UNIVERSITE D’ORLEANS SL01MA11, Groupes 1 et 5
D´epartement de Math´ematiques 2009-2010
N. El Hage Hassan
S’EXPRIMER EN MATH´
EMATIQUES
1 Les ´enonc´es
La plupart des phrases que l’on rencontre dans un livre de math´ematiques concernent des objects
math´ematiques. Ces phrases ont pour but de d´efinir de tels objects ou bien d’en affirmer des pro-
pri´et´es. Ces phrases s’appellent des ´enonc´es.
Voici des exemples d’´enonc´es.
(1) Le nombre 711 7
11 est un entier positif.
(2) Soit xun nombre r´eel strictement positif.
(3) Il existe un entier naturel plus grand que 2100.
(4) Posons a=Z1
0
et2dt.
(5) Si nest un entier relatif, alors 16n248n+ 33 est un entier positif.
(6) Si xest un nombre r´eel, le plus grand des nombres xet xs’appelle la valeur absolue de x.
(7) Notons Il’intervalle [0,1].
(8) Si nest un entier positif, alors ou bien nest impair, ou bien n(n+ 2)(n+ 3) est multiple de 4.
(9) Pour tout r´eel xtel que x2>2, on a x > 1.
(10) Si xest un nombre r´eel, la valeur absolue de xse note |x|.
Un ´enonc´e comme (2) permet de se donner un objet math´ematique, en l’introduisant en g´en´eral par
le mot ”soit”.
L’´enonc´e (6) d´efinit et nomme un nouvel objet, la valeur absolue d’un nombre r´eel. Un tel ´enonc´e
s’appelle une d´efinition.
Il y a des ´enonc´es, comme (4),(7) ou (10), qui indiquent simplement que l’on va d´esigner par
un certain symbole un objet pr´ec´edement d´efini: ce sont des notations. Une notation est le plus
souvent introduite par l’un des mots ”posons” ou ”notons”.
Certains ´enonc´es affirment une propri´et´e: ce sont des propositions. Par exemple, (1),(3),(5),(8)
et (9) sont des propositions.
Une proposition est soit vraie, soit fausse et elle ne peut ˆetre `a la fois vraie et fausse.
Par exemple, la proposition (1) est vraie, ainsi que (3). Par contre, la proposition (9) est fausse:
en effet, 2 est un nombre r´eel, (2)2est strictement plus grand que 2 et 2 n’est pas strictement
plus grand que 1.
1
Certaines propositions sont des expressions math´ematiques ´ecrites sous forme purement symbol-
ique, comme par exemple 6<5
2ou bien Zπ
0
sin(t)dt = 0. Ces propositions n’´etant pas des phrases,
on doit les employer en utilisant des formes grammaticales correctes, notamment en ce qui concerne
les verbes. Par exemple, il convient d’´ecrire ”puisque l’on a 6 <25
4, on en d´eduit 6<5
2” et non
pas ”6<5
2car 6 <25
4”. Cependant, pour ne pas alourdir le style, des libert´es sont permises, `a
la condition expresse qu’elles ne nuisent pas au sens. Par exemple, l’expression ”on a 6<5
2car
6<25
4” est permise en math´ematiques.
Dans un livre de math´ematiques, les propositions `a retenir sont en g´en´eral introduites par le mot
Proposition. Certains ´enonc´es particuli`erement importants sont signal´es par le mot Th´eor`eme.
Un Corollaire est une propri´et´e qui r´esulte d’un th´eor`eme ou d’une proposition pr´ec´edente. Un
Lemme est une propri´et´e dont on a besoin pour la suite et qui m´erite d’ˆetre mise en ´evidence. Un
´enonc´e qui d´efinit un nouvel objet math´ematique s’appelle une D´efinition.
2 Op´erations logiques
Voici les op´erations que l’on peut effectuer avec des propositions.
I. La n´egation. Soit Pune proposition. On d´esigne par ”non P” la proposition qui est vraie
si Pest fausse et qui est fausse si Pest vraie. Elle est appel´ee n´egation de Pet se lit non P.
Par exemple, la n´egation de la proposition ”2 n’est pas un entier naturel” est tout simple la propo-
sition ”2 est un entier naturel”.
II. L’op´eration ”ou”. Consid´erons la proposition suivante, o`u net psont des entiers relatifs:
R: ”np est pair ou n2p2est multiple de 8” .
Cette proposition est du type (Pou Q), o`u Pest la proposition ”np est pair” et o`u Qest la propo-
sition ”n2p2est multiple de 8”.
Par d´efinition, une proposition de la forme (Pou Q) est vraie si et seulement si l’une
au moins des propositions Pou Qest vraie; si Pet Qsont fausses toutes les deux, alors
la proposition (Pou Q) est fausse.
Dans notre exemple, choisissons n= 5 et p= 3. Alors la proposition Pest fausse et la propo-
sition Qest vraie, donc Rest vraie lorsque n= 5 et p= 3.
Si n= 5 et p= 2, la proposition Pest vraie et la proposition Qest fausse, donc Rest vraie.
Si n= 6 et p= 2, chacune des deux propositions Pet Qest vraie, donc Rest vraie aussi dans ce
cas.
III. L’op´eration ”et”. Consid´erons la proposition suivante, o`u xest un nombre r´eel:
R: ”xest strictement positif et x2+ 3x4 est strictement n´egatif .
Cette proposition est du type (Pet Q), o`u Pest la proposition ”xest strictement positif” et o`u Q
est la proposition ”x2+ 3x4 est strictement n´egatif”.
Par d´efinition, une proposition de la forme (Pet Q) est vraie si et seulement si les
2
propositions Pet Qsont toutes les deux vraies. Si la proposition Pest fausse ou si la
proposition Qest fausse, alors la proposition (Pet Q) est fausse.
Puisque l’on a x2+ 3x4 = (x1)(x+ 4), la proposition Qest vraie si et seulement si xv´erifie les
in´egalit´es 4<x<1, donc la proposition Rest vraie si et seulement si l’on a 0 <x<1.
IV. L’implication. Si Pet Qsont des propositions, la proposition ”si P, alors Q” exprime que
si Pest vraie, alors Qest vraie aussi. Les propositions de ce type sont tellement utilis´ees que l’on
leur a donn´e un nom: on les appelle des implications. La proposition ”si P, alors Q” peut aussi
s’exprimer par ”Pimplique Q” ou encore par ”Pdonc Q”.
Lorsque les propositions Pet Qsont constitu´ees de symboles math´ematiques, et seulement dans ce
cas, on peut utiliser le signe =qui se lit ”implique” et l’on ´ecrit P=Qpour exprimer que la
proposition Pimplique la proposition Q.
Voici des exemples de formulation:
Si nest un entier positif, alors n3nest multiple de 3.
nest un entier positif implique n3nest multiple de 3.
6<25
4=6<5
2.
xappartient `a l’intervalle ] 4,1[, donc x2+ 3x4 est strictement n´egatif.
x]− ∞,4[=x2+ 3x4>0.
Si Pet Qsont des propositions, la proposition (P=Q)est vraie seulement dans
l’un des cas suivants: ou bien Pet Qsont vraies, ou bien Pest fausse. Ainsi, (P=Q)
est vraie si et seulement si l’une des propositions non Pou Qest vraie.
Par exemple, la propostion (5) est vraie, de mˆeme que la proposition (8) qui est du mˆeme type. La
proposition (9) a ´egalement la structure ”si..., alors ...”, car elle pourrait aussi bien se formuler sous
la forme ”si xest un nombre r´eel tel que x2>2, alors on a x > 1”. Cette proposition (9) est fausse:
en effet, 2 est un nombre r´eel tel que (2)2soit strictement plus grand que 2 et 2 ne soit pas
strictement plus grand que 1.
V. L’´equivalence. Si Pet Qsont des propositions, la proposition ((P=Q) et (Q=P))
se note (PQ). Le signe se lit ”´equivaut `a” ou ”si et seulement si”. Donc, la proposition
(PQ) est vraie si et seulement si les deux propositions (P=Q) et (Q=P) sont
vraies. Lorsque la proposition (PQ) est vraie, on dit aussi que les propositions Pet Qsont
´equivalentes. Par exemple, lorsque zet z0sont des nombres complexes, on a l’´equivalence
zz0= 0 (z= 0 ou z0= 0) .
On peut r´esumer les d´efinitions pr´ec´edentes dans un tableau, appel´e table de v´erit´e. Ce tableau
indique, pour chaque valeur possible Vraie ou Fausse des propositions Pet Qla valeur de (non P),
(Pet Q), (Pou Q), (P=Q) et (PQ):
P Q non P(Pet Q) (Pou Q) (P=Q) (PQ)
V V F V V V V
V F F F V F F
F V V F V V F
F F V F F V V
Table de v´erit´e
Exercice. En compl´etant la table de v´erit´e pr´ec´edente, d´emontrer les ´equivalences suivantes:
Soient Pet Qdes propositions. On a:
3
1. non(Pou Q)(non(P) et non(Q)).
2. non(Pet Q)(non(P) ou non(Q)).
3. (P=Q)(non(P) ou Q)non(Pet non(Q)).
Exercice. En dressant une table de v´erit´e, d´emontrer l’implication suivante:
Soient A,Bet Cdes propositions. On a la propri´et´e de transitivit´e:
((A=B) et (B=C)) =(A=C).
3 Quantificateurs
Certaines propositions sont exprim´ees `a l’aide d’une ou plusieurs variables qui peuvent prendre
diff´erentes ”valeurs”. Des telles propositions sont vraies ou fausses selon les ”valeurs” que prennent
ces variables. Par exemple, la proposition ”xest un nombre r´eel et x2+3x4 est strictement n´egatif”
est une proposition P(x) qui d´epend de la variable x. La proposition P(x) n’est pas toujours vraie:
elle ne l’est que lorsque xest un nombre appartenant `a l’intervalle ] 4,1[. De mˆeme, la proposition
xest un nombre r´eel et x5+x1 = 0” est une proposition Q(x) qui d´epend de la variable x. Il
peut ˆetre utile d’affirmer que l’on peut trouver un nombre r´eel xtel que x5+x1 = 0. Pour pr´eciser
ces diff´erents cas de figure, on d´efinit deux op´erateurs, appel´es quantificateurs.
I. Le quantificateur pour tout. Pour exprimer que l’on a x2+ 3x4<0 `a chaque fois que x
est un nombre de l’intervalle ] 4,1[, nous dirons ”pour tout nombre xappartenant `a ] 4,1[, on a
x2+ 3x4<0” ou bien ”quel que soit le nombre xappartenant `a ] 4,1[, on a x2+ 3x4<0”.
Lorsque l’on veut exprimer par des symboles math´ematiques une proposition qui commence par
l’expression ”pour tout”, on utilise le signe , qui se lit ”pour tout” et le signe , qui se lit ”ap-
partient `a” et qui affirme qu’un ´el´ement est dans l’ensemble consid´er´e. Ainsi, notre proposition se
formalise de la mani`ere suivante:
(x]4,1[, x2+ 3x4<0)
Plus g´en´eralement, supposons que P(x) est une proposition qui d´epend d’un objet appartenant `a
un certain ensemble E.La proposition (xE, P (x)) est vraie si et seulement si P(x)
est vraie `a chaque fois que xest un ´el´ement de l’ensemble E. Par exemple, la proposition
(x]4,1[, x2+3x4<0) est vraie. Pour que la proposition (xE, P (x)) soit fausse, il
suffit de trouver un ´el´ement xappartenant `a Epour lequel la proposition P(x)est fausse.
Par exemple, la proposition (x]0,3[, x2+ 3x4<0) est fausse car le nombre 2 appartient `a
]0,3[ et le nombre 22+ 3 ×24 n’est pas strictement n´egatif.
II. Le quantificateur il existe. Supposons que l’on veuille affirmer la possibilit´e de trouver un
nombre r´eel xv´erifiant la propri´et´e x2+ 53x231 = 0. Nous dirons ”il existe un nombre r´eel xtel
que x2+ 53x231 = 0”. En fait, il est facile de calculer deux nombres r´eels ayant cette propri´et´e;
mais pour ˆetre assur´e que la proposition pr´ec´edente est vraie, il suffit de trouver l’un de ces nombres,
ou bien sans faire de calculs; d’expliquer pourquoi il est possible d’en trouver un (le discriminant du
trinˆome est positif).
On peut employer le signe , qui se lit ”il existe”, pour formuler par des symboles une proposition
commen¸cant par l’expression ”il existe”. Par exemple, on ´ecrit
xR, x2+ 53x231 = 0 .
4
D’une fa¸con g´en´erale, supposons que P(x) est une proposition qui d´epend d’un objet appartenant
`a un certain ensemble E.La proposition (xE, P (x)) est fausse si et seulement si la
proposition P(x)est fausse pour tous les ´el´ements de E.
Ces quatificateurs et satisfont l’axiome suivant:
La n´egation de la proposition (xE, P (x)) est la proposition (xE, non(P(x))).
La n´egation de la proposition (xE, P (x)) est la proposition (xE, non(P(x))).
Remarque. La proposition
(mN,nN, m +nest un nombre pair)
exprime que, quel que soit l’entier naturel m, il existe un entier naturel ntel que m+nsoit un
nombre pair. On d´emontre facilement que cette proposition est vraie. Par contre la proposition
(nN,mN, m +nest un nombre pair)
qui exprime qu’il existe un entier naturel ntel que, quel que soit l’entier naturel m,m+nsoit un
nombre pair est fausse, comme on le montre facilement. On voit donc que l’ordre dans lequel sont
´ecrits les quatificateurs et est tr`es important.
4 Diff´erents types de raisonnement
Pour affirmer qu’une proposition Qest vraie, on fait un raisonnement ou une d´emonstration.
Pour cela, on utilise des propositions que l’on sait d´ej`a ˆetre vraies et l’on en d´eduit la proposition
grˆace `a un petit nombre de r`eles pr´ecises. Voici diff´erents types de raisonnement.
I. Le raisonnement direct. En g´en´eral la d´emonstration consiste `a ´etablir une chaˆıne d’implications
aboutissant `a Q. Pour montrer une proposition de la forme ”pour tout xE,Q”, on se donne un
´el´ement quelconque xappartenant `a l’ensemble Eet l’on d´emontre que la proposition Qest vraie.
La d´emonstration d´ebute par l’expression ”soit xun ´el´ement de E” ou bien par ”soit xE” et se
termine par ”donc Q”.
Exemple. D´emontrer la proposition suivante:
pour tout entier relatif n, 16n248n+ 33 est un entier positif.
D´emonstration. Soit nun entier relatif. Puisqu’un produit, une somme et une diff´erence d’entiers
relatifs sont des entiers relatifs, on en d´eduit que 16n248n+ 33 est un entier. D’autre part, on
a l’´egalit´e 16n248n+ 33 = 4(2n3)23. Puisque nest un entier relatif, 2n3 est un en-
tier relatif diff´erent de 0, par suite on a |2n3| ≥ 1, d’o`u (2n3)21. Il s’ensuit que l’on a
4(2n3)2343 = 1, donc 16n248n+ 33 est un entier positif.
Pour d´emontrer une proposition de la forme ”il existe xE,Q”, le plus direct est d’exhiber
un ´el´ement de l’ensemble Epour lequel la proposition Qest vraie. Mais quelquefois, il n’est pas
possible de calculer explicitement un tel ´el´ement. Dans ce cas, il faut penser `a appliquer un r´esultat
du cours affirmant qu’un tel ´el´ement existe.
II. Le raisonnement cas par cas. Il s’applique lorsque l’on veut d´emontrer une implication
de la forme ((Pou Q) =R). On distingue deux cas: ou bien Pest vraie et il faut d´emontrer
qu’alors Rest vraie, ou bien Qest vraie et il faut d´emontrer qu’alors Rest vraie. La structure du
raisonnement est
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