71 Apprendre autrement à l’ère du numérique III - Se connaître et connaître l’autre : les compétences émotionnelles III-1 Développer les compétences émotionnelles : motivation, confiance en soi, autonomie, persévérance, empathie… III-1-1 L’intelligence émotionnelle pour réussir à l’ère du numérique À l’heure du numérique, remettre de l’ « humain » dans les relations est indispensable… De plus, le développement de l’intelligence émotionnelle améliore les résultats scolaires des élèves et des étudiants, leurs compétences personnelles et sociales, la confiance en soi, diminue les problèmes de comportement… Amis virtuels, sport et loisirs en ligne, e-commerce les médias numériques peuvent couper nos enfants de la société et des autres. Or la relation humaine, la capacité à se connaître et à connaître l’autre sont essentielles pour le développement et la réussite d’un individu. Et à l’heure du numérique, la relation humaine prend une nouvelle dimension. Dans son best-seller, Daniel Goleman150 a repris la notion d’ « intelligence émotionnelle » apparue quelques années plus tôt et montré que la maîtrise de soi, l’autodiscipline, la persévérance et l’empathie sont des compétences essentielles à développer chez l’enfant afin de favoriser sa réussite scolaire, personnelle et professionnelle. « En un sens, nous avons deux cerveaux, deux esprits et deux formes différentes d’intelligence : l’intelligence rationnelle et l’intelligence émotionnelle ». La manière dont nous les utilisons détermine le déroulement de notre vie151. L’intelligence émotionnelle : origine et définition Le professeur Joseph Ledoux, s’est aperçu en 1990, qu’une petite partie des stimuli provoquant nos émotions, est traitée au niveau d’une glande (amygdale), différente du cortex. Cette glande prend le pouvoir dans les moments de fortes émotions. Or elle procède par associations entre des évènements passés et actuels et dans notre univers social changeant, le signal envoyé est souvent obsolète. Ainsi, nos émotions fortes échappent à la raison et sont souvent « décalées ». La maîtrise des émotions s’apprend par l’expérience, notamment par les conseils dont l’enfant bénéficie pour apprendre à dominer ses contrariétés et pulsions. L’intelligence émotionnelle est ainsi la capacité à percevoir, à comprendre et à gérer ses émotions, afin de prendre des décisions optimales. 150 Goleman Daniel (1998). L’intelligence émotionnelle. Accepter ses émotions pour développer une intelligence nouvelle. Editions J’ai lu. 151 Davidson Richard. Cité dans Paranque Patricia (2011). L’intelligence émotionnelle de Goleman Daniel. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.desucoaching.univ-cezanne.fr/fileadmin/DESU_COACHING/Documents/Publications/ Intelligence_emotionnelle_-_Rossano_et_Di_Nunzio_2011.pdf Mission parlementaire Fourgous 72 Apprendre autrement à l’ère du numérique James Parker152 et son équipe ont évalué en 2004, l’intelligence émotionnelle d’étudiants de 667 établissements et l’ont comparé aux scores obtenus aux examens de fin d’année. Les chercheurs ont alors mis en évidence qu’intelligence émotionnelle et réussite scolaire étaient fortement liées : les étudiants ayant obtenus les meilleures notes étaient également ceux qui avaient le quotient émotionnel le plus fort. James D.A. Parker153 a également mis en évidence que l’intelligence émotionnelle est un réel indicateur de persévérance et que la développer permet d’améliorer l’investissement scolaire des élèves. 152 Parker, J.D.A., Creque, R.E., Barnhart, D.L., Harris, J.I., Majeski, S.A., Wood, L.M., Bond, B.J., & Hogan, M.J. (2004). Academic achievement in high school, does emotional intelligence matter? Personality and Individual. Differences, Volume 37 (7). Pages1321-1330. Cit2 dans Six Seconds(2007). A Case for Emotional Intelligence in Our Schools. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.6seconds.org/pdf/case_for_EQ_school.pdf 153 Parker, J.D.A., Hogan, M.J., Eastabrook, J.M., Oke, A., & Wood, L.M. (2006). Emotional intelligence and student retention: Predicting the successful transition from high school to university. Personality and Individual Differences. Volume 41 (7). Pages 1329-1336. Cité dans Six Seconds(2007). A Case for Emotional Intelligence in Our Schools. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.6seconds.org/pdf/case_for_EQ_school.pdf Mission parlementaire Fourgous 73 Apprendre autrement à l’ère du numérique Ainsi, selon la Recherche, le développement de l’intelligence émotionnelle améliore les résultats scolaires des élèves et des étudiants, leurs compétences personnelles et sociales, la confiance en soi, diminue les problèmes de comportement, d’agressivité et les « abandons scolaires » 154. Test du Marshmallow155 Les études montrent que les personnes qui réussissent le mieux dans la vie ne sont pas celles qui ont le QI le plus élevé, mais celles qui ont une intelligence émotionnelle importante : en effet, un QI élevé ne met pas à l’abri des pulsions et des passions. Faîtes le test du Marshmallow avec un enfant de quatre ans : mettez un Marshmallow sur la table et dîtes-lui que vous vous absentez cinq minutes : s’il ne mange pas le bonbon pendant votre absence, il en a droit à deux. Vous obtenez deux groupes d’enfants, ceux qui le mangent et ceux qui attendent. Ces derniers sont ceux qui arrivent à gérer leurs émotions. Depuis les premiers résultats de la recherche dans ce domaine, dans les années 1990, de nombreuses écoles ont intégré l’intelligence émotionnelle dans leurs programmes. - Des enseignants ont ainsi appliqué une de ces formations156 avec 311 étudiants et constatèrent : - Une amélioration des compétences personnelles et sociales - Une diminution des comportements agressifs et violents - Une amélioration du climat scolaire - Une plus grande confiance - Une diminution des problèmes de discipline - Une plus grande aide entre pairs - Une plus grande participation dans les cours - Une amélioration des résultats scolaires Apprendre à gérer ses émotions pour surfer sur le net Les documents multimédias peuvent générer une émotion, qui mal gérée, interfère avec les apprentissages et peut amener à la violence. Le développement de « l’intelligence émotionnelle » est ainsi au programme de nombreux établissements scolaires de par le monde. Aux États-Unis, le Collectif pour l’apprentissage de l’intelligence émotionnelle (Université de Yale) aide, par exemple, les écoles à introduire des activités développant l’intelligence émotionnelle chez l’enfant. − Éducation et réussite scolaire ne doivent ainsi pas forcément s’opposer dans nos Écoles et encore moins à l’heure du numérique. En effet, pour les enfants, cette intelligence émotionnelle permet d’améliorer les résultats scolaires, de renforcer les liens d’amitiés et de réduire les comportements à risque. Pour les adultes, elle représente un atout dans la carrière, les relations avec les autres et la santé. C’est pourtant une ressource trop souvent inexploitée dans nos Écoles. 154 Cherniss, C., Extein, M., Goleman, D., Weissberg, R.P. (2006). Emotional intelligence: What does the research really indicate?. Educational Psychologist, 41(4). 239-245. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://alliance.la.asu.edu/temporary/students/katie/MultipleIntelligenceEmotional.pdf 155 Test du Marshmallow. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.youtube.com/watch?v=6EjJsPylEOY 156 Durlak & Weissberg, R.P. (2005). Cité dans Six Seconds (2007). A Case for Emotional Intelligence in Our Schools. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.6seconds.org/pdf/case_for_EQ_school.pdf Mission parlementaire Fourgous 74 Apprendre autrement à l’ère du numérique Axes de travail pour développer l’intelligence émotionnelle157 - « Conscience de soi : s’observer et identifier ses émotions, se doter d’un vocabulaire pour les exprimer - Prise de décisions et responsabilité personnelle : examiner ses actions et prendre conscience de leurs conséquences ; déterminer si une décision est gouvernée par la pensée ou le sentiment ; tenir ses engagements ; - Maîtriser ses émotions : trouver le moyen de surmonter ses peurs et son anxiété, comprendre sa colère, sa tristesse ; - Apaiser ses tensions : comprendre l’intérêt de l’exercice physique, - Empathie : comprendre les sentiments et les préoccupations des autres; apprécier les différences dans la manière dont ils perçoivent les choses ; - Communication : parler utilement des sentiments ; savoir écouter ; distinction entre les paroles et les actions de quelqu’un ; émettre des appréciations personnelles au lieu de condamner ; - Ouverture à autrui : établir la confiance dans les relations avec les autres ; savoir quand il est approprié de parler de ses sentiments personnels ; - Acceptation de soi : éprouver de la fierté à se voir sous un jour positif ; reconnaître ses forces et ses faiblesses ; être capable de rire de soi-même ; accepter ses sentiments, ses humeurs ; - Assurance : exprimer ses préoccupations et ses sentiments sans colère ni passivité - Dynamique de groupe : coopération ; savoir comment et à quel moment commander, à quel autre se laisser guider ; - Résolution des conflits : savoir se montrer loyal dans les conflits avec les autres enfants, avec ses parents et ses maîtres ; négocier des compromis où toutes les parties sont gagnantes. » III-1-2 L’autonomie pour pouvoir apprendre L’autonomie est nécessaire aux apprentissages : les enfants autonomes avancent deux fois plus vite que les autres… Même si elle a toujours été très importante, l’autonomie a aujourd’hui un rôle essentiel. Que signifie être autonome ? Être autonome, c’est savoir faire, savoir qu’on sait faire et reconnaître les situations dans lesquelles on peut le faire. C’est être capable de prendre des décisions et de leur donner un sens158. C’est également savoir s’organiser, optimiser son temps, maintenir sa motivation… Être autonome à l’ère numérique, c’est également savoir se servir des outils numériques pour s’informer, se former, apprendre, s’autoévaluer, créer, produire. 157 Paranque Patricia (2011). L’intelligence émotionnelle de Goleman Daniel. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.desucoaching.univ-cezanne.fr/fileadmin/DESU_COACHING/Documents/Publications/Intelligence_emotionnelle_-_ Rossano_et_Di_Nunzio_2011.pdf 158 Fourgous Jean-Michel (2011). Réussir à l’école avec le numérique. Le guide pratique. Éditions : Odile Jacob. 176 pages. Mission parlementaire Fourgous 75 Apprendre autrement à l’ère du numérique En classe, un enfant, un collégien, un lycéen autonome avance beaucoup plus vite qu’un enfant non autonome. Selon Valérie Marty159, présidente de la PEEP, « on sait qu’un enfant réussira ou non sa scolarité, selon qu’il sait travailler ou non de manière autonome ». Sur une plateforme d’apprentissage, d’accompagnement scolaire, la réussite de l’apprenant dépend de son autonomie : autonomie face aux outils mis à sa disposition et face au cheminement pédagogique qui lui est proposé. En milieu universitaire, toutes les études160 montrent que l’autonomie de l’étudiant est une condition sine qua non à sa réussite : les formations incluent, aujourd’hui, quasiment toutes le numérique. Or les apprenants les plus autonomes sont les plus à même de bénéficier des atouts de ces outils. Ainsi, si on n’y prend pas garde, l’autonomie va devenir un facteur d’accroissement des inégalités. Les nouvelles méthodes d’enseignement doivent développer l’autonomie et ceci, le plus tôt possible : dans les écoles Montessori, les enfants travaillent en autonomie avec un contrat à réaliser dans la semaine. Projet Montessori à Gennevilliers : favoriser l’autonomie de tous les élèves La pédagogie Montessori privilégie la curiosité et l’autonomie de l’enfant pour son développement : elle s’appuie sur le fait qu’une stimulation précoce (dès la maternelle) des capacités cognitives favorise l’apprentissage des savoirs fondamentaux. Cette approche a été créée par Maria Montessori dans la première moitié du XXe siècle, pour des enfants de quartiers populaires mais est essentiellement utilisée en France dans des écoles privées, scolarisant des enfants de milieu aisé. Ce projet vise à analyser à petite échelle les effets de la pédagogie Montessori sur une classe de Petite Section / Moyenne Section (25 enfants au total) en zone difficile, dans une école publique, la maternelle Lurçat de Gennevilliers. Des effets positifs, notamment sur l’attention, ont été enregistrés et peuvent fortement favoriser l’apprentissage du langage, de la lecture, de l’écriture et des mathématiques. Mais qui dit « autonomie » ne dit pas « non-directivité ». Le développement de cette compétence nécessite au contraire « une organisation structurée et structurante permettant une évolution progressive » (Marie-José Barbot et Geneviève Jacquinot161). Selon l’expression de Develay162, « l’important est de construire un rapport autonome au savoir ». III-1-3 Plaisir, motivation, goût de l’effort : les moteurs de l’apprentissage Un enfant qui ne prend pas plaisir à apprendre et qui n’est pas motivé, n’apprendra pas. Par ses pratiques pédagogiques, l’enseignant a le pouvoir de motiver un enfant… Les résultats des recherches scientifiques montrent que les plus grands facteurs permettant l’apprentissage sont le plaisir et les émotions positives : si on met à disposition de l’enfant des données, des éléments, des « morceaux » qui, au départ, n’ont pas de sens pour lui et qu’on le laisse réfléchir, manipuler, créer des liens… soudain, à un moment, il y a un déclic et il relie tous les éléments les uns aux autres. Il comprend. Ce moment déclenche un plaisir intense qui a comme conséquence, 159 Auditionnée à l’Assemblée nationale le 30 novembre 2011 160 Linard (2001) ; Karsenti, Savoie-Zajc, Larose (2001) ; Paquelin et Choplin (2001) ; Marchand et alii (2002)… 161 Barbot M-J, Jacquinot-Delaunay G. (2008) « Des ressources pédagogiques aux usages : vers l’autonomisation de l’étudiant ? ». De Boeck. Cité dans Chaptal Alain (2009). Les cahiers 24x32. Mémoire sur la situation des TICE et quelques tendances internationales d’évolution. Sciences et Technologies de l´Information et de la Communication pour l´Éducation et la Formation Volume 16. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://sticef.univ-lemans.fr/num/vol2009/04-chaptal/sticef_2009_chaptal_04.htm#(Becta, 2007) 162 Develay, M. (1996) Donner du sens à l’école, Paris, ESF. Cité dans Perrenoud Philippe (1997). Les pédagogies nouvelles en question. Université de Genève. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1997/1997_05.html Mission parlementaire Fourgous 76 Apprendre autrement à l’ère du numérique que l’enfant a envie de recommencer, juste pour ressentir à nouveau ce plaisir. Et comme l’a alors souligné Bruno Della Chesia lors du séminaire des enseignants à Élancourt le 7 décembre 2011, « c’est gagné : on a donné l’envie, le besoin d’apprendre, à l’enfant ». Ce plaisir est, de plus, d’autant plus fort, qu’il est partagé, d’où la pertinence des méthodes coopératives et collaboratives. John Dewey, un des penseurs les plus influents du XXe siècle aux États-Unis, notait que l’attitude la plus importante à développer chez les élèves est « le goût d’apprendre ». Le fait que les enfants quittent le système éducatif préparés mais non motivés, constitue un indicateur de l’échec de l’École. Les élèves quittant le système éducatif devraient être « affamés intellectuellement ». Le rôle des écoles maternelles est fondamental dans le développement du plaisir d’apprendre. Si l’École ne devait posséder qu’un seul rôle, ce serait celui-là : faire découvrir aux élèves le plaisir d’apprendre, leur donner le virus de l’apprentissage. Or « il est remarquable que l’éducation qui vise à communiquer les connaissances soit aveugle sur ce qu’est la connaissance humaine, ses dispositifs, ses infirmités, ses difficultés, ses propensions à l’erreur comme à l’illusion, et ne se préoccupe nullement de faire connaître ce qu’est connaître… L’être humain est à la fois physique, biologique, psychique, culturel, social, historique […] Ainsi, la condition humaine devrait être un objet essentiel de tout enseignement » (Edgar Morin163) et la formation à la psychopédagogie un élément fort de toute formation menant au métier d’enseignant. Selon le rapport Pochard164, 60% des enseignants (contre 49% en 1972) estiment que les élèves ne sont pas intéressés par leurs cours, pas motivés pour apprendre. Les théories sur la motivation sont innombrables. L’élève peut étudier pour s’améliorer, faire plaisir à ses parents, à son enseignante, avoir une bonne note, une récompense, accéder à un métier qui lui fait plaisir ou qui est bien rémunéré… Les études montrent que différents facteurs modulent cette motivation : environnement familial, amical, scolaire… même le contexte social et l’évolution du marché du travail influencent, selon certains sociologues, la motivation de nos enfants. Mais l’engagement de l’élève dans ses apprentissages dépend pour beaucoup de l’importance de la relation professeur-étudiant, du climat de la classe et de la pédagogie employée (Jean Loisier165, Viau 2007166, Bruno Della Chesia 167). La motivation est « un besoin ou un désir qui sert à dynamiser le comportement » (Myers,1998). C’est l’un des meilleurs moteurs de l’apprentissage. Selon Viau168, elle peut se mesurer par l’engagement de l’élève dans l’activité et par sa persévérance. Créer la motivation (François Taddéi) « Dans une classe, l’enseignante a demandé aux enfants ce qu’ils voulaient faire plus tard. Les réponses ont été assez uniformes : footballeur, maîtresse… Elle leur a alors montré plusieurs vidéos de Ted (Technology, Entertainment, Design)169 : ce sont des conférences faisant intervenir des experts sur des sujets très variés : biologie moléculaire, cellulaire, économie, politique, environnement… L’enseignante a reposé la même question quelques semaines plus tard. Là, les réponses des enfants étaient aussi diversifiées que surprenantes : paléontologue, architecte, biologiste… Les enfants savaient désormais pourquoi ils devaient apprendre : ils avaient un objectif qui les enthousiasmait. » 163 Morin Edgar. Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur. Unesco. Ed. Seuil (2000) p.11-12. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.pedagopsy.eu/page7320.htm 164 Livre vert sur l’évolution du métier d’enseignant – Marcel Pochard – février 2008 http://www.education.gouv.fr/cid20894/remise-du-livre-vert-a-xavier-%20darcos.html 165 Loisier, Jean (2011). Les nouveaux outils d’apprentissage encouragent-ils réellement la performance et la réussite des étudiants en FAD ? Document préparé pour le Réseau d’enseignement francophone à distance du Canada. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.refad.ca/recherche/TIC/TIC_et_reussite_des_etudiants.pdf 166 Viau, R. (2007). 12 questions sur l’état de la recherche scientifique sur l’impact des TIC sur la motivation à apprendre. http://tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/LME/lombard/motivation/viau-motivation-tic.html 167 OCDE (2007). Della Chesia Bruno. Comprendre le cerveau : naissance d’une science de l’apprentissage. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.oecd.org/dataoecd/10/25/40583325.pdf 168 Viau, R. (2007). 12 questions sur l’état de la recherche scientifique sur l’impact des TIC sur la motivation à apprendre. http://tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/LME/lombard/motivation/viau-motivation-tic.html 169 http://www.ted.com/ Mission parlementaire Fourgous 77 Apprendre autrement à l’ère du numérique Si l’enseignant est motivant par la façon dont il enseigne, il motivera les élèves et on entrera dans le cercle vertueux de l’apprentissage et de la réussite. L’enseignant n’est certes pas le seul acteur de la motivation d’un élève, mais « une pièce centrale » : il doit tout mettre en œuvre pour l’inciter à aller toujours plus loin. Pour Albert Einstein, « le rôle essentiel du professeur est ainsi d’éveiller la joie de travailler et de connaître ». Pour réussir à apprendre, il est nécessaire d’avoir le goût de l’effort et du travail et donc de le développer chez les élèves. Or, il est regrettable que de nombreuses décisions politiques aient pu avoir un impact négatif sur ce goût de l’effort. Ces décisions et manifestations (35 heures hebdomadaires, retraite à 60 ans…) ont fait passer le message que travailler était plus une contrainte qu’un épanouissement. Nous sommes ainsi revenus, dans l’esprit des Français, à l’origine étymologique du mot « travail », tripalium, instrument de torture à trois pieux et oubliant que depuis le XVIe siècle, « travailler », signifie « rendre plus utilisable » et « conférer une valeur ». Le travail occupe la deuxième position dans le cœur des Français (après la famille). C’est en effet un moyen de se réaliser, d’être indépendant, de développer ses compétences… de réussir et d’être socialement reconnu. Toutes les personnes qui ont réussi, ont travaillé et fourni des efforts. Ainsi, pour Roseline Garon170, de l’université de Montréal, « il faut faire en sorte de remettre l’effort dans la classe, dans la famille, et faire redécouvrir aux enfants ce que cela peut leur apporter ». 170 Garon Roseline et Théorêt Manon, L’effort à l’école. Un goût à développer, Montréal, Éditions Logiques, 2000. 123 p. Mission parlementaire Fourgous 78 Apprendre autrement à l’ère du numérique III-1-4 Avoir confiance pour avancer La confiance en soi est essentielle pour avancer et persévérer. La confiance dans les autres est le pilier de la collaboration et de la réussite. Développer la confiance d’un enfant dépend des pratiques pédagogiques utilisées : une pédagogie positive la favorise. Une évaluation sanction l’inhibe… 78% des Français estiment « qu’on est jamais assez prudent quant on a affaire aux autres » ! Un résultat consternant, qui nous situe parmi les peuples les plus méfiants du monde171 : on se méfie de tout : de ses concitoyens, de l’entreprise, des pouvoirs publics, du marché… À en croire le prix Nobel d’économie K. Arrow, tout échange commercial contient une part de confiance. Et « on peut soutenir qu’une grande part du retard de développement économique d’une société est due à l’absence de confiance réciproque entre ses citoyens. » Ainsi, ce manque de confiance des Français entrave leurs capacités de collaboration, réduit significativement la création d’emplois, la croissance et, surtout, leur aptitude au bonheur. Les jeunes Français sont ceux qui ont le moins confiance en eux. Ils se sous-estiment en permanence, hésitent à se lancer dans de nouveaux apprentissages par peur de l’échec172. Ils sont, de plus, ceux qui ont le moins confiance en leur avenir : 17% d’entre eux pensent que leur avenir est prometteur contre 61% en Finlande, 65% au Canada et 82% en Chine (Fondapol, 2011). Selon le psychologue américain Albert Bandura173, la confiance d’un élève en ses capacités d’apprentissage dépend des performances passées, de l’observation des performances d’autrui, des messages de l’entourage… La confiance en soi est le reflet de toutes les perceptions reçues par l’élève. Or l’élitisme du système éducatif français pousse à mettre en avant les erreurs d’une copie, « cassant » la confiance de l’enfant, celui-ci ne voyant souvent uniquement que ses fautes. À l’opposé, les écoles britanniques ou finlandaises mettent systématiquement en valeur les points forts de chaque élève. Les élèves sont évalués de telles sortes qu’ils comprennent comment s’améliorer. Un enfant confiant se fixe des objectifs plus élevés et travaille dur pour les atteindre. Il sait s’auto-motiver et arrive en général à mieux gérer ses émotions ou son stress. III-1-5 L’auto-apprentissage et l’auto-évaluation pour apprendre à se connaître et apprendre à apprendre Apprendre et persévérer demande de se connaître, de savoir apprendre et de savoir s’évaluer. Les outils numériques présentent de nombreux avantages dans ces optiques… Motiver un enfant, lui donner confiance, lui apprendre à se connaître et à connaître autrui… L’enseignant a un contrat plus large que celui de la seule transmission de connaissances. Dans ce cadre, l’auto-évaluation représente un moyen pertinent : elle aide l’enfant à s’évaluer, à gérer ses apprentissages. Elle lui apprend à gérer ses frustrations, ses erreurs. Elle le pousse à persévérer. Pour P. Broadfoot174, l’auto-apprentissage et l’auto-évaluation favorisent la maturité des élèves : « c’est une manière d’encourager les élèves à réfléchir sur ce qu’ils ont appris, à chercher les moyens d’améliorer leur apprentissage. [...] 171 Teinturier Brice, Directeur d’IPSOS-Opinion (2010) L’opinion française au crible: une défiance accentuée. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.revuecivique.eu/index2.php?option=com_content&do_pdf=1&id=46 172 Étude PISA 2006 (Programme for international student assessment), OCDE. En ligne. Consulté le 24 février 2012 www.oecd.org/document/18/0,2340,fr_2649_201185_34010578_1_1_1_1,00.html 173 Bandura (2002). Autoefficacité. Le sentiment d’efficacité personnelle, De Boeck. Cité par Galand Benoît. Réussite scolaire et estime de soi. Sciences Humaines.com. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.scienceshumaines.com/index.php?lg=fr&id_article=14911 174 Broadfoot Patricia (2007). An Introduction to Assessment. London : Continuum. Cité dans Endrizzi Laure et Rey Olivier (2008). L’évaluation au cœur des apprentissages. Dossier d’actualité n° 39 – novembre 2008. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.inrp.fr/vst/LettreVST/39-novembre-2008.php Mission parlementaire Fourgous 79 Apprendre autrement à l’ère du numérique En tant que telle, [l’auto-formation] comprend des compétences en termes de gestion du temps, de négociation, de communication – avec les enseignants et avec les pairs – et d’autodiscipline, en plus de la réflexivité, de l’esprit critique et de l’évaluation ». Difficile à mettre en place, aujourd’hui l’auto-apprentissage et l’auto-évaluation sont facilités par les outils numériques qui offrent la possibilité de nombreux feed-back. L’utilisation de logiciels interactifs ou multimédia, dans un but d’auto-apprentissage, diffère entre les pays membres de l’OCDE et entre les Écoles mais les pays comme ceux d’Europe du Nord qui ont une tradition d’enseignement centrée sur l’apprenant ont tendance à mieux profiter des atouts offerts par le numérique dans cette perspective, que les pays où la formation est traditionnellement centrée sur l’enseignant. III-2 Les apports des sciences de l’apprentissage Les « sciences de l’apprentissage », à la jonction des neurosciences et des sciences de l’éducation, ont fait de réelles avancées et commencent à apporter des réponses aux questions fondamentales que se posent les systèmes éducatifs : comment favoriser le développement des compétences-clés chez les élèves et étudiants ? Ou encore pourquoi un enfant sur six déteste-t-il aller à l’école ? III-2-1 Un climat rassurant pour oser se tromper Créer un environnement serein dans sa classe facilite la concentration et la mémorisation… Le cerveau dispose d’une grande capacité d’adaptation et contrairement à ce que l’on a cru jusqu’à très récemment, cette plasticité se maintient tout au long de la vie175 : plus on continue d’apprendre, mieux on apprend. Cela étant dit, il existe des périodes idéales durant lesquelles un apprentissage donné présentera une efficacité maximale : les sons du langage sont mieux mémorisés pendant l’enfance alors que le vocabulaire peut-être appris toute la vie. Selon l’expert de l’OCDE, Bruno Della Chesia176, faciliter et améliorer l’apprentissage passe en premier lieu par des facteurs très simples et pourtant encore trop souvent sous-estimés : qualité de l’environnement social, interactions, alimentation, exercice physique, sommeil… Le stress excessif, la peur et l’angoisse diminuent les performances cognitives, alors qu’un stress léger améliore l’apprentissage. D’où la nécessité, pour l’enseignant, de faire extrêmement attention au climat instauré dans sa classe, à l’élaboration d’un climat de confiance où on a le droit à l’erreur : la classe devrait être un espace protégé, rassurant, permettant d’oser et de repousser les frontières de la connaissance. Dans quel environnement apprend-on le mieux ?177 Dorthe Berntsen, chercheur de l’université d’Aarhus au Danemark a posé des questions sur les détails de la seconde guerre mondiale, d’une part à un groupe de danois ayant vécu la seconde guerre mondiale, d’autre part à un groupe, beaucoup plus jeune, ne connaissant cette période qu’au travers de documentaires. Le premier groupe ayant vécu ces émotions a été cinq fois plus performant que le second. Si une émotion vécue a un fort impact dans la mémorisation de la notion rattachée, le stress l’inhibe178. Ainsi, la vue d’une photo belle et marquante, associée à une histoire marquante, touchante… permet d’aider l’enfant à visualiser et à retenir. 175 OCDE (2007). Bruno Della Chesia. Comprendre le cerveau : naissance d’une science de l’apprentissage. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.oecd.org/dataoecd/10/25/40583325.pdf 176 Bruno Della Chesia. Intervention lors du séminaire des enseignants à Elancourt le 7 décembre 2011. 177 Michel Jean-François. La mémoire et les émotions. Apprendre à apprendre.com. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.apprendreaapprendre.com/reussite_scolaire/la-memoire-et-les-emotions-365-8-3.html 178 OCDE (2007). Bruno Della Chesia. Comprendre le cerveau : naissance d’une science de l’apprentissage. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.oecd.org/dataoecd/10/25/40583325.pdf Mission parlementaire Fourgous