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MMR n°169 I MARS 2014
n pratique
réglementaire où la notion de secret partagé est lisible et adaptée
aux besoins de la pratique quotidienne. Il est alors intéressant d’en
connaitre les conditions et de s’en inspirer pour nos établissements.
Par exemple, le Code de la Santé Publique prévoit que deux profes-
sionnels de santé d’un établissement sanitaire puissent échanger
des informations concernant un patient afi n d’assurer la continuité
des soins et permettre la meilleure prise en charge possible. Le texte
va plus loin en indiquant même que toute information confi ée à un
professionnel de l’établissement est réputée confi ée à l’ensemble
de l’équipe. Ce partage n’est possible qu’après avoir recherché et
obtenu le consentement du résident concernant le partage des in-
formations le concernant..
De la même manière, les textes concernant le champ de la protec-
tion de l’enfance et l’accompagnement de la délinquance autorisent
aussi les personnes soumises au secret professionnel à partager
entre elles des informations à caractère secret, là encore à condi-
tion que les personnes concernées soient préalablement informées.
Ces textes introduisent toutefois une notion supplémentaire car le
partage d’information est limité aux informations dites « utiles et
nécessaires », laissant alors à l’appréciation de chacun de détermi-
ner ce qui est « utile et nécessaire »…
Nous l’avons vu, la notion de secret professionnel partagé n’est
donc pas explicitement posée dans les textes, particulièrement
pour notre secteur d’activité. Malgré cela, les dispositions appli-
cables à d’autres types d’établissement peuvent donc inspirer nos
bonnes pratiques en matière de partage d’informations, comme l’a
d’ailleurs récemment évoqué l’Anesm dans ses recommandations
sur la qualité de vie en Ehpad. Concrètement, retenons notamment
que :
• Le secret professionnel s’applique à tous, sans hiérarchie. Tou-
tefois, sous couvert de ce secret professionnel, le travail en
équipe pluridisciplinaire nécessite de partager des informations
et donc de déroger au secret. Ces échanges sont alors envisagés
comme étant des « secrets partagés », sans fondement légal.
• Le résident doit être informé dès son arrivé de la possibilité que
se réserve l’équipe de partager les informations le concernant.
Il lui est alors rappelé que l’ensemble des intervenants est sou-
mis au secret professionnel. Le consentement du résident ou de
son représentant légal doit alors être obtenu concernant cette
disposition. Cela peut être une disposition du contrat de séjour
par exemple.
• La transmission des données personnelles entre professionnels
doit se limiter aux informations « utiles et nécessaires » à la
qualité et la continuité de l’accompagnement. L’intérêt du ré-
sident et le respect de sa vie privée doivent alors en permanence
être interrogés et privilégiés.
• Le partage d’information n’entraîne pas un accès libre des
professionnels aux dossiers tenus par d’autres professionnels
de l’établissement. Ainsi, le choix du médecin de partager cer-
taines informations à caractère médical avec le reste de l’équipe
ne signifi e pas pour autant que ces professionnels disposent
d’un accès libre au dossier médical.
Une organisation du dossier pour favoriser le partage
D’un point de vue plus organisationnel, les données des résidents
doivent être compilées dans des espaces de stockage, de consulta-
tion et de modifi cation permettant l’accès de tous à ces fameuses
données partagées car « utiles et nécessaires » à la qualité de
l’accompagnement. C’est ainsi qu’il peut être envisagé :
• Un dossier de données partagées, accessible à tous, et
contenant les informations utiles et nécessaires à la qualité et
la continuité de l’accompagnement, y compris « de santé ». Les
données administratives pourraient y être inclues, sous réserve
qu’elles ne concernent pas des volets intimes de la vie du ré-
sident (divorce, relations diffi ciles avec le représentant légal) et
que l’on pourrait juger inutiles de partager.
• Si nécessaire, un dossier tenu par chaque professionnel
de santé de l’établissement, uniquement accessible par lui.
Chaque professionnel de santé estime d’une part les informa-
tions utiles et nécessaires à verser au dossier partagé d’accom-
pagnement et d’autre part les informations qu’il souhaite gar-
der confi dentielles, dans un espace réservé.
Au-delà de la « révolution culturelle » que peut représenter une
nouvelle approche du partage d’informations par tous les profes-
sionnels d’une équipe, sans distinction de leur fonction, il vous
reste l’épineux problème de pouvoir défi nir ce qui est « utile et
nécessaire » et donc pertinent de partager.
Katy Giraud-Jarny, Consultante
avec l’aimable collaboration du Dr Dominique Fullana-Littiere,
Médecin Coordonnateur
Deux conditions au partage de
l’information : informer préalablement
la personne concernée et limiter
le partage aux données
« utiles et nécessaires » .
Le choix du médecin de partager certaines
informations à caractère médical avec
le reste de l’équipe ne signifi e pas pour
autant que ces professionnels disposent
d’un accès libre au dossier médical
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