ÉDITIONS MUSÉE DU TEMPS LE ROI, L’EMPEREUR ET LA PENDULE t livret pour tous MUSÉE DU TEMPS LE ROI, L’EMPEREUR ET LA PENDULE le fil d’Ariane h Les pendules du XIXe siècle, conservées par le Mobilier national, permettent de découvrir soixante dix ans d’histoire culturelle de la France. Signées par des horlogers réputés, elles résultent du travail de nombreux artisans : horlogers, mécaniciens, bronziers, doreurs, marbriers, ébénistes... Sans oublier les architectes et les dessinateurs de sujets. Tout ce monde vit des commandes de l’Etat et des puissants. en savoir plus Qu’est-ce que le Mobilier national ? En 1663, Louis XIV et Colbert ordonnent l’institution du Garde-meuble de la Couronne, avec un double souci, celui de la gloire et celui de la gestion patrimoniale. Les ventes révolutionnaires appauvrissent ce riche ensemble. Cependant, la République naissante renoue avec les fastes publics et Napoléon Ier développe une politique de remeublement des palais : le Garde-Meuble devient le Mobilier national. Les ministres revendiquèrent eux aussi de beaux meubles et effets qui répondissent à l’importance et à la dignité des fonctions qui leur étaient confiées. Aujourd’hui, le Mobilier national rassemble près de 200 000 objets. La grande majorité des pendules reproduites dans le présent livret est sortie des collections du Mobilier national. La mode est de plus en plus exigeante. Bien sûr, la fonction d’affichage de l’heure subsiste, mais la valeur décorative prend de plus en plus de place. Mais, par-delà, les multiples symboles et allégories utilisés traduisent la transformation de la pendule en vecteur de propagande et de messages. 1 I L’Etude Mobilier national La muse Uranie est accoudée sur une pile de livres et, sur le socle, des chérubins s’initient aux sciences, à l’architecture, au dessin. Le coq symbolise la vigilance. L’étude est un thème important à la fin XVIIIe et au début du XIXe siècle. L’étude de l’art, selon Diderot doit éduquer et rendre la vertu attrayante, le vice odieux et le ridicule éclatant. Pendule acquise en 1808 pour le salon dit “des Princes” au palais de Compiègne. En 1811, elle se trouve dans le salon de musique de l’Impératrice. Bronze doré et marbre rouge, cadran signé : “Bailly à Paris”. L’Empire triomphant Au lendemain de la Révolution, l’Empire a besoin de marquer symboliquement son avènement. Il le fait en imposant son style, dans l’architecture comme dans l’art décoratif. Les pendules n’échappent pas à cette prise en main. Destinées à des lieux prestigieux, elles sont commandées aux meilleurs artisans de l’époque. Ces pendules ne sont pas d’abord des objets utilitaires, mais elles sont avant tout porteuses de sens : elles exaltent les valeurs du régime en place. Mais le choix du sujet renvoie aussi à la personnalité des destinataires. 2 La France écrivant ou le Génie de l’Histoire Mobilier national En 1809, Napoléon Ier a voulu cette pendule pour sa chambre à coucher du palais des Tuileries. Le bronzier Thomire a travaillé à partir d’un dessin de l’architecte Charles Percier. La partie mécanique a été fournie par l’horloger Lepaute. Le marbre choisi est rouge “griotte”. La figure de l’Histoire rappelle que Napoléon est un grand conquérant et que l’Histoire s’écrit par les conquêtes. La couronne, la main de justice et le sceptre de la frise sont les éléments symboliques de son autorité. Les motifs comme le laurier, le caducée, les étoiles… relèvent d’une même volonté : l’inscription dans l’éternité. Un aigle surmontant la pendule a été enlevé à la Restauration. Par l’intermédiaire du garde-meuble (aujourd’hui Mobilier national), Napoléon ne commande pas moins de 250 pendules pour garnir les appartements impériaux. Lepaute, Bailly et autres horlogers parisiens en signent la partie mécanique. L’horloger Bréguet suscite un grand engouement ; il a laissé son nom à une aiguille célèbre : simple pointe mince et élégante, frappée à son extrémité d’un cercle évidé. z symboles à lire Thèmes guerriers venant de la Rome antique : la massue d’Hercule les piques, sabres, épées, le carnyx, trompette militaire terminée en gueule d’animal, la cuirasse avec le masque de Méduse, tuée par Persée (le masque avait pour fonction de faire peur et de repousser les adversaires), le casque à cimier couronné de laurier Symboles du pouvoir impérial, hérités des rois de France : la couronne impériale fermée, la main de Justice, le sceptre impérial, L’aigle impérial, symbole personnel de Napoléon Ier Tout un vocabulaire est mobilisé pour inscrire l’oeuvre dans l’éternité: lauriers, guirlandes, flambeaux, étoiles… II Elisa Bonaparte-Baciocchi Mobilier national Elisa, aînée des trois sœurs de Napoléon, grande duchesse de Toscane en 1809, gouverne efficacement avec son époux. L’art officiel de l’Empire Le style Empire est l’aboutissement de l’art néo-classique. Pour les portraits de l’empereur et de ses proches, les artistes s’inscrivent dans la tradition de la Rome antique et signent des bustes austères. Ce buste de Napoléon est l’œuvre du sculpteur Chaudet. Reproduit en marbre de Carrare, il fut la plus diffusée des effigies officielles. Besançon, Musée des beaux-arts et d’archéologie. Le bronze doré s’allie au marbre jaune de Sienne dans ce buste, commandé à un sculpteur italien en 1809. Sur le cadran, outre l’heure et les minutes, on peut lire les phases de la Lune. Diane de Poitiers Mobilier national Reproduction par le fondeur Barbedienne, de la tête de Diane de Poitiers, XVIe siècle (musée du Louvre). Ce buste représentant Diane, célèbre maîtresse du roi de France Henri II, est réalisé sous le Second Empire, soixante ans après celui d’Elisa. L’austérité n’est plus de mise. La déesse Rome Mobilier national Dans l’Antiquité, la ville de Rome fut de bonne heure divinisée sous les traits d’une guerrière, comme Minerve, le plus souvent armée d’une lance et coiffée d’un casque. Elle est représentée assise sur les sept collines de la ville. A ses pieds, le fleuve Tibre s’appuie sur une urne renversée dont l’eau s’écoule ; Rémus et Romulus, les deux fondateurs de Rome, sont sauvés et allaités par la Louve, devenue symbole de l’Empire. Elle tenait le palladium (attribut de Pallas, déesse de la guerre dans l’Antiquité) et une lance, aujourd’hui disparus. Le bronzier Vittoz et l’horloger Lepaute signent ensemble cette pendule, commandée pour le grand salon du roi de Rome, fils de Napoléon Ier, au palais des Tuileries. Napoléon Bonaparte est le cadet d’une famille corse de huit enfants, qu’il dotera tous richement : - Joseph, roi de Naples puis d’Espagne, - Lucien, président du Conseil des Cinq cents, puis prince de Canino, - Maria Anna, dite Elisa, épouse de Félix Baciocchi, duchesse de Toscane, - Louis, roi de Hollande, père du futur Napoléon III, - Pauline, épouse du prince Borghèse - Caroline, épouse de Murat. Ils sont reine et roi de Naples, - Jérôme, roi de Westphalie. En 1809, les Etats pontificaux sont annexés par la France. Rome devient une ville impériale et la seconde capitale de l’Empire ; elle doit rivaliser avec Paris tout en conservant le souvenir de sa grandeur passée. Y LA TECHNIQUE A la fin du XVIIIe siècle, les habitations bourgeoises évoluent vers plus d’intimité, avec des pièces plus petites. Les cheminées monumentales sont abandonnées au profit d’élégantes cheminées en marbre ; les pendules deviennent des éléments essentiels du décor de la maison. A Paris, les horlogers mettent au point un nouveau modèle de mécanisme, le “mouvement de Paris”. De forme ronde, alors qu’auparavant la forme carrée était de mise, il s’intègre au mieux dans la décoration surabondante des pendules. Ce mouvement est à deux corps de rouages (horaire et sonnerie) ; l’échappement à ancre à recul est de rigueur dans les mouvements courants, remplacé par l’échappement à chevilles dans le haut de gamme. 5 III Cariatide égyptienne Mobilier national La cariatide est une figure humaine, utilisée comme élément porteur en architecture ou sur un meuble. On la retrouve dans les décors dès la fin du XVIIIe siècle. L’épopée impériale Les campagnes militaires menées par le général Bonaparte, en Italie et en Égypte, inspirent de nombreux décors. Le style Empire multiplie les attributs guerriers inspirés de l’antiquité gréco-romaine, les aigles et les sphinx, les victoires et les renommée, les cygnes et les abeilles… En France, la mode est à l’Egypte. Réalisée vers 1805, entrée au Garde-Meuble en 1832, elle est en bronze doré et oxydé. Le balancier oscillait en extérieur le long du voile ; il a été supprimé au cours du siècle et remplacé par un système plus facile d’entretien. Pendule “arc de triomphe” Mobilier national Cet arc de triomphe reprend la forme des arcs qui, dans la Rome antique, honoraient les généraux victorieux et les empereurs. Napoléon, se veut héritier de cette tradition, en commande deux pour Paris, celui du Carrousel et celui qui domine les Champs Elysées. Longtemps utilisé pour la décoration du château de Saint-Cloud, l’objet est transformé en pendule en 1839. Marbres précieux et bronze doré. A l’instar de la Rome antique, le premier Empire aime les pierres dures, travaillées en mosaïques. C.Percier et P.-F. Fontaine, gravure, dans le Recueil de décorations intérieures, 1812. Bibliothèque municipale de Besançon. Ces deux architectes, nommés décorateurs officiels en 1813, bénéficient de nombreuses commandes sous Napoléon Ier, sous la Restauration puis sous Louis-Philippe. De 1798 à 1800, Bonaparte cherche à s’emparer de l’Égypte. De très nombreux savants, ingénieurs, historiens, botanistes et dessinateurs accompagnent l’armée. Ils découvrent la pierre de Rosette, grâce laquelle Champollion, en 1822, déchiffre les hiéroglyphes. Leurs travaux débouchent sur une magnifique publication, la Description de l’Egypte. Y LA TECHNIQUE Les marbres contribuent à l’impression de puissance de l’empire. Ainsi on utilise : - le vert de mer réservé aux ameublements les plus riches, - le portor et le griotte, deux marbres assez rares, - le jaune de Sienne, - le marbre blanc, - le marbre noir dont le second empire fera grand usage. On recense en France, à la fin du XIXème siècle, 200 carrières de marbres. Sur l'arc de triomphe, Le bleu outremer de la pierre dure dite lapis lazuli est le symbole du dieu égyptien Horus. Le nom de celui-ci est à rapprocher du mot heure. 7 IV Le sentiment du Temps à l’aube du XIXe siècle. Gravure représentant Janus accompagné du serpent qui se mord la queue, appelé Ouroboros. Collection musée du Temps, XVIIe siècle, (fonds E.Gélis). Allégories et symboles Le mot “allégorie” vient du grec allêgorien, qui signifie “parler par figures”. Les allégories sont utilisées pour exprimer des leçons morales ou désigner les richesses du savoir et des arts. La richesse des matériaux et des symboles, traduisent la soif de pouvoir, l’aspiration à une éternelle notoriété. 8 Les deux visages de Janus sont tournés vers le soleil, à son lever d’un côté, à son coucher de l’autre. Le serpent qui se mord la queue, appelé Ouroboros, souligne le retour éternel du cycle du jour et la continuité. Le Temps et Clio Mobilier national Le vieillard Temps est accroupi pour mieux présenter le globe céleste, ceinturé d’une échelle des heures servant de cadran. Il a posé sa faux. Son sablier, couché, indique que l’écoulement du sable, donc du temps, est suspendu comme dans l’éternité. Le serpent qui se mord la queue pour former un anneau évoque le retour immuable des saisons. Clio, muse de l’Histoire maîtrise le temps ; à ce titre, elle tient le stylet qui, indiquant l’heure, sert d’aiguille. Cette pendule ornait le grand salon de l’impératrice Joséphine, au palais de Laeken, en Belgique (alors département français). Le marbre “vert de mer” s’y allie au bronze doré et oxydé. Etude pour le portrait de Napoléon dans son cabinet de travail, David, musée des Beaux arts de Besançon, 1812. David commente ainsi son portrait : Je l’ai représenté dans le moment de sa vie qui lui est le plus habituel, le travail : il est dans son cabinet, ayant passé la nuit à composer son code Napoléon. La pendule-globe de l’arrière-plan, très proche de la pendule Clio et le Temps, a été remplacée par une horloge dans l’œuvre définitive. Le Temps Mobilier national Le Temps est figuré comme un vieillard (le temps fait vieillir), ailé (il vole), armé d’une faux (il fauche les vies). Il est en marche, car rien ne peut l’arrêter. Le cadran, cerné par le serpent, est calé sous son bras. Réalisée entre 1810 et 1820, cette pendule n’est entrée au Mobilier national qu’au XXe siècle. Y LA TECHNIQUE Les grandes étapes de la réalisation des bronzes L’établissement du modèle fait appel à toutes sortes d’artistes. Architecte, décorateur, ornemaniste, sculpteur ou peintre… tout le monde s’en mêle. Puis entrent en scène des spécialistes, le mouleur et le fondeur (la technique la plus usuelle étant le moulage au sable). Le ciseleur prépare le “sujet” sorti du moule. Dorer le bronze au mercure n’est pas sans danger pour la santé. Reste à monter les éléments de bronze ensemble puis à les patiner. Quand est livré, le 25 Thermidor an XIII (13 août 1805), la pendule Le Temps et Clio, il ne reste que quelques mois de vie au calendrier révolutionnaire. Il aura existé quatorze ans. La Révolution avait en effet radicalement transformé la mesure du temps : découpage du mois en trente jours, du jour en 10 heures, de l’heure en 100 minutes. Mais chacun vivait encore à l’heure de son clocher, calée sur le soleil. Napoléon Ier souhaitait que la France et l’Europe vivent selon le même temps. Il faudra pourtant attendre 1881 pour que tous les Français vivent à la même heure et que se mette en place une organisation à l’échelle du globe. Cronos, dieu du Temps Ouranos, époux de Gaia, la déesse Terre, refusait de laisser ses enfants voir le jour. Après avoir fabriqué une grande serpe, Gaia exhorte ses enfants à s’en servir contre Ouranos. Cronos, l’un d’eux, châtre son père et jette le sexe coupé à la mer. De l’écume ainsi fécondée naît la première déesse : la “femme née des vagues” c’est-à-dire Vénus / Aphrodite. Cronos a ainsi séparé le Ciel et la Terre, créant également le temps et l’espace. Clio Les neuf Muses sont filles de Zeus et de Mnémosyne (la Mémoire). Lors des fêtes de l’Olympe, elles dansent avec Apollon et avec d’autres divinités, les Grâces et les Heures. Chaque muse incarne un art. Clio – dont le nom grec signifie célébrer - est la Muse de l’Histoire. V Andromaque pleurant sur le corps d’Hector Tableau, musée du Louvre, 1783. Au cours du combat entre Grecs et Troyens, Hector meurt sous les coups d’Achille. Tableau de David, Musée du Louvre L’Empire, héritier du néo-classicisme la Grèce comme inspiratrice En 1748, la découverte de Pompéi provoque un véritable engouement pour l’Antiquité. La relecture du modèle antique donne un puissant sentiment de renouveau. Ce mouvement, dit néoclassique, s’épanouit sous l’Empire. Au travers des pendules, conçues pour l’élite d’une société pétrie d’esprit guerrier, on devine l’aspiration, venue des Grecs, à une beauté virile, fière, au cœur des ambitions du régime. Achille et Agamemnon s’affrontant à propos du sacrifice d’Iphigénie Mobilier national Les Adieux d’Hector et d’Andromaque Mobilier national Dans l’Iliade d’Homère, Hector est le fils préféré de Priam, roi de Troie. Homme valeureux, Hector est également attaché aux valeurs familiales. Le sujet principal de la pendule le représente faisant, avant la bataille, ses adieux à sa femme Andromaque et à son fils, Astyanax. Sur le socle, un bas-relief raconte les amours de Pâris et d’Hélène, causes de cette guerre ; Hector exhorte Pâris le couard à venir combattre. En 1806, cette pendule en bronze doré et patiné, orne le grand salon des appartements de l’Empereur au palais de Rambouillet. Les adieux d’Hector et Andromaque Dessin de Pompeo Batoni, 1758 Besançon, Musée des beaux-arts et d’archéologie 10 A la suite de l’enlèvement de la grecque Hélène par le troyen Pâris, Agamemnon organise une expédition contre Troie. La déesse Artémis lui promet des vents favorables à condition qu’il lui sacrifie sa fille Iphigénie. Pour convaincre celle-ci de le suivre, Agamemnon prétend la fiancer à Achille. Celui-ci, indigné d’avoir été abusé, saisit son épée. Le bas-relief montre un soldat poussant Iphigénie sur l’autel. Homère chantant sur les ruines de Troie Mobilier national Homère est le plus célèbre des poètes de la Grèce ancienne, il aurait peut-être vécu vers 850 avant notre ère. La tradition raconte que, devenu vieux, aveugle (d’où son nom, qui signifie l’absence de jour), il errait de ville en ville, chantant ses poèmes. Il serait l’auteur de l’Iliade et de l’Odyssée. L’Iliade, qui tire son nom de Troie, appelée aussi Ilion, raconte une partie du siège de Troie par les Achéens tandis que l’Odyssée raconte le difficile retour d’Ulysse depuis Troie jusqu’à son petit royaume de l’île d’Ithaque. symboles à lire z Le chien et les colombes, que l’on voit sur la base de la pendule Les Adieux d’Hector et d’Andromaque signifient la fidélité et l’amour. Sur la pendule Homère, la base contre laquelle s’appuie le poète est intentionnellement dégradée, symbole romantique du temps qui passe et de la ruine inéluctable. Y LA TECHNIQUE Dans la pendule Les Adieux d’Hector et d’Andromaque, le mouvement, signé “Lepaute / à Paris”, présente un bel échappement à chevilles, une aiguille des secondes, une sonnerie à chaperon des heures et demies, un balancier avec suspension à fil battant la demie-seconde. Le mouvement de Paris est un gage de qualité: il se doit d’être à la hauteur du traitement des bronzes et des marbres. VI Psyché et ses soeurs Papier peint, inspiré du dessin de Laffitte, 1816. Musée des beaux-arts et d’archéologie de Besançon, Psyché, en grec, signifie papillon et âme : la déesse symbolise la résurrection de l’âme, comme le papillon sortant de la chrysalide. A ses côtés, le paon est une image de l’immortalité, le cygne celle de la pureté. L’Empire, héritier du néo-classicisme les ornements à la mode L’élégance, la mode, veulent que la pendule du salon ne ressemble pas à celle du boudoir, et que celle de la salle où l’on mange soit toute différente de celle de la chambre où l’on couche. Il faut que dans la maison d’un prélat, les pendules ne soient pas semblables à celles qu’on voit dans la maison d’un général ; il faut que, pour chaque état, les pendules soient des ornements caractéristiques. Telle est la première cause de la prodigieuse variété dans les formes des pendules. Journal de Paris, 4 mai 1810 12 z symboles à lire On désigne par “psyché” un miroir de grande dimension, monté sur pivots dans un cadre à colonnes. C’est le meuble par excellence du courant néoclassique. La toilette de Psyché Mobilier national Vénus, déesse de la beauté, jalouse de la jeune Psyché, ordonne à Eros de rendre cette dernière amoureuse du mortel le plus méprisable qui soit. Mais Eros tombe amoureux de Psyché et la rejoint la nuit, lui demandant de ne jamais chercher à connaître son identité. Victime de sa curiosité, Psyché est soumise par Vénus à une série d’épreuves dont elle triomphe, regagnant ainsi le cœur de son amant qui l’épouse. Présentée en 1805 par l’horloger Lépine, cette pendule orne le boudoir de l’impératrice Joséphine au palais de Saint-Cloud. Elle intègre les ornements à la mode : cheminée aux montants en cariatide, tabouret à assise rectangulaire et piètement en X terminé par des griffes de lion. L’Amour en silence Mobilier national Eros est la divinité du désir amoureux. Il ne rejoint Psyché qu’à la nuit. Pendule de la chambre à coucher de l’Impératrice Joséphine au palais du Petit Trianon, 1809. Lit exécuté à Paris pour Monsieur O, gravure tirée du Recueil de décorations intérieures, de Percier et Fontaine, 1812, Bibliothèque municipale de Besançon 13 VII La piété monarchique de la Restauration Posséder une pendule servait, durant l’Empire, à montrer que l’on était cultivé et surtout que l’on avait du pouvoir et des richesses : “Rideaux et croisées, tout est grand ouvert ; il est de bon ton alors de montrer qu’on a des meubles en acajou, un lit étoffé et une pendule sur la cheminée ; cela donne du crédit chez l’épicier, le marchand de vin et la fruitière” Journal des dames et des modes, 12 septembre 1800. A partir de la Restauration, sous l’influence du Romantisme, les pendules affichent le souci d’élévation de l’âme. Au travers de ces objets, le catholicisme affirme ses ambitions sociales, à une époque où l’Union du Trône et de l’Autel rompt violemment avec la période révolutionnaire et impériale. Portrait de Charles X Tableau de Justin Ouvrié, Musée des Beaux-arts de Dole A partir de 1814, après la tentative de Napoléon de reprendre le pouvoir (les Cent jours), Louis XVIII, frère de Louis XVI, monte sur le trône, inaugurant ainsi la Restauration. Octroyant une charte constitutionnelle à ses sujets, le roi veut réconcilier les Français. Tentant de concilier l’Ancien régime avec l’héritage napoléonien, il est contraint de tempérer les excès de ses partisans. A sa mort en 1824, son frère lui succède sous le nom de Charles X. Le règne de celui-ci est dominé par les “ultras” qui veulent rétablir lois et coutumes de l’Ancien régime. Le catholicisme dévot du Roi indispose le peuple de Paris, volontiers anticlérical. Son abdication, après la Révolution de 1830 (Les Trois glorieuses ), ouvre la voie à la Monarchie de Juillet. La religion Mobilier national Le caractère purement religieux de cette pendule témoigne de l’intérêt retrouvé pour la foi, soutien du pouvoir monarchique. Repérée à l’Exposition des produits de l’Industrie de 1823, cette pendule est livrée au garde Meuble par le fabricant de bronze Choiselat-Gallien, artiste considéré comme un bon chrétien et un bon royaliste. La mauvaise charge, caricature de Louis XVIII, gravure, Bibliothèque municipale de Besançon. Le roi se laisse entraîner par le poids du sac qui contient les “fautes des Bourbons” ; le modeste sac des “bienfaits de Louis XVIII” ne réussit pas à faire contrepoids. “Ainsi qu’après César Auguste remplit Rome, Après Napoléon il fallait plus qu’un homme. Charles ne fut qu’un homme” Victor Hugo, Les Voix intérieures, 1837. Saint Vincent-de-Paul Mobilier national Saint Vincent-de-Paul, aumônier des galères au XVIIe siècle, est à son retour à Paris frappé par la misère. Au XIXe siècle, incarnation de la charité chrétienne, il fait l’objet d’une grande vénération. Le bas-relief reproduit le tableau de Monsiau : Saint-Vincent-de-Paul sauvant des rigueurs de la mauvaise saison de malheureux Enfants abandonnés par leurs Mères.. Vers 1820-25. La pendule a une forme qui rappelle les bornes servant, dès l’Antiquité, à repérer les distances au long des routes et des chemins. On parle de pendule borne. En 1824, Lepère réalise à Paris une vaste opération immobilière, baptisée Saint Vincent de Paul. L’église du nouveau quartier est un compromis entre la basilique romaine et la tradition médiévale. Pour elle, Rude réalise La Vierge au Calvaire dans la tradition des “deuillants” gothiques (voile et lourd drapé). Vierge au calvaire, sculpture de F. Rude, église de Saint Vincent-de-Paul, Paris. 15 VIII Détrompe-toi. Je suis une force qui va ! Agent aveugle et sourd de mystères funèbres ! Une âme de malheur faite avec des ténèbres ! Où vais-je ? Je ne sais. Mais je me sens poussé D’un souffle impétueux, d’un destin insensé. Je descends, je descends, et jamais ne m’arrête. Si parfois, haletant, j’ose tourner la tête, Une voix me dit : marche ! et l’abîme est profond, Et de flamme ou de sang je le vois rouge au fond ! Cependant, à l’entour de ma course farouche, Tout se brise, tout meurt. Malheur à qui me touche !” Monument à Victor Hugo Just Becquet, Besançon, Musée des beaux-arts et d’archéologie Maquette préparatoire au monument de la promenade Granvelle, à Besançon. Au début du XXe siècle, le sculpteur bisontin Becquet utilise encore un langage néoclassique et une inspiration romantique pour représenter le poète, né à Besançon en 1802. L’Homme face à son destin La gloire est fugace et le héros exposé aux vicissitudes. Les Romantiques chantent la fragilité de l’homme, ils épanchent leurs émotions et exaltent l’individu solitaire. A l’image de Julien Sorel, héros du roman de Stendhal Le Rouge et le Noir, la jeunesse rêve des gloires impériales. 16 Victor Hugo, Hernani, 1830 Marius sur les ruines de Carthage Mobilier national Marius, général romain déchu, est contraint de fuir. En 88 avant notre ère, il se réfugie à Carthage, ville d’Afrique du Nord détruite par Rome. Au messager lui transmettant l’ordre de quitter ce pays, Marius, s’exclame : Va dire à ton maître que tu as vu Caïus Marius, errant et proscrit, assis sur les ruines de Carthage. Cette pendule à la composition équilibrée et à la pose conventionnelle évoque la noble simplicité et la calme grandeur. Bronze doré. Achat du Garde-Meuble en 1833, auprès du fabricant de bronzes Ledure, pour le petit salon des Maréchaux, au palais des Tuileries. Anaxagore et Périclès. Mobilier national Le philosophe grec Anaxagore, qui soutient que le soleil est une pierre chaude et que la lune est constituée de terre, est condamné pour impiété. Il décide alors de se laisser mourir. Le voile dont il se recouvre le visage symbolise son renoncement au monde. Aux côtés d’Anaxagore, se trouvait une figure de Périclès aujourd’hui disparue. Celui-ci, personnage politique dominant du Ve siècle athénien, tenta de sauver le philosophe. On le voit sur un des bas-reliefs du socle : il écoute un messager venu l’avertir. Y LA TECHNIQUE La dorure au mercure Elle est d’origine chinoise, mais on l’utilise dès le IIème siècle avant notre ère dans le bassin méditerranéen. La technique paraît simple : on amalgame l’or moulu dans du mercure, jusqu’à l’obtention d’un liquide bon à appliquer sur le bronze. Le mercure une fois évaporé, la dorure est superbe. L’Anglais Elkington dépose en 1836 une série de brevets modifiant et perfectionnant la dorure par immersion. Il est suivi en 1840 par les Français Ruolz puis Roseleur en 1845. IX Louis Philippe d’Orléans est le fils de “Philippe Égalité” qui a voté la mort du roi Louis XVI. La Révolution de 1830 le fait roi des Français. Régnant d’abord modestement, il est appelé Roi Citoyen. Mais sa popularité décline rapidement sous l’effet conjugué du mécontentement politique et de la détérioration des conditions de vie populaire. La crise économique de 1846-1848 suscite une nouvelle révolution qui le renverse et ouvre la voie à la Seconde République. Louis Philippe, “Roi des Français” Gravure, Bibliothèque municipale de Besançon. L’Art troubadour Les créateurs du XIXe siècle, ne limitant pas leur inspiration à l’Antiquité, explorent d’autres périodes. L’Art troubadour, en vogue vers 1820-1830, alimente les créateurs de pendules en légendes et chroniques prises dans l’histoire du Moyen Age et de la Renaissance. 18 Théophile Gautier, parlant de Chateaubriand (mort en 1848) : Il a restauré la cathédrale gothique, rouvert la grande nature fermée et inventé la mélancolie moderne. François Ier et la reine de Navarre Mobilier national François Ier devint roi de France en 1515. Sa sœur, Marguerite d’Angoulême, reine de Navarre, protégea les sciences, les lettres et les arts. Elle reçut à maintes reprises Leonard de Vinci et rassembla les plus grands esprits de son temps. La pendule interprète un tableau de F. F. Richard : François Ier montrant à Marguerite le distique qu’il vient de tracer avec un diamant sur l’un des vitraux du Château de Chambord : “Souvent Femme varie, Bien fol est qui s’y fie”. François Ier et la duchesse d’Etampes Dessin de Johannot, vers 1835 Besançon, Musée des Beaux-Arts et d’archéologie. Le roi est représenté au moment où il remet à une de ses maîtresses un collier symbolisant son élévation au rang de duchesse d’Etampes. Prosper Mérimée, premier inspecteur général des Monuments Historiques, fait le tour de France pour recenser les édifices les plus importants du passé national. A Besançon, il classe le palais Granvelle en 1842. Y LA TECHNIQUE Horloge cathédrale Musée du Temps L’architecture de la fin du Moyen Age, longtemps décriée comme barbare, (d’où son nom de gothique) est réhabilitée avec un enthousiasme qui mène à la gothicomanie. Les Bronziers sont de plus en plus nombreux au début du XIXe siècle. D’après l’Almanach du commerce, ils sont cinquante et un en 1813 et cent onze en 1826. Thomire, Feuchère, Denière, Ledure, Galle sont les plus connus. X Diane chasseresse Mobilier national Fille de Jupiter et de Léda, la déesse romaine Diane est la soeur jumelle d’Apollon. Elle se plaît dans les champs, dans les bois et près des sources. Ses attributs sont l’arc et le carquois, la torche et le croissant de lune. Ici, Diane enlève à Hercule la biche qu’il a capturée, car cette bête lui est consacrée. L’amour de l’Antique Dans la deuxième moitié du XIX siècle, les bronziers sont capables de reproduire mécaniquement les œuvres d’art de toutes dimensions avec la précision la plus complète, l’exactitude la plus rigoureuse, soit dans la même proportion, soit dans une proportion réduite ou étendu (revue L’Artiste, 1838). Les œuvres de l’Antiquité sont les premières à bénéficier de cette technique de reproduction mais elles doivent s’adapter à une clientèle qui la veut à portée de ses moyens financiers et dans des dimensions adaptées à ses appartements. Cette production en série s’accompagne évidemment d’une baisse de la qualité. e 20 Ariane endormie Dans la mythologie grecque, Ariane est la fille de Minos, roi de Crète. Tombée amoureuse du héros athénien Thésée, venu affronter le Minotaure, elle lui donne, une épée et une pelote de laine (“le fil d’Ariane”) pour le guider dans le Labyrinthe. Vainqueur, Thésée s’embarque avec elle en direction d’Athènes mais l’abandonna sur l’île de Naxos. Elle est alors recueillie par Dionysos, le dieu des arts, de la vigne et du vin, qui l’épouse. Livrée au Garde-Meuble en 1865 par F. Barbedienne, cette reproduction d’après la statue antique conservée au musée du Vatican, porte l’estampille : “Réduction mécanique, A. Collas, Breveté”. Le bronze, argenté et doré, est associé au marbre griotte. Le bas-relief du piédestal s’inspire de la Bacchanale du Vase Borghèse. Ariane endormie Musée du Vatican, Rome. Copie d’un original grec, cette statue romaine du IIe siècle de notre ère, est découverte au début du XVIe siècle. Elle est installée au Vatican, dans le jardin du Belvédère. Volée en Italie, comme beaucoup d’autres œuvres par les troupes françaises, l’Ariane endormie est exposée au musée du Louvre entre 1797 et 1815. Aujourd’hui, elle se trouve au musée du Vatican. Le bronze, fourni par le fabricant Denière, est une réduction de la célèbre Diane chasseresse, admirée en France depuis le XVIe siècle et actuellement conservée au Musée du Louvre. Cette statue, copie romaine en marbre d’une statue grecque en bronze, jouissait d’une telle renommée qu’on la copia maintes fois. Pendule mise en place en 1835 dans le salon du duc d’Aumale, au palais des Tuileries. Le vase Borghèse Découvert à Rome au XVIe siècle, ce vase grec en marbre, de 1,71 m de hauteur, représente une frise de Bacchantes. Il a été fréquemment copié. En 1807, son propriétaire, le prince Borghèse, vend à l’Empereur, son beau-frère, l’essentiel de ses collections qui rejoignent alors le Musée du Louvre, alors appelé Musée Napoléon. Y LA TECHNIQUE Le réducteur un outil à reproduire les volumes en les réduisant. Vers 1839, l’ingénieur Collas met au point une machine permettant de faire des copies, des réductions et des agrandissements de statues. Il s’associe à Barbedienne, fondeur remarqué dès les années 1855 pour ses procédés galvanoplastiques appliqués à l’orfèvrerie. Théophile Gautier, sortant de chez lui, pouvait s’exclamer : Sa boutique est un musée et Où est le mal d’apprendre le beau en apprenant l’heure ?. XI Femme indienne chassant le fauve Mobilier national Dans les pendules recevant ces modèles sculptés, la partie mécanique, ou mouvement, est intégrée au socle, pour laisser toute liberté à la sculpture. La sculpture au service de l’industrie L’art antique fournit ses modèles à l’industrie. En retour celle-ci soutient l’art de son époque en encourageant des artistes, à l’affût de l’industriel assez confiant dans le succès bourgeois de cette sculpture romantique pour en faire une entreprise de bronze d’art, créer et lancer des modèles. 22 Le marbre noir met en valeur le bronze doré et patiné, signé du sculpteur Gechter pour le fabricant de bronze Charpentier. Vers 1849. Jument et son poulain Mobilier national Acquise par le Garde-Meuble en 1852 auprès de Denière, fabricant de bronze, le sujet de cette pendule porte la signature de Fratin, sculpteur. la chasse au taureau sauvage 1834, Barye, Musée de Louvre Fratin, travaillant pour offrir des modèles aux industriels du bronze, les conçoit “pour plusieurs usages de décoration”. Il calcule le volume de sa sculpture afin qu’elle puisse être posée “comme ornement soit sur un meuble, soit sur une cheminée, soit sur un socle de pendule” (revue L’Artiste, 1838). Y LA TECHNIQUE Ces pendules de la deuxième moitié du XIXe siècle ont des mouvements de série, estampillés des manufactures : Japy ou Marti à Montbéliard, Pons à Paris ou Saint Nicolas d’Aliermont. Ces mouvements sont équipés d’un système d’échappement très solide, mis au point dans les années 1840-1850 par l’horloger Brocot. Les “clients” choisissaient d’un côté la sculpture, de l’autre le socle contenant le mouvement ; le fabricant assemblait le tout. Au début du siècle, c’était l’horloger qui signait la pendule et coordonnait les différents artisans. C’est désormais le fabricant de bronze qui dirige les équipes. XII z symboles à lire Les chiffres inscrits sur le parchemin tenu par l’empereur sont ceux des deux scrutins essentiels : son élection comme président de la République le 10 décembre 1848, et le plébiscite du 21 novembre 1852 qui ratifie l’avènement de l’Empire. Napoléon III avait choisi la date de son coup d’Etat, (2 décembre 1851) en référence à la date du sacre de son oncle (2 décembre 1804) ainsi qu’à l’éclatante victoire d’Austerlitz du 2 décembre 1805. Ces deux dates sont visibles sur les médaillons. A la gloire de Napoléon III En 1853, pour le grand salon de son château de la Motte-Beuvron, Napoléon III commande une pendule tout entière vouée à sa propagande. Au tout début de son règne, il dresse son tableau d’honneur, incluant sans hésitation la glorification du coup d’Etat (2 décembre 1852). Marbre blanc et bronze doré assurent l’unité d’un décor surabondant. On peut ici évoquer l’éclectisme, mouvement artistique s’intéressant à toutes les époques du passé pour y puiser de quoi satisfaire les goûts les plus variés : Le passé est un porte-feuille de motifs. L’empereur porte le manteau impérial semé d’abeilles. Il est accompagné par des aigles, symboles de l’Empire. Les ancres de marine évoquent les ressources économiques de la France, comme la charrue et la faux, la gerbe de blé et la figure de l’Abondance tenant une bourse. Au centre de la composition, les armoiries impériales, reposant sur des branches de chêne et de laurier, veulent donner une image de force et de longévité. Lors du coup d’Etat de 1851, des centaines de personnes furent tuées, dont des femmes et des enfants, à Paris et surtout en province. Vous ne compreniez point, mère, la politique. Monsieur Napoléon, c’est son nom authentique, Est pauvre, et même prince ; il aime les palais ; Il lui convient d’avoir des chevaux, des valets, De l’argent pour son jeu, sa table, son alcôve, Ses chasses ; par la même occasion, il sauve La Famille, l’Eglise et la Société ; Il veut avoir Saint Cloud plein de roses l’été, Où viendront l’adorer les préfets et les maires. C’est pour cela qu’il faut que les vieilles grands-mères, De leurs pauvres doigts gris que fait trembler le temps, Cousent dans le linceul les enfants de sept ans” Jersey, 2 décembre 1852. Victor Hugo, Les Châtiments, 1853 Apothéose de Napoléon III Dessin de Harang, dit Cabasson, 1857, Musée du château de Compiègne. Louis-Napoléon Bonaparte est le neveu de Napoléon Ier. En 1848, il est élu président de la République française puis empereur des Français sous le nom de Napoléon III. Sous le Second Empire, la France connaît des années de progrès économiques (création d’un système bancaire, développement des chemins de fer, transformation des grandes villes) qui ne sauraient dissimuler la misère des quartiers populaires. En 1870, à la suite de la défaite contre la Prusse, la IIIe République est proclamée. 25 1815 – 1830 Restauration Louis XVIII, frère de Louis XVI, devient roi constitutionnel. Napoléon, exilé à l’île d’Elbe, tente de reconquérir le pouvoir (“les Cent-Jours”). Il est finalement vaincu à Waterloo (juin 1815) et abdique définitivement. Louis XVIII redevient roi jusqu’à sa mort en 1824. 1824-1830 27-29 juillet 1830 1830 – 1848 M 1848-1852 Abolition de la royauté. Louis XVI est guillotiné en janvier 1793 – Ière République. Juillet 1801 Le Premier Consul signe avec la Papauté un concordat qui délivre l’Église – désormais soumise au pouvoir politique – des fureurs de la déchristianisation. 1804 – 1814 Premier Empire Réaction conservatrice : suppression du suffrage universel. Louis Napoléon, non rééligible en 1852, fomente un coup d’Etat le 2 décembre 1851 puis rétablit l’Empire et prend le nom de Napoléon III. 1852-1870 26 Abdication de Napoléon. Second Empire Politique de grands travaux. Le régime, d’abord autoritaire, se libéralise à partir de 1862 : il reconnaît le droit de grève, puis tolère les syndicats. En juillet 1870, l’Empire déclare la guerre à la Prusse. Série de défaites (capitulation de Sedan). Code civil, 1804. A partir de 1803, guerres, d’abord victorieuses (conquête de la moitié de l’Europe), puis défaites (“La Campagne de Russie”). IIe République Une révolte ouvrière en juin 1848 est durement réprimée. En décembre, Louis Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon Ier, est triomphalement élu, pour quatre ans, Président de la République. Début de la Révolution française Par le coup d’État du 18 Brumaire (novembre 1799), Bonaparte, général victorieux à l’immense prestige, se proclame consul puis Ier consul (1800) puis consul à vie (1802), enfin Empereur sous le nom de Napoléon Ier. Avril 1814 “Monarchie de Juillet” Suffrage universel (sauf pour les femmes, évidemment). Liberté de presse et de réunion. Abolition de l’esclavage aux colonies. Chronologie, esquisse 10 août 1792 Révolution dite “Les Trois Glorieuses”. Louis-Philippe, à la tête d’une monarchie constitutionnelle, devient “Roi des français”. Il est renversé en février 1848. La République est rétablie. en savoir plus 14 juillet 1789 Règne de Charles X : limitation des libertés. Septembre 1870 1871 proclamation d’une troisième République qui va durer jusqu’en 1940. Adolphe Thiers noie dans le sang l’insurrection populaire de la Commune (18 mars-28 mai) et devient le premier Président de la Troisième République. 27 Encyclopédie Diderot et d’Alembert les différents métiers nécessaires à la fabrication d’une pendule “Voilà en gros les ouvriers qui travaillent aux pendules ordinaires : 1) Le premier ouvrage que l’on fait faire aux ouvriers qui travaillent aux pendules, est ce qu’on appelle le mouvement en blanc, lequel consiste dans les roues, les pignons et les détentes. Ces ouvriers, que l’on appelle faiseurs de mouvement en blanc, ne font qu’ébaucher l’ouvrage, dont le mérite consiste dans la dureté des roues et pignons ; les dents des roues doivent être également grosses, distantes entre elles, avoir les formes et courbures requises, etc. 2) Le finisseur est celui qui termine les dents des roues, c’est-à-dire qu’il fait les courbures des dents, finit leurs pivots, fait les trous dans lesquels ils doivent tourner, il fait les engrenages, l’échappement, fait faire les effets à la sonnerie ou à la répétition. Il ajuste les aiguilles, enfin les finit ; ajuste les pendules ou lentilles et fait marcher la pendule. Reste au méchaniste, c’est-à-dire l’horloger, de revoir les effets de la machine si, par exemple, les engrenages sont bien faits, ainsi que les pivots des roues, si l’échappement fait parcourir au pendule l’arc convenable, si la pesanteur de la lentille et les arcs qu’elle décrit sont relatifs à la force motrice, les effets de la sonnerie ou répétition. 3) La fendeuse est une ouvrière qui fend les roues des pendules, et ne fait que cela. “Enseigne d’horloger” Paris ou Londres, vers 1760 détail : horloger au travail Collection musée du Temps 4) Le faiseur de ressorts fait les ressorts des pendules ; il ne s’occupe uniquement qu’à cela. Ce que l’on peut exiger d’un faiseur de ressorts, c’est qu’il fasse le ressort fort long et de bon acier, que la lame diminue insensiblement de force depuis le bout extérieur jusqu’au centre, qu’il soit trempé assez dur pour ne pas perdre son élasticité, mais pas assez pour casser. Il faut que l’action du ressort, en se débandant, soit la plus égale possible, que les lames ne se frottent pas en se développant. 5) Il y a des faiseurs de lentilles, de poids, pour faire marcher les pendules : ces ouvriers font aussi les aiguilles d’acier de pendule. 6) Le graveur, qui fait les cadrans de cuivre pour les pendules à secondes. 7) Le polisseur est un ouvrier qui polit les pièces de cuivre du mouvement de la pendule ; le finisseur termine et polit celles d’acier. 8) Les émailleurs ou faiseurs de cadrans de pendules. 9) Les ouvriers qui argentent les cadrans de cuivre. 10) Les ciseleurs font les battes à cartels pour les pendules. 11) Les ébénistes font les boîtes de marqueterie et autres : les horlogers doivent diriger les ébénistes et ciseleurs pour le dessin des boîtes et, comme ils ne sont pas trop en état de le faire par eux-mêmes, il est à propos qu’ils consultent des architectes et de bons dessinateurs. 12) Les doreurs, pour les bronzes des boîtes et des cartels etc. 13) Les metteurs en couleurs : ceux-ci donnent la couleur aux bronzes des boîtes de pendule, aux cartels, cadrans etc. Cette couleur imite la dorure. 14) Les fondeurs pour les roues de pendules et de différentes autres pièces qui s’emploient pour les mouvements. 15) Les fondeurs pour les timbres, les tournent et les polissent.” 29 L’horlogerie en France aux XVIIIe et XIXe siècles pour mémoire... L’horlogerie mécanique devient la technique de pointe du XVIIIe siècle Depuis deux siècles, le grand commerce maritime pousse les horlogers à faire des progrès en précision, les vaisseaux devant pouvoir calculer toujours mieux leur position et arriver à bon port. Par ailleurs, le perfectionnement des mécanismes et des matériaux rend l’horlogerie beaucoup plus fiable. L’horloge participe ainsi à la conquête du monde, au développement des échanges, à l’essor de la bourgeoisie capitaliste. En 1772, Frédéric Japy lance à Beaucourt, près de Montbéliard, la première manufacture de montres: jusque là l’horlogerie était artisanale ; elle est en passe de devenir industrielle. Avoir une montre, avoir l’heure sur soi cessera bientôt d’être un privilège. La Révolution française, qui fait ensuite litière du passé et change le calendrier, la religion, les mesures et laïcise le temps. Avec les philosophes des Lumières et les premiers paléontologues, finit la belle sécurité des anciens historiens et des théologiens, qui fixaient sans la moindre hésitation la date du déluge et l’âge de la Terre. Celui-ci passe de cinq mille ans, selon la Bible, à plusieurs centaines de millions d’années. Appert inventant les conserves, et voici que l’alimentation s’affranchit des saisons... Voilà les premières diligences à horaires minutés : la précision rentre dans les moeurs. Le gouvernement révolutionnaire invite Laurent Mégevand à créer la Fabrique Nationale de Besançon, pour fournir la République en montres... Ainsi naît un nouveau pôle horloger! Au XIXe siècle, le temps devient de l’argent... L’heure devient une unité de mesure du travail. La montre se banalise. C’est le chemin de fer qui va bientôt imposer l’heure unique dans chaque pays. Le télégraphe, puis l’électricité, apportent l’heure de la capitale dans les gares. Avec le téléphone naissent les premiers réseaux. Le temps devient mondial : en 1885, la Terre est divisée en vingt quatre zones, les fuseaux horaires , avec le méridien de Greenwich pour référence. Suivant le mouvement industriel, la montre devient un objet manufacturé de grande production. Avec l’arrivée des machine-outils, ses pièces sont de plus en plus fréquemment fabriquées par des machines. Le mouvement dit Roskopf, né dans les années 1870, rend la montre beaucoup plus simple: elle va devenir un produit de grande série! Besançon s’affirme capitale française de l’horlogerie. La montre devient un outil de contrôle indispensable dans l’entreprise, pour le salarié comme pour son patron : l’heure est désormais une unité de travail. Mise au point à la fin du XIXe siècle dans des usines américaines, le taylorisme instaure le chronométrage du travail et parcellise les tâches, débouchant ainsi que le travail à la chaîne. La gestion du temps devient ainsi tyrannique et obsédante. Mouvement en blanc, fabriqué par la Maison Marti, à Montbéliard. Collection musée du Temps Ce genre de mécanisme était produit pour une clientèle d'horlogers, qui se chargeaient de la finition et de la mise en œuvre dans les pendules. 31 Ce fil d’Ariane a été conçu et rédigé par Pascal Brunet, Joëlle Mauerhan, Agnès Vannet, avec l’aide de Maguy Scheid Le travail a été largement appuyé sur les recherches de Marie-France Dupuy-Baylet Editions MUSEE DU TEMPS Besançon Directeur de la publication : Jean-Louis Fousseret Un grand merci pour leur aide à : la bibliothèque Municipale, le musée des Beaux-arts, l’office du tourisme de Besançon et les équipes du Mobilier national et du musée du Temps. Les Amis des musées de Besançon et l’Association des amateurs d’horlogerie ancienne (AFAHA) ont tout particulièrement aidé au financement du présent livret. Qu’ils en soient vivement remerciés. Photographies : Mobilier national (Isabelle Bideau, Françoise Baussan) Musée des Beaux-arts et d'archéologie de Besançon (Charles Choffet) Bibliothèque municipale de Besançon (Charles Choffet) Musée du Temps Musée du Louvre (RMN) Musée des Beaux-arts de Dole Musée du château de Compiègne Musée du Vatican Administration : Julie Nuyts, Jean-Michel Llaona Scénographie : Didier Blin Graphisme : Saluces Musée du Temps 96 Grande rue 25000 Besançon Tél. 03 81 87 81 50 Communication : Adrienne Bergelin Service des visites : Bernard Roy Besançon, mai 2006 dépôt légal juillet 2006 ISBN 2-9508625-2-7