Une introduction à la logique stoïcienne Les raisonnements et leurs modes
Le mode ou trope () d’un raisonnement est ce que l’on obtient lorsque l’on
remplace les éléments concrets du raisonnement par des variables. Voici le mode du
raisonnement précédent :
Si le premier alors le second ; or le premier ; donc le second.
, ; ; .
[Diog.2, VII, 76, p. 137]
Notons au passage que les variables utilisées sont des ordinaux, et ces variables
symbolisent des propositions et non pas des termes comme dans la syllogistique
d’Aristote.
Un logotrope () est une combinaison d’un trope et d’un raisonnement
permettant d’abréger l’écriture d’un raisonnement trop long. Comme par exemple :
Si Platon vit alors Platon respire ; or le premier ; donc le second.
ἰ , ; ; .
[Diog.2, VII, 77, p. 137]
2. Classification des raisonnements. Tout d’abord un raisonnement est ou
bien déductif ou bien non déductif. Selon Sextus « a » [Sextus.2,
, II, 137, p. 87] ; un raisonnement est déductif () si et seulement
si l'implication qui a pour antécédent la conjonction des lemmes et pour
conséquent la conclusion du raisonnement est une proposition vraie 2. Il en résulte,
d'après le critère de Chrysippe sur la vérité de l'implication, qu'un raisonnement est
concluant dès que la négation de sa conclusion est en conflit avec la conjonction des
lemmes. Par exemple s’il fait jour alors il y a de la lumière ; or il fait jour ; donc il y a de la
lumière est un raisonnement déductif, car non, il y a de la lumière est en conflit avec la
conjonction il fait jour et s'il fait jour alors il y a de la lumière : en effet cette conjonction
n'est vraie que si les deux propositions qui la composent sont vraies, donc d'une part
il fait jour est vrai et d'autre part s'il fait jour alors il y a de la lumière est vrai ; une
implication vraie, dont l'antécédent est vrai, a nécessairement un conséquent vrai,
donc il y a de la lumière est vrai. concluant () par contre, lorsque ces deux
propositions ne sont pas en conflit, le raisonnement est non concluant.
Les raisonnements non déductifs sont de quatre formes: inconsistants, déficients,
redondants, asyllogistiques. Un raisonnement non concluant est inconsistant lorsque
les lemmes sont sans rapport ni entre eux ni avec la conclusion, par exemple : s'il fait
jour alors il y a de la lumière ; or on met du blé en vente sur le marché ; donc Dion se
promène. Un raisonnement non concluant est déficient lorsqu'il manque un élément
pour déduire la conclusion, par exemple: Socrate est plus petit ou bien de même taille que
Platon ; or Socrate n'est pas plus petit que Platon ; donc Socrate est de même taille que
Platon, en effet l'alternative est incomplète puisque Socrate pourrait être plus grand
que Platon. Un raisonnement non concluant est redondant lorsqu'un lemme est en
surplus pour déduire la conclusion, par exemple : s'il fait jour alors il y a de la lumière ;
or il fait jour ; or Dion marche ; donc il y a de la lumière. Un raisonnement non concluant
est asyllogistique lorsque les propriétés de l'implication ne sont pas correctement
utilisées, par exemple : s'il fait jour alors il y a de la lumière ; or il y a de la lumière ; donc
il fait jour, en effet toutes les propositions nécessaires pour former un raisonnement
concluant sont présentes mais elles sont mal disposées.
2 Ce que l'on peut formaliser ainsi : p ; q donc r est concluant ssi p ∧ q ⇒ r est vraie ; on reconnaît là
une version du théorème de déduction : X ⊢ Y ssi ⊢ X ⇒ Y.