cette forme était incapable d’hydro-
lyser la succinylcholine (ce qui se
traduisait par la prolongation de l’effet
myorelaxant). À la suite de cette décou-
verte, on a élaboré le concept selon
lequel il existe des variations géné-
tiques dans les différentes populations
de patients, et que ces variations se
traduisent par des différences du taux
de métabolisme de certains médica-
ments. Depuis, des chercheurs ont
décrit les variations liées à plusieurs
cytochromes, dont le CYP 2D6.
Le CYP 2D6 a été l’objet de
recherches très approfondies. Des
scientifiques ont entrepris les pre-
mières recherches sur cette voie enzy-
matique après avoir constaté que
certains médicaments étaient métabo-
lisés rapidement chez certains patients
alors que, chez d’autres, les mêmes
médicaments étaient métabolisés plus
lentement. Les concentrations san-
guines des médicaments étaient donc
altérées. Ne pouvant encore expliquer
ce phénomène, les chercheurs ont
classé les patients comme ayant un
métabolisme rapide ou un métabo-
lisme lent. Cette classification n’est
pas vraiment utile parce qu’elle
dépend d’un patient et d’un médica-
ment donné. En d’autres mots, le fait
de savoir qu’un patient métabolise
rapidement le métoprolol n’aide pas à
savoir si d’autres médicaments vont
aussi être métabolisés rapidement.
D’autres recherches ainsi que le
développement de la génétique
moléculaire ont permis de découvrir
qu’il existe différentes copies du gène
qui code pour l’enzyme CYP 2D6.
Certains allèles produisent des
enzymes fonctionnelles, alors que
d’autres variants produisent des
enzymes non fonctionnelles. Chez les
sujets qui métabolisent lentement les
médicaments, on a décelé des copies
non fonctionnelles, alors que chez
ceux qui métabolisent les médica-
ments rapidement, on a décelé
plusieurs copies du gène fonctionnel.
Grâce à cette découverte, il est
beaucoup plus facile de prévoir les
interactions. Tout ce dont on a besoin
est une liste de tous les médicaments
métabolisés par le CYP 2D6. Les
patients porteurs de plusieurs copies
du gène codant pour le CYP 2D6
métaboliseraient tous ces médica-
ments plus rapidement, et ces patients
auraient donc besoin de doses plus
élevées pour maintenir les mêmes
concentrations sanguines. À l’opposé,
dans le cas d’allèle dysfonctionnel,
même une dose faible de médicament
risque de produire des effets toxiques.
De 7 % à 10 % des personnes de
race blanche et 3 % des personnes de
race noire ou asiatique présentent un
déficit en ce qui concerne l’enzyme
CYP 2D69. Voilà un exemple du rôle
important de la génétique pour étudier
le métabolisme des médicaments.
Traitements de la MA
Parce que la MA touche surtout les
personnes âgées, les questions de
polypharmacie et d’interactions médi-
camenteuses sont particulièrement
pertinentes dans cette population.
Pourtant, il importe de ne pas écarter
des médicaments efficaces à cause du
risque d’interactions médicamenteu-
ses. Il faut, au contraire, apprendre à
mieux connaître les interactions pour
prendre les mesures appropriées afin
de les maîtriser. Connaître et compren-
dre les interactions médicamenteuses
revêt une importance primordiale pour
améliorer le traitement des patients.
Lorsqu’une interaction contribue à
augmenter la concentration du médica-
ment, il faut alors réduire la dose. Au
contraire, si l’interaction réduit la con-
centration, la dose doit être augmentée.
En portant une attention particulière à
ces aspects, on peut prescrire de
manière sécuritaire divers médica-
ments en traitement d’association.
Le donépézil, la galantamine et la
rivastigmine sont les inhibiteurs de la
cholinestérase actuellement commer-
cialisés au Canada et approuvés pour
le traitement de la MA. Pour employer
un médicament de façon judicieuse, il
faut en connaître les caractéristiques et
il faut évaluer tous les aspects du
médicament avant de décider de le
prescrire à un patient donné.
Le donépézil, par exemple, est ca-
ractérisé par un taux d’absorption de
100 % et il n’entraîne pas d’interaction
avec les aliments. Sa demi-vie est de
70 heures, ce qui en fait un médica-
ment à dose quotidienne unique. De
plus, en raison de sa longue demi-vie,
il ne devrait pas y avoir d’apparition de
symptômes de sevrage en cas d’arrêt
brusque du traitement10. Tous ces
points sont importants, surtout chez les
patients âgés qui risquent d’omettre
une dose ou d’oublier qu’ils doivent
prendre des médicaments plus d’une
fois par jour. Pour leur part, la galanta-
mine et la rivastigmine ont toutes deux
des demi-vies plus courtes et doivent
donc être prises deux fois par jour11,12.
Le donépézil est métabolisé par le
CYP 3A4 et le CYP 2D6, tout comme
la galantamine9,13. Cela signifie que les
inhibiteurs de ces enzymes pourraient,
en théorie, accroître leurs concentra-
tions sanguines.
Les principaux inhibiteurs des
enzymes CYP 3A4 et CYP 2D6 sont
abordés dans d’autres sources de do-
cumentation6. Les médecins qui traitent
des patients prenant des inhibiteurs de
la cholinestérase (ou d’autres médica-
ments) métabolisés par ces enzymes
doivent bien connaître ces inhibiteurs.
On sait, par exemple, que de nom-
breuses personnes âgées boivent du
jus de pamplemousse, un inhibiteur du
CYP 3A4. Il importe d’expliquer à ces
patients que le jus de pamplemousse
risque d’augmenter la concentration
La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • Septembre 2003 • 13
[...] lorsqu’on comprend bien ces termes (substrats,
inhibiteurs, inducteurs, compétition), on peut prévoir les
interactions médicamenteuses avant qu’elles surviennent.