH(t)FN kε,β,µ = kFN kε,β,µ .
Les estimations à perte de la Proposition 10.1 nous obligent à introduire des indices de
régularité qui décroissent au cours du temps. On considère donc des indices de régularité
variables
β(t) = β0 − λt,
µ(t) = µ0 − λt.
90
CHAPITRE 10. HIÉRARCHIES BBGKY ET BOLTZMANN
Le taux de décroissance λ pourra être choisi arbitrairement petit.
Par l’inégalité intégrale de Minkowski :
Z t
Z t
kCN GN (t0 )
≤
H(t − t0 )CN GN (t0 ) dt0 I := ε,β(t),µ(t)
0
0
dt0 ,
ε,β(t),µ(t)
et donc avec l’estimation de continuité on trouve
Z t
I.
(β(t0 ) − β(t))−1 + (µ(t0 ) − µ(t))−1 kFN (t0 )kε,β(t0 ),µ(t0 ) dt0
0
. Cβ,µ (T ) × sup kFN (t)kε,β(t),µ(t)
0≤t≤T
Z
où Cβ,µ (T ) = sup
0≤t≤T
t
(β(t0 ) − β(t))−1 + (µ(t0 ) − µ(t))−1 dt0 .
0
XTε,β,µ
On note
l’ensemble des applications G : t ∈ [0, T ] → G(t) = (gs (t))1≤s ∈
Xε,β(t),µ(t) , telles que les normes kGkε,β,µ,T soient finies. Si Cβ,µ (T ) < 1, alors les opérateurs linéaires
Z t
L : GN ∈ XTε,β,µ 7→ t 7→ GN (t) −
H(t − t0 )CN GN (t0 ) dt0 ∈ XTε,β,µ
0
sont inversibles et
kL−1 kXTε,β,µ →XTε,β,µ ≤ (1 − Cβ,µ (T ))−1 ,
et donc pour les ε, β, µ, T correspondants, la solution de BBKGY est donnée par
FN = L−1 H(·)FN (0).
Il y a un problème dans cette ébauche de preuve : la quantité
Z t
Cβ,µ (T ) = sup
(β(t0 ) − β(t))−1 + (µ(t0 ) − µ(t))−1 dt0 = ∞
0≤t≤T
0
est en général infinie. La solution de ce problème est simple : il suffit de ne pas utiliser
Minkowski, et d’utiliser l’estimation ponctuelle (10.15) dans la Proposition 10.1 plutôt que
(10.16) ; cela revient à prendre la borne supérieure d’une intégrale plutôt que prendre l’intégrale d’une borne supérieure.
Le résultat d’existence et d’unicité s’exprime en fonction de la constante
(10.17)
c̄(ε, β, µ, T ) :=
Ce−µ(T ) β(T )−d/2
λ−1 (3/2 + (β(0) − λT )−d/2 ),
1 − εeC−µ(T ) (2π/β(T ))d/2
où C est le volume de la boule unité.
Théorème 10.2. — Pour β0 > 0 et µ0 ∈ R, étant données des familles de marginales
(s)
FN (0) = fN (0) 1≤s≤N ∈ Xε,β0 ,µ0 ,
F (0) = f (s) (0) 1≤s ∈ X0,β0 ,µ0 ,
étant donné T > 0 et des fonctions poids t → β(t) = β0 − λt, t → µ(t) = µ0 − λt, si pour
un certain ε0 > 0 on a la borne
(10.18)
c̄(ε0 , β, µ, T ) < 1,
alors pour tout 0 < ε ≤ ε0 , dans le scaling de Boltzmann-Grad N εd−1 ≡ 1, la hiérarchie
BBGKY (10.9) avec donnée initiale FN (0) a une unique solution FN ∈ XTε,β,µ , qui satisfait
la borne
−1
kFN kε,β,µ,T ≤ 1 − c̄(ε0 , β, µ, T )
kFN (0)kε,β0 ,µ0 ,
10.5. A PROPOS DES COLLISIONS MULTIPLES
91
et la hiérarchie Boltzmann (10.11) avec donnée initiale F (0) a une unique solution F ∈
XTε,β,µ , qui satisfait la borne
−1
kF kε,β,µ,T ≤ 1 − c̄(0, β, µ, T )
kF (0)kε,β0 ,µ0 .
C’est un résultat d’existence uniforme, au sens où le temps T ne dépend pas de N, ce qui
est bien sûr crucial dans la perspective de l’examen de la limite N → ∞.
On peut vérifier que pour des constantes β0 et µ0 données, pour une certaine constante
C0 > 0 qui ne dépend que de la dimension d’espace (d = 3) ici, un temps d’existence qui
convient dans le théorème ci-dessus est
(10.19)
d/2
T := C0 eµ0 (1 + 2β0 )−1 max xe−x (β0 − x)d
x∈[0,β0 ]
C’est-à-dire que pour un tel T, on peut trouver β, µ, ε0 tel que la condition (10.18) soit
d/2
satisfaite. Pour d β0 , cela donne un temps d’existence proportionnel à eµ0 β0 .
10.5. A propos des collisions multiples
On peut avancer plusieurs arguments pour arguer du fait que les collisions (interactions)
qui impliquent plus de deux particules ne comptent pas ici.
• Le premier argument est un argument d’échelle. Dans le scaling considéré, le volume
total occupé par les particules est N ε3 = O(ε) → 0 quand N → ∞. C’est-à-dire qu’on
considère un gaz raréfié. Donc les configurations dans lequelles trois particules ou plus interagissent simultanément sont rares, et donc négligées.
• L’argument utilisé dans [30] consiste à utiliser la formulation faible de la hiérarchie
BBGKY décrite au paragraphe 10 plus haut. Les collisions multiples, qui correspondent à
des termes de bord de mesure nulle, n’apparaissent pas dans cette formulation faible. Puis
les solutions mild de (10.9) données par le Théorème 10.2 fournissent des solutions faibles
L∞ de (10.7), et donc de (9.6), qui correspond à s = N dans (10.7).
La dynamique décrite par le Théorème 10.2 est donc associée à l’unique solution faible
L∞ de (9.6).
CHAPITRE 11
DONNÉES ADMISSIBLES ET LIMITE VERS BOLTZMANN
11.1. Définition et exemple
On définit l’ensemble des données admissibles pour la hiérarchie BBGKY comme l’en(s)
semble des familles F0,N = (f0,N )1≤s≤N ∈ Xε,β0 ,µ0 qui satisfont les propriétés suivantes :
• Borne uniforme : pour un certain β0 > 0, un certain µ0 ∈ R,
sup kF0,N kε,β0 ,µ0 < ∞,
(11.1)
N ≥1
(N )
• Ecriture comme marginales tronquées : pour une certaine fonction positive f0,N ∈
C (ΩN ; R) :
Z
(s)
(N )
s (XN )f
1DN
1≤s<N,
(11.2)
f0,N (Zs ) =
0,N (ZN )dZ(s+1,N ) ,
0
R6(N −s)
(s)
et f0,N = 0 pour s > N.
Ce sont les données pour lesquelles le Théorème 10.2 donne un résultat d’existence.
Peut-on fournir des exemples simples de telles données ?
11.1.1. Données tensorisées. — On considère des produits tensoriels :
Y
(11.3)
f0⊗s (Zs ) =
f0 (zi ),
1 ≤ s ≤ N,
1≤i≤s
avec une densité f0 telle que
Z
(11.4)
f0 ≥ 0,
f0 (z)dz = 1,
R2d
1
f0 ∈ X0,β
,
0
pour un certain β0 > 0.
Les familles tensoriées fournissent-elles des exemples de données admissibles ?
On remarque que pour (f0⊗s )1≤s≤N définie par (11.3)-(11.4), on a en général
sup k(f0⊗s )1≤s≤N kε,β,µ = +∞,
N ≥1
pour tout β > 0, µ ∈ R.
La correction due au potentiel dans le Hamiltonien produit en effet des erreurs de taille
O(1) dans les domaines de l’espace des configurations à s particules qui sont définis par des
petits tubes autour des diagonales : |xi − xj | ≤ ε. Ces domaines ne sont pas petits à la limite
N → ∞.
94
CHAPITRE 11. DONNÉES ADMISSIBLES ET LIMITE VERS BOLTZMANN
11.1.2. Données admissibles. — Le remède semble à première vue assez simple : on
annule la contribution du potentiel, en posant
Y
X
⊗s
(11.5) f0,ε
(Zs ) := exp − β0
Φε (xi − xj )
f0 (zi ), 2 ≤ s ≤ N, Zs ∈ Ωs ,
1≤i<j≤s
1≤i≤s
⊗1
avec la notation f0,ε
:= f0 . Avec cette définition, on a
⊗s
|f0,ε
|ε,β0 =
=
=
sup eβ0 Eε (Zs ) e−β0 Eε (Xs ,0)
Zs ∈R2ds
sup
Y
|f0 (zi )|
1≤s≤N
2
Y
eβ0 |vi |
/2
|f0 (zi )|
Zs ∈R2ds 1≤i≤s
|f0 |s0,s,β0
et le problème évoqué au paragraphe précédent n’apparait plus. La propriété de normalisation est cependant perdue. La proposition suivante énonce le fait qu’en normalisant ces
familles on produit des données admissibles :
Proposition 11.1. — Soit f0 satisfaisant (11.4). On pose
Z
−1
(N )
⊗N
⊗N
(11.6)
f0,N :=
f0,ε
(ZN ) dZN
f0,ε
.
R6s
(N )
Alors les familles de marginales tronquées fabriquées à partir de f0,N par (11.2) sont des
familles de données admissibles pour BBGKY.
De plus,
(s)
f0,N −→ f0⊗s ,
à s fixé, quand N → ∞, localement uniformément dans Ωs .
La borne (11.1) a lieu pour µ0 tel que eµ0 |f0 |0,β0 < 1. La preuve de cette proposition
repose essentiellement sur l’examen de la convergence vers 0 du facteur de normalisation.
On peut considérer plus généralement des combinaisons convexes de produits tensoriels
conditionnés.
A cet effet, on considère P = P(R3 ) l’ensemble des densités continues
Z
0
3
(11.7)
P = h ∈ C (R ; R), h ≥ 0,
h(z)dz = 1 ,
R2d
et π une mesure de probabilité sur P, telle que, pour un certain β0 > 0 et un certain µ0 ∈ R,
(11.8)
supp π ⊂ h ∈ P, |h|0,β0 ≤ e−µ0 .
On pose
(11.9)
π (s) :=
Z
h⊗s dπ(h).
P
Dans le cas où π est une masse de Dirac : π = δf0 , alors (11.9) est le produit tensoriel
(11.3)-(11.4).
Comme plus haut, on annule la contribution du potentiel :
X
h⊗N
:=
exp
−
β
Φ
(x
−
x
)
h⊗N ,
0
ε
i
j
ε
1≤i<j≤N
et alors en normalisant à nouveau on obtient des données admissibles :
95
11.2. ENONCÉ PRÉCIS : LIMITE VERS BOLTZMANN
Proposition 11.2. — Etant donné π satisfaisant (11.8), on pose
Z Z
−1
(N )
(11.10)
πN :=
h⊗N
h⊗N
ε (ZN ) dz1 . . . dzN
ε dπ(h).
R6N
P
(s)
(N )
Alors les familles (πN )1≤s≤N de marginales tronquées définies à partir de πN
(11.2) sont des données BBGKY admissibles.
De plus,
(s)
πN −→ π (s) ,
comme dans
à s fixé, quand N → ∞, localement uniformément dans Ωs .
(s)
La borne uniforme sup k(πN )1≤s≤N kε,β0 ,µ00 ≤ 1 a lieu pour β0 comme en (11.8) et tout
N ≥1
µ00 < µ0 , pour µ0 comme en (11.8).
La preuve de la Proposition 11.2 est essentiellement identique à celle de la Proposition
11.1.
11.1.3. Données admissibles pour la hiérarchie limite. —
Définition 11.3. — Les données admissibles pour la hiérarchie Boltzmann (10.11) sont
(s)
(s)
définies comme les familles de marginales F0 = (f0 )s≥1 , avec f0 ≥ 0, intégrable et continues sur Ωs :
Z
(s+1)
(s)
(11.11)
f0
(Zs , zs+1 ) dzs+1 = f0 (Zs ) ,
R2d
qui satisfont la propriété de symétrie (9.7), et qui sont limites localement uniformes, à s
fixé, quand N → ∞, de données admissibles BBGKY.
On observe par ailleurs qu’une donnée admissible pour Boltzmann satisfait une borne
uniforme :
(11.12)
kF0 k0,β0 ,µ0 < ∞,
Avec les Propositions 11.1 et 11.2, on voit que les produits tensoriels (f0⊗s )s≥1 , avec f0
qui satisfait (11.4), sont des données admissibles pour Boltzmann, et que plus généralement
l’enveloppe convexe de telles données est incluse dans l’ensemble des données admissibles
pour Boltzmann.
L’inclusion réciproque est vraie :
Proposition 11.4. — L’ensemble des données admissibles pour Boltzmann est l’enveloppe
convexe des produits tensoriels, et c’est aussi l’ensemble des familles de marginales qui
satisfont une borne (11.12).
La Proposition 11.4 est une conséquence directe du théorème de représentation de Hewitt
et Savage [38] pour les familles symétriques de variables aléatoires, et de la Proposition 11.2.
11.2. Enoncé précis : limite vers Boltzmann
On définit une notion de convergence faible en vitesse et localement uniforme en espace :
on dira qu’une suite (hsN )1≤s≤N de fonctions hsN ∈ C 0 (Ωs ; R) converge vers une suite (hs )s≥1
de fonctions hs ∈ C 0 (Ωs ; R), ce qu’on notera
∼
hsN −→ hs ,
96
CHAPITRE 11. DONNÉES ADMISSIBLES ET LIMITE VERS BOLTZMANN
quand pour tout s, pour toute fonction test φ ∈ Cc∞ (Rds ; R), on a
Z
φ(Vs ) hsN − hs (Zs )dVs −→ 0, as N → ∞,
Rds
localement uniformément dans Xs ∈ Rds , xi 6= xj for i 6= j .
Nous pouvons maintenant donner une version précise du théorème de Lanford :
Théorème 11.5. — Etant donné un potentiel admissible (voir le paragraphe 9.3), étant
donnée F0 une famille de marginales satisfaisant une borne uniforme (11.12) :
• soit FN (0) une famille de données BBGKY admissibles associée à F0 (dont l’existence
est donnée par la Proposition 11.4),
• soit F l’unique solution de la hiérarchie Boltzmann (10.11) issue de F0 , et FN l’unique
solution de la hiérarchie BBGKY (10.9) issue de F0 (dont l’existence est donnée par le
Théorème 10.2),
la convergence
∼
FN −→ F ,
a lieu uniformément sur [0, T ], pour tout temps d’existence T > 0 au sens du Théorème
10.2.
En quoi a-t-on alors prouvé la convergence vers l’équation de Boltzmann (9.9) ?
Les solutions de (10.11) issues de données initiales tensorisées sont tensorisées. Pour de
telles données, la hiérarchie Boltzmann se réduit à l’équation de Boltzmann (9.9). Donc la
(1)
convergence de la première marginale fN est une convergence vers une solution faible f (1)
de l’équation de Boltzmann.
CHAPITRE 12
RÉDUCTION DE LANFORD ET RECOLLISIONS
12.1. Réduction
(s)
Dans une première étape, on utilise une formule de Duhamel itérée pour exprimer fN (t)
en fonction des données, puis un argument de convergence dominée pour se ramener à l’étude
d’un nombre fini de termes.
Dans (10.9), les corrélations d’ordre supérieur sont négligeables dans la limite de BoltzmannGrad. On a donc pour BBGKY la description (approchée)
Z t
(s)
(s)
(s+1)
(12.1)
fN (t) = Hs (t)fN (0) +
Hs (t − τ )Cs,s+1 fN
(τ ) dτ
0
On remarque que dans l’intégrande on peut utiliser récursivement (12.1). On obtient ainsi
Z t
(s)
(s+1)
(s)
Hs (t − t1 )Cs,s+1 f0,N (Zs ) dτ
fN (t, Zs ) = Hs (t)f0,N (Zs ) +
0
Z t
Z t1
(s+2)
+
Hs (t − t1 )Cs,s+1
Hs+1 (t1 − t2 )Cs+1,s+2 fN
(t2 , Zs ) dt2 dt1 .
0
0
(s)
et, par récurrence, une représentation de fN en fonction des données :
X Z
(s+n)
(s)
(s)
Es,n (t, Tn )fN,0
(Zs ) dTn ,
fN (t, Zs ) = Hs (t)fN,0 (Zs ) +
Tn (t)
1≤n≤N −s
où le domaine temporel est
n
Tn (t) := Tn = (t1 , . . . , tn ), 0 ≤ t1 < t,
et pour i ≥ 2, 0 ≤ ti < ti−1
o
et les opérateurs de collision itérés sont
Es,n (t, Tn ) := Hs (t − t1 )
Y
Cs+k−1,s+k Hs+k (tk − tk+1 ),
1≤k≤n
en notant tn+1 = 0.
La même description vaut pour la hiérarchie limite :
X Z
(s)
(s+n)
f (s) (t, Zs ) = Ss (t)f0 (Zs ) +
E0s,n (t, Tn )f0
(Zs ) dTn ,
1≤n≤∞
Tn (t)
avec des opérateurs de collision itérés :
E0s,n (t, Tn ) = Ss (t − t1 )
Y
1≤k≤n
0
Cs+k−1,s+k
Ss+k (tk − tk+1 ),
98
CHAPITRE 12. RÉDUCTION DE LANFORD ET RECOLLISIONS
Figure 12.1. Pseudo-trajectoires.
0
où Cs,s+1
est défini au paragraphe 10.2 page 88.
On décompose maintenant les opérateurs de collisions, en notant à chaque étape le numéro
de la particule qui interagit. On obtient ainsi une décomposition des opérateurs de collision
itérés en somme d’opérateurs de collision élémentaires définis par
Y m
k
Es,n,Mn (t, Tn ) = Hs (t − t1 )
Cs+k−1,s+k
Hs+k (tk − tk+1 ),
1≤k≤n
où
M := (m1 , . . . , mn ) with mi ∈ {1, . . . , s + i − 1},
qui correspond à une selectio des numéros des particules collisionelles : pour tout m ∈ [1, s] :
m
Cs,s+1
est le terme dans l’opérateur de collision Cs,s+1 pour lequel c’est la particule numéro
m qui est collisionnelle.
Les fonctionnelles élémentaires associées sont définies par
Z
Z
(s+n)
Is,n,Mn (t, Xs ) :=
φ(Vs )
Es,n,Mn (t, Tn )f0,N
(Zs ) dTn dVs .
Rds
Tn (t)
De même on a
0
Is,n,M
(t, Xs ) :=
n
Z
Rds
Z
φ(Vs )
Tn (t)
(s+n)
E0s,n,Mn (t, Tn )f0,N
(Zs ) dTn dVs .
Un argument de convergence dominée montre que pour prouver la convergence dans le
Théorème 11.5, il suffit de prouver
(12.2)
0
Is,n,Mn − Is,n,M
−→ 0.
n
Avec (12.2), on s’est ramené à l’étude d’un nombre fini de collisions.
Dans la même direction, on isole les termes de gain et de perte, on tronque les vitesses,
et on sépare les temps de collisions dans Tn (t). Ces approximations créent de petites erreurs
qu’on peut quantifier.
12.2. RECOLLISIONS
99
0
On comprend alors les fonctionnelles élémentaires Is,n,Mn et Is,n,M
par une lecture de
n
gauche à droite des opérateurs de collision élémentaires. Dans cette lecture, il existe un
nombre fini s + n de particules. A l’instant final t0 = t, il y a s particules, qui très probablement sont en situation non collisionnelle. Le premier opérateur de transport rétrograde
Hs (t − t1 ) dans Es,n,Mn est donc un transport libre. A l’instant t1 , sur la Figure 12.1, c’est
la particule numéro 2 est collisionnelle. Une particule s + 1 est donc créée, en position précollisionnelle ou post-collisionelle, suivant l’indice pertinent dans E. Puis à nouveau on suit
le transport rétrograde, etc.
Les fonctionnelles I et I0 vont donc être proches si dans cette description les transports
H et S sont proches, c’est-à-dire si deux particules qui interagissent à un instant tj n’ont
pas interagi dans le passé.
12.2. Recollisions
On prouve par des découpages en vitesse que les configurations qui mènent à des recollisions sont de mesure petite. Ces découpages sont basés sur des lemmes géométriques
élémentaires.
On vérifie par exemple que, des positions x1 et x2 sont données, telles que |x1 − x2 | ≥ ε0 ,
avec ε ε0 , et une vitesse |v1 | ≤ R étant donnée, alors lors, pour |v2 | ≤ R :
• si v1 − v2 n’est pas dans un cône de mesure plus petite que C(R)(ε/ε0 )2 , on a
∀τ ≥ 0 ,
|(x1 − v1 τ ) − (x2 − v2 τ )| > ε ;
• si v1 − v2 n’est pas dans un cylindre de mesure plus petite que C(R)(ε0 /δ)2 , on a
∀τ ≥ δ ,
|(x1 − v1 τ ) − (x2 − v2 τ )| > ε0 .
Nous avons besoin d’une borne uniforme pour la section efficace b (loin des collisions
rasantes ν · (v2 − v1 ) = 0) quand l’opérateur de collision élémentaire introduit une configuration post-collisionnelle entre z1 et z2 . On doit alors vérifier que si v1 appartient à un petit
cylindre comme ci-dessus, alors son antécédent par le scattering inverse appartient décrit un
ensemble de mesure petite, c’est-à-dire
n
o
(ν, v2 ), ν ∈ S2 , |v2 | ≤ R, (v2 − v1 ) · ν > η, v20 ∈ K(y, ρ) ≤ C(Φ, R, η)ρd−1 ,
avec une constante C qui dépend de Φ par une borne L∞ de la section efficace b, en notant
K(y, ρ) le cylindre d’axe y et de rayon ρ.
BIBLIOGRAPHIE
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