Introduction
La veille stratégique peut être présentée comme un système informationnel qui vise es-
sentiellement à fournir, analyser puis à diffuser des informations à valeur ajoutée auprès
des décideurs [C.W. Choo, 2002, H. Lesca et al, 2005]. Les pratiques de veille straté-
gique cherchent à accroître la réactivité de l’entreprise en détectant des signaux faibles
[Ansoff, 1975] ou signes d’alerte précoce [H. Lesca, 2003] qui permettent à l’entreprise
de s’adapter aux changements en émergence ou à venir dans son environnement. Ces
activités s’inscrivent clairement dans une perspective d’aide à la décision à travers des
pratiques de management de l’information.
Des travaux fondateurs de F.J Aguilar [1967] à des recherches plus récentes [M.J Han-
non, 1997; C.W.Choo, 2002 ; M. Salles, 2003, N. Lesca et Caron-Fasan, 2008, D. Sal-
vetat, 2008] un consensus semble s’être établi dans la littérature pour ce qui est de
l’utilité et de l’intérêt des activités de veille pour une entreprise.
Cela dit, dans le même temps, plusieurs auteurs soulignent les difficultés liées à la mise
en place au déploiement des pratiques de veille dans la pratique (N. Lesca et M-L. Ca-
ron-Fasan, 2008, I. Boulifa Tamboura et Z. Ben Ammar Mamlouk, 2009). En effet, les
managers sur le terrain avouent souvent ne pas savoir précisément en quoi consistent les
activités de veille, ni comment les mettre en place [H. Lesca, 2003]. Ce constat nous
amène à reprendre le questionnement suivant : pourquoi la veille stratégique n’est-elle
pas pratiquée et repérée de façon plus précise par les acteurs dans les entreprises ? Ou
en d’autres termes, Peut-on aider les manager a mieux comprendre ces pratiques et la
manière dont elles sont mise en place en entreprise ?
Ces questionnements inscrivent clairement notre article dans la perspective d’une con-
tribution à l’ingénierie des systèmes d’information de veille stratégique. Nous allons par
conséquent tenter de répondre à la question précédente en considérant essentiellement
les aspects structurels et organisationnels des systèmes de veille.
Notons dans un premier temps que les problématiques d’organisation des activités de
veille (ou d’IE1) dans les entreprises ne sont pas récentes. Dans les années 1970, les pro-
cessus de veille commencent à être formalisés en entreprise avec l’apparition de « cel-
lules de veille » : ceux que l’on appelle communément « les veilleurs » constituent un
personnel – généralement à temps plein – chargé par le management de faire de la veille
et affecté à un service particulier de l’entreprise (souvent la stratégie, le marketing ou la
R&D2, [M.J Hannon, 1997]). Ces cellules de veille témoignent d’un passage d’une
veille individuelle à une veille organisationnelle et reflètent une prise de conscience du
caractère nécessairement collectif de la veille.
De fait, vu le nombre de sources d’information qui existent pour une entreprise (les in-
formations publiées, les informations collectées via les clients, les fournisseurs, les ven-
deurs, etc.) la tâche de collecte d’information semble accablante voire impossible si elle
est confiée à une ou deux personnes dans l’entreprise [Gilad et Gilad, 1986].
1 IE : Intelligence Economique (au sens de Martre, 1994). Ici, nous employons indifféremment les ternes veille et
Intelligence économique car les différences entre les deux concepts ne sont pas significatives.
2 Recherche et Développement.