DOCUMENT 2
La division euclidienne
La division euclidienne joue un role central en arithm´etique. Comme c’est l’un des tous
premiers r´esultats que l’on d´emontre, il est important de savoir exactement ce qui est connu
lorsqu’on l’aborde. Nous supposerons ici que l’on a donn´e les d´efinitions de Net de Zet que
l’on a ´etabli, comme dans le document 1, ou admis :
La structure d’anneau commutatif et unitaire de Z. Dans Zil n’y a pas de diviseur de
z´ero (ab = 0 implique a= 0 ou b= 0).
Les relations ´el´ementaires entre l’ordre sur Z, d´efinie par absi et seulement si il
existe cNtel que a+c=b, et la multiplication et l’addition. En particulier abet
c0 impliquent ac bc.
Toute partie non vide de Nadmet un plus petit ´el´ement.
Un corollaire de ce dernier r´esultat est :
Toute partie non vide et minor´ee de Z, admet un plus petit ´el´ement.
Preuve. Soit XZ, non vide et minor´e par a. Si a0 alors Xest contenu dans Net son
plus petit ´el´ement dans Nest aussi son plus petit ´el´ement dans Z. Supposons maintenant a < 0
et soit X={na|nX}.Si nX,and’o`u 0 naet donc XN. Soit ble plus
petit ´el´ement de X. Il existe cXtel que b=caet pour tout nX,bnad’o`u
c=a+bnet cest le plus petit ´el´ement de X.
On peut trouver une d´emonstration un peu diff´erente de ce r´esultat dans le document 1.
1. La division euclidienne dans Net Z
Th´
eor`
eme 2.1.(Division euclidienne dans Z). Soit aZ, b Z. Il existe un unique
couple (q, r)Z×Ntel que :
a=bq +r, 0r <|b|.
Les entiers qet rsont appel´es, respectivement, le quotient et le reste de la division euclidienne
de apar b.
Preuve de l’existence.
Si a= 0 alors le couple (0,0) convient. Supposons a6= 0.
1er cas : b > 0. Soit A={nZ|nb > a}.L’entier (|a|+1)best un multiple de bqui est
strictement plus grand que a. En effet :
(|a|+1)b >|a|b=|a|(b1 + 1) ≥| a|≥ a.
On a donc A6=. Montrons que Aest minor´e par −|a|:
si m < −|a|alors, comme b1, mb < −|a|b≤ −|a| ≤ aet donc m6∈ A.
17
18 2. LA DIVISION EUCLIDIENNE
Soit nle plus petit ´el´ement de A. De n1< n on d´eduit (n1)b < nb et donc (n1)b
a < nb. Posons q=n1. On a qb a < qb +bd’o`u 0 aqb < b. Si r=aqb alors
a=bq +ret 0 r < b =|b|.
2me cas : b < 0. D’apr`es le premier cas, il existe qet rtels que a= (b)q+ravec
0r≤| −b|. En ´ecrivant a=b(q) + r, on voit que le couple (q, r) convient.
Preuve de l’unicit´e.
Supposons que :
a=bq +r, 0r <|b|
a=bq0+r0,0r0<|b|.
On a r0r=b(qq0). Or − | b|< r0r <|b|, ou encore, − | b|< b(qq0)<|b|. Il en
r´esulte que 0 ≤| b|| qq0|<|b|et donc 0 ≤| qq0|<1. Finalement, |qq0|= 0 d’o`u q=q0
et r=r0.
Th´
eor`
eme 2.2.(Division euclidienne dans N). Soit aN,bN. Il existe un unique
couple (q, r)N2tel que :
a=bq +r, 0r < b.
Preuve. L’unicit´e r´esulte de l’unicit´e dans Z. Pour l’existence, consid´erons la preuve du
th´eor`eme 1 dans le cas b > 0. Comme nb > a, on a n > 0 et donc q=n10. De plus,
r <|b|=bet donc (q, r)N2et v´erifie
a=bq +r, 0r < b.
Remarques.
1) La descente de Fermat. Il existe une variante de la d´emonstration de l’existence du
quotient et du reste dans le cas de deux entiers positifs aet bconnue sous le nom de descente
de Fermat. Supposons 0 < b a(sinon (0, a) convient). Il existe q1tel que q1ba. Soit
r1=abq1. Si r1< b alors (q1, r1) convient et sinon r1bet il existe q2tel que q2br1. Soit
r2=r1bq2. Si r2< b le couple (q1+q2, r2) convient et sinon r2bet on continue. Comme
r1> r2> . . . , on ne peut pas toujours avoir rnbet il existe un plus petit entier kpour lequel
rk< b et (q1+q2+· · · +qk, rk) est le couple cherch´e.
2) La preuve donn´ee ici de l’existence du couple (q, r) est constructive en ce sens qu’il est facile
d’en d´eduire un programme permettant de calculer effectivement ce couple. Il existe des preuves
beaucoup plus courtes mais qui n’ont pas cette qualit´e. Par exemple, dans le cas de deux entiers
aet bpositifs on peut faire une d´emonstration par r´ecurrence sur a. On a 0 = 0.b + 0 et si
a=bq +ravec 0 r < b alors a+ 1 = bq + (r+ 1). Si r+ 1 < b alors (q, r + 1) convient et si
r+ 1 = balors a+ 1 = (q+ 1)b.
3) L’entier bq n’est pas toujours le multiple de ble plus proche de a(Exemple : 19 = 3.5 + 4.).
On peut montrer que pour tout (a, b)Z×Zil existe (q0, r0)Z2tel que a=bq0+r0avec
|r0| ≤ |b|
2. L’entier bq0est alors un multiple de brendant |abq0|minimum. Si a=bq +r,
0r < |b|alors (r0, q0) = (r, q) si 0 r|b|
2et (r0, q0) = (rb, q + 1) sinon.
2. APPLICATIONS 19
Exercice Si x÷yd´esigne le quotient de la division euclidienne de xpar yalors montrer que,
pour trois entiers strictement positifs a,bet c,
a÷(bc) = (a÷b)÷c.
Solution. Posons a=bq +r, 0 r < b, et q=cq0+r0, 0 r0< c. On a a=b[cq0+r0] + r=
bcq0+br0+ret de 0 r0c1 on d´eduit 0 br0bc bd’o`u br0+rbc b+r < bc car
rb < 0. Finalement q0=a÷c.
On peut utiliser le r´esultat pr´ec´edent en calcul mental. Par exemple : 311 ÷21 = (311 ÷
3) ÷7 = 103 ÷7 = 14.
2. Applications
La division euclidienne ´etant au tout d´ebut de l’arithm´etique, ses applications font intervenir
en g´en´eral des notions qui apparaissent `a un stade plus avanc´e de cette discipline.
2.1. D´etermination des sous-groupes de Z.Il est clair que pour tout nZ, l’ensemble
nZdes multiples de nest un sous-groupe de Z(na+nb =n(a+b),(na) = n(a)). R´eciproquement,
soit Gun sous-groupe de Z. Si G={0}alors G= 0Zet si G6={0}alors Gposs`ede un ´el´ement
non nul m. On a aussi mGet donc G+={nZ|nG, n > 0} 6=. Soit n0le plus
petit ´el´ement de G+. Le groupe Gcontient tous les multiples de n0et si nGalors il existe
(q, r)Z2tel que
n=n0q+r, 0r < n0
On a r=nn0qGet donc, par d´efinition de n0,r= 0 d’o`u n=n0qet finalement G=n0Z.
Supposons que G=mZavec mZ. On a mn0Zd’o`u l’existence de aZtel que m=n0a.
De mˆeme, il existe bZtel que no=mb et m=abm d’o`u ab = 1. On a donc a=b= 1 ou
a=b=1. Dans le premier cas on a m=n0et dans le second, m=n0. On a d´emontr´e :
Proposition 2.1.Tous les sous-groupes de Zsont monog`enes (c’est-`a-dire engendr´es par
un seul ´el´ement). Tout sous-groupe, distinct de {0}, poss`ede un unique g´en´erateur strictement
positif et un unique g´en´erateur strictement n´egatif. Ces g´en´erateurs sont oppos´es l’un de l’autre.
Remarques
1) Tous les sous-groupes de Z, distincts de {0}, sont isomorphes `a Zet donc isomorphes
entre eux. Un isomorphisme de Zsur nZest l’application mZnm nZ. En revanche,
deux quotients distints Z/nZet Z/mZne sont jamais isomorphes.
2) Les ensembles de la forme nZ,nZ, sont aussi les sous-anneaux et les id´eaux de l’anneau
Z. Un anneau est dit principal s’il est int`egre (commutatif,unitaire, non r´eduit `a {0}et sans
diviseur de 0) et si tous ses id´eaux sont principaux. L’anneau Zest un exemple d’anneau
principal.
3) D´etermination de l’ensemble des id´eaux de l’anneau des nombres d´ecimaux. Voir le
document 7.
2.2. Les groupes cycliques. Un groupe Gest dit cyclique s’il est fini et engendr´e par un
´el´ement (Gest form´ee par les puissances positives et n´egatives d’un ´el´ement).
Soit aun g´en´erateur d’un groupe cyclique G. Le groupe G´etant fini, l’application nN
ann’est pas injective et il existe des entiers strictement positifs pet qtels que p < q et ap=aq.
Si ed´esigne l’´el´ement neutre de Galors e=aqp. Il existe donc des entiers strictement positifs
ltels que al=e. Soit dle plus petit et
X={a0=e, a, a2, . . . , ad1}.
20 2. LA DIVISION EUCLIDIENNE
Tous les ´el´ement de Xsont distincts car si ap=aqavec 0 pqd1 alors aqp=eavec
0qp<det donc qp= 0. Soit akGavec kZ. Il existe (q, r)Z×Ntel que
k=qd +ret 0 rd1. On a ak= (ad)qar=ard’o`u akXet finalement G=X. On a
donc montr´e que si Gest un groupe cyclique ayant d´el´ements alors
G={a0=e, a, a2, . . . , ad1}.
On peut montrer que tous les groupes cycliques d’ordre dsont isomorphes et en particulier
isomorphes `a Z/dZ.
Maintenant, soit Gun groupe fini d’ordre net aun ´el´ement de G. Le sous groupe engend´e
par aest cyclique et s’il est d’ordre dalors, par le th´eor`eme de Lagrange, ddivise n. On a donc
ad=eavec dun diviseur de n.
2.3. Num´eration. En g´en´eral, un syst`eme de num´eration est form´e par une suite finie de
symboles, appel´es chiffres, et d’un algorithme associant de fa¸con injective `a chaque entier une
suite finie de ces symboles. Cette suite est appel´ee l’´ecriture de l’entier (dans le syst`eme de
num´eration donn´e). Par exemple dans la num´eration romaine, les chiffres sont I, V, X, C, M,
..... , `a l’entier neuf on associe IX, `a l’entier douze est associ´e XII. En principe, un bon syst`eme
de num´eration permet de d´eterminer par un algorithme simple l’´ecriture de la somme ou du
produit de deux entiers `a l’aide des ´ecritures de chacun de ces entiers. Il doit aussi ˆetre facile
de comparer deux entiers en utilisant uniquement leurs ´ecritures.
Nous allons d’abord d´emontrer le r´esultat math´ematique qui est le fondement du syst`eme
de num´eration en base b,b2, et plus particuli`erement du syst`eme d´ecimal.
Proposition 2.2.Soit (a, b)N2avec b2et ((qn, rn))nla suite de N2efinie par
r´ecurrence de la fa¸con suivante :
(q0, r0)est form´e par le quotient et le reste de la division euclidienne de apar b;
(qn+1, rn+1)est form´e par le quotient et le reste de la division euclidienne de qnpar b.
a) Il existe un plus petit entier n0tel que kn0entraine qk=rk+1 = 0.
b) On a : a=rn0bn0+... +r2b2+r1b+r0.
c) Si a=spbp+... +s2b2+s1b+s0avec 0si< b alors, pour tout entier k,rk=sk.
Preuve.
Remarque pr´eliminaire. Soit (a, b)N×N. Il existe (q, r)N2tel que a=bq +ret
0r < b. Si b2 alors on a abq = (b1)q+qqet a=qentraine (b1)q= 0 d’o`u
q= 0 = aet aussi r= 0.
a) La remarque pr´eliminaire implique que la suite (qn) est d´ecroissante. Elle est donc sta-
tionnaire `a partir d’un certain rang car l’ensemble de ses termes poss`ede un plus petit ´el´ement.
Soit n0le plus petit entier tel que qn0=qn0+1. La remarque entraine qn0=qn0+1 = 0 et, comme
(qn) d´ecroit, qn= 0 si nn0. On a aussi rn= 0 si nn0+ 1 et rn06= 0.
Disons que n0est le rang de a. Une remarque, essentielle pour la suite de la preuve, est que
la suite de N2associ´ee `a l’entier q0est ((qn+1, rn+1)) et si n06= 0 alors le rang de q0est n01.
On peut aussi remarquer que les entiers de rang 0 sont ceux compris entre 0 et b1.
b) La d´emonstration se fait par r´ecurrence sur le rang n0de a. Si n0= 0 alors a=r0=rn0
et le r´esultat est vrai. Supposons le r´esultat vrai pour tout entier de rang n01 et soit ade
rang n0. L’entier q0´etant de rang n01 on a
q0=rn0bn01+rn01bn02+... +r2b+r1
2. APPLICATIONS 21
et a=bq0+r0entraine
a=rn0bn0+... +r1b+r0
Le r´esultat est vrai pour n0.
c) La d´emonstration se fait par r´ecurrence sur le rang n0de a. Si n0= 0 alors 0 ab1
d’o`u sp=sp1=... =s1= 0 (car sinon aspbp+... +s1bb) et s0=r0. Ainsi, on a bien
sn=rnpour tout entier n. Supposons maintenant c) pour tout entier de rang n01 et soit a
de rang n0. On a :
a=bq0+r0= (spbp1+... +s1)b+s0
avec 0 s0b1. L’unicit´e du quotient et du reste dans une division euclidienne entraine
q0=spbp1+... +s1et s0=r0. Par l’hypoth`ese de r´ecurrence on a sk=rksi k1 et le
r´esultat est vrai pour l’entier n0.
La num´eration en base bet la num´eration d´ecimale. Dans le syst`eme de num´eration en base
b,b2, on repr´esente les bpremiers entiers par des symboles appel´es chiffres. D´esignons par x
le chiffre associ´e `a l’entier x < b. La proposition pr´ec´edente, partie b), montre que tout entier
positif aest d´etermin´e par bet une suite finie r0, r1, ..., rn06= 0 d’entiers strictement inf´erieurs
`a b. L’´ecriture de aen base best form´ee par les n0+ 1 chiffres rn0rn01....r0. Par exemple en
base dix (num´eration d´ecimale), les chiffres sont 0, 1, 2, ...,9 et l’´ecriture de l’entier seize est 16
car r0= 6, r1= 1 et rn= 0 si n2.
L’´ecriture d’un entier n´egatif nest obtenue en faisant pr´ec´eder l’´ecriture de ndu signe .
Ecriture d´ecimale des nombres rationnels. Soit a=p
q,pN,qN, un nombre rationnel
positif. On d´efinit par r´ecurrence deux suites d’entiers (an) et (rn) :
a0et r0sont le quotient et le reste de la division euclidienne de ppar q:p=a0q+r0,
0r0< q. On remarque que a0est la partie enti`ere de a=p
q.
Pour n1, anet rnsont le quotient et le reste de la division euclidienne de 10rn1
par q: 10rn1=anq+rnet 0 rn< q.
On montre que 0 an<10 si n1 et que la suite (an) est p´eriodique `a partir d’un certain
rang car il n’y a que qvaleurs possibles pour rn. Plus particuli`erement, cette suite est nulle `a
partir d’un certain rang si et seulement si a=p
qest un nombre d´ecimal. Pour obtenir l’´ecriture
en base 10 de a, lorsque ce nombre n’est pas un entier, on ´ecrit de gauche `a droite :
l’´ecriture en base 10 de a0
une virgule
les chiffres a1a2....an... (Cette suite est infinie mais, comme elle est p´eriodique
`a partir d’un certain rang, on peut la caract´eriser sans trop d’ambiguit´e en ´ecrivant
qu’un nombre fini de ces premiers termes et des pointill´es)
L’ecriture d’un nombre rationnel n´egatif rest obtenue en faisant pr´ec´eder l’´ecriture de r
du signe .
2.4. Les congruences. Soit n1 un entier. Deux entiers pet qsont congrus modulo n
si et seulement si ils ont mˆeme reste dans leurs divisions euclidiennes par n(voir le document
5). La division euclidienne est donc utile dans l’´etude des congruences mais son rˆole ne semble
pas essentiel. Il est cependant int´eressant de remarquer la grande similitude de signification des
deux ´enonc´es suivants :
(1) Pour tout entier n1, Z/nZ={0, . . . , r, . . . , n 1};
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