Cristina Obreja – Imaginaire linguistique et dynamique de la langue…
152
en fonction de leur perception sur la qualité du parler: bon ou
mauvais usage ou par contre langue belle ou laide. Ainsi,
Houdebine-Gravaud met en cause les aspects extralinguistiques
pour déterminer les réactions et les attitudes des sujets parlants en
dehors de la communauté linguistique à laquelle ils appartiennent.
Ces attitudes se manifestent toujours en rapport d’identité et de
différence entre la langue parlée (dans une certaine région, en
famille, dans la rue, etc.), qui se lie toujours à l’idéal de langue
prescrite considérée linguistiquement «pure».
Houdebine-Gravaud s’est appuyée, dans ses recherches, sur
des entretiens et des enquêtes à grande échelle, menées pendant
plusieurs années, dans les communautés françaises de la région de
Poitou, afin d’observer et de mettre au jour les variétés de la
langue française «d’une région traversée par ce qu’on appelle la
ligne oc/oïl» (Houdebine-Gravaud). Par ses observations, au ni-
veau de la phonologie et de l’attitude manifestées par les sujets
parlants concernant l’usage de la langue, Houdebine-Gravaud in-
troduit dans le domaine de la linguistique, le concept d’imagi-
naire, qu’elle préfère à celui de représentation (à cause de sa po-
lysémie), en faisant appel à des domaines connexes, tel que la
psychologie cognitive et sociale, la sociologie du langage ou la
sociolinguistique. Toutefois, ses recherches s’inscrivent dans le
domaine de la linguistique générale ou linguistique des langues,
car elles s’appuient sur des aspects internes à la langue: «décrire
la dynamique linguistique et ses causalités, internes et externes,
sociologiques et psychologiques, autrement dit la comprendre, est
évidemment l'objectif fondamental de toute étude linguistique.»
(Houdebine-Gravaud 1986: 58-64).
Par ses recherches, Houdebine-Gravaud a réussi à mettre en
évidence le caractère dynamique de la langue, en développant les
idées avancées par Martinet conformément auxquelles la langue
se trouverait, en synchronie, dans un permanent processus de
changement et d’adaptation aux besoins linguistiques des usagers.
C’est cette dynamique linguistique qui entraine la société et qui
est générée par le flux continu des usages, car «toute langue
change quand elle sert et parce qu’elle sert.» (Martinet 1974b: