Chez les patients sévèrement distendus, quelle qu’en soit l’étio-
logie, l’amélioration de la CI est bien plus fréquente que celle du
VEMS. Dans une large série de patients très distendus, une amé-
lioration significative du VEMS seul était obtenue dans seule-
ment 11 % des cas, alors qu’une augmentation de la CI avec
réduction parallèle du VR concernait 43 % des patients ( 2 0 ).
L’“effet volume” est d’autant plus prédominant que le patient
présente une obstruction sévère ( 2 1 ). L’amélioration de la CI sous
bronchodilatateur longue action est également plus importante
que celle du VEMS chez les patients BPCO distendus (22). Lors
d’un test de bronchodilatation maximale, utilisant une nébulisa-
tion de salbutamol et de bromure d’ipratropium à forte dose chez
des patients BPCO stables, l’amélioration de la CI s’avérait net-
tement supérieure à celle du VEMS (0,34 l versus 0,15 l), et sans
lien avec l’effet du bronchodilatateur sur la limitation des débits
expiratoires évaluée par la technique NEP (pression expiratoire
négative) (2). Chez les patients BPCO non réversibles en termes
de VEMS, on constate une amélioration de la CI et donc de la
distension, alors que la limitation des débits expiratoires reste
inchangée (23, 24). Les patients semblent privilégier, en termes
de “stratégie ventilatoire”, la diminution de la distension, source
majeure de dyspnée. Dans la BPCO, l’amélioration de la CI sous
différents bronchodilatateurs est plus importante chez les patients
ayant une CI basale diminuée (< 80 % de la valeur théorique) ;
elle est d’ailleurs significativement corrélée dans ce sous-groupe
à l’amélioration de la dyspnée ( 2 5 ) . L’effet plateau sur la CI atteint
son maximum 30 minutes après l’administration du bronchodi-
latateur.
Une seule étude a fourni des résultats contradictoires dans la
BPCO, en ne retrouvant aucun lien entre l’amélioration de la dys-
pnée sous bronchodilatateur et le gain en CI ( 2 6 ). Les auteurs
expliquent cette absence de corrélation avec les modifications de
la dyspnée par la variabilité importante de la CI au repos, liée à
la fois à la distension et à l’obstruction expiratoire et inspiratoire.
En revanche, une corrélation très significative apparaissait entre
la variation de la dyspnée sous bronchodilatateur et le volume
inspiré maximal-seconde (VIMS), paramètre dynamique prenant
en compte l’efficacité de l’inspiration. Ces données contradictoires
nécessitent une confirmation par d’autres études.
En l’absence de données précises à large échelle sur la repro-
ductibilité de la mesure, le problème pratique est de déterminer
le niveau d’amélioration de la CI permettant de définir une réver-
sibilité sur ce paramètre. Là encore, il n’existe pas de recom-
mandation officielle. Plusieurs études ont proposé un seuil de
10 ou 12 % par rapport à la valeur de base pour définir une réver-
sibilité significative sur la CI (2, 20, 25). D’autres auteurs retien-
nent comme seuil 10 % de la valeur théorique (19).
UTILISATION PRATIQUE ET PERSPECTIVES
En pratique, la CI est un complément utile de la CVF dans l’éva-
luation de nombreuses pathologies, notamment obstructives.
C’est le paramètre le plus simple pour évaluer indirectement la
distension et la contrainte restrictive. Sa simplicité de réalisation
et les résultats des récentes études justifient son emploi large,
voire systématique, lors des tests de réversibilité sous broncho-
dilatateur chez les patients considérés comme “non réversibles”
en termes de VEMS. Nous avons vu son intérêt majeur en asso-
ciation avec la courbe débit-volume au cours de l’exercice. Des
incertitudes persistent néanmoins quant à l’interprétation des
valeurs en longitudinal, compte tenu de l’absence de données à
large échelle sur sa reproductibilité et du niveau de variation
considéré comme cliniquement significatif. Son intérêt dans la
surveillance au long cours des pathologies obstructives reste donc
à évaluer. La CI pourrait, par exemple, s’avérer utile dans le dépis-
tage des exacerbations de BPCO, alors que le VEMS a montré
son faible intérêt dans cette indication. La CI est également par-
ticulièrement pertinente dans l’évaluation de la dyspnée d’effort,
que ce soit en pathologie obstructive ou restrictive. Son utilisa-
tion et ses indications devraient s’élargir rapidement.
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La Lettre du Pneumologue - Volume VII - n
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3 - mai-juin 2004