18 AMPLICHIPS Plateforme biopuces à ADN Roche/ Affymetrix en routine Apport de l’AmpliChip CYP 450, première biopuce marquée CE IVD, dans l’ajustement des traitements INNOVATION I De gauche à droite : Dr Michaëla Rebsamen, Dr Michel Rossier, Mme Adeline Diemand, Pr Hochstrasser et M. A. Chiappe Reportage aux Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) Aujourd’hui utilisées en pharmacogénétique, les applications potentielles des biopuces sont multiples et la technologie mise en œuvre s’appliquera dans de nombreux domaines. En janvier 2006, une réunion a été organisée aux HUG, entre des spéciaR O C H E D I A G N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N° 74 - MAI 2 0 0 6 listes de pharmacogénétique ou de médecine de laboratoire, français (Pr Beaune, Dr Loriot, Dr Méary) et suisses (Pr Dayer, Pr Hochstrasser, Dr Rossier). À l’occasion de cette visite, 10 000 BIO a souhaité interroger le Dr Michel Rossier nstallée depuis près de 9 mois au laboratoire central de chimie clinique des HUG, service du Pr Denis Hochstrasser, la plateforme AmpliChip réalise en routine et dans le cadre d’études cliniques, le test AmpliChip CYP450. Ce test de génotypage permet de prédire la susceptibilité individuelle au traitement de patients souffrants de certaines affections. sur son expérience pionnière et le Pr Philippe Beaune chez qui la première plateforme française AmpliChip CYP P450 a été installée en mars. AMPLICHIPS Le laboratoire équipé de la plateforme biopuces à ADN Roche/Affymetrix nous est présentée par A. Chiappe • Une section Toxicologie et suivi thérapeutique, assurant le dépistage de toxiques ou le dosage des médicaments. • Une section R&D, spécialisée dans les approches protéomiques et la découverte de nouveaux bio-marqueurs et enfin, sous ma responsabilité (Le Dr Rossier est privat-docent, équivalent d’un MCU-PH dans le système français – NDRL), une section un peu hybride, avec des intérêts aussi bien dans le domaine de l'endocrinologie (hormones stéroïdes) que de la pharmacogénétique. Nous sommes également en charge de la surveillance des analyses de proximité (effectuées au lit du patient) pour toute l'institution. Une partie des activités de ma section concerne donc la mise en place des technologies de biologie moléculaire appliquées à la chimie clinique. Les disciplines ciblées sont la pharmacologie et l’oncologie, ceci en rapport avec les nombreux dosages de marqueurs tumoraux ou de médicaments déjà réalisés dans les autres sections du service, et nous avons maintenant un recul d'environ 6 ans dans ce domaine. » En quelques chiffres, quelle est l’activité des HUG ? L’activité des HUG est répartie sur plusieurs sites avec un total de 2 200 lits. Le site principal où nous nous trouvons représente plus de 1 000 lits et comprend les soins aigus, y compris pédiatrie et maternité. Le laboratoire couvre l’ensemble des analyses de ce site et les analyses spécialisées des autres sites. L’activité des différents laboratoires est d’environ 3 millions d’analyses/an, la majorité étant effectuée en chimie clinique. » Quelle est la place de la pharmacologie et de la pharmacogénétique dans ce contexte ? « Les prestations de la section Toxicologie dans le domaine du suivi thérapeutique a depuis longtemps créé une forte interaction entre le laboratoire et le service de pharmacologie clinique du Pr. P. Dayer. À la demande des cliniciens, les pharmacologues sont régulièrement consultés en cas d’inefficacité de traitement, ou, à l’inverse, d’effets indésirables qui peuvent être très graves pour le patient et très coûteux pour la société. Dans ce contexte, l’idée d’introduire au laboratoire la pharmacogénétique est venue tout naturellement pour compléter nos techniques de toxicologie analytique. Nous avons bien entendu développé en parallèle des méthodes conventionnelles de phénotypage (analyse de la cinétique d'apparition des métabolites du médicament ou d'une substance analogue ayant R O C H E D IAG N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N ° 74 - M A I 200 6 INNOVATION Pouvez-vous nous décrire l’organisation de votre laboratoire ? « Le Laboratoire Central de Chimie Clinique (LCCC) des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) dépend du département de pathologie clinique dirigé par le Pr Denis Hochstrasser. Ce laboratoire est accrédité depuis un peu plus de 5 ans, accréditation qui vient d’être confirmée en 2005. L’activité du service de Chimie Clinique nécessite des techniques très variées, allant des gros automates de routine pour les analyses en urgence, capables de rendre des résultats avec un temps médian inférieur à 35 minutes, jusqu’à des méthodes beaucoup plus manuelles (chromatographie, électrophorèse, biologie moléculaire, examens microscopiques). De nombreuses analyses spécialisées sont également mises au point au sein du service, par exemple en toxicologie (spectrométrie de masse) ou dans le domaine de la protéomique. Le LCCC (qui comprend une centaine de collaborateurs) est organisé en plusieurs sections : • Une section Urgence qui fonctionne 24 h/24 h autour de gros automates à haut débit. • Une section Routine & Qualité pour des examens plus spécialisés (métabolites, activités enzymatiques, marqueurs particuliers) exécutés en série, notamment par électrophorèse ou par chromatographie. Le responsable de cette section a aussi en charge la gestion de la qualité pour l’ensemble du service de chimie clinique. • Une section d'analyses courantes, située sur un autre site des HUG (hôpitaux de gériatrie et de psychiatrie). • Une section Examens Biologiques : analyses d'urines, de lavages bronchoalvéolaires et autres liquides biologiques, y compris par microscopie (analyse des sédiments). Certains paramètres endocriniens non pratiqués au laboratoire d’urgences y sont également analysés par immuno-dosage. 19 20 AMPLICHIPS Cas clinique Intoxication à la codéine lié au polymorphisme du cytochrome P450 2D6 Nous avons récemment rapporté(1) le cas d'un patient de 62 ans hospitalisé après plusieurs jours de fatigue, dyspnée, fièvre et toux persistante. Il a subi trois mois plus tôt une chimiothérapie pour une leucémie chronique et il prend quotidiennement de l'acide valproïque (1 500 mg/jour) depuis plusieurs années suite à une crise épileptique généralisée. À son arrivée, le patient est parfaitement conscient et orienté, bien que clairement hypoxémique (pO2 = 7.5 kPa (56 mmHg)). L'investigation clinique et radiologique suggère alors une pneumonie bilatérale et un lavage broncho-alvéolaire révèle la présence de levures. Un traitement adéquat est alors initié (ceftriaxone, clarithromycine et voriconazole) et 25 mg de codéine sont administrés 3 fois par jour pour apaiser sa toux persistante. Au 4e jour d'hospitalisation, alors que sa dernière prise de codéine remonte à 12 heures, l'état du patient se détériore, celui-ci perd conscience et devient rapidement comateux. Il est alors transféré aux soins intensifs où il est ventilé artificiellement (sa pO2 est toujours à 7.5 kPa). L'examen neurologique révèle un coma à 6 sur l'échelle de Glasgow. Aucune amélioration de l'état neurologique n'est observée après 90 min de ventilation (malgré une pO2 remontée à 9.1 kPa (68 mmHg)). L'administration intraveineuse de naloxone (2 fois 0.4 mg), un antagoniste des récepteurs aux opioïdes, résulte alors en une amélioration drastique de l'état du patient qui peut alors être maintenu conscient et qui retrouve une fonction respiratoire normale. (1) Gasche Y. et al. 2004, N Engl J Med, 351:2827 INNOVATION Explication pharmacologique et physiopathologique La codéine est un "pro-médicament" qui doit être activé en morphine par le CYP 2D6 pour exercer son effet antitussif. L'analyse génétique, réalisée après cet épisode, a révélé la présence de copies supplémentaires du gène codant pour le CYP 2D6 chez ce patient, lui conférant ainsi un phénotype de "métaboliseur ultra-rapide" (comme chez environ 2-8 % de la population caucasienne). Ce résultat a été corroboré par les dosages plasmatiques (effectués pendant l'épisode du coma) de la codéine et de la morphine, cette dernière étant mesurée à 20 fois la concentration attendue. Le phénotype de métaboliseur ultra-rapide pour le CYP 2D6 a également été confirmé en mesurant la cinétique du métabolisme du dextrometorphane chez ce patient. La cause du coma a donc pu être clairement attribuée à une intoxication aux opioïdes (morphine et dérivés), due à une transformation trop rapide de la codéine. Cette surdose de morphine, due principalement à un polymorphisme du gène CYP 2D6, a encore été exacerbée chez ce patient par le fait qu'une voie secondaire du métabolisme de la codéine, le CYP 3A4, qui inactive normalement une partie de la codéine en norcodéine, était clairement inhibée par les autres médicaments administrés simultanément (ceci a été confirmé par un phénotypage du CYP 3A4), et par une insuffisance rénale aiguë qui a également contribué à maintenir des concentrations plasmatiques d'opioïdes élevées. Ce cas démontre l'intérêt clinique à déterminer à la fois le génotype et le phénotype de certaines voies métaboliques pouvant intervenir dans les effets indésirables de certains médicaments et d'ajuster au mieux de la situation et de façon individualisée le dosage de ces médicaments. la même pharmacocinétique). Naturellement, nous nous sommes intéressés très tôt aux différents cytochromes P450 (CYP450) très impliqués dans le métabolisme de très nombreux médicaments. Ainsi, à partir de trousses commerciales de PCR en temps réel sur Light Cycler (FRET) ou en Taqman, nous avons introduit des techniques pour le génotypage des principaux polymorphismes des CYP 2D6, 2C9, 2C19, entre autres. R O C H E D I A G N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N° 74 - MAI 2 0 0 6 Ces analyses sont effectuées à partir de quelques millilitres de sang complet du patient (en fait ses cellules sanguines), le matériel biologique de loin le plus couramment utilisé en chimie clinique. » Comment choisissez-vous les nouveaux tests de pharmacogénétique à développer ? « Le processus de développement de nouvelles techniques est un peu différent en pharmacogénétique comparativement aux autres secteurs de la biologie clinique. Généralement, c’est le laboratoire qui met en place de nouveaux dosages et qui les propose aux services cliniques. Jusqu'à présent, dans le cas de la pharmacogénétique, ce sont plutôt les pharmacologues qui nous ont sollicité pour développer de nouveaux tests répondant à un besoin précis en fonction de l’évolution des traitements dans tel AMPLICHIPS Comment concevez-vous la place de la technique AmpliChip CYP450 dans votre laboratoire ? « Nous avions déjà des techniques (commerciales ou développées au laboratoire) pour rechercher les génotypes (allèles) les plus fréquents des CYP450 2D6 et 2C19. Notre expérience acquise en 9 mois avec l'AmpliChip nous permet maintenant d’évaluer comparativement les performances des différents tests. Globalement, il existe une très bonne corrélation analytique entre nos techniques "classiques" et l'AmpliChip, mais la biopuce permet en un seul test de combiner l’étude des allèles 2D6 et 2C19. Surtout, un des avantages majeurs permis par le format biopuce est la capacité d’explorer en même temps un nombre beaucoup plus important d’allèles (pour le CYP 2D6, du moins), en particulier des allèles fréquemment rencontrés chez les patients d’ethnies non caucasiennes que nous ne pouvons pas rechercher de façon systématique simplement en multipliant le nombre de tests. Pour une ville internationale et cosmopolite comme Genève, et face à l’accélération des échanges inter-culturels et des migrations de population, pouvoir rechercher des polymorphismes a priori rares, mais néanmoins répandus dans d'autres ethnies, répond presque à une exigence éthique. Enfin, un autre intérêt de la biopuce est de pouvoir définir, en cas d'allèle multidupliqué détecté simultanément avec un allèle déficient, l'identité de l'allèle impliqué afin de mieux prédire le phénotype résultant (seule la duplication d'un allèle normal donnera un phénotype de métaboliseur ultrarapide). Cette distinction ne peut pas être faite avec une méthode de génotypage classique. » Quels développements espérez-vous sur AmpliChips ? « Ils sont nombreux. En effet, les potentialités de cette technologie sont énormes. Actuellement, nous déterminons les polymorphismes de deux gènes, mais nous pourrions tout aussi bien analyser plusieurs milliers de gènes simultanément sur le même genre de puce. La limitation n'est plus d'ordre technologique, mais la question consiste maintenant à déterminer quels sont les gènes pertinents dont l'analyse permettra d'améliorer la prise en charge du patient. Par exemple, aujourd’hui le test AmpliChip CYP450 donne des informations sur la pharmacocinétique des médicaments à voie métabolique hépatique CYP 2D6 et 2C19-dépendants, mais nous espérons pouvoir un jour rechercher des polymorphismes dans les gènes-clés intervenant également dans la pharmacodynamie des médicaments. En outre, les développements en cours dans le domaine de l'oncologie sont aussi immenses, et notre laboratoire, qui travaille également sur les phénomènes de régulation épigénétique par hyperméthylation, attend beaucoup de la technologie des puces à ADN. Nous ne doutons pas que ce type de plateforme s’ouvrira à un grand nombre d’applications. » Vos plateformes de biologie moléculaire, qu’il s’agisse du Light Cycler ou de l’AmpliChip, sontelles exclusivement utilisées par le service de Chimie clinique. Quelle est votre philosophie en terme de mise en commun de moyen ? « Vous avez raison de m’interroger sur ce point. En effet, la politique du service est très en faveur de l’ouverture de ces plateformes à d’autres services, pour d’autres applications. C’est déjà le cas pour la PCR en temps réel (Light Cycler) utilisée par d’autres services, par exemple pour le génotypage en routine des Apolipoprotéines E ou dans des domaines plus expérimentaux comme la transplantation d'îlots pancréatiques (étude du relargage des cellules Bêta dans la circulation sanguine après transplantation, par analyse des ARN messagers circulants de l’insuline). Si ce n’est pas encore le cas pour la plateforme AmpliChip, les développements de nouveaux tests nous imposeront forcément d’aller dans cette voie d’une communauté de moyens. Cette mise en commun de plate-formes techniques est d'ailleurs un des points centraux du projet de regroupement des laboratoires actuellement en cours aux HUG. » Cette plateforme est à la pointe en matière d'innovation biologique. Cette image novatrice est-elle importante pour votre laboratoire ? « Oui. On est toujours sensible à l’image de son laboratoire ! Physiologiste et endocrinologue de formation initiale R O C H E D IAG N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N ° 74 - M A I 200 6 INNOVATION ou tel secteur thérapeutique, en particulier celui de la douleur pour lequel nous avons une expertise mondialement reconnue à Genève. Cette interaction est extrêmement motivante et nous entretenons des liens privilégiés avec le service de Pharmacologie Clinique (Pr. P. Dayer et Dr J. Desmeules). La première phase d’introduction d'une nouvelle analyse est en règle générale initiée au travers d’études cliniques, dont certaines viennent d’être récemment publiées. Outre les objectifs spécifiques des études, bien définis en amont par l’investigateur, il s’agit aussi pour nous de valider la pertinence clinique d’un test, c'est-à-dire de bien définir dans quelle situation il présentera vraiment une aide pour la prise en charge et/ou le suivi thérapeutique (choix de la molécule et de la posologie initiale). Ainsi que mesurer et démontrer l’impact médico-économique favorable de l’introduction de la pharmacogénétique en routine. » 21 22 AMPLICHIPS Question à… Donc, pour résumer, 3 intérêts majeurs : dans ce domaine, et l’idée du réseau est • donner de la puissance à nos études de de valider la démarche de pharmacogéné- validation et réaliser nos travaux de recherche tique. Pour cela nous étudierons comment dans de très bonnes conditions, mieux utiliser ces médicaments ; adaptation • introduire cette technologie que nous pen- de la dose ou de la molécule en fonction des sons d’avenir à de multiples développements données de la pharmacogénétique. Dans ce possibles en biologie ; en mesurer toutes les cadre, nous envisageons bien sur que soient possibilités et la praticabilité, développées d’autres enzymes du métabo- • développer la pharmacogénétique à lisme aussi impliquées dans d’autres classes l’hôpital. » thérapeutiques. Je pense qu’une très vaste Pr Philippe Beaune, responsable du pôle Biologie Hôpital Européen Quelles sont pour vous les limites le "défrichage" sont d’ores et déjà acquis. G. Pompidou (HEGP), Paris de la pharmacogénétique ? Maintenant il nous faut modéliser et valider « Elles sont dictées par l’évolution de la l’utilisation de ces tests en routine. » En tant que spécialiste du cytochrome P450, quel est pour vous l'intérêt d’intégrer la plateforme DNA Roche/ Affymetrix dans votre laboratoire ? « Nous travaillons depuis longtemps dans INNOVATION connaissance théorique sur le sujet et que le domaine de la pharmacogénétique et nous constatons aujourd’hui que son intérêt commence à s’imposer dans les esprits. Cependant, il est encore difficile de développer cette discipline en routine dans un laboratoire de chimie clinique. Certaines applications sont bien définies mais des études de validation doivent encore être faites. Sous l’égide de l’INSERM, nous mettons en place plusieurs réseaux de pharmacogénétique pour définir les études et méthodologies qui permettraient de valider le concept de pharmacogénétique en pratique clinique de routine. D’autre part, nous pensons que les biopuces sont promises à un grand développement et il nous semble qu’introduire cette technologie dans notre laboratoire, sur un sujet que nous recherche pharmaceutique. Les R&D des laboratoires connaissent de mieux en mieux, Pour d’autres applications ? et de plus en plus tôt, les enzymes impliquées « Bien entendu. Ce n’est pas une pensée dans le métabolisme des nouvelles molécules révolutionnaire, nous souhaitons que se déve- en développement. Dans la mesure du possi- loppent sur le standard Roche Affymetrix ble, tout est fait pour de modifier une molécule d’autres applications et nous avons des idées pour la rendre moins dépendante d’un cyto- déjà bien avancées sur les classes thérapeu- chrome. Mais cela n’est pas toujours possible, tiques : par exemple, les anti-cancéreux, les car l’activité de ces molécules est souvent liée immunosuppresseurs, et les anticoagulants. à leur structure tri-dimensionnelle et donc à Je pense effectivement qu’une plateforme leur métabolisme cytochrome-dépendant. unique permettant de développer différentes De plus toutes les enzymes impliquées dans applications semble préférable à une multipli- le métabolisme des médicaments présentent cation de systèmes pour chaque application. de nombreux polymorphismes génétiques. Il doit y avoir une logique similaire aux autres Au total, il y aura donc toujours des compro- domaines de la biologie (immuno-analyse, mis pour le design de ces molécules entre biologie moléculaire…). performance et confort (métabolisme hépati- Par ailleurs chaque biopuce devra, dans ce que, effets secondaires, pharmacodynamie…). cadre, évoluer aux rythmes des connais- Dans ce contexte, l’exclusion totale de l’inte- sances cliniques. À l’issue de cette visite raction du 2D6 et 2C19 dans le métabolisme très intéressante au service de biochimie du des médicaments me semble peu probable. » Pr Hochstrasser, et aux conversations fruc- connaissons bien nous permettra d’en avoir la Votre service travaille beaucoup sur meilleure approche possible. Dans beaucoup les psychotropes, qu’envisagez-vous de domaines thérapeutiques, les cliniciens dans ce cadre ? ne sont pas demandeurs, mais dans le cadre « Vous d’essais cliniques nous aurons la possibi- Pharmacogénétique lité par une technique simple de donner des coordonné par le Pr Marion Leboyer (service réponses pertinentes, permettant d’élargir le de psychiatrie, Créteil). En effet, les psycho- champ de la pharmacogénétique actuelle. tropes sont une bonne cible d’application R O C H E D I A G N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N° 74 - MAI 2 0 0 6 faites référence des au "Réseau tueuses avec le Dr Michel Rossier et Mr A. Chiappe, j’accueille avec grand plaisir l’idée d’évaluer dans mon laboratoire la biopuce Roche P450. » Psychotropes" NB : La plateforme a été installée au laboratoire du Pr Baune en mars 2006. Son fonctionnement est sous la responsabilité du Dr Marianne Loriot, pharmacogénéticienne. mon intérêt pour la biologie moléculaire est venu plus tardivement, lorsque les applications possibles dans ce domaine sont devenues plus concrètes. Ce qui a vraiment été un tournant novateur pour le laboratoire, c’est l’explosion de la biologie moléculaire hors de la génétique médicale classique. Cette discipline amène cependant des questions auxquelles nous n'étions pas habitués dans d’autres domaines analytiques. Autour de cette thématique, nous avons créé, sous l’impulsion du Pr D. Hochstrasser, un groupe de génétique clinique, sorte de laboratoire central virtuel de génétique. Il nous semble en effet fondamental d’approfondir la réflexion pour bien comprendre la différence entre l’analyse génétique et les autres types d’analyses : l’information génétique révélée ne concerne pas seulement le patient isolé, mais peut retentir sur ses ascendants et descendants, qu’on pense par exemple au problème de filiation… Dans ce cadre, la loi suisse sur les analyses génétiques humaines nous impose un cadre légal et éthique très strict, tel l’obtention obligatoire d’un consentement éclairé du patient pour la pratique de ces tests. Au total, la mise en place de cette plateforme nous amène à repenser nos approches en biologie médicale. C’est une démarche par essence très novatrice et valorisante pour notre profession. » Quelle est la prescription pour ces tests ? « La demande en génotypage CYP 2D6/ 2C19 en 2005 était encore relativement modeste (une cinquantaine de patients) et limitée aux pharmacologues sollicités par les cliniciens se trouvant devant des difficultés d’ajustement de traitement. Le résultat du laboratoire est systématiquement communiqué au pharmacologue qui complète le rapport d'analyse par une interprétation clinique circonstanciée. Celle-ci est essentielle pour qu’un résultat de génotypage ou de phénotypage soit directement compréhensible par le clinicien. Cette collaboration étroite avec le Centre d'informations thérapeutiques et de Pharmacovigilance (Dr J. Desmeules) est sans aucun doute une valeur ajoutée à notre prestation analytique et, même, une condition pour la réalisation de ces tests. » Phénotypage, génotypage ? « C’est une question que l’on s’est posée très tôt : faut-il faire les deux, et si oui, lequel avant l’autre ? Très clairement, les deux informations se sont rapidement avérées parfaitement complémentaires et elles peuvent être demandées et réalisées indépendamment l’une de l’autre. La différence essentielle, c’est que le génotypage est réalisé une seule fois dans la vie du patient et détermine le "fonds génétique" alors que le phénotypage n’est pas définitif, pouvant changer au gré du temps en fonction de l’âge et de l’état physio-pathologique du rein et du foie. » En pratique, que vous apporte l’AmpliChip ? « En pratique, cette technologie nous fait gagner du temps car nous obtenons en une seule étape l’information nécessaire à l’étude du polymorphisme très vaste 2D6 et 2C19, contrairement à nos techniques précédentes pour lesquelles nous utilisions un algorithme de réactions en chaîne pour avancer dans la détermination du génotype, commençant par l'analyse des allèles les plus fréquents. Sur le sang ou un bon matériel biologique, cette technique est remarquablement fiable. Grâce à la redondance des informations obtenues par cette technologie, c'est un peu comme si nous répétions six fois l'analyse de chaque allèle. Reste la question du coût encore élevé aujourd’hui, comme pour toute nouvelle technologie de pointe (les réactifs et la puce coûtent par échantillon environ 450 e). » À quelles conclusions, en terme d’application clinique, votre expérience de l’AmpliChip vous amène-t'elle ? « Notre phase de mise en place n’est pas encore terminée, mais il est clair que ce test aura des indications précises et cliniquement validées. Je vois des applications évidentes pour des médicaments où l’ajustement doit se faire très rapidement et dans une fenêtre thérapeutique étroite, en fonction de chaque individu, particulièrement dans des domaines comme l'oncologie ou la psychiatrie. Nous souhaiterions déterminer pour quels médicaments un génotypage avant mise en route de traitement serait particulièrement bénéfique. Cette approche nous permettra ainsi, à terme, de ne plus traiter simplement des ensembles de patients mais des patients personnalisés. C’est un des éléments majeurs de la médecine individualisée. » Contact Roche Diagnostics : fred[email protected] BIBLIOGRAPHIE - Pirmohamed M. and Park B.K. (2001) "Genetic susceptibility to adverse drug reactions" Trends Pharmacol Sci 22:298. - Phillips K., et al. (2001) "Potential role of pharmacogenomics in reducing adverse drug reactions" J Am Med Ass 286:2270. - Samer C.F. et al (2004) "Le polymorphisme génétique du cytochrome P450 2D6: le bon, l'ultrarapide, l'intermédiaire et le lent" Med Hyg 62:697. Informations sur le web Amplichip CYP450 et autre AmpliChip : http://www.rochediagnostics.com/products_ services/amplichip_cyp450.html#links Technologie des puces à ADN : http://www.affymetrix.com/technology/index.affx Polymorphisme des cytochromes P450 : http://www.imm.ki.se/CYPalleles/ Service de Pharmacologie et Toxicologie cliniques des HUG : http://www.pharmacoclin.ch/QuickPlace/ pharmacoclin/Main.nsf/ R O C H E D IAG N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N ° 74 - M A I 200 6 23 INNOVATION AMPLICHIPS