Apprendre autrement à l’ère du numérique
Mission parlementaire Fourgous
71
III - Se connaître et connaître l’autre :
les compétences émotionnelles
III-1 Développer les compétences émotionnelles :
motivation, conance en soi, autonomie, persévérance, empathie…
III-1-1 L’intelligence émotionnelle pour réussir à l’ère du numérique
À l’heure du numérique, remettre de l’ « humain » dans les relations est indispensable…
De plus, le développement de l’intelligence émotionnelle améliore les résultats scolaires des
élèves et des étudiants, leurs compétences personnelles et sociales, la conance en soi,
diminue les problèmes de comportement…
Amis virtuels, sport et loisirs en ligne, e-commerce les médias numériques peuvent couper
nos enfants de la société et des autres. Or la relation humaine, la capacité à se connaître et à
connaître l’autre sont essentielles pour le développement et la réussite d’un individu. Et à l’heure
du numérique, la relation humaine prend une nouvelle dimension.
Dans son best-seller, Daniel Goleman150 a repris la notion d’ « intelligence émotionnelle » apparue
quelques années plus tôt et montré que la maîtrise de soi, l’autodiscipline, la persévérance et
l’empathie sont des compétences essentielles à développer chez l’enfant an de favoriser sa
réussite scolaire, personnelle et professionnelle. « En un sens, nous avons deux cerveaux, deux
esprits et deux formes différentes d’intelligence : l’intelligence rationnelle et l’intelligence émotionnelle
». La manière dont nous les utilisons détermine le déroulement de notre vie151.
L’intelligence émotionnelle : origine et dénition
Le professeur Joseph Ledoux, s’est aperçu en 1990, qu’une petite partie des stimuli
provoquant nos émotions, est traitée au niveau d’une glande (amygdale), différente du
cortex. Cette glande prend le pouvoir dans les moments de fortes émotions. Or elle procède
par associations entre des évènements passés et actuels et dans notre univers social
changeant, le signal envoyé est souvent obsolète. Ainsi, nos émotions fortes échappent à la
raison et sont souvent « décalées ».
La maîtrise des émotions s’apprend par l’expérience, notamment par les conseils dont
l’enfant bénécie pour apprendre à dominer ses contrariétés et pulsions.
L’intelligence émotionnelle est ainsi la capacité à percevoir, à comprendre et à gérer
ses émotions, an de prendre des décisions optimales.
150 Goleman Daniel (1998). L’intelligence émotionnelle. Accepter ses émotions pour développer une intelligence nouvelle.
Editions J’ai lu.
151 Davidson Richard. Cité dans Paranque Patricia (2011). L’intelligence émotionnelle de Goleman Daniel. En ligne.
Consulté le 24 février 2012 http://www.desucoaching.univ-cezanne.fr/leadmin/DESU_COACHING/Documents/Publications/
Intelligence_emotionnelle_-_Rossano_et_Di_Nunzio_2011.pdf
Apprendre autrement à l’ère du numérique
Mission parlementaire Fourgous
72
James Parker152 et son équipe ont évalué en 2004, l’intelligence émotionnelle d’étudiants de 667
établissements et l’ont comparé aux scores obtenus aux examens de n d’année. Les chercheurs
ont alors mis en évidence qu’intelligence émotionnelle et réussite scolaire étaient fortement liées : les
étudiants ayant obtenus les meilleures notes étaient également ceux qui avaient le quotient émotionnel
le plus fort.
James D.A. Parker153 a également mis en évidence que l’intelligence émotionnelle est un réel
indicateur de persévérance et que la développer permet d’améliorer l’investissement scolaire des
élèves.
152 Parker, J.D.A., Creque, R.E., Barnhart, D.L., Harris, J.I., Majeski, S.A., Wood, L.M., Bond, B.J., & Hogan, M.J. (2004).
Academic achievement in high school, does emotional intelligence matter? Personality and Individual. Differences,
Volume 37 (7). Pages1321-1330. Cit2 dans Six Seconds(2007). A Case for Emotional Intelligence in Our Schools. En ligne.
Consulté le 24 février 2012 http://www.6seconds.org/pdf/case_for_EQ_school.pdf
153 Parker, J.D.A., Hogan, M.J., Eastabrook, J.M., Oke, A., & Wood, L.M. (2006).
Emotional intelligence and student retention: Predicting the successful transition from high school to university. Personality
and Individual Differences. Volume 41 (7). Pages 1329-1336. Cité dans Six Seconds(2007). A Case for Emotional Intelligence
in Our Schools. En ligne. Consulté le 24 février 2012
http://www.6seconds.org/pdf/case_for_EQ_school.pdf
Apprendre autrement à l’ère du numérique
Mission parlementaire Fourgous
73
Ainsi, selon la Recherche, le développement de l’intelligence émotionnelle améliore les résultats
scolaires des élèves et des étudiants, leurs compétences personnelles et sociales, la conance en soi,
diminue les problèmes de comportement, d’agressivité et les « abandons scolaires » 154.
Test du Marshmallow155
Les études montrent que les personnes qui réussissent le mieux dans la vie ne sont pas celles
qui ont le QI le plus élevé, mais celles qui ont une intelligence émotionnelle importante : en
effet, un QI élevé ne met pas à l’abri des pulsions et des passions.
Faîtes le test du Marshmallow avec un enfant de quatre ans : mettez un Marshmallow sur la
table et dîtes-lui que vous vous absentez cinq minutes : s’il ne mange pas le bonbon pendant
votre absence, il en a droit à deux.
Vous obtenez deux groupes d’enfants, ceux qui le mangent et ceux qui attendent. Ces
derniers sont ceux qui arrivent à gérer leurs émotions.
Depuis les premiers résultats de la recherche dans ce domaine, dans les années 1990, de nombreuses
écoles ont intégré l’intelligence émotionnelle dans leurs programmes.
- Des enseignants ont ainsi appliqué une de ces formations156 avec 311 étudiants et constatèrent :
- Une amélioration des compétences personnelles et sociales
- Une diminution des comportements agressifs et violents
- Une amélioration du climat scolaire
- Une plus grande conance
- Une diminution des problèmes de discipline
- Une plus grande aide entre pairs
- Une plus grande participation dans les cours
- Une amélioration des résultats scolaires
Apprendre à gérer ses émotions pour surfer sur le net
Les documents multimédias peuvent générer une émotion, qui mal gérée, interfère avec
les apprentissages et peut amener à la violence. Le développement de « l’intelligence
émotionnelle » est ainsi au programme de nombreux établissements scolaires de par
le monde. Aux États-Unis, le Collectif pour l’apprentissage de l’intelligence émotionnelle
(Université de Yale) aide, par exemple, les écoles à introduire des activités développant
l’intelligence émotionnelle chez l’enfant.
−
Éducation et réussite scolaire ne doivent ainsi pas forcément s’opposer dans nos Écoles et
encore moins à l’heure du numérique. En effet, pour les enfants, cette intelligence émotionnelle permet
d’améliorer les résultats scolaires, de renforcer les liens d’amitiés et de réduire les comportements
à risque. Pour les adultes, elle représente un atout dans la carrière, les relations avec les autres et la
santé.
C’est pourtant une ressource trop souvent inexploitée dans nos Écoles.
154 Cherniss, C., Extein, M., Goleman, D., Weissberg, R.P. (2006). Emotional intelligence: What does the research really
indicate?. Educational Psychologist, 41(4). 239-245. En ligne. Consulté le 24 février 2012
http://alliance.la.asu.edu/temporary/students/katie/MultipleIntelligenceEmotional.pdf
155 Test du Marshmallow. En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.youtube.com/watch?v=6EjJsPylEOY
156 Durlak & Weissberg, R.P. (2005). Cité dans Six Seconds (2007). A Case for Emotional Intelligence in Our Schools.
En ligne. Consulté le 24 février 2012 http://www.6seconds.org/pdf/case_for_EQ_school.pdf
Apprendre autrement à l’ère du numérique
Mission parlementaire Fourgous
74
Axes de travail pour développer l’intelligence émotionnelle157
- « Conscience de soi : s’observer et identier ses émotions, se doter d’un vocabulaire pour
les exprimer
- Prise de décisions et responsabilité personnelle : examiner ses actions et prendre
conscience de leurs conséquences ; déterminer si une décision est gouvernée par la
pensée ou le sentiment ; tenir ses engagements ;
- Maîtriser ses émotions : trouver le moyen de surmonter ses peurs et son anxiété,
comprendre sa colère, sa tristesse ;
- Apaiser ses tensions : comprendre l’intérêt de l’exercice physique,
- Empathie : comprendre les sentiments et les préoccupations des autres; apprécier les
différences dans la manière dont ils perçoivent les choses ;
- Communication : parler utilement des sentiments ; savoir écouter ; distinction entre les
paroles et les actions de quelqu’un ; émettre des appréciations personnelles au lieu de
condamner ;
- Ouverture à autrui : établir la conance dans les relations avec les autres ; savoir quand il
est approprié de parler de ses sentiments personnels ;
- Acceptation de soi : éprouver de la erté à se voir sous un jour positif ; reconnaître ses
forces et ses faiblesses ; être capable de rire de soi-même ; accepter ses sentiments, ses
humeurs ;
- Assurance : exprimer ses préoccupations et ses sentiments sans colère ni passivité
- Dynamique de groupe : coopération ; savoir comment et à quel moment commander, à
quel autre se laisser guider ;
- Résolution des conits : savoir se montrer loyal dans les conits avec les autres enfants,
avec ses parents et ses maîtres ; négocier des compromis toutes les parties sont
gagnantes. »
III-1-2 L’autonomie pour pouvoir apprendre
L’autonomie est nécessaire aux apprentissages : les enfants autonomes avancent deux
fois plus vite que les autres…
Même si elle a toujours été très importante, l’autonomie a aujourd’hui un rôle essentiel.
Que signie être autonome ?
Être autonome, c’est savoir faire, savoir qu’on sait faire et reconnaître les situations dans
lesquelles on peut le faire. C’est être capable de prendre des décisions et de leur donner un
sens158. C’est également savoir s’organiser, optimiser son temps, maintenir sa motivation…
Être autonome à l’ère numérique, c’est également savoir se servir des outils numériques
pour s’informer, se former, apprendre, s’autoévaluer, créer, produire.
157 Paranque Patricia (2011). L’intelligence émotionnelle de Goleman Daniel. En ligne. Consulté le 24 février 2012
http://www.desucoaching.univ-cezanne.fr/leadmin/DESU_COACHING/Documents/Publications/Intelligence_emotionnelle_-_
Rossano_et_Di_Nunzio_2011.pdf
158 Fourgous Jean-Michel (2011). Réussir à l’école avec le numérique. Le guide pratique. Éditions : Odile Jacob.
176 pages.
Apprendre autrement à l’ère du numérique
Mission parlementaire Fourgous
75
En classe, un enfant, un collégien, un lycéen autonome avance beaucoup plus vite qu’un enfant
non autonome. Selon Valérie Marty159, présidente de la PEEP, « on sait qu’un enfant réussira ou non sa
scolarité, selon qu’il sait travailler ou non de manière autonome ». Sur une plateforme d’apprentissage,
d’accompagnement scolaire, la réussite de l’apprenant dépend de son autonomie : autonomie face
aux outils mis à sa disposition et face au cheminement pédagogique qui lui est proposé. En milieu
universitaire, toutes les études160 montrent que l’autonomie de l’étudiant est une condition sine
qua non à sa réussite : les formations incluent, aujourd’hui, quasiment toutes le numérique. Or les
apprenants les plus autonomes sont les plus à même de bénécier des atouts de ces outils. Ainsi, si
on n’y prend pas garde, l’autonomie va devenir un facteur d’accroissement des inégalités.
Les nouvelles méthodes d’enseignement doivent développer l’autonomie et ceci, le plus tôt
possible : dans les écoles Montessori, les enfants travaillent en autonomie avec un contrat à réaliser
dans la semaine.
Projet Montessori à Gennevilliers : favoriser l’autonomie de tous les élèves
La pédagogie Montessori privilégie la curiosité et l’autonomie de l’enfant pour son
développement : elle s’appuie sur le fait qu’une stimulation précoce (dès la maternelle) des
capacités cognitives favorise l’apprentissage des savoirs fondamentaux. Cette approche a
été créée par Maria Montessori dans la première moitié du XXe siècle, pour des enfants de
quartiers populaires mais est essentiellement utilisée en France dans des écoles privées,
scolarisant des enfants de milieu aisé.
Ce projet vise à analyser à petite échelle les effets de la pédagogie Montessori sur une classe
de Petite Section / Moyenne Section (25 enfants au total) en zone difcile, dans une école
publique, la maternelle Lurçat de Gennevilliers.
Des effets positifs, notamment sur l’attention, ont été enregistrés et peuvent fortement
favoriser l’apprentissage du langage, de la lecture, de l’écriture et des mathématiques.
Mais qui dit « autonomie » ne dit pas « non-directivité ». Le développement de cette compétence
nécessite au contraire « une organisation structurée et structurante permettant une évolution
progressive » (Marie-José Barbot et Geneviève Jacquinot161). Selon l’expression de Develay162,
« l’important est de construire un rapport autonome au savoir ».
III-1-3 Plaisir, motivation, goût de l’effort : les moteurs de l’apprentissage
Un enfant qui ne prend pas plaisir à apprendre et qui n’est pas motivé, n’apprendra pas.
Par ses pratiques pédagogiques, l’enseignant a le pouvoir de motiver un enfant…
Les résultats des recherches scientiques montrent que les plus grands facteurs permettant
l’apprentissage sont le plaisir et les émotions positives : si on met à disposition de l’enfant des
données, des éléments, des « morceaux » qui, au départ, n’ont pas de sens pour lui et qu’on le laisse
rééchir, manipuler, créer des liens… soudain, à un moment, il y a un déclic et il relie tous les éléments
les uns aux autres. Il comprend. Ce moment déclenche un plaisir intense qui a comme conséquence,
159 Auditionnée à l’Assemblée nationale le 30 novembre 2011
160 Linard (2001) ; Karsenti, Savoie-Zajc, Larose (2001) ; Paquelin et Choplin (2001) ; Marchand et alii (2002)…
161 Barbot M-J, Jacquinot-Delaunay G. (2008) « Des ressources pédagogiques aux usages : vers l’autonomisation de
l’étudiant ? ». De Boeck. Cité dans Chaptal Alain (2009). Les cahiers 24x32. Mémoire sur la situation des TICE et quelques
tendances internationales d’évolution. Sciences et Technologies de l´Information et de la Communication pour l´Éducation
et la Formation Volume 16. En ligne. Consulté le 24 février 2012
http://sticef.univ-lemans.fr/num/vol2009/04-chaptal/sticef_2009_chaptal_04.htm#(Becta, 2007)
162 Develay, M. (1996) Donner du sens à l’école, Paris, ESF. Cité dans Perrenoud Philippe (1997).
Les pédagogies nouvelles en question. Université de Genève. En ligne. Consulté le 24 février 2012
http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1997/1997_05.html
1 / 9 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !