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Pr. Claude Bonnet
Université Louis Pasteur (Strasbourg 1)
Faculté de Psychologie et des
Sciences de l’Education
Histoire de la Psychologie
Scientifique
Le XXme siècle
L2 CSD HEP 2005-2006
2.1 Etat des lieux
A l’aube du XXme siècle, la psychologie scientifique s’est installée en
se séparant de la philosophie et en adoptant les méthodes des
sciences naturelles (expérimentation). En France et en Angleterre, elle
n’a pas encore reçu une reconnaissance officielle.
Cependant, de vifs débats concernent l’utilisation de l’introspection
comme méthode expérimentale :
toute activité mentale est consciente, ce qu’admettait Descartes
l’introspection nous donne une connaissance vraie de ce qui se
passe en nous aussi vraie que la connaissance qui nous vient des
sens (perception)
l’introspection fonde une connaissance vraie du moi comme la
perception fonde une connaissance vraie du monde extérieur.
Les résultats des expérimentations avec cette méthode sont peu
concordants.
Elle ne permet pas d’étudier les mécanismes psychologiques des
êtres sans langage (jeunes enfants, animaux).
La psychologie change d’objet
A l’aube du XXme siècle, tout un courant de la psychologie
scientifique va abandonner l’étude de la conscience.
Seul le comportement est observable de l’extérieur et la science ne
peut s’occuper que des évènements observables et publics.
Les modèles mécanistes construits sur la base de l’arc réflexe
peuvent expliquer l’activité humaine.
La critique de l’introspection comme méthode expérimentale est à
l’origine d’une nouvelle doctrine: le béhaviorisme. Celui-ci va chercher
à réaliser l’un des objectifs de toute science : établir des lois.
Edward L. Thorndike (1874-1949)
Animal intelligence : Experimental studies (1898-1901)
Américain, ancien élève de Wundt, se détourne de l’étude de la
conscience. Etudie la manière dont un animal sort d’une boite à
problème :
- Établissement de connexions stimulus-
réponse.
- Loi de l’effet : force des connexions
renforcée si satisfaction.
- La récompense est le facteur principal
de l’apprentissage.
- Loi de l’exercice : plus l’animal fait
l’expérience d’une connexion stimulus-
réponse, plus forte elle devient.
Thorndike est un des précurseurs du
béhaviorisme.
2.2 Le béhaviorisme
redéfinition de l’objet de la psychologie
L’objet de la psychologie sera le comportement (Ivan P. Pavlov (1849-
1936), Henri Piéron (1881-1964), John B. Watson (1878-1958).
Sechenov (1829-1905), russe: la psychologie doit être étudiée avec les
méthodes objectives de la physiologie (les réflexes).
Pavlov I. russe, spécialiste de la digestion, découvre les réflexes
conditionnés vers 1897. Présentation internationale, Madrid 1903.
Piéron H. (1908) L’évolution du psychisme et l’étude objective du
comportement. (cf. Psychologie Française, 2000, vol. 45).
Watson J.B. (1913) Psychology as the behaviorist views it.
Psychological Review. Spécialiste du comportement animal, il assigne à la
psychologie le but de prédire et contrôler le comportement observable.
Principes du béhaviorisme
Seul le comportement est observable.
“Pour le béhavioriste, la psychologie est une science naturelle
purement objective” (Watson).
Le but de la psychologie est de dégager les relations stimulus-
réponse (S-R) sans faire appel à des concepts mentalistes.
Permet l’étude du psychisme des enfants avant l’apparition du
langage et des animaux.
Développement de méthodes expérimentales objectives (rejet de
l’introspection).
Applications possibles principalement dans la pédagogie.
Les apports principaux concernent l’apprentissage et le
conditionnement Edward Thorndike (1874-1949) loi de l’effet, Ivan P.
Pavlov (1849-1936) conditionnement répondant, Burrhus F. Skinner
(1904-1989 ) conditionnement opérant.
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Ivan P. Pavlov (1849-1936)
conditionnement répondant
Etudiant les mécanismes de la digestion, Pavlov découvre que ses
chiens ne salivent pas qu’à la vue de la nourriture (réflexe
inconditionnel), mais aussi pour d’autres stimuli associés à la
nourriture.
Il parlera de réflexe psychique et plus tard de réflexe conditionné.
Habituation
n’entraîne pas de salivation
Stimulus Conditionnel (neutre) Aucune réponse
cloche
Déroulement d’un conditionnement
Avant Conditionnement
nourriture entraîne salivation
Stimulus Inconditionnel (SI) Réponse Inconditionnelle (RI)
Pendant le Conditionnement
suivie de la nourriture entraîne salivation
Stimulus Conditionnel(SC) Stimulus Inconditionnel Réponse Inconditionnelle
cloche
Après Conditionnement
entraîne salivation
Stimulus Conditionnel Réponse Conditionnée (RC)
cloche
Caractéristiques du Conditionnement
Le conditionnement va sa
manifester par une phase
d’acquisition (apprentissage)
pendant les couplages SC + SI.
Lorsque SI cesse d’être
présenté, il y a diminution
progressive de la RC
(extinction).
L’extinction est un phénomène actif (inhibition) et non un oubli passif
comme le montrent les récupérations spontanées de la RC.
Généralisation des stimuli proches du SC non présentés pendant
l’acquisition évoquent la RC.
Si ces stimuli généralisés ne sont jamais renforcés par la présentation du
SI, il y a discrimination.
Burrhus F. Skinner (1904-1989)
conditionnement opérant
En 1928, Jerzy Konorski (1903-1973) en Pologne décrit une autre forme de
conditionnement : le conditionnement instrumental (Conditioned Reflexes
and Neuron Organization, 1948) notion déjà présente chez Thorndike
Dans cette lignée, B. Skinner va développer ce conditionnement et
l’appeler conditionnement opérant. Le renforcement (nourriture) est fourni
seulement si l’animal presse une clef réponse dans certaines conditions.
Boites de Skinner
Conditionnement opérant
1) une réponse Renforcement (ou stimulus inconditionnel)
2) Stimulus discriminatif (=Conditionnel) Renforcement
Programmes de Renforcement
- Rapport Fixe (fixed ratio) : seules les réponses apparaissant après n
réponses successives sont renforcées (ex/ FR15).
- Intervalle Fixe (fixed interval) : le renforcement n’est disponible
qu’après un intervalle temporel fixe après la présentation du stimulus
discriminatif (ex. FI20).
-Rapport Variable (variable ratio) ressemble à RF, mais le nombre de
réponse est ici une moyenne VR15 peut varier de 3 à 22.
-Intervalle Variable (variable interval) ressemble à FI, mais l’intervalle
temporel est une moyenne.
Le dogme béhavioriste prôné par Watson excluait tout recours à des
concepts « mentalistes » tels que motivation, conscience, attention
etc.
On ne devait étudier que des relations entre les observables : stimuli
et réponses. R = f (S).
Plusieurs auteurs, pourtant considérés comme béhavioristes, ont à
l’évidence transgressé le dogme et fait appel dans leurs modèles ou
leur théorie à des concepts « mentalistes ».
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Clark Hull (1884-1952)
Hull considérait qu'entre S et R il fallait prendre en compte des
variables intermédiaires (ou theoretical constructs) en nombre limité
(principe d'économie) telles que la force de l'habitude (habit
strength) ou le niveau de besoin (drive level) que l'on peut inférer à
partir des observations S-R. Hull a formalisé sa théorie (Principles of
behavior, 1943) sous une forme mathématique.
Récupération d’une
habitude positive
(H)
Récupération d’une
inhibition
conditionnée
(SIR)
Multiplie H par
motivation (D)
Ajouter la fatigue
(IR)
Calcul de la
différence Seuil
stimulus conditionnel
Trace
interne du
stimulus
Vitesse
Amplitude
R
Force de la réponse E = (H x D) – (SIR+ IR)
Edward C. Tolman (1887-1955)
Edward C. Tolman (1889-1959) (Purposive behavior in animal and men,
1932).
Propose une théorie intentionnelle (purposive) faisant appel à de nombreux
concepts cognitifs comme connaissances, pensée, planification, inférence
etc. Connaissance de l'environnement organisée en cartes cognitives.
L’apprentissage est fonction de la motivation (faim) et de la récompense.
Carte mentale
Temps 1 : le rat explore librement le
labyrinthe.
Temps 2 apprentissage : toutes les
allées sont libres, le rat choisit l’allée
1.
Temps 3 l’allée 1 est fermée, le rat
choisit de passer par l’allée 2.
Temps 4 les allées 1 et 2 sont fermées,
le rat passe par l’allée 3. Chambre
de départ
BUT
Conclusion : pendant le temps 1, le rat a appris une carte du labyrinthe
qui lui permet de changer de chemin lorsque le plus court n’est plus
disponible.
Renforcement
Pour Thorndike (1874-1949) c'est l'effet de la réponse, la satisfaction
qui l'accompagne qui renforce la connexion S-R.
Pour Ewin R. Guthrie (1886-1959) c'est la simple contiguïté temporelle
qui renforce la probabilité de la RC.
Skinner qui est un des béhavioriste les plus orthodoxes a une position
originale. Il distingue deux types de réponses : celles qui sont
contrôlées par les stimuli (dans le conditionnement répondant,
pavlovien) et celles qui sont contrôlées par leurs conséquences (dans
le conditionnement opérant). Pour Skinner, les deux types de
conditionnements correspondent à des principes différents. Dans le
conditionnement répondant, c'est bien la contiguïté qui est
responsable du conditionnement. Dans le conditionnement opérant la
probabilité d'émission de la réponse augmente compte tenu de ses
conséquences. Ce dernier principe ressemble à celui qui est en cause
dans la sélection des membres d'une espèce dans la phylogenèse.
Applications des théories du
conditionnement
Dressage des animaux
Pédagogie, exemple enseignement programmé
• Thérapies
désensibilisation (phobies)
Gestalttheorie
Une tradition phénoménologique de la psychologie s’est développée en
Autriche, en Allemagne, puis aux USA où beaucoup de ses membres ont
émigré au moment de la montée du nazisme.
Pour la Gestalttheorie, ce qui compte c’est la structure des phénomènes.
Il s’agit d’une approche holistique opposée à l’approche analytique
(associationiste ou béhavioriste).
La Gestalttheorie ou Théorie de la Forme est une réaction contre
l’associationnisme : le tout est différent de la somme des parties. La
perception n’est donc pas une combinaison de sensations.
Max Wertheimer, Kurt Koffka et Wolfgang Köhler vont développer les
conceptions d'Ehrenfels en affirmant la prééminence du tout, de la
structure, sur les parties. La structure que nous percevons est due à la
structure de la stimulation. Il en est ainsi parce que il existe un
isomorphisme entre la structure du monde physique et la structure du
monde psychologique. La perception est immédiate et ne se décompose
pas phénoménalement.
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Théorie de la Forme
Max Wertheimer(1880-1943) Über Gestalttheorie 1925.
développe les principes de la théorie à partir de l’étude du
mouvement apparent (pas association de sensations).
Kurt Koffka (1886-1941) Principles of Gestalt Psychology
1935 décrit les principales lois de la forme (groupement).
proximité similarité
continuité fermeture
Gestalttheorie et apprentissage
Wolfgang Köhler (1887-1967) Gestalt Psychology (1929)
Devenu directeur de la station de primatologie de Ténérife,
il étudie l’apprentissage chez le chimpanzé dans des
situations complexes. S’oppose aux conceptions de
Thorndike (apprentissage progressif par essai et erreur).
Découverte soudaine de la solution (insight) par
restructuration des données.
Le gestaltisme s’oppose aux conceptions analytiques
(élémentaristes) de la psychologie de la conscience (Wundt) tout
autant qu’à celles du béhaviorisme.
C’est une phénoménologie.
Son postulat de base est celui d’un isomorphisme entre la structure
du monde physique et celui de la perception.
Il se préoccupe des lois d’organisation des formes et non des
mécanismes d’association des éléments.
Il adopte une position nativiste à l’opposé des conceptions
empiristes qui prédominent en psychologie : les structures sont
données et non construites.
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