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NIETZSCHE Philosophe du Soupçon
NIETZSCHE a vécu au XIXème siècle (1844 -1900).
NIETZSCHE n’a pas eu de formation philosophique universitaire. C’est un
PHILOLOGUE et cependant NIETZSCHE est un des plus grands philosophes du
XXème siècle.
Il voulait devenir musicien, il va vibrer au son de la musique et des chœurs de la
TRAGEDIE grecque, TRAGEDIE qui représente pour lui l’APOGEE de la Culture
grecque. Pour NIETZSCHE l’aube de la PHILOSOPHIE se confond avec la
TRAGEDIE : c’est l’âge d’ESCHYLE et des pré platoniciens, HERACLITE et
PARMENIDE. Ce sera en substance la matière de son premier ouvrage «La
NAISSANCE de la TRAGEDIE » parue en 1872. Les forces lyriques sont incarnées
par le dieu DIONYSOS. SOCRATE, au nom du savoir et de la logique étouffe ces
forces, c’est un démon logique et destructeur.
NIETZSCHE condamne aussi PLATON, le disciple, qui pour fuir le REEL que
SOCRATE lui avait rendu odieux, va inventer la THEORIE des IDEES (le VRAI, le
BEAU, le BIEN), drame philosophique avec les IDEES en guise de personnages.
Comme PLATON est cependant DRAMATURGE, à travers ses DIALOGUES, et
même le plus grand prosateur grec, NIETZSCHE lui reconnaît une dimension
ARTISTIQUE et ne le condamne que partiellement.
En effet, PLATON est accusé de lâcheté devant le REEL, de HAINE du corps, de
CHRISTIANISME aggravé. (N’oublions pas que le ROYAUME de DIEU n’est pas
de ce monde).
RESUMONS
1 - la philosophie est née en GRECE sur le cadavre de la TRAGEDIE (SOCRATE
PLATON).
2 - le geste philosophique majeur de NIETZSCHE est donc le « RENVERSEMENT
du PLATONISME ».
C’est la lecture de HEIDEGGER et de DELEUZE.
Nous avons le couple SOCRATE, démon cynique, PLATON, serviteur
schizophrène. Mais comme SOCRATE n’a pas laissé d’écrits, ne serait-ce pas lui
qui serait platonicien ? Enfin ne dit-on pas que PLATON a tué le père, en
l’occurrence PARMENIDE, ce qui en clair veut dire qu’il réhabilite en partie le
REEL.
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NIETZSCHE est à la philosophie ce que PICASSO est à la peinture. Il anticipe
toutes les ruptures à venir, réalisant une gigantesque déconstruction, mais il
fera de la philosophie par excellence, faisant de celle-ci son « TEMPS VECU
DANS LA PENSEE », selon la définition de HEGEL. Ce qui veut dire avoir
« l’INTELLIGENCE DE CE QUI EST » (Luc FERRY).
Le temps est celui de la MORT de DIEU, celui du déboulonnage des IDOLES,
celui de la PHILOSOPHIE au MARTEAU, et le travail de NIETZSCHE est bien la
critique des VALEURS et des IDEAUX traditionnels de la MORALE, de la
METAPHYSIQUE classique et de la RELIGION.
NIETZSCHE se veut un HABILE entre les MODERNES, mais estime-t-il, il faut
savoir combien les ANCIENS se donnaient du mal pour apprendre à parler et
écrire, et combien les MODERNES s’épargnent une telle peine. Et de fait, il aura
fallu un siècle pour apprendre à le lire, ceci étant lié à l’absence de système
jouant le rôle de référence, ce que l’on trouve par exemple chez HEGEL.
De plus, la pensée de NIETZSCHE évolue très vite : de 1872 à 1888, en seize ans,
il va écrire quinze livres, des poèmes et des compositions musicales. Cette
évolution ne se fera pas sans rupture de continuité. Cette pensée atteint le
tissu même de la vie et se mêle à elle nous dit Giorgio COLLI, philologue et
philosophe. Le lecteur se sent scruté et peut de ce fait rejeter cette impression,
ou alors il participe ardemment. Elle laisse son empreinte dans l’esprit avant
que dans la raison.
Pour le vrai philosophe la CONNAISSANCE est CREATION, sa volonté de vérité
est VOLONTE de PUISSANCE. Il ne fuit pas la VIE au profit de l’objectivité. Il lui
faut donc du COURAGE et les deux VERTUS COROLLAIRES : SINCERITE et
PROBITE, nécessaires pour faire face au caractère effroyable de la VIE.
AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA, PAR DELA le BIEN et le MAL.
Ces deux vertus, SINCERITE et PROBITE sont indispensables pour passer du
terrain esthétique, du sentiment tragique au terrain plus philosophique de
l’esprit tragique.
Ainsi lutter pour une VERITE, donc pour la valeur objective de la connaissance,
ne rend pas meilleur et lutter pour la VERITE, faire preuve de SINCERITE permet
de se dépasser. C’est le reproche fait à SOCRATE pour qui la SINCERITE tombe
sous la coupe de la logique. De même l’HISTOIRE n’aide pas les personnes à se
libérer, à être plus sincères vis-à-vis d’elles-mêmes, ce faisant elle aggrave la
misère intérieure de l’homme moderne.
Il y a une opposition entre le regard « grec » et le regard « protestant » dans
lequel a vécu le jeune NIEZTSCHE, dont le père était pasteur.
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SCHOPENHAUER, EDUCATEUR de NIETZSCHE
SCHOPENHAUER est le premier philosophe contemporain. Il est le
précurseur de ceux que Paul RICOEUR appellera les philosophes du soupçon :
MARX, NIETZSCHE et FREUD. En fait, c’est le premier de ces philosophes. Son
ouvrage majeur s’intitule « Le MONDE COMME VOLONTE et
REPRESENTATION » (1819) Il invente la pratique généralisée du soupçon, ce
que NIETZSCHE appellera la GENEALOGIE, à savoir l’idée que derrière les
phénomènes conscients, il y a le dessous de l’ICEBERG, les SOUTERRAINS (de
DOSTOÏEWSKI), l’INCONSCIENT. La GENEALOGIE est l’attitude ultra critique de
tout ce qui est conscience claire du monde de la représentation (§289 de PAR
DELA le BIEN et le MAL). Parallèlement, la VOLONTE (WILLE) est le règne des
forces aveugles inconscientes.
SCHOPENHAUER passe pour le philosophe du pessimisme ; il est
effectivement pessimiste méthodologiquement sur le plan philosophique, mais
il ne l’est pas sur le plan du vécu psychologique. En fait, il prépare un nouvel
optimisme, un accès solide au bonheur, à une SAGESSE désillusionnée, suivant
l’héritage du BOUDDHISME qu’il a découvert et le passionne. Il a d’ailleurs écrit
un ART du BONHEUR. Il parle d’EUDEMONIE, de l’ART d’apprendre à vivre.
Ce BONHEUR se confine à l’ATARAXIE, c’est-à-dire l’absence de souffrance, la
sérénité. Sur le plan de la RAISON, SCHOPENHAUER déconstruit l’IDEE de
CAUSALITE, comme le fait HUME. Selon celui-ci, toute explication causale fait
intervenir un raisonnement par INDUCTION et a valeur de CROYANCE.
KANT dit la même chose dans la troisième antinomie de la CRITIQUE de
la RAISON PURE : le principe de causalité fait remonter à un état antérieur : la
causalité est donc par définition une REGRESSION à l’INFINI. Toute
représentation repose sur du vent, elle est sans fondement (GRUNDLOS), un
souterrain renvoie à un autre souterrain, le tout reposant sur l’océan du
VOULOIR (SCHOPENHAUER). Toute explication scientifique est un bouchon
flottant sur cet OCEAN.
Le principe de RAISON s’enracine dans l’absence totale de RAISON. C’est
l’ABSURDE, le TRAGIQUE au CŒUR du MONDE. Ce n’est pas seulement un
raisonnement imparfait comme l’induction qui est visé comme chez HUME,
mais la RAISON elle-même et ce par KANT lui-même suivi par SCHOPENHAUER
puis par NIETZSCHE. On sait qu’à cette absence de CAUSE PREMIERE, LEIBNIZ
posera DIEU comme tel. Mais alors de deux choses l’une : ou DIEU est sans
cause, c’est l’IRRATIONNEL, ou DIEU est cause de soi (SPINOZA), ce qui est
absurde : cf le Baron de MÜNCHHAUSEN qui se tire par les cheveux pour sortir
du marais où il patauge avec son cheval.
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Cette absurdité du monde, provoquant l’étonnement philosophique de
SCHOPENHAUER sera reprise par HEIDEGGER dans son analyse de l’ANGOISSE.
Ce sera la NAUSEE de SARTRE.
TROIS CLES de LECTURE de NIETZSCHE
1 NIETZSCHE HERITIER des LUMIERES
Il radicalise la critique de la RELIGION et de la METAPHYSIQUE inaugurée au
XVIIIème siècle par VOLTAIRE. Il se reconnaît comme continuateur des
LUMIERES dans la préface d’AURORE (1881). Il leur reproche cependant de ne
pas aller assez loin dans la cassure des IDOLES que sont les illusions de la
RELIGION et de la METAPHYSIQUE, soit disant idéaux supérieurs qui ne servent
qu’à plonger l’humanité dans le NIHILISME, concept central chez NIETZSCHE.
Mais les LUMIERES n’ont pas été assez DECONSTRUCTRICES, elles n’ont pas
pratiqué suffisamment la « PHILOSOPHIE AU MARTEAU ». Elles ont même créé
de nouvelles idoles : le PROGRES, le SCIENTISME, la DEMOCRATIE, les DROITS
de l’HOMME. Donc NIETZSCHE radicalise l’esprit critique des LUMIERES.
2 Seconde INTERPRETATION (DELEUZE)
NIETZSCHE va plus loin que la critique des Lumières : il déconstruit
l’HUMANISME, la MODERNITE. Ainsi FOUCAULT voit en NIETZSCHE le principal
philosophe de la MORT de DIEU mais aussi le philosophe de la MORT de
l’HOMME, tenant les DROITS de l’HOMME et le PROGRES pour IDOLES à
détruire.
3 Lecture de HEIDEGGER. La plus profonde
NIETZSCHE serait le penseur de la TECHNIQUE de la RAISON INSTRUMENTALE :
la VOLONTE de PUISSANCE ne veut rien de précis, ni bonheur, ni liberté :
- la volonté du capitalisme ne vise que son propre accroissement
- la force pour la force
- l’intensité pour l’intensité
- la maîtrise pour la maîtrise.
La LOGIQUE est dé finalisée (sans OBJECTIFS) elle est RAISON INSTRUMENTALE.
Nous avons donc chez NIETZSCHE les concepts de NIHILISME, de VOLONTE de
PUISSANCE, de RAISON INSTRUMENTALE, de MONDE de la TECHNIQUE.
L’écriture est apparemment facile car elle est poétique, elle est économe en
jargon mais terriblement cryptée.
Mais voyons d’abord la notion d’INSTINCT (ou TRIEB), la philosophie de
NIETZSCHE étant une philosophie de l’INSTINCT.
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HISTORIQUE de l’INSTINCT NIETZSCHEEN
NIETZSCHE utilise deux mots : TRIEB et INSTINCT.
Le TRIEB est une irruption dynamique.
L’INSTINCT est une force calme, continue.
Le TRIEB est lié au STURM und DRANG (en français Tempête et Passion/Elan) et
le noyau de la notion est issu du PREROMANTISME allemand. Il est le MOTEUR
qui agit en la réalité humaine et qui s’investit en discours poétique. Il est donc
lié à l’ESTHETIQUE.
NIETZSCHE, dans sa leçon inaugurale à BÂLE, sur HOMERE et la PHILOLOGIE
classique (1869) va présenter celle-ci (la PHILOLOGIE) comme un ensemble
d’INSTINCTS SCIENTIFIQUES et ETHICO-ESTHETIQUES disparate donnant
l’impression d’une unité apparente.
Ces instincts sont mélangés : ainsi une activité unitaire en apparence est liée à
une foule d’instincts. Le MÊME recouvre de nombreux instincts, non fondus.
La PHILOLOGIE est ainsi présentée comme une science de la NATURE cherchant
à sonder le plus profond instinct de l’HOMME.
L’ INSTINCT de PAROLE (SPRACHINSTINKT)
TRIEB et INSTINCT sont les leviers des apparences, la PHILOLOGIE va les
actualiser sous forme de CONNAISSANCE, de SCIENCE humaine.
SCHILLER (que reprend NIETZSCHE) fonde son anthropologie (science de
l’homme) sur le SOI (SACHTRIEB), allant vers le réel, et le FORMTRIEB, allant
vers la forme.
Ils sont sources de KUNSTTRIEB (instinct de l’ART) qui est perçu comme un
langage prenant forme dans la réalité, par exemple la création artistique.
L’instinct est naturaliste, il vient de la NATURE. C’est une PUISSANCE (MACHT)
qui se matérialise soit en style APOLLINIEN, soit en style DIONYSIAQUE.
NIETZSCHE fait l’analogie entre les deux instincts SACHTRIEB et
FORMTRIEB et la dualité des sexes. Pour lui, SOCRATE qui nie l’instinct est un
MONSTRE.
Il va aussi déplorer les faits de l’INSTINCT de CONNAISSANCE
(ERKENNTNISTRIEB) aboutissant à la Science, de l’instinct de culture, de
l’instinct de VERITE, trop imprégnés de RAISON.
Rappelons que la définition standard de la PHILOLOGIE est l’établissement du
texte authentique, de son contenu historique et socioculturel, à propos de ce
qui a survécu d’une civilisation de l’écriture (Alain REY).
Le TRIEB de SCHILLER (Instinct)
Le WILLE (VOLONTE ) de SCHOPENHAUER
Les SOUTERRAINS de DOSTOÏEWSKI
La GENEALOGIE de NIETZSCHE
Correspondent à l’INCONSCIENT, thème central de FREUD et de LACAN.
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