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Sujet d'actualité droit bancaire et financier, mai 2015, www.altenburger.ch
Modifications de la LBA et échange automatique de renseignements: conséquences
de la nouvelle loi
L’introduction du délit fiscal qualifié comme infraction préalable au blanchiment d’argent, a provoqué, comme
nous l’avons vu, des changements dans divers textes législatifs suisses mais elle apportera également des
modifications dans la place financière en particulier pour les intermédiaires financiers dans le cadre de la Loi
sur le Blanchiment d’Argent (LBA). Plus globalement, l’impact atteindra d’autres acteurs du secteur financier
suite à la volonté systématique du Conseil fédéral de parvenir à l’échange automatique de renseignements et à
l’assistance administrative au niveau international.
1. Intermédiaires Financiers
La décision du Conseil fédéral de modifier la LBA dans la foulée de l’adoption des Recommandations du GAFI
aura d’importantes conséquences pour les intermédiaires financiers. Cette initiative est un exemple supplé-
mentaire de ce que l’on appelle le “Swiss finish”, soit la volonté des autorités fédérales d’aller toujours un peu
plus loin que ce qui était attendu. Dès lors, les intermédiaires financiers devront s’impliquer dans la vérification
de la conformité fiscale de leurs clients. En plus du devoir déjà existant d’identification du cocontractant et
de l’ayant droit économique d’une personne morale, l’intermédiaire financier devra désormais comprendre la
justification de (i) la transaction financière, (ii) l’ouverture et l’utilisation du compte en Suisse, (iii) la constitu-
tion d’une structure de sociétés et sa réalité économique, afin de s’assurer que l’origine des fonds n’est pas le
résultat d’une infraction préalable au blanchiment d’argent.
L’introduction de nouvelles dispositions, dans la LBA et le CPS, obligera l’intermédiaire financier à examiner les
fonds déposés chez lui ou gérés par lui sous l’angle fiscal et à déterminer si le seuil annuel de CHF 300’000.-
de soustraction fiscale pourrait être atteint. La déclaration du client ne suffira pas. Afin de respecter ces
exigences, une connaissance approfondie de la situation fiscale de chaque client et de la réglementation fiscale
de son pays de résidence fiscale sera nécessaire. Les vérifications de l’intermédiaire financier se feront selon
une analyse des risques et par l’intermédiaire d’un catalogue d’indices et de signes, tels que les transferts en
espèces, les investissements dans des produits exonérés d’impôts, le refus de recevoir toute correspondance
ou des extraits de compte en provenance de l’intermédiaire financier, le fait que le client soit une PPE (Personne
Politiquement Exposée) et ainsi de suite. Au moindre doute, l’intermédiaire financier doit demander des éclair-
cissements au client et être totalement convaincu ; si ce n’est pas le cas il peut (art. 305ter, para 2 CPS) ou doit
(art. 9 LBA) communiquer un rapport au MROS, ce qui le libèrera de toute responsabilité civile et pénale.
Les obligations décrites ci-dessus seront applicables très largement parmi les intermédiaires financiers, qu’il
s’agisse de banques, de gérants de fortune indépendants, de gestionnaires de fonds ou d’avocats agissant
comme intermédiaires financiers, et dépasseront largement ce qui sera demandé dans d’autres pays euro-
péens. Les intermédiaires financiers deviendront de ce fait une extension des autorités fédérales et cantonales
de lutte contre le blanchiment d’argent et devront investir dans la création de départements de vérification de
la conformité, quelle que soit la taille de leur structure. Par ailleurs, ces changements affecteront également les
clients, par l’augmentation des coûts assumés par les intermédiaires financiers et la disparition presque totale
du secret bancaire. Finalement, nous pourrons nous attendre à une augmentation substantielle des dénoncia-
tions au MROS.