Juillet-Août 2001 • 29
Maladie, fin de vie et mort
dans la vie chrétienne
(…) « Comprendre » la mort dans la foi fait
que, pour le chrétien, regarder la mort en face
devient un ars moriendi chrétien, un art de
mourir qui consiste à sattacher à Dieu dans
la confiance et à se déprendre de soi-même.
Dans la mort, notre foi est mise à l’épreuve
une dernière fois : elle met à l’épreuve notre
abandon à la certitude confiante que, dans sa
fidélité, Dieu nous demeure présent et nous
fait don dun avenir et de la vie, même si les
apparences sont contraires. Plus nous aurons
appris à garder notre confiance croyante en
Dieu dans les épreuves de notre vie, plus
aussi nous pourrons dire un oui confiant à
Dieu dans l’épreuve de notre mort.
Pour demeurer ainsi attachés à Dieu nous
avons à nous déprendre des liens et des sécu-
rités de notre vie terrestre. Nous déprendre
signifie nous détacher, accepter de perdre
dans la douleur, et ne plus nous cramponner
à ce à quoi nous étions attachés dans notre
vie. Se déprendre, cest aussi laisser derrière
soi des souhaits, des espérances restés inac-
complis. La foi nous donne la liberté daller
notre chemin dans la certitude de Dieu en
nous déprenant de ce qui est terrestre, et de
nous savoir profondément unis au Christ qui
a pris avant nous le chemin de la souffrance et
de la mort. Il nous est donné davoir part à
ce chemin (voir 1 Co 1, 24) qui conduit à la
résurrection. Cette attitude de foi nourrit
lespérance et donne un sens à la souffrance.
Depuis toujours, la piété chrétienne a vu
aussi dans cette attitude à l’égard de la souf-
france et de la mort une vocation à ne jamais
perdre de vue.
Il sagit de connaître le Christ, et la puis-
sance de sa résurrection et la communion à
ses souffrances, de devenir semblable à lui
dans sa mort. [Ph 3, 10.]
Dans leur Catéchisme pour adultes, les
évêques allemands abordent la question de
l’euthanasie. Ils la situent dans le cadre d’une
réflexion sur le cinquième commandement et,
plus précisément, sous la rubrique « le soin des
personnes malades et mourantes ». Nous
proposons ici l’essentiel de leurs remarques
sur « l’art de mourir chrétien » ainsi que leurs
repères pour mieux discerner une ligne de
conduite moralement acceptable dans des
situations particulièrement difficiles.
Notre mort est à appréhender à la lumière de notre
foi en Dieu et en Christ, mort et ressuscité.
Les progrès de la médecine apportant la guérison sont
bons, mais quand on s’attache à repousser la fin de la
vie par tous les moyens, cela remet en question le sens
même de la mort.
Il faut distinguer l’euthanasies passive de l’euthanasie
active : dans le premier cas, on laisse advenir la mort
naturelle, sans acharnement thérapeutique ; dans le
deuxième cas, on met prématurément fin à la vie.
Aider les personnes très âgées et les malades en
phase terminale à mourir, c’est les aider à accepter
leur finitude. Cette acceptation peut prendre plusieurs
formes (voir texte).
Légaliser l’euthanasie risquerait de changer le but
de l’activité médicale qui est de préserver et non de
supprimer la vie. Aux chrétiens de continuer de témoigner
plutôt de leur espérance dans l’amour de Dieu, en se
dévouant auprès des malades et des mourants.
La réflexion des évêques résume les positions quils
ont pris dans une série de documents publiés depuis
1978 sur la question de la mort, dont : «Mort digne
de lhomme et mort chrétienne » (DC 1979, n°1764,
p. 479) et «Laccompagnement des grands malades
et des mourants » (traduit en partie par Questions
actuelles, voir hors série n°5 de la DC, mai 1996).
Voir Catéchisme pour adultes : Vivre de la foi, (volume II)
de la Conférence épiscopale allemande, Centurion/Cerf, 1997,
p. 283-289. Titre de Questions actuelles.
RÉSUMÉ
PERSPECTIVES
FICHE DE LECTURE
Le chrétien et
« lart de mourir »
30 Questions actuelles
Le service des malades
et des mourants
La maladie et la mort ne sont pas seule-
ment un appel à vivre dans la conscience de
la mort et à nous préparer à mourir en chré-
tiens : elles nous confrontent également à des
problèmes éthiques.
Nous sommes responsables de la conserva-
tion de la vie, de la promotion de la santé, de la
lutte contre les maladies et de leur guérison,
ainsi que de laccompagnement et de laide aux
mourants. Tel est aussi le but de lactivité mé-
dicale et des soins dont le principe suprême est
le bien du malade au sens le plus global du
terme. Dans le christianisme, le service des
malades et des mourants est considéré depuis
toujours comme une «œuvre de miséricorde ».
Ces dernières années, la médecine a fait de
grands progrès dans de nombreux domaines.
Ces succès de la médecine moderne nous fas-
cinent. Rares sont ceux qui renonceraient à
en bénéficier lorsquils tombent malades.
Lorsquelle produit la guérison et restaure les
forces de la vie, elle ne peut qu’être approu-
vée du point de vue moral.
Mais les dangers éventuels liés à la mise en
œuvre de la technique dans les hôpitaux et
les cliniques sont de plus en plus manifestes.
La fascination exercée par ce quil est pos-
sible de faire a pour conséquence une modifica-
tion inquiétante de lattitude à l’égard du savoir
et du pouvoir médicaux et aussi du sens de la
vie et de la mort. Celui qui place une confiance
illimitée dans la technique verra dans le geste
médical une réparation ou un rétablissement de
la capacité dun organe à bien fonctionner; il
exigera d’être traité sans se préoccuper, si la
guérison nest pas assurée, du sens de prolon-
ger sa vie. Pour lui, la mort est lennemi à com-
battre par tous les moyens, à repousser jusqu’à
la fin inéluctable, même au prix dune prolonga-
tion de la vie dans des conditions pénibles. Un
autre risque de la mise en œuvre de toute la
science médicale est de rendre le patient dé-
pendant dun appareillage sophistiqué et oné-
reux et de le désapproprier de sa mort. La tech-
nique médicale peut ici devenir inhumaine. ()
() Voir plus
haut, p. 16.
Dans un entretien publié
par Questions actuelles en
mai 1996, Mgr Albert Rouet
explique le sens des soins
apportés à des gens, privés
de leur conscience :
Chaque personne porte en elle
un idéal qui lui donne le désir
d’être au mieux de ses
possibilités et de mourir en
pleine conscience. Lorsque cet
état nest pas atteint, on pense
que lhomme reste en dessous
de son existence. Bien des
regards portés sur ces situations
humaines extrêmes proviennent
de la déchirure de cet idéal.
Seulement cet idéal de
perfection existe-t-il en réalité ?
Ce qui est parfait nest pas
humain. Lhomme joue
perpétuellement entre la réalité
et une tension vers quelque
chose dautre. Il faut considérer
ceux qui sont dans une situation
inconsciente ou grabataire
comme dans un état qui
appartient à lhumanité, dans
ce quelle a de précaire et
dimparfait, comme pour toute
personne. Comment réagir ?
Il reste toujours le fait que l’être
en question, quel que soit son
état, appartient à lhumanité.
La relation aux autres nest pas
simplement affaire de liberté,
de conscience, de décision.
Elle est dabord un état qui
simpose à la liberté, à la
conscience et à la décision.
Cet être provient de lhumanité,
appartient à lhumanité par
son corps. Il serait étonnant de
pouvoir garder des photos,
des souvenirs et doublier, par
un idéalisme déplacé, le corps.
Or, par ce corps, la personne
reste frère de tous ceux qui ont
le même corps, la même
humanité. Le respect et les
soins apportés à des gens dans
une situation inconsciente
profonde continuent à montrer
quils sont les frères de ceux
qui soccupent deux au nom
de leur appartenance à la
même humanité.
LA PERSONNE SOUFFRANTE APPARTIENT TOUJOURS À LHUMANITÉ
Les dangers éventuels liés à
la mise en œuvre de la
technique dans les hôpitaux
et les cliniques sont de plus
en plus manifestes.
prolonger la vie pendant un certain temps, mais
qui ne ferait que prolonger des souffrances
intolérables. Il sagit de laisser mourir, non
dun geste provoquant la mort. Dans ce sens,
leuthanasie dite passive est considérée de ma-
nière générale comme moralement permise.
Renoncer à mettre en œuvre certains moyens
devient cependant une euthanasie active dans
le cas dune omission coupable portée par lin-
tention de mettre prématurément fin à la vie.
Leuthanasie active en revanche est une inter-
vention directe dans le processus conduisant à
la mort qui prend la forme dun geste homicide
à l’égard du patient, même si cela est conforme
à son souhait (« homicide à la demande »).
La déclaration sur leuthanasie (1980) de la
Congrégation de la Doctrine de la foi entend par
euthanasie «une action ou une omission qui,
de soi ou dans lintention, donne la mort afin
de supprimer ainsi la douleur ». Leuthanasie
existe donc au niveau de lintention comme des
méthodes mises en œuvre. (••)
Pour éviter les malentendus et les erreurs
dinterprétation, le terme «euthanasie » de-
vrait être utilisé seulement dans le sens
dune euthanasie active, cest-à-dire dun
geste provoquant le décès dun mourant (ou
dun malade incurable), ou dun renoncement
coupable à des soins de maintien de la vie.
Dans tous les autres cas, il faudrait toujours
parler daide à mourir, dassistance ou dac-
compagnement des mourants.
Malgré les dangers possibles de la mise en
œuvre des techniques de la médecine mo-
derne, il serait injuste de condamner a priori
le fait dy recourir. Les méthodes modernes
de diagnostic et de traitement des maladies
ont prouvé leur valeur pour obtenir la guéri-
son et permettre de continuer à vivre dans de
bonnes conditions.
À propos des possibilités de la médecine
moderne, la véritable question éthique est
celle-ci : le médecin a-t-il le droit de faire ce
que la médecine le rend capable de faire? La
vie doit-elle être maintenue et prolongée à
tout prix? Quest-ce qui, en fin de vie, est mo-
ralement permis et moralement interdit?
Toutes les tentatives de donner une ré-
ponse moralement justifiable à ces questions
et à dautres doivent partir du fait quon na
pas le droit de disposer de la vie humaine, à
quelque stade que ce soit, et que lhomme a
le droit de mourir dans la dignité. Avec les
malades et les mourants en phase terminale,
lobligation est de les aider à mourir et, tout
autant, lobligation de ne pas tuer.
Le sens du terme « euthanasie »
Dans le débat public, dans le langage
scientifique et dans celui du droit, mais éga-
lement dans des documents de l’Église, le
terme « euthanasie » revient fréquemment
lorsquil est question de laide et de lassis-
tance aux mourants.
Le mot «euthanasie » (eu-thanasia) signifie
littéralement «mort douce ». Dans lAntiquité,
ce terme signifiait dabord, tout simplement,
«aide en vue dune bonne mort ». Plus tard,
on entendit par là un raccourcissement inten-
tionnel du processus conduisant à la mort. Le
mourant nest pas aidé dans son passage vers
la mort; celui-ci est abrégé par un geste pro-
curant la mort. Dans le système national-
socialiste, on entendait par euthanasie la
«destruction de vie indigne de vivre », et
dans un «programme deuthanasie » on or-
donna la mise à mort de dizaines de milliers
de malades mentaux. Il ne sagissait pas de
faire mourir des mourants, mais de faire dis-
paraître des hommes malades mais vivants.
Aujourdhui les expressions «euthanasie
passive »et «active » sont dusage courant. ()
On entend par euthanasie passive le renonce-
ment à mettre en œuvre les moyens capables de
() Les évêques
du Canada
sont davis quil
ne faut plus
employer
les adjectifs
« active » et
« passive »
pour parler
de leuthanasie
à cause de la
confusion quils
risquent de créer
sur ce sujet (voir
plus loin, p. 35).
(••) Voir plus
haut, p. 10.
Dans leur déclaration « Mort digne de lhomme et
mort chrétienne » (voir « Perspectives » p. 29), les
évêques allemands rappellent limportance de la
promesse que Dieu nous accompagne toujours :
Cette promesse, le malade doit en outre pouvoir la
toucher, lexpérimenter dans la manière même dont
nous lassistons. La présence du Seigneur peut devenir
évidente lorsque nous sommes simplement aux côtés
du malade (). En nous efforçant d’être présent au
malade et d’être sensible à son sort, nous trouverons
du même coup les réponses qui nous permettront de
le comprendre vraiment. Même lorsque le mourant ne
semble plus avoir sa connaissance, nous pouvons
encore faire de petits gestes (). Grâce à une telle
assistance, le mourant peut pressentir, ou même
expérimenter, la mystérieuse présence de Dieu à ses
côtés, et se confier dans la foi au mystère de la mort.
LA PRÉSENCE DE DIEU AUX COTÉS DU MALADE
Juillet-Août 2001 31
32 Questions actuelles
La vraie aide aux mourants
Laide à mourir, comprise comme assis-
tance ou accompagnement du mourant, vise à
lui rendre la mort plus facile, à laider à vivre
sa propre mort. On pourrait donc parler daide
à vivre pour les mourants. Une telle aide peut
prendre des formes diverses.
Beaucoup de personnes meurent très âgées,
sans traitements agressifs et sans soins inten-
sifs. La mort survient au terme dun processus
de diminution de leurs forces et de défaillance
progressive de leurs fonctions vitales. Lassis-
tance aux mourants, cest ici utiliser les
moyens qui diminuent leurs souffrances. Dans
de telles situations, il ny aurait aucun sens, en
mettant en œuvre tous les moyens dispo-
nibles, à vouloir prolonger la vie au-delà de la
survenue prévisible de la mort naturelle. Le
respect de la fin inéluctable demande de seffa-
cer et daccepter la mort. Outre lassistance
médicale, normale, laide apportée au mourant
consistera en soins, en une sollicitude et un ac-
compagnement personnels qui soulageront le
mourant dans la phase ultime de sa vie, et per-
mettront de mourir dune mort chrétienne. On
cherche aujourdhui à assurer cette aide et cet
accompagnement grâce à des personnes et des
services formés à cette fin.
Cela vaut également pour les situations où le
processus conduisant à la mort a abouti à la
cessation progressive des fonctions biolo-
giques, et à laquelle viennent sajouter soudain
des complications (pneumonie par exemple)
qui accélèrent le processus. Ici, en règle géné-
rale, le médecin nest pas tenu de combattre
les complications, ce qui ne ferait que surseoir
à une échéance proche et inéluctable.
La question se pose de savoir ce quil est
permis de faire pour un malade en phase ter-
minale en proie à de grandes souffrances, quil
est possible de combattre, mais par des
moyens qui, outre la neutralisation de la dou-
leur, peuvent avoir pour effet possible daccé-
lérer la mort en cas de traitement prolongé.
Étant donné le développement actuel des mé-
dicaments anti-douleur, cette possibilité ne
devrait pas être fréquente, mais elle ne peut
être exclue. Un médecin qui aurait connais-
sance des effets secondaires de ce type pour-
rait-il néanmoins administrer de tels remèdes?
Lorsquun groupe de médecins posa cette
question à Pie XII (), il répondit : «Lorsque
dautres moyens font défaut, et que compte
tenu des circonstances on nempêche pas par
là laccomplissement du devoir religieux et
moral qui demeure, cela est permis. » Il ne
sagit pas ici de donner la mort de façon inten-
tionnelle; écourter la vie est un effet secon-
daire de lapaisement des souffrances.
Parfois une personne qui souffre dune ma-
ladie incurable, et qui, selon le diagnostic du
médecin et le pronostic médical, na plus une
grande espérance de vie, pourra sinterroger
sur lopportunité de se soumettre à une opé-
ration qui, sans doute, pourrait différer la
mort, mais entraînerait également de graves
séquelles corporelles et psychiques. Si le ma-
lade se prononce de façon consciente et libre
contre cette intervention, sa décision doit
être respectée car, au lieu dune prolongation
des souffrances qui na pas de sens, le malade
opte pour une mort consciente et digne.
() Voir encadré
p. 11.
À loccasion de la « Semaine pour la Vie 1996 »,
le Conseil des Églises Évangéliques et la
Conférence épiscopale dAllemagne ont publié
une déclaration commune intitulée : « La fin de
la vie, cest encore la vie ». Voici un résumé de
leurs propos sur limportance du mouvement
des soins palliatifs et ses objectifs :
Ce Mouvement des soins palliatifs, né en Allemagne
sous limpulsion de la Grande-Bretagne et des
États-Unis, a démarré lentement et a connu bien des
difficultés et des échecs. Mais il ne sest jamais laissé
détourner de ses objectifs, à savoir :
reconnaître la fin de la vie comme faisant partie de la
vie ;
découvrir le sens de la fin de la vie ;
faire prendre conscience que les mourants et leurs
proches sont à accompagner ensemble ;
apporter le support dune équipe interdisciplinaire ;
associer des auxiliaires bénévoles, hommes et femmes ;
assurer le suivi de tous les acteurs ;
sassurer de la coopération de toutes les personnes
impliquées dans chaque situation que lon prend en
charge ;
intégrer le concept de soins palliatifs dans les services
et les institutions existant ;
avoir des connaissances spécialisées en matière de
contrôle des symptômes ;
assurer la continuité de la prise en charge ;
accompagner les endeuillés.
Cf. DC 1996, n°2138, p. 493-497.
LES OBJECTIFS DES SOINS PALLIATIFS
Juillet-Août 2001 33
tion danalgésiques qui rendent la douleur
physique supportable. Cela nexclut pas, il est
vrai, quun malade proche de sa fin soit écrasé
par des souffrances morales que personne
narrive à atténuer et quil manifeste le sou-
hait que tout cela prenne fin. Il sagit alors
dun appel et dune demande daide. Cette
situation est à mettre en rapport avec lobser-
vation suivante : dans une société où la vie
faible, malade, mourante ne saccorde plus
avec lunivers du rendement et de la consom-
mation, les malades et les mourants pourront
facilement avoir ce sentiment : je ne vaux plus
rien, je ne fais plus quimposer des charges,
des dépenses et du travail aux autres.
Il est temps de reprendre conscience du fait
quaucune vie humaine ne perd sa valeur et sa
dignité, si misérable et apparemment inutile
quelle puisse être. La souffrance et linfir-
mité font partie de la condition humaine.
Nous mésestimerions cette vérité en niant la
souffrance liée à la vie, et si nous n’étions
plus disposés à lendurer.
Le principe éthique de la
proportionnalité
Des problèmes particuliers sont posés au-
jourdhui par les possibilités médicales et
techniques de la réanimation. Pour parvenir à
un jugement moralement juste concernant la
mise en œuvre des techniques de réanima-
tion, le principe éthique est celui de la pro-
portionnalité selon lequel «on appréciera les
moyens en mettant en rapport le genre de
thérapeutique à utiliser, son degré de com-
plexité ou de risque, son coût, les possibilités
de son emploi, avec le résultat quon peut en
attendre, compte tenu de l’état du malade et
de ses ressources physiques et morales » ().
De ce principe découlent des conséquences
importantes pour une utilisation moralement
responsable des techniques de réanimation.
Les mettre en œuvre est une obligation mo-
rale lorsquun malade a des chances de retrou-
ver la santé. Si en revanche tout espoir damé-
lioration est exclu et quy recourir ne ferait
que prolonger la phase terminale de la vie, re-
noncer est une décision moralement accep-
table. Elle respecte la condition mortelle de
lhomme et le terme fixé par Dieu. Elle sup-
pose cependant lassentiment du malade ou, si
cela nest plus possible, laccord des proches.
Mourir dans la dignité inclut également de ne
pas mettre un patient sous respiration artifi-
cielle si celle-ci na dautre résultat que de
maintenir des fonctions biologiques.
À propos de la mort donnée intentionnelle-
ment à un malade incurable ou à un mourant,
des situations extrêmes nappellent-elles pas
des critères spécifiques? Nest-il pas compa-
tible avec la foi chrétienne de faire une injec-
tion libératrice à un homme en proie à des
souffrances atroces et qui le demande?
L’éthique chrétienne refuse un tel acte. La vie,
un don Dieu, est portée par Dieu et référée à
lui en chacun de ses instants, jusqu’à sa fin ter-
restre et au-delà. Mettre fin à la vie délibéré-
ment signifierait une volonté den disposer,
moralement inacceptable. Du reste les progrès
de la médecine moderne en matière de lutte
contre la douleur ont rendu très rares les cas
dans lesquels celle-ci ne peut être contrôlée.
Du point de vue chrétien, il nexiste pas de
droit de mettre fin à une vie, mais bien un
droit de mourir dignement. Cette préoccupa-
tion peut être rencontrée grâce à ladministra-
() Ce principe
a été élaboré
dans la
déclaration de
la Congrégation
pour la Doctrine
de la foi (voir
plus haut,
p. 12).
La « machine à suicide » tant controversée, employée
dans l’État du Michigan, aux États-Unis.
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