BULLETIN
Litiges et résolution de conflits
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1
6 mars 2012
Richard c. Time Inc. : le consommateur « crédule et inexpérimenté »
ressuscité
Par : Enrico Forlini, Raphaël Lescop et Frédérique Dupuy | Montréal al
Le 28 février 2012, la Cour suprême du Canada a rendu un arrêt attendu depuis fort longtemps en droit québécois de la consommation et
a clarifié plusieurs questions qui faisaient l'objet de controverses en jurisprudence et doctrine. À titre d'exemples, la Cour a établi
clairement :
Le 28 février 2012, la Cour suprême du Canada a rendu un arrêt attendu depuis fort longtemps en droit québécois de la consommation et
a clarifié plusieurs questions qui faisaient l'objet de controverses en jurisprudence et doctrine. À titre d'exemples, la Cour a établi
clairement :
qu'une publicité commerciale doit être appréciée de la perspective du consommateur « crédule et inexpérimenté » et non pas de la
perspective du consommateur « moyennement intelligent, moyennement sceptique et moyennement curieux »;
qu'une publicité commerciale doit être appréciée de la perspective du consommateur « crédule et inexpérimenté » et non pas de la
perspective du consommateur « moyennement intelligent, moyennement sceptique et moyennement curieux »;
qu'une poursuite civile en vertu de l'article 272 de la Loi sur la protection du consommateur (« L.p.c. ») ne peut être entreprise par une
personne ayant uniquement pris connaissance d'une publicité trompeuse. Cette personne doit en outre avoir conclu un contrat de
consommation en lien avec cette publicité;
qu'une poursuite civile en vertu de l'article 272 de la Loi sur la protection du consommateur (« L.p.c. ») ne peut être entreprise par une
personne ayant uniquement pris connaissance d'une publicité trompeuse. Cette personne doit en outre avoir conclu un contrat de
consommation en lien avec cette publicité;
qu'un consommateur jouissant d'un recours en vertu de l'article 272 L.p.c. a le choix de demander uniquement une condamnation à des
dommages-intérêts punitifs. Ce chef de dommages est autonome et distinct et peut être octroyé par le tribunal, même en l'absence
d'une condamnation à des dommages-intérêts compensatoires.
qu'un consommateur jouissant d'un recours en vertu de l'article 272 L.p.c. a le choix de demander uniquement une condamnation à des
dommages-intérêts punitifs. Ce chef de dommages est autonome et distinct et peut être octroyé par le tribunal, même en l'absence
d'une condamnation à des dommages-intérêts compensatoires.
Le présent bulletin vise à dégager les enseignements principaux de cet arrêt-clé qui – nous le prédisons – sera désormais invoqué dans
tous les litiges en matière de droit de la consommation au Québec. Il y a donc lieu de le maîtriser le plus rapidement possible.
Le présent bulletin vise à dégager les enseignements principaux de cet arrêt-clé qui – nous le prédisons – sera désormais invoqué dans
tous les litiges en matière de droit de la consommation au Québec. Il y a donc lieu de le maîtriser le plus rapidement possible.
Les faits Les faits
Les faits remontent à 1999. Jean-Marc Richard reçoit du magazine Time une lettre portant bien en évidence la mention suivante écrite en
haut de page : « OUR SWEEPSTAKES RESULTS ARE NOW FINAL: MR JEAN MARC RICHARD HAS WON A CASH PRIZE OF
$833,337.00! ». En lisant plus attentivement, on constate toutefois que cette mention n'est que la suite d'une phrase dont le début, écrit de
façon discrète, en lettres minuscules et caractère régulier, se lit comme suit : « If you have and return the Grand Prize winning entry in time
and correctly answer a skill-testing question, we will officially announce that … ».
Les faits remontent à 1999. Jean-Marc Richard reçoit du magazine Time une lettre portant bien en évidence la mention suivante écrite en
haut de page : « OUR SWEEPSTAKES RESULTS ARE NOW FINAL: MR JEAN MARC RICHARD HAS WON A CASH PRIZE OF
$833,337.00! ». En lisant plus attentivement, on constate toutefois que cette mention n'est que la suite d'une phrase dont le début, écrit de
façon discrète, en lettres minuscules et caractère régulier, se lit comme suit : « If you have and return the Grand Prize winning entry in time
and correctly answer a skill-testing question, we will officially announce that … ».
Le même procédé de rédaction est repris à quatre autres reprises dans la lettre. Les mentions en lettres majuscules, en caractère gras et
en exergue sont les suivantes : « we are now authorized to pay $833,337.00 in cash to Mr Jean Marc Richard! »; « a bank cheque
for $833,337.00 is on its way to —— st! »; « you will forfeit the entire $833,337.00 if you fail to respond to this notice! »; « latest cash prize
winners : […] Mr Jean Marc Richard, $833,337.00, authorized for payment ». Toutefois, comme pour la mention initiale, ces extraits sont
tous précédés d'un début de phrase, écrit discrètement, ayant pour effet de rendre conditionnel les extraits accrocheurs suscités. En
somme, par cette lettre, M. Richard n'est qu'invité à participer à un tirage.
Le même procédé de rédaction est repris à quatre autres reprises dans la lettre. Les mentions en lettres majuscules, en caractère gras et
en exergue sont les suivantes : « we are now authorized to pay $833,337.00 in cash to Mr Jean Marc Richard! »; « a bank cheque
for $833,337.00 is on its way to —— st! »; « you will forfeit the entire $833,337.00 if you fail to respond to this notice! »; « latest cash prize
winners : […] Mr Jean Marc Richard, $833,337.00, authorized for payment ». Toutefois, comme pour la mention initiale, ces extraits sont
tous précédés d'un début de phrase, écrit discrètement, ayant pour effet de rendre conditionnel les extraits accrocheurs suscités. En
somme, par cette lettre, M. Richard n'est qu'invité à participer à un tirage.
Pour une meilleure compréhension, consultez la version intégrale de cette lettre
Pour une meilleure compréhension, consultez la version intégrale de cette lettre (disponible en anglais seulement).
En lisant la lettre, M. Richard n'y voit que du feu et est convaincu d'avoir gagné la somme de 833 337 $. Il retourne son coupon-réponse à
Time et décide en même temps de s'abonner au magazine pour une période de deux ans (le coupon-réponse prévoyait un espace à cette
fin). M. Richard reçoit son premier magazine un mois plus tard, mais attend en vain son prix en argent. Il contacte alors un représentant du
service marketing chez Time qui l'informe que la lettre qu'il avait reçue n'annonçait qu'un tirage et que son coupon-réponse ne portait pas
le numéro gagnant. Il ne recevra pas 833 337 $.
Le recours de M. Richard
Estimant avoir été floué, M. Richard entreprend un recours devant la Cour supérieure à l'encontre de Time afin de réclamer son prix ou,
subsidiairement, un montant équivalent au prix à titre de dommages compensatoires et exemplaires. La Cour supérieure accueille le
recours en partie et lui octroie 1 000 $ à titre de dommages-intérêts compensatoires (par. 21) et 100 000 $ à titre de dommages-intérêts
punitifs (par. 23).