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Quelles sont les vraies raisons de l’effondrement du dollar ?
Pour bien comprendre ce dernier épisode des tensions sur le marché des devises, nous devons remonter jusqu’{ la crise des
subprimes. Trois phases ont jalonné les marchés de change [voir encadré] :
Phase 1 : Crise des subprimes et
politique monétaire ultra-souple
La crise des subprimes et sa transmis-
sion à la sphère réelle, a amené la Fed
américaine à engager un cycle baissier
de ses taux d’intérêt directeurs. Le taux
des fed funds a été ramené à 0%-0,25%.
Mais compte tenu de la profondeur de
la crise, l’économie américaine n’a
montré aucun signe de reprise. Du
coup, la Fed a été forcée de recourir à
des instruments non conventionnels
(quantitative easing, operation twist, …)
pour sortir l’économie américaine de la
récession. Des injections massives de
liquidités dans le cadre de ses program-
mes de quantitative easing (QE) ou as-
souplissement quantitatif. Le dernier
en date, le QE 3, où la Fed s’est engagée
à injecter 85 milliards de dollars par
mois.
Devant cette avalanche de capitaux, les
grands fonds d’investissement ont pré-
féré quitter le territoire américain, où
la croissance est proche de 0%, pour
prendre des positions sur les places
financières émergentes où les taux de
croissance dépassent les 7%. Ce mou-
vement de fuite de capitaux était péna-
lisant pour la devise américaine, mais
fortement profitable pour les monnaies
émergentes.
Billet Economique
Phase 2 : L’annonce du "tapering"
par Ben Bernanke
Le président de la Fed, Ben Bernanke a
annoncé, le 22 mai dernier, la sortie
prochaine de sa politique monétaire
ultra-accommodante (annonce du ta-
pering), compte tenu de la multiplica-
tion des indices de la reprise économi-
que au printemps 2013 (croissance du
secteur privé solide et amélioration des
finances publiques). Cette déclaration a
rapidement déclenché des mouve-
ments de sorties massives de capitaux
des économies émergentes et un retour
vers l’économie américaine. A titre in-
dicatif, depuis le 22 mai, l’Inde a enre-
gistré des sorties de capitaux avoisi-
nant les 10 milliards de dollars. Ce po-
sitionnement sur le dollar a provoqué
l’appréciation du billet vert et la chute
des devises émergentes. Ces déprécia-
tions sont imputables { l’apparition
d’un deleveraging massif des marchés
sur fond de réduction du programme
de quantitative easing ou assouplisse-
ment quantitatif (QE3) aux États-Unis,
suite { une orientation positive d’un
certain nombre d’indicateurs avancés
de la conjoncture américaine. Depuis le
mois de mai et jusqu’au 31 août 2013,
la roupie indienne a enregistré une
chute de 23%, la lire turque a baissé de
15% et la roupie indonésienne s’est
dépréciée de 16%.
Phase 3 : Le maintien du statu
quo monétaire par la Fed
Lors de la dernière réunion du Federal
Open Market Committee (FOMC) du 17-
18 septembre 2013, la banque centrale
américaine a surpris les marchés par sa
décision de maintenir le statu quo mo-
nétaire. Certes, les opérateurs n’ont pas
anticipé la hausse des taux directeurs,
mais ils ont plutôt misé sur la baisse du
niveau de ses injections (entre 10 et 15
milliards de dollars), pour ramener les
interventions mensuelles à 75 ou même
à 70 milliards. Mais, la Fed était ferme
sur le maintien de son programme de
QE à 85 milliards. Plusieurs facteurs
expliquent sa position:
1/ Le niveau de l’inflation qui reste
sous contrôle. Les prévisions d’inflation
sous-jacente resteront en dessous de
2%.
2/ La croissance, qui en montrant un
léger ralentissement par rapport { l’été
dernier, demeure très fragile pour pou-
voir ramener le chômage en dessous de
6,5 %.
3/ La forte dépréciation des devises
émergentes, qui pourrait résulter du
durcissement de sa politique monétai-
re, et qui serait fort pénalisante pour
les exportations américaines vers ces
pays, déjà fragilisés ces dernières an-
nées par une dégradation de leurs fon-
damentaux.
4/ La montée de l’incertitude liée à l’is-
sue des prochaines négociations sur le
budget et le plafond de la dette.
5/ Et enfin, la hausse inattendue des
taux d’intérêt { long terme, provoquée
par les anticipations de resserrement
monétaire, qui pourrait étouffer une
reprise déjà embryonnaire.