Le ResidentAssessment Instrument- Home-Care (RAI

S. Monod
T. Hongler
T. Castelli
P. Clivaz-Luchez
C. Büla introduction
Depuis sa création, l’Association suisse des services d’aide et
de soins à domicile (ASSASD) s’est engagée à ce que ses mem-
bres utilisent le même instrument d’évaluation des personnes
dont elles assurent le suivi. Après un recensement des instru-
ments disponibles, l’ASSASD a décidé, en 2003, d’adopter le
Resident Assessment
Instrument
(RAI) dans sa version «Home-Care» (domicile).
Le RAI vient des Etats-Unis. En 1983, suite à des problèmes liés à la prise en
charge de patients, le Congrès a mandaté un consortium de recherche pour définir
des standards de prise en charge des résidants en établissement de long séjour.
Le Resident Assessment Instrument1 est issu de leur travail et a éconçu afin de
pouvoir générer, sur la base d’une évaluation globale structurée et fiable de la per-
sonne âgée, des indicateurs qualité de prise en charge dans ces établissements.2
Suite au RAI long séjour (RAI-
Institution
), d’autres versions ont été élaborées,
dont le RAI pour les soins à domicile (RAI-
Home-Care
).3 Aujourd’hui, la famille RAI
compte une quinzaine d’instruments, conçus pour différents lieux de soins (ré-
adaptation, soins aigus, soins palliatifs, etc.) et groupes de patients (psychiatri ques,
avec handicap intellectuel, etc.). C’est un groupe international de chercheurs et
cliniciens qui gère la société à but non lucratif
interRAI
(www.interrai.org). Cette
sociététient les droits d’auteur de la méthode RAI et garantit la rigueur de son
utilisation.
Suite à la décision de l’ASSASD, le RAI-
Home-Care
américain a été adapté au
paysage helvétique. Le RAI-
Domicile Suisse
a vu le jour en 2004 et est progressive-
ment implémenté dans tous les services d’aide et de soins à domicile de notre
pays. Les médecins de premier recours seront ainsi de plus en plus souvent con-
frontés aux résultats issus de cet instrument. Il apparaît cessaire que nous en
connaissions la structure et l’utilisation, de façon à s’approprier les données qui
en découlent. Cet article a pour but d’expliquer la méthode RAI, de mettre en évi-
dence ses avantages, son potentiel, et ses limitations.
méthode rai : bien plus quun simple outil dévaluation
Le RAI, quelle que soit sa version (domicile, institution, soins aigus ou autre),
est bien plus qu’un simple recueil de données médicales et fonctionnelles au-
The Resident Assessment Instrument Home
care : what primary care physician needs
to know
Following the decision of the Swiss Associa-
tion for Home Care Services to adopt the Re-
sident Assessment Instrument (RAI), the RAI-
Home Care is gradually implemented in all
home care services in Switzerland. Based on
a comprehensive geriatric assessment, the
RAI not only allows to establish an individua-
lized plan of care, but also generates quality
indica tors and a case-mix classification sys-
tem that helps financing and planning resour-
ces. This article describes the five steps of the
RAI-Home Care process and discusses the
strengths, future and limitations of the RAI.
Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 2176-83
Suite à la décision de l’Association suisse des services d’aide
et de soins à domicile d’adopter le
Resident Assessment Ins-
trument
(RAI), le RAI-
Domicile
est progressivement impmenté
dans tous les services de soins à domicile de Suisse. Sur la
base d’une évaluation globale standardisée (Minimum Data
Set), la méthode RAI permet non seulement d’établir un plan
de prise en charge individualisé, mais également de suivre des
indicateurs qualité concernant la prise en charge des person-
nes, financer les soins en fonction des profils, et planifier les
ressources au niveau du système de soins. Cet article décrit
les cinq étapes du processus RAI-
Domicile
et discute les avan-
tages, le potentiel, et les limitations de la méthode RAI.
Le Resident Assessment Instrument-
Home-Care (RAI-Domicile) : ce que le
médecin de premier recours doit savoir
perspective
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près d’une personne âgée. La méthode RAI est une procé-
dure complète qui comprend :
une grille d’évaluation structurée, le
Minimum Data Set
(MDS)
, qui permet de recueillir des données d’excellente
qualité en termes de fiabilité et de validité.4,5
Un
logiciel
qui nère des échelles et des tableaux d’alarme
qui permettent de faire une liste des problèmes et partant
de là, de rédiger un plan d’intervention.
Un
manuel de l’utilisateur
qui contient en particulier des
guides d’analyse par problème et contribue à la formation
des professionnels.
Des
indicateurs qualité
qui permettent de suivre et d’éva-
luer les effets d’une intervention chez un patient, de faire
des comparaisons transversales entre services d’aide et
de soins à domicile
(benchmarking)
ou encore de faire des
comparaisons chronologiques (en fonction du temps, dans
le me service d’aide et de soins à domicile, par exem-
ple).
Un
système de case-mix
(Ressource Utilization Group) qui
permet d’identifier des groupes de patients iso-consomma-
teurs de ressources et de faire des projections en termes de
planification de services de santé.
Ainsi, sur la base d’une évaluation globale standardisée,
la méthode RAI permet non seulement d’établir un plan de
prise en charge individualisé, mais également de suivre
des indicateurs qualité,6 financer les soins en fonction des
profils, et planifier les ressources au niveau du système de
soins (figure 1). La diffusion internationale des instruments
dans une trentaine de pays permet même des comparai-
sons internationales.7,8
En outre, un des ints majeurs des instruments de la fa-
mille RAI est qu’ils partagent le me langage et sont compa-
tibles entre eux. Ils permettent, en théorie, un transfert d’in-
formation d’un lieu de soins à un autre et entre les difrents
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Figure 2. Le processus de la méthode Resident
Assessment Instrument – Domicile
Evaluation
Au domicile
du patient
Réalisation du
MDS-domicile
avec le client
Enregistrement
des données
Au domicile
du patient
Réalisation de
l’intervention
Au CMS/
Domicile
Evaluation
Au CMS
Génération des
échelles et du
tableau d’alarme
Lecture du Guide
d’analyse par
domaine d’inter-
vention (GAD)
Au CMS
Définition du
Plan d’interven-
tion
Impression du
Catalogue des
prestations
Réalisation Evaluation
Prise de décision
Figure 3 Minimum Data Set
Figure 1. Méthode Resident Assessment Instrument
Plan
d’intervention
Allocation des
ressources
Indicateurs de
qualité
Mesure des
résultats
Evaluation
standardisée
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partenaires du réseau.9 Ils peuvent ainsi contribuer à la conti-
nuité des soins. En Suisse, certains établissements dico-
sociaux utilisent jà la version «Institution» du RAI et la mise
en réseau de l’information entre institutions de long séjour
et services d’aide à domicile pourrait être mise en fonction.
rai-domicile-suisse : comment est-il
utilisé ?
Le RAI-Domicile-Suisse est un processus qui se déroule
en cinq étapes (figure 2) :
1. une évaluation globale et multidimensionnelle de la per-
sonne et le recueil de données sur le formulaire Minimum
Data Set (MDS).
2. L’analyse des échelles de performance et du tableau
d’alarme et la lecture des guides d’intervention par do-
maine.
3. La définition du plan d’intervention et la saisie du cata-
logue de prestations.
4. La réalisation des prestations.
5. L’évaluation des résultats.
Ces cinq étapes sont reprises en détail ci-après.
Domaines évalués Nombre Exemples d’items
d’items
A. Information concernant 2 Date
l’évaluation Raison de l’évaluation (première évaluation, changement de l’état du client**, etc.)
B. Cognition 4* Mémoire à court terme, mémoire procédurale
Facultés cognitives pour les décisions courantes
Signes d’état confusionnel
C. Communication/ audition 2 Capacité du client à se faire comprendre
Audition
D. Vision 1 Vision
E. Humeur et comportement 2 Signes de dépression, d’anxiété ou de tristesse
F. Fonction sociale 4 Relations et activités sociales (fréquences des hobbies, visites, etc.)
Changement dans les activités sociales au cours des trois derniers mois
G. Aide de l’entourage 3 Situation des aidants principaux (ne peuvent plus continuer leur aide, expriment de l’épuisement, etc.)
Type d’aide fournie par l’entourage
H. Status physique 6 Activités instrumentales de la vie quotidienne
et fonctionnel Activis de base de la vie quotidienne
Monter/descendre les escaliers
Endurance
I. Continence 3 Continence des urines
Continence des selles
J. Diagnostics médicaux 1 Liste des diagnostics médicaux
K. Problèmes de santé 6* Problèmes de santé (diarrhée, perte d’appétit, difficultés d’endormissement, etc.)
Douleurs
Chutes (au cours des trois derniers mois, risque de chute)
L. Etat nutritionnel, 7* Taille/poids
hydratation Etat buccodentaire
Perte de poids
M. Problèmes de peau et des 4 Escarres
pieds Ulcères
N. Environnement 1 Logement (dangerosité à cause de problèmes d’éclairages, sols, salle de bain, accessibilité, etc.)
O. Utilisation de services 2 Services professionnels au cours des sept derniers jours (aide-soignante, infirmière, physiothérapeute,
professionnels etc.)
P. Médicaments 7 Nombre, liste
Préparation
Médicaments psychotropes et analgésiques
Suivi médical des médicaments (contrôle de la liste des médicaments par un médecin au cours des
six derniers mois)
Q. Evaluation d’ensemble 2 Santé autoévaluée par le client
Changement global du degré d’indépendance du client depuis trois mois
R. Responsabilités, directives 2 Représentant légal/thérapeutique
Directives anticipées
S. Signature et date 1 Date et signature
Tableau 1. Domaines évalués dans le Minimal Data Set, nombre d’items par domaine et exemples d’items
* : Modifications dans la version 2009 ; ** : le terme de client, qui pourrait être remplacé par bénéficiaire, a été choisi par l’Association Suisse des aides
et soins à domicile et c’est la raison pour laquelle il est utilisé en Suisse.
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Etape 1 : Réalisation d’une évaluation globale de
la personne et recueil de dones du Minimum
Data Set
Lévaluation globale et multidimensionnelle de la person-
ne se fait, sauf exception, au
domicile
du patient, en présence
si possible d’un proche. L’évaluation peut être conduite sur
une ou plusieurs visites chez le patient dans un délai de
sept jours ouvrables.
Dans le canton de Vaud, c’est un(e) infirmier (-ère), ou
un(e) ergothérapeute formé(e) à la thode RAI, qui réa-
lise l’évaluation et remplit une grille appelée le
Minimum
Data Set
(MDS) (figure 3). Cette grille est structurée en sec-
tions, qui chacune correspond à un domaine particulier et
contient un certain nombre d’items. Les domaines évalués,
le nombre d’items par domaine et quelques exemples
d’items sont décrits dans le tableau 1. Le MDS permet de
recueillir de manière fiable des données concernant l’état
de santé et l’état fonctionnel de la personne
au cours des
trois derniers jours
. Il recueille également des informations sur
les aidants formels et informels.
Le professionnel qui alise l’évaluation recherche l’in-
formation la plus complète et la plus fiable possible, si né-
cessaire en faisant appel au médecin traitant. Mais l’infir-
mier(-ère) ou l’ergothérapeute pourra également se fier à
sa propre observation pour coter certains items (par exemple
pour juger de la présence de troubles de la marche). Le
temps de réalisation d’un MDS est d’environ une heure.
Etape 2 : Analyse des échelles de performance
et du tableau d’alarme, lecture des guides
d’intervention par domaine
A partir des données entrées dans le MDS, le logiciel RAI
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Echelles de performance Description Items du MDS utilisés pour le calcul du score
Echelle des AVQ (activités • Indice de quantité d’aide nécessaire pour les AVQ • Mobilité dans le lit
de base de la vie quotidienne) • Score de 4 (indépendance dans les AVQ) • Transfert
à 15 (dépendance dans les AVQ) • Manger, boire
• Utilisation des toilettes
Echelle des AIVQ (activités • Indice de performance dans les activités instrumentales • Préparation des repas
instrumentales de la vie de la vie quotidienne • Faire le ménage
quotidienne) • Score de 0 (indépendance totale dans les AIVQ) • Gestion de l’argent
à 6 (dépendance dans toutes les AIVQ) • Gestion des médicaments
• Usage du téléphone
• Faire les courses
Echelle de performance • Indice de performance cognitive • Mémoire à court terme
cognitive • Score de 0 (absence de trouble cognitif) • Facultés cognitives pour les décisions courantes
(Cognitive performance scale) à 6 (trouble cognitif très sévère) • Se faire comprendre
• Si valeur M 2, un trouble cognitif doit être suspecté • Manger, boire
Echelle de dépression • Indice de dépression • Colère perpétuelle envers soi-même ou envers les autres
(Depression rating scale) • Score de 0 (absence de signes dépressifs) Peurs qui semblent non fondées
à 4 (plusieurs signes dépressifs) • Souci constant de sa propre santé (hypocondrie)
• Si valeur M 2, une dépression doit être suspectée • Visage exprimant tristesse, douleur, inquiétude
Tableau 2. Echelles de performance : description, valeurs seuils et items du Mimimum Data Set utilisés pour
calculer les scores
MDS : Mimimum Data Set ; AVQ : activités de la vie quotidienne ; AIVQ : activités instrumentales de la vie quotidienne.
Figure 4. Exemple de présentation des échelles de performance
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calcule des échelles de performance et émet des signaux
d’alarme selon des algorithmes préétablis.
Quatre
échelles de performance
sont systématiquement cal-
culées sur la base des données du MDS (figure 4). Il s’agit
de scores d’activités de la vie quotidienne de base et ins-
trumentales, d’un score de performance cognitive et d’un
score de dépression. Les échelles de performance, les va-
leurs seuils et les items du MDS utilisés pour calculer ces
scores sont résumés dans le tableau 2.
Le logiciel RAI identifie également des problèmes qui
nécessiteraient une intervention spécifique (domaine d’in-
tervention) et émet un
tableau d’alarme
(figure 5). Ce tableau
d’alarme met en évidence des problèmes de santé ou fonc-
tionnels, tels que «chutes», «santé buccale» ou «douleurs»,
mais mentionne également des problèmes en lien avec la
prise en charge («fragili du système d’aide informel»,
«gestion des médicaments») ou des besoins de prestations
(«potentiel de réadaptation dans les Activités de la vie
quotidienne (AVQ)», «risque d’institutionnalisation»).
A chacune des rubriques du tableau d’alarme correspond
un
guide d’analyse par domaine d’intervention
(GAD) dans le ma-
nuel RAI-Domicile-Suisse. Il s’agit de petits chapitres dans
Figure 5. Exemple de tableau d’alarme
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