patient
care JUILLET-AOÛT 2009
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RAPPORT
de congrès
de la Renaissance au 20ème siècle, en recherchant, par une ana-
lyse minutieuse des portraits, d’éventuels signes de maladie. Il
apparaît ainsi que ces signes sont extrêmement fréquents
puisqu’ils sont retrouvés sur 82% des portraits du 17ème et du
18ème siècle. Les observations les plus courantes sont l’existence
d’un goitre chez les femmes et l’excès de poids chez les hom-
mes.
Si on se limite aux portraits où seule la région du cou est éva-
luable, on constate que 41% des femmes et 24% des hommes
d’identité connue ont un goitre tandis que les prévalences sont
respectivement de 68% et 63% pour les modèles d’identité incon-
nue.
D’autres signes potentiellement liés à une dysfonction thyroï-
dienne ont été recherchés. Leur prévalence était moins élevée:
aspect crétinoïde dans 8% des cas, signe de Hertoghe dans 5%
des cas… La fréquence des autres conditions pathologiques, comme
une atteinte ostéo-articulaire était plus faible encore puisqu’elle
oscillait entre 0 et 1%.
«Si les signes de maladies ne sont pas rares sur les portraits des
habitants du canton de Berne, célèbres et moins célèbres, ces
maladies n’en sont pas moins sous-représentées», commente
C. Als. En effet, la prévalence du goitre chez les Bernois oscil-
lait entre 80% et 90% en 1989. Elle était très probablement du
même ordre au cours des siècles précédents.
Et C. Als d’expliquer: «Il est probable que l’artiste atténue l’ex-
pression d’une maladie dans un souci d’idéalisation». Par ailleurs,
les personnages peints sur les tableaux sont probablement
issus d’une population relativement aisée, dont l’état de santé
était meilleur que celui de la population générale.
Enfin, la fréquence élevée de l’excès de poids sur les portraits
masculins pourrait conforter l’hypothèse d’une population sélec-
tionnée: l’excès de poids était considéré comme un signe d’opu-
lence et un facteur prédictif de survie à l’époque des famines.
Elle pourrait également s’expliquer par une interprétation artis-
tique idéalisée.
Daniel Glinoer est à l’origine de la première étude de cohorte
prospective sur la régulation de la fonction thyroïdienne chez
la femme enceinte en bonne santé2. Cette étude a été particu-
lièrement instructive dès lors qu’elle a fixé le cadre de toutes
les investigations ultérieures. Ses principaux résultats montrent
que la grossesse est associée à l’aggravation d’un éventuel défi-
cit en iode préexistant, d’une hypothyroxinémie relative, d’une
diminution du taux de la TSH au cours du premier trimestre, d’une
sécrétion préférentielle de T3, d’une augmentation de la thyro-
globuline et d’une augmentation du volume de la thyroïde.
Ces observations d’ordre biochimique révèlent en définitive
qu’environ un tiers des femmes enceintes ayant une carence iodée
marginale présente ainsi une stimulation thyroïdienne avec
diminution relative de la T4.
Plusieurs des études entreprises par D. Glinoer ont porté sur
le goitre gestationnel. Elles ont montré que ce goitre survient
chez environ 10% des femmes enceintes et également chez
10% de leurs bébés à la naissance. De plus, chez la mère, le
goitre d’origine gestationnelle peut persister jusqu’à un an
après l’accouchement3-5. Enfin, ce goitre résulte d’une stimu-
lation anormale de la glande thyroïde et est donc corrélé aux
indices de la fonction thyroïdienne et à la sévérité de la
carence en iode, ce qui conduit à recommander une augmen-
tation de la consommation en iode pour atteindre 200-300
mcg/jour.
L’hCG joue également un rôle dans la régulation de la fonc-
tion thyroïdienne maternelle6. Ainsi, l’émoussement transi-
toire de la TSH observé chez 18% des femmes durant le pre-
mier trimestre de la grossesse est corrélé au pic d’hCG. Plus
ce pic d’hCG est élevé, plus la baisse de la TSH est marquée.
Dans 10% des cas, cette diminution de la TSH est associée à
une thyrotoxicose transitoire avec vomissements. La TSH
retrouve progressivement une valeur normale au cours du
deuxième trimestre. L’impact de l’hCG sur la fonction thyroï-
dienne a été confirmé par JP Grün et al.7Ces auteurs ont
montré d’une part que l’amplitude et la durée du pic d’hCG
sont plus élevées en cas de grossesse gémellaire, d’autre
part que ces paramètres influencent la survenue d’une thy-
rotoxicose. Une amplitude élevée et une durée prolongée du
pic d’hCG permettent à la stimulation thyroïdienne anormale
de se manifester.
Dix-sept pour cent des femmes enceintes présentent de dis-
crètes anomalies thyroïdiennes préexistantes8. L’incidence des
avortements est trois fois plus élevée chez les femmes por-
teuses d’anticorps anti-thyroïdiens tandis que les femmes
enceintes qui ont des nodules voient ces derniers augmenter
en nombre et en volume. Près de 7% des femmes enceintes
présentent une auto-immunité thyroïdienne et, parmi elles, 16%
développent une hypothyroïdie sub-clinique9. Ce phénomène
est un peu paradoxal dès lors que le titre des anticorps dimi-
nue de 50% au cours de la grossesse. «Quoi qu’il en soit, ces
données épidémiologiques justifient pleinement un dépis-
tage des troubles thyroïdiens chez la femme enceinte», com-
mente D. Glinoer (figure).
Un tiers des femmes enceintes ayant une carence iodée
marginale présentent une stimulation de la fonction thyroï-
dienne.
Environ dix pour cent des femmes enceintes – ainsi que leurs
nouveau-nés – en condition de carence iodée développent
un goitre.
L’hCG stimule la fonction thyroïdienne.
Dix-huit pour cent des femmes enceintes présentent une dimi-
nution transitoire du taux de TSH sérique et 2,4% dévelop-
pent une hyperthyroïdie gestationnelle.