pathologie benigne du corps thyroide

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Docteur Nicole BERGER
DES 27/05/2005
PATHOLOGIE BENIGNE DU CORPS THYROIDE
Le corps thyroïde est formé de 2 types de cellules épithéliales :
- des cellules vésiculaires ou folliculaires qui représentent plus de 99 ,9% du parenchyme,
s’organisent en vésicules (follicules), sécrètent de la Thyroglobuline et les hormones T3,
T4. Elles sont sous la dépendance de la TSH.
- des cellules C, qui sécrètent de la Calcitonine.
I) - LES DYSTROPHIES THYROÏDIENNES :
GOÎTRE SIMPLE :
Etiologie : multiples facteurs de goîtrigénèse : carence iodée, facteurs génétiques, substances
goîtrigènes naturelles ou médicamenteuses.
Clinique : augmentation de volume du cou ; euthyroïdie
Traitement : freinage par hormone thyroïdienne ou chirurgie en cas de volume important ou de
complications : signes de compression.
Macroscopie : augmentation de taille du corps thyroïde. On parle de goître à partir de 35gr… jusqu’à
3O gr ou plus.
Microscopie : plusieurs étapes :
-A) - le goître parenchymateux hyperplasique ou stade initial : prolifération de microvésicules
à lumière punctiforme et de macrovésicules à paroi plissée. L’épithélium est actif, cubique ou
cylindrique
B) - le goître colloïde ou forme involutive du précédent : l’épithélium est au repos, aplati ; les
vésicules sont de grande dimension, remplies d’une abondante colloïde dense.
C)- le goître nodulaire : il correspond à l’individualisation d’un ou de plusieurs territoires au
sein d’un goître jusqu’alors diffus. Ces territoires sont plus ou moins encapsulés. On
distingue le nodule solitaire (étudié plus loin) dans une glande normale ou hypertrophique et
le goître multinodulaire.
Macroscopie : nodules multiples de taille variable déformant les deux lobes, très rarement unilatéral.
Microscopie : sur un fond d’hyperplasie diffuse, s’individualisent des nodules d’architecture macro ou
microvésiculaires. La capsule de ces nodules est faite de lamelles conjonctives d’épaisseur inégale qui
peut être incomplète car il ne s’agit pas d’une vraie capsule mais de l’encerclement fibreux d’une zone
d’hyperplasie irrégulière. Il existe d’importants remaniements : hyalinisation, fibrose, calcifications,
hémorragies …
Possibilité de transformation kystique de certains de ces nodules en kystes séreux vrais provenant de
la coalescence de macrovésicules dont la paroi régresse et se rompt ; seul le revètement interne
persiste entourant une colloïde plus ou moins liquéfiée.
Les kystes séro-hématiques correspondent à l’hématocèle thyroïdienne qui se traduit par une
augmentation brusque de volume d'un nodule. Macroscopiquement, le kyste à paroi conjonctive plus
ou moins épaisse est rempli d’un contenu franchement hémorragique puis hématique, « coca-cola ».
GOÏTRE CONGENITAUX PAR TROUBLES DE L’HORMONOGENESE
Anomalie génétique de l’hormonogénèse qui se traduit par une hypothyroïdie constante plus ou moins
marquée, parfois fruste, découverte tardivement.
Microscopie : les aspects observés peuvent être ambigus, trompeurs. L’allure générale est celle d’une
hyperactivité cellulaire sur fond d’hyperplasie diffuse ou multinodulaire. L’architecture est
polymorphe microvésiculaire ou trabéculaire ; les cellules sont hautes au cytoplasme pâle. Il existe
surtout une importante anisocaryose avec des mitoses assez fréquentes.
GOÏTRE AMYLOIDE
Entité rare, elle survient dans la moitié des cas dans un contexte d’amylose secondaire (tuberculose,
polyarthrite rhumatoïde suppuration bronchique…)
Macroscopie : goître de poids variant entre 40 et 150g. A la coupe, le tissu est homogène gris-jaunâtre,
assez ferme
Microscopie : infiltration amyloïde interstitielle entraînant une atrphie parenchymateuse ; îlots
d’adipocytes englobés dans l’amylose.
II) – LES HYPERTHYROIDIES
L’hypersécrétion d’hormones thyroïdiennes survient dans 2 circonstances :
- une perturbation du système immunitaire, à l’origine d’anticorps stimulant la thyroïde,
interagissant avec le récepteur de la TSH : hyperthyroïdie diffuse.
- Un hyperfonctionnement localisé et autonome : hyperthyroïdie focale par nodule
autonome unique ou multiple.
A) HYPERTHYROIDIE DIFFUSE : MALADIE DE BASEDOW
Pathogénie : désordre immunitaire + facteurs génétiques
Clinique : goître diffus, vasculaire (souffle, thrill) - signes de thyrotoxicose : tachycardie,
amaigrissement, tremblement, thermophobie - manifestations extra-thyroïdiennes : exophtalmie,
myxoedème prétibial
Biologie : augmentation des hormones thyroïdiennes et TSH ultra sensible pratiquement indétectable.
Traitement : antithyroïdiens de synthèse - Iode Radio Actif – chirurgie.
Macroscopie : goître diffus symêtrique, rarement supérieur à 60gr ; la tranche de section est charnue,
rougeâtre, lobulée. Le poids peut être supérieur si la maladie survient sur un goitre préexistant (diffus
ou nodulaire).
Microscopie :
Forme non traitée. On observe une triple hyperplasie :
- conjonctive, avec accentuation de la lobulation et hypervascularisation
- épithéliale, avec augmentation du nombre des vésicules qui sont petites ou plus grandes
mais avec des contours plissés formant des végétations. Les cellules sont hautes et claires,
les noyaux tassés les uns contre les autres. La colloïde est pâle, très riche en vacuoles de
résorption.
hyperplasie lymphoïde sous forme d’infiltrats en bandes, en croissants, ou véritables
follicules lymphoïdes
Forme traitée : c’est la forme la plus souvent rencontrée car la chirurgie ne s’effectue que chez des
patients en euthyroïdie parfaite après traitement par ATS et préparation par Lugol. Plusieurs aspects :
- glande encore hyperfonctionnelle, mais colloïde plus abondante
- aspect proche de celui d’un goïtre colloïde avec vésicules au repos
- aspect bigarré avec alternance de zones hyperfonctionnelles et de zones en involution
colloïde
Modifications dues au traitement : Le traitement par les ATS entraine une hyperplasie et une
hypervascularisation plus marquée ainsi qu’une hyperplasie du tissu lymphoïde.
Le traitement par l’IRA est responsable de fibrose et de dystrophies cellulaires et nucléaires qui
peuvent poser des problèmes diagnostiques. L’évolution se fait inexorablement vers l’hypothyroïdie.
B) - HYPERTHYROIDIE FOCALE :
1) ADENOME TOXIQUE :
Lésion nodulaire autonome hypersécrétante, représentant 17% des hyperthyroïdies focales.
Physiopathologie : l’hyperactivité du nodule inhibe l’activité du parenchyme voisin (nodule extinctif
en scintigraphie), en raison du freinage de la TSH.
Macroscopie : nodule unique, arrondi, bien limité souvent oedémateux, plus dense à la périphérie et
remanié au centre (kystisation hémorragie)
Microscopie : l’aspect est peu spécifique et souvent pauvre en signes d’hyperfonctionnement mais
plutôt remanié ; on distingue :
- une zone périphérique ou les vésicules forment un parenchyme assez dense et fonctionnel
- une zone centrale oedémateuse et remaniée avec des modifications vasculaires
- une capsule ou pseudo capsule très fine
- un aspect au repos du parenchyme péri nodulaire
2) GOITRE MULTI HETERO NODULAIRE TOXIQUE
Association de plusieurs nodules dont certains sont froids à la cartographie, non fonctionnels et
d’autres toxiques, entrainant une thyrotoxicose, toujours modérée.
Macroscopiquement et microscopiquement, il n’est pas possible de différencier un GMNT d’un goître
pluri adénomateux banal.
III THYROIDITES
Ensemble d'affections d'allure inflammatoire de la glande thyroïde où l'on distingue :
- des thyroïdites d'étiologie connue, secondaires.
- des thyroïdites primitives, au nombre de 3, bien séparées les unes des autres par leurs
caractères cliniques, anatomiques, évolutifs et pathogéniques :
- 1. Thyroïdite sub-aiguë de de Quervain.
- 2. Thyroïdite fibreuse de Riedel.
- 3. Thyroïdite chronique lymphomateuse de Hashimoto.
A Thyroïdite sub-aiguë de de Quervain ou thyroïdite granulomateuse.
ETIOLOGIE : Se développe sur le mode épidémique ou autonome. Femme de 30 à 50 ans.
CLINIQUE : Début insidieux ou brutal succédant à une rhino-pharyngite. Goître douloureux, petite
altération de l'état général, fébricule, syndrome inflammatoire douloureux. La captation de l'Iode
par la thyroïde est faible ou nulle mais il existe parfois une hyperthyroïdie transitoire au début. Sous
traitement anti-inflammatoire (corticothérapie) la guérison survient en quelques semaines sans
séquelles. Il existe des formes atypiques et silencieuses.
MACROSCOPIE : augmentation diffuse et discrète du corps thyroïde, discrète adhérence aux tissus
voisins, surface lisse, consistance élastique. A la coupe : les foyers granulomateux sont de coloration
blanc jaunâtre. La dureté peut évoquer une lésion maligne.
MICROSCOPIE : lésions segmentaires, d'âge différent :
1 - le stade initial est la destruction de l'épithélium vésiculaire par un infiltrat leucocytaire
(polynucléaires, lymphocytes). La dislocation de la paroi entraîne une libération de la colloïde qui se
disperse en flaques dans le tissu interstitiel.
2 - formation d'un granulome à polynucléaires, pouvant évoquer un micro-abcès mais
sans suppuration, à l'emplacement de la vésicule rompue. Ce granulome est inconstant.
3 - apparition rapide de cellules histiocytaires macrophagiques qui vont résorber la
colloïde et se transformer en cellules géantes multi-nucléées. Ces cellules géantes se disposant, par 5
à 10, en couronne autour d'une flaque de colloïde donnent un aspect tuberculoïde, très caractéristique
de "thyroïdite à plasmodes". Il n'existe jamais de nécrose, d'hémorragie, de calcification ou de
remaniements kystiques.
4 - les lésions tardives consistent en une fibrose progressive entourant les lésions
granulomateuses en renforçant leur disposition nodulaire. A ce stade on observe des signes de
régénération vésiculaire.
5 - le stade terminal se fait vers la régression des lésions avec remplacement des
zones inflammatoires par une plage de sclérose cicatricielle.
L'EVOLUTION de la thyroïdite sub-aiguë est transformée par la corticothérapie.
La guérison survient en quelques semaines avec possibilité de rechutes. Il n'y pas d'altération de
la fonction thyroïdienne, pas d’hypothyroïdie. Dans 10 % des cas, il persiste un nodule résiduel
se comportant cliniquement comme un nodule froid. L'étude par cytoponction de ce nodule évite
l'intervention chirurgicale en levant le doute sur un possible nodule froid malin. La thyroïdite subaiguë ne se transforme ni en thyroïdite de Riedel, ni en thyroïdite de Hashimoto.
PATHOGENIE: On pense qu'il s'agit d'une affection virale dont la nature reste à préciser. Seul
le virus coxackie semble avoir été retrouvé de façon significative par VOLPE.
B La thyroïdite ligneuse de Riedel :
Affection rarissime - 20 cas sur 42 000 thyroïdectomies pratiquées jusqu'en 1957 à la
Mayo Clinic (Woolner).Elle survient 4 fois sur 5 chez une femme autour de 50 ans. C'est une lésion
distincte de la thyroïdite de Hashimoto tant histologiquement que biologiquement.
CLINIQUE : - goître d'une dureté extrème appelé "goître de fer", sans adhérence à la peau, sans
adénopathies. L’hypothyroïdie est, paradoxalement, tardive. L'évolution se fait vers l'extension locale
avec signes de compression.
MACROSCOPIE : l'intervention chirurgicale est toujours très laborieuse en raison des adhérences
extrèmement serrées aux tissus avoisinants et n'aboutit qu'à une thyroïdectomie partielle, voire une
simple biopsie. L'infiltration du cou d'aspect lardacé est très évocatrice d'un cancer anaplasique.
MICROSCOPIE : Le parenchyme thyroïdien est progressivement étouffé et remplacé par un tissu
de sclérose collagène ou hyaline peu cellulaire où sont disséminés des lymphocytes et des
polynucléaires souvent éosinophiles. Les lymphocytes T sont prédominants, les B lymphocytes sont
très peu nombreux. Le parenchyme thyroïdien résiduel, enserré par la fibrose est nodulaire, encore
actif, non inflammatoire. Il n'y a pas de métaplasie éosinophile de l'épithélium, pas de cellule
géante. Le fait capital est l'extension de cette sclérose au delà de la capsule thyroïdienne :
atteinte des muscles, de la trachée, de l'oesophage. Les vaisseaux, les nerfs sont englobés.
PATHOGENIE : elle reste inconnue : sa nature immunitaire est exclue. Certaines études soulignent
l'analogie de cette affection avec la fibrose rétro-péritonéale. La thyroïdite de Riedel est différente
de la forme fibreuse de la thyroïdite de Hashimoto
.
C Thyroïdite lymphocytaire autoimmune :
La présence de lymphocytes dans la thyroïde est un phénomène anormal probablement autoimmun qui s’intègre dans le groupe des thyroïdites chroniques lymphocytaires.Cette infiltration
lymphocytaire peut être non spécifique (c’est à dire sans signes biologiques ou cliniques de maladie
thyroïdienne) et sa découverte se fera de façon fortuite lors de l’examen de thyroïdes réséquées pour
d’autres raisons, ou spécifique et s’intégrer dans différents cadres cliniques regroupés plus ou moins
abusivement sous le nom de maladie de Hashimoto.
En fait, la thyroïdite de Hashimoto strictement individualisée sur le plan clinique,
biologique et pathologique fait partie d'un ensemble d'affections de pathogénie semblable qu'il
conviendrait mieux de regrouper sous le terme générique de "thyroidite auto-immune chronique"
comportant :
a) la thyroïdite (lymphocytaire) de Hashimoto.
b) la thyroïdite lymphocytaire de l'enfance et de l'adolescence.
c) la thyroïdite du post-partum.
d) la thyroïdite fibreuse chronique.
e) le myxoedème idiopathique.
f) la thyroïdite asymptomatique atrophique.
a) la thyroïdite de Hashimoto ou struma lymphomatosa :
CLINIQUE : Atteint dans 9 cas sur 10 les femmes entre 40 et 50 ans. Apparition d'un goître diffus et
bilatéral en quelques semaines ou mois, goître ferme et élastique.
BIOLOGIE : Signes d'hypothyroïdie d'intensité croissante avec présence constante d’autoanticorps anti-microsomiaux (95 %), anticorps anti-thyroglobuline (55 %).
MACROSCOPIE : Augmentation de volume du corps thyroïde (3 à 6 fois) qui est diffuse,
bilatérale, d'aspect parfois finement lobulé, quelques adhérences aux tissus voisins lors de la
chirurgie. A la coupe : tissu ferme, élastique, blanc rosé, semé de points blanchâtres.
MICROSCOPIE :
- Infiltration de lymphocytes matures soit diffuse soit sous forme de follicules à centres
germinatifs hyperplasiques. En association avec l’infiltration lymphocytaire, on met en évidence des
plasmocytes, des histiocytes et même des cellules géantes. Ces dernières sont visibles au sein des
vésicules mais elles restent peu nombreuses et ne s’accompagnent pas de réaction granulomateuse ni
de polynucléaires.
- modifications de l'épithélium vésiculaire : atrophie des vésicules et métaplasie
oxyphile de l’épithélium vésiculaire.
sclérose d'importance variable à disposition lobulaire ou pseudo nodulaire.
IMMUNOHISTOCHIMIE :
L’infiltrat lymphocytaire montre une expression à la fois de type B (CD 20 [L26]) et de type
T (CD3). On ne note pas de restriction des chaînes d’immunoglobulines bien que les cellules B soient
le plus souvent de type IgG kappa.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL :
Lymphome malin :
- l’infiltration lymphocytaire est confinée à la glande et n’atteint pas la capsule ni les tissus
périthyroïdiens.
- Il n’y a pas de colonisation des vésicules thyroïdiennes par les lymphocytes (sauf quelques
rares aspects isolés).
- profil immunohistochimique monoclonal.
Carcinome Papillaire : la présence de quelques foyers de clarification nucléaire des cellules
oncocytaires doit être différenciée des signes de cancer papillaire dans ce contexte inflammatoire..
b) La thyroïdite des enfants et des adolescents (forme juvénile) :
Atteint plus fréquemment les sujets féminins. On note fréquemment un contexte familial de
dysthyroïdie (goître, maladie de Basedow).
CLINIQUE : petit goître, signes d’hypothyroïdie modérée inconstants ; parfois au contraire,
symptômes d’hyperthyroïdie. Anticorps anti-thyroïdiens : élévation modérée dans 20 à 30%.
MICROSCOPIE : infiltration lymphocytaire diffuse avec rares centres germinatifs.
Peu d’atrophie épithéliale ou de métaplasie éosinophile - peu de fibrose.
EVOLUTION : régression spontanée ou évolution vers l’hypothyroïdie ;
9 Attention : ne pas méconnaître une forme juvénile de cancer papillaire : le carcinome
sclérosant diffus.
c) Thyroïdite du post-partum : Durant la 1ère année suivant l'accouchement. Réversible
ou devenant chronique ; Histologie peu connue.
d) Thyroïdite fibreuse chronique :
ETIOLOGIE : environ 10% des thyroïdites. Atteint le sujet âgé, serait plus fréquent chez
l’homme.
CLINIQUE : goître pouvant être volumineux et s’associer à des signes de compression :
dysphagie, dyspnée. Hypothyroïdie fréquente. Anticorps antithyroïdiens très élevés.
MACROSCOPIE : la glande est diffusément augmentée de volume, ferme ou dure, pâle, fibreuse et
d’aspect lobulé, le poids varie de 50 à 150 gr. Il n’y a pas d’adhérences aux structures de voisinage.
MICROSCOPIE : fibrose majeure, dense, chéloïde, peu cellulaire, morcelant et remplaçant le tissu
thyroïdien - infiltration inflammatoire de type lymphoplasmocytaire avec présence de centres
germinatifs. Le parenchyme thyroïdien résiduel est atrophique et présente des signes d’atteinte autoimmune : métaplasie oxyphile de l’épithélium. Il existe surtout, de façon presque constante, une
métaplasie malpighienne qui signe cette variante.
e) Thyroïdite du « myxoedème idiopathique » et thyroïdite asymptomatique atrophique:
CLINIQUE : Myxoedème spontané de l'adulte survenant chez la femme après la ménopause comme
un myxoedème primitif acquis. La scène clinique est identique à la forme précédente. La différence
essentielle est l’atrophie extrême de la glande thyroïde. L’hypothyroïdie est sévère et les ACAT
toujours augmentés.
MACROSCOPIE : le poids de la glande est autour de 5gr
MICROSCOPIE : atrophie fibreuse majeure du corps thyroïde avec là encore une "signature" de
thyroïdite auto-immune car on retrouve une métaplasie éosinophile, des infiltrats lymphocytaires.
Les analogies entre cette variante et la forme fibreuse précédemment décrite font suggérer l’existence
d’un continuum lésionnel entre les 2 lésions.
IV) - LES TUMEURS BENIGNES : ADENOMES
CARACTERES GENERAUX
Définition de l'O.M.S : tumeur bénigne encapsulée montrant une différenciation cellulaire de type
vésiculaire.
Signes cliniques : Plus fréquents chez la femme que l’homme, ils apparaissent à tout âge, mais plus
souvent autour de la 5eme décade.Il s'agit d'une découverte d'examen systématique parfois fortuite.Le
nodule est habituellement solitaire, limité à une portion d’un lobe ou toto-lobaire.
Diagnostic :
- Biologie : euthyroïdie clinique et biologique : dosage de T4 et de TSH normal
- Echographie précise la nature pleine ou kystique du nodule.
- la cytoponction avec ou sans repérage échographique, oriente le diagnostic.
Macroscopie : lésion solitaire de quelques grammes à environ 50 g.
- l’aspect est fonction de l'abondance de la colloïde, la capsule est fine, bien visible.
- la texture du nodule est différente de celle du parenchyme voisin lequel est plus ou moins
comprimé.
- les remaniements sont le fait de troubles vasculaires : hématocèle, hémorragies, infarctus,
secondairement fibrose, calcifications.
Microscopie :
- A) tumeur encapsulée ne présentant aucune invasion capsulaire et /ou vasculaire. Cette
capsule est fine et régulière, bien délimitée, séparant nettement le tissu adénomateux du
tissu sain de voisinage, lequel est souvent atrophique ou comprimé. Une capsule épaisse et
irrégulière peut s’observer mais ce signe doit faire multiplier lers prélèvements pour
éliminer un cancer
- B) l’architecture est habituellement faite de vésicules de taille égale, le plus souvent on ne
rencontre qu’un seul type architectural. On distingue donc :
* l'adénome normovésiculaire : les vésicules ont une taille proche de celle de la glande normale.
* adénome macro-vésiculaire ou colloïde : vésicules distendues par la colloïde, de taille un peu
plus irrégulière souvent assez grande.
* adénome micro-vésiculaire (terme ancien d’adénome foetal) : vésicules petites pauvres en
colloïde avec présence fréquente de kystes et d'hémorragies. Oédème central.
•
adénome trabéculaire (ou embryonnaire) : composé de travées, de cellules petites,
étroitement serrées les unes contre les autres, entourées d'un tissu oedémateux. Il y a peu de
vésicules, elles restent petites avec pas ou peu de colloïde.
-
-
C) formes cytologiques : la cellularité est variable d’un adénome à l’autre ; les noyaux
sont réguliers en taille, forme et disposition le long de la membrane basale ; les nucléoles
sont peu apparents. Le cytoplasme est amphophile (sans particularités), éosinophile
(oxyphile) ou clair
D) le stroma est grèle, bien vascularisé ; il peut contenir des remaniements dégénératifs
(hémorragies, fibrose, calcifications, kystisation). La nécrose peut se voir dans des lésions
volumineuses mais elle doit toujours être regardéd avec suspicion.Néanmoins, elle peut
s’observer de façon extensive après cytoponction.
TYPES HISTOLOGIQUES
1) adénome vésiculaire atypique (ou adénome vésiculaire comportant des atypies ou
néoplasme de potentiel malin indéterminé)
Définition : Néoplame vésiculaire encapsulé ayant des caractéristiques évocatrices d’un cancer mais
sans aucune évidence d’invasion capsulaire et /ou vasculaire.
Principales caractéristiques évocatrices de lésion suspecte :
- augmentation de la cellularité (densité architecturale), surtout à la périphérie de la tumeur
- atypies nucléaires : nucléole volumineux, déformation des contours ou clarification sans
aspect formel de cancer papillaire
- augmentation de l’index mitotique
- architecture inhabituelle (travées épaisses, aspect fusiforme..).
L’association de ces différents signes est un critère de suspicion supplémentaire.
Pour l’OMS le terme d’adénome atypique est à proscrire mais en pratique, cette classe est toujours
employée. Les endocrinologues de la région Rhône Alpes surveillent les patients cliniquement et
instituent un freinage par LT3. En revanche, il n’y a pas de chirurgie complémentaire ni de totalisation
isotopique par Iode RA
2) Adénome oncocytaire (synonyme cellules éosinophiles, adénome à cellules oxyphiles
adénome à cellules de Hurthle)
Macroscopie : tumeur souvent friable, de coloration brun chamois, capsule fragile se détachant
facilement du parenchyme nodulaire. Possibilités de remaniements, surtout après cytoponction. Taille
variable, importante pour l’évaluation de la bénignité.
Le diagnostic de bénignité ou de malignité en extemporané n’est souvent pas possible (diagnostic
différé). Au cours de cet examen per-opératoire, il est recommandé de manipuler la pièce avec
précaution pour ne pas compromettre l’examen définitif ultérieur après fixation formolée.
Microscopie : les adénomes à cellules oxyphiles ont des caractéristiques identiques à celles des
adénomes communs : architecture vésiculaire pure ou largement prédominante, densité architecturale
faible ou modérée, colloïde abondante, remaniements sans nécrose.
La bénignité des adénomes oncocytaires est assurée par
- l’absence de signes d’invasion capsulaire et /ou vasculaire qui serait en faveur d’un
carcinome vésiculaire. Attention ! Les risques d’artéfacts sont nombreux : fragilité de la
capsule qui, lors de la fixation se rétracte et prend des contours polycycliques, faux
embols vasculaires du fait de la friabilité.
- Absence de noyaux de type papillaire
Il existe dans cette variante cytologique un certain nombre de tumeurs atypiques de pronostic
incertain n’ayant pas fait la preuve de leur caractère invasif. Les éléments de suspicion sont :
-
-
la taille élevée : en principe au-dessus de 4cm (chiffre variable selon les auteurs).Cette
taille élevée peut être le seul critère faisant opter en extemporané pour une thyroïdectomie
totale.
l’augmentation de la cellularité avec architecture compacte, trabéculaire ou polyadénoïde
-
-
la présence de mitoses, surtout atypiques, la présence de nucléoles saillants.
L’anisocaryose, en revanche est habituelle dans ce type cellulaire (taille et forme
variables)
la présence de nécrose cellulaire individuelle ou en foyers.
3) Adénome vésiculaire à cellules claires.
Microscopie : identique : les mêmes critères sont exigés pour la bénignité. Sur le plan cytologique,
les cellules ont un cytoplasme clair (vide) ou finement granuleux. Le noyau est central, rond, régulier
Histochimie : présence dans le cytoplame d’un matériel PAS+ diastase résistant
Immunohistochimie : positivité avec l’anti- Thyroglobuline ; négativité avec l’anti-Calcitonine,
Chromogranine, Parathormone
Diagnostic différentiel : toutes lésions à cellules claires : métastase d’un carcinome rénal, tumeur
parathyroïdienne, cancer vésiculaire ou médullaire.
4) Adénome vésiculaire à cellules en bague à chaton « signet ring cell adenoma » ou adénome avec
production de mucines.
Microscopie : cette lésion est caractérisée par des cellules vésiculaires dont le cytoplasme est le
siège d’une vacuole optiquement vide refoulant le noyau à la périphérie. Ces vacuoles sont
immunoréactives pour la thyroglobuline et parfois leur contenu est positif pour les les mucines (PAS +)
Diagnostic différentiel : adénocarcinome métastatique (poumon, colon.)
IV) - TUMEUR TRABECULAIRE HYALINISANTE (TTH)
Le concept de cette lésion, décrite en 1987 par CARNEY sous le nom d’adénome
trabéculaire hyalinisant, puis par Bronner sous le nom de « paraganglioma-like adenoma » a évolué
ces dernières années.En effet, des formes malignes ayant été rapportées, la dénomination actuelle
semble évoluer vers le concept de « tumeur trabéculaire hyalinisante » qui engloberait les 2 entités.
Macroscopie : Lésion solitaire de 0,3 à 4 cm de diamètre, ferme, limitée, habituellement encapsulée,
de coloration brun jaunâtre.
Microscopie :
- l’architecture est faite de travées sinueuses de 2 à 4 assises cellulaires qui ont une
disposition palissadique, associées à des massifs comportant en leur sein une différenciation
vésiculaire d’importance variable.
- les cellules sont allongées parfois fusiformes, à contours nets. Leur cytoplasme est sans
particularités ou faiblement éosinophile. Les noyaux, allongés et orientés perpendiculairement au
stroma fibrovasculaire, sont pourvus d’un nucléole un peu saillant et surtout montrent des
caractéristiques (« exagérées » selon LiVolsi) de carcinome papillaire : pseudo- inclusions, incisures
- le stroma est abondant, hyalin, situé à la périphérie des travées, de coloration parfois
éosinophile pouvant faire évoquer de l’amylose. Dans les zones très fibreuses, on peut voir
des phénomènes de momification cellulaire. Présence de calcifications parfois évocatrices
de calcosphérites
- la capsule est fine, régulière. Parfois la lésion est bien circonscrite, sans capsule.
.
Immuno-histochimie : les cellules expriment la Thyroglobuline, la CytoKératine et la
Vimentine mais n’expriment ni la Calcitonine ni la Chromogranine.
Diagnostic différentiel :
* carcinome médullaire +++ : la confusion est possible en raison de l’aspect trabéculaire ou
rubanné, la forme allongée des cellules, le stroma évocateur d’amylose (mais Rouge Congo négatif).
Le marquage aves les anticorps anti-TG et CT de cette tumeur est indispensable.
* carcinome papillaire ++ : erreur en cytologie ou en histologie par l’aspect des noyaux.
* paragangliome : architecture alvéolaire ou lobulée mais profil immuno-histochimique
différent (positivité avec l’anti-Chromogranine et l’anti-P-S100).
Données nouvelles :
- sur l’évolution : cette lésion avait été considérée par Carney comme bénigne (suivi de 10 ans
sans récidive). Depuis lors, des formes « malignes », car s’accompagnant de métastases
et/ou avec invasion à la périphérie ou embols, ont été décrites et nommées « carcinome
trabéculaire hyalinisant ».Plus fréquemment, ont été observées des associations avec un
authentique C. Papillaire, au sein de cette tumeur ou dans la même glande
- en biologie moléculaire : des travaux très récents ont mis en évidence des réarrangements du
proto-oncogène RET dans les TTH en proportion équivalente à celle de C. Papillaires :
28,8 % (cf. bibliographie).
En conclusion : comment classer ces lésions ? Pour certains, il s’agit dans tous les cas d’une variante
de carcinome papillaire encapsulé. Pour d’autres (LiVolsi), les formes classiques de Carney sont à
considérer comme des « tumeurs » de très faible potentiel malin, sans employer le terme
« carcinome »
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