R. LLORED. Théorie microéconomique du consommateur. Cours Hypokhâgne B/L.
THEORIE MICROECONOMIQUE DU
CONSOMMATEUR.
PLAN.
1. La fonction d’utilité.
1.1. De l’utilité totale à l’utilité marginale
Encadré 1. Les fondateurs de la microéconomie : les marginalistes.
Encadré 2. L’utilité selon Léon WALRAS.
Encadré 3. Y a-t-il eu une révolution marginaliste ?
1.2. Utilité cardinale et utilité ordinale.
1.3. Les courbes d’indifférence.
1.4. Le taux marginal de substitution (TMS).
1.5. Une typologie des biens et des fonctions d’utilité.
2. La contrainte budgétaire.
2.1. La droite de budget.
2.2. L’équilibre du consommateur.
2.3 La maximisation de l’utilité.
2.4. Transformations de l’environnement économique et équilibre du consommateur.
Encadré 4. Les gens raisonnent-ils vraiment à la façon dont la théorie microéconomique le
conçoit ?
3. La demande.
3.1.De la fonction de demande individuelle à la demande globale.
Encadré 5. Thorstein VEBLEN.
3.2. Effet de revenu et effet de substitution.
3.3. L’élasticité-prix de la demande.
Encadré 6. L’élasticité-prix selon Paul KRUGMAN.
3.4. L’élasticité-revenu de la demande
4. Marchés concurrentiels et surplus du consommateur.
4.1. Le surplus du consommateur.
4.2. Efficacité des marchés de concurrence pure et parfaite et surplus du consommateur.
R. LLORED. Théorie microéconomique du consommateur. Cours Hypokhâgne B/L.
1. La fonction d’utilité.
La fonction d’utilité est une fonction numérique qui établit une relation de préférence exprimée par
un consommateur à l’égard d’un bien ou d’un panier de biens auquel peut être associé un nombre
réel.
1.1. De l’utilité totale à l’utilité marginale.
L’utilité totale U d’un bien d’un bien x mesure la satisfaction globale que l’individu retire de la
consommation de ce bien. Le niveau de U dépend de la quantité de x, U est donc « fonction » de x :
U = U(x)
L’utilité marginale (notée Um ) mesure l’évolution de l’utilité totale à la marge c’est-à-dire pour
une variation très petite de la quantité de x consommée.
On peut distinguer deux cas de figure.
Utilité marginale d’un bien partiellement
divisible
Utilité marginale d’un bien parfaitement
divisible
Variation de l’utilité totale induite par une
unité supplémentaire de ce bien.
Um x =
Variation de l’utilité totale induite par une
variation infiniment petite ( infinitésimale) de la
quantité consommée.
Um = U’(x) ou Um =
On considère que l’intensité que l’intensité du besoin que le consommateur cherche à satisfaire
décroît au fur et à mesure que la quantité consommée augmente (loi de l’utilité marginale
décroissante ou 1ère loi de Gossen).
Autrement dit, la satisfaction éprouvée lors de la consommation de chaque unité supplémentaire va
en diminuant. Mais l’utilité totale ne diminue pas pour autant.
Représentations graphiques
Commentaires
Le point S représente le niveau de
consommation du bien x pour lequel le
consommateur atteint le maximum de son
utilité (point de saturation),
en ce point Um = 0
A partir de ce point, l’utilité diminue et
l’utilité marginale devient négative. Mais
un consommateur rationnel ne devrait pas
poursuivre sa consommation au-delà de ce
niveau.
D’où l’hypothèse de décroissance de
l’utilité marginale,
U’x > 0 et U’’x < 0
Conditions définissant l’existence d’un
maximum pour la fonction d’utilité totale.
U
Um
S
R. LLORED. Théorie microéconomique du consommateur. Cours Hypokhâgne B/L.
Encadré 1. Les fondateurs de la microéconomie : les marginalistes.
Source : J. Boncœur et H. Thouément, Histoire des idées économiques.
Tome 2. De Walras aux contemporains, Nathan, 2000.
R. LLORED. Théorie microéconomique du consommateur. Cours Hypokhâgne B/L.
Encadré 2. L’utilité selon Léon WALRAS.
« J'appelle richesse sociale l'ensemble des choses matérielles ou immatérielles (car la matérialité
ou l'immatérialité des choses n'importe ici en aucune manière) qui sont rares, c'est-à-dire qui,
d'une part, nous sont utiles, et qui, d'autre part, n'existent à notre disposition qu'en quantité
limitée. [...] Je dis que les choses sont utiles dès qu'elles peuvent servir à un usage quelconque, dès
qu'elles répondent à un besoin quelconque et en permettent la satisfaction. Ainsi, il n'y a pas à
s'occuper ici des nuances par lesquelles on classe, dans le langage de la conversation courante,
l'utile à côté de l'agréable entre le nécessaire et le superflu. Nécessaire, utile, agréable et superflu,
tout cela, pour nous, est seulement plus ou moins utile. Il n'y a pas davantage à tenir compte ici de
la moralité ou de l'immoralité du besoin auquel répond la chose utile et qu'elle permet de
satisfaire. [...] Je dis que les choses n'existent à notre disposition qu'en quantité limitée du moment
qu'elles n'existent pas en quantité telle que chacun de nous en trouve à sa portée à discrétion pour
satisfaire entièrement le besoin qu'il en a. [...] On voit, d'après cela, quel est ici le sens des mots
rares et rareté. C'est un sens scientifique, comme celui des mots de vitesse en mécanique et de
chaleur en physique. »
Léon Walras, Eléments d'économie politique pure, 1874. Troisième leçon (extrait).
Encadré 3. Y a-t-il eu une révolution marginaliste ?
« Le terme de révolution marginaliste est souvent utilisé pour désigner la découverte pratiquement
simultanée mais totalement indépendante, au début des années 1870, du principe de l’utilité
marginale décroissante, conçu comme fondement d’un nouveau genre de micro-économie statique,
par Jevons, Menger et Walras. Ce phénomène qui est présenté comme l’un des meilleurs exemples
de découvertes multiples dans l’histoire de la pensée économique, appelle une explication
historique : il est difficile de croire que trois hommes travaillant à peu près à la même époque dans
des contextes intellectuels aussi différents que Manchester, Vienne et Lausanne peuvent avoir eu
par hasard la même idée. Aucune des explications habituellement avancées n’est convaincante. Le
développement économique était si différent en Angleterre, en Autriche et en Suisse, vers 1860, que
toutes les explications crypto-marxistes, en terme d’évolution des structures de la production, ou
de lutte des classes, ne peuvent convaincre. De même, la tradition empirique et utilitariste de la
philosophie britannique, le climat philosophique néo-kantien qui régnait en Autriche, et le contexte
cartésien suisse n’avaient rien en commun qui puisse expliquer la révolution de l’utilité en
économie. En ce qui concerne la politique économique, c’était la pensée classique qui prévalait, et
lorsque Jevons et Walras écrivirent sur des questions de politique économique, et ils le firent
souvent, il y avait peu ou pas de rapport du tout entre ce qu’ils préconisaient et leurs idées sur la
théorie de la valeur. Pour défendre le système capitaliste, en supposant qu’il en ait besoin, ils ne
trouvèrent rien de mieux que le vieux mécanisme salaire-population des classiques ou les écrits de
Bastiat qui ne doivent rien à l’utilité marginale. Enfin, personne n’avait conscience de l’existence
d’une crise intellectuelle vers 1860, pas plus en Angleterre que sur le continent, qui aurait pu
inciter à la recherche d’autres modèles économiques ; de plus l’historicisme constituait un modèle
alternatif qui continuait à se populariser en 1860, non seulement en Allemagne mais aussi en
Angleterre. En résumé, la découverte simultanée de l’utilité marginale appelle effectivement une
explication, mais aucune de celles qui sont avancées n’est satisfaisante. La difficulté réside peut-
être dans le fait que la notion de “révolution marginaliste” est une reconstruction rationnelle
comme en opère l’histoire de la pensée économique, comme les concepts de “mercantilisme” ou d’
“économie politique classique” tels que Keynes les définit, et qui sont susceptibles d’engendrer
des puzzles historiques. […]
R. LLORED. Théorie microéconomique du consommateur. Cours Hypokhâgne B/L.
Rappelons les principales caractéristiques de l’économie politique classique. Que nous
considérions Smith, Ricardo ou John Stuart Mill, le problème économique est conçu comme
l’opposition entre la terre, dont la quantité est fixée, et le travail dont les quantités peuvent
augmenter, le capital étant ramené à ce dernier sous la forme d’un stock de biens intermédiaires.
La fonction de l’analyse économique était d’étudier les effets des variations, en quantité et en
qualité, de la force de travail sur le taux de croissance du produit total.
Puisque les classiques considéraient que le taux de croissance est une fonction du taux de profit du
capital, les tendances à long terme des prix des facteurs et des parts des facteurs dans la
répartition venaient naturellement au premier plan, comme éléments déterminants du processus
économique. L’accent était mis sur l’accumulation du capital et la croissance économique, dans
une économie fondée sur l’entreprise privée. L’économie politique classique prône la concurrence
parce qu’elle est supposée étendre le marché en instaurant une amélioration de la division du
travail : le bien-être économique était conçu en termes physiques et considéré comme sensiblement
proportionnel au volume de la production. Après 1870, cependant, les économistes firent
l’hypothèse d’une offre donnée de facteurs productifs, déterminée de façon exogène par des
éléments ne relevant pas du domaine de l’analyse. Le problème économique fut alors conçu
comme la recherche des conditions
auxquelles des services productifs donnés peuvent être affectés de façon optimale à des usages
alternatifs, optimal étant entendu au sens de “maximisant la satisfaction des consommateurs”.
Ceci éliminait la considération des effets de l’accroissement de la quantité ou de la qualité des
ressources et de l’expansion dynamique des besoins, effets que les économistes classiques avaient
considérés comme la condition nécessaire du progrès économique. Pour la première fois,
l’économie devint réellement la science qui étudie la relation entre des fins données et des moyens
rares donnés qui ont des usages alternatifs. La théorie classique du développement économique fut
remplacée par le concept d’équilibre général dans un cadre essentiellement statique. […]
La suprématie du concept de substitution à la marge dans la nouvelle science économique explique
l’apparition subite d’un raisonnement explicitement mathématique. Ce n’est pas la théorie de
l’utilité mais plutôt le marginalisme en tant que tel qui conféra aux mathématiques le rôle
important qui fut le leur après 1870. Ce n’est pas par hasard que les Autrichiens qui insistèrent
toujours sur la priorité de l’utilité, n’utilisèrent pas l’outil mathématique : ni Menger, ni Wieser, ni
Böhm-Bawerk n’utilisèrent une équation algébrique dans leurs écrits. De plus, ils s’opposaient,
pour des raisons méthodologiques, à l’utilisation de l’outil mathématique dans l’analyse
économique. Dans une lettre à Walras de 1884, Menger insiste sur le fait que les mathématiques
n’aident en rien l’économiste à déterminer l’“essence” qualitative de phénomènes comme la
valeur, la rente et le profit. Ce trait caractérise l’attitude des auteurs autrichiens qui allèrent
jusqu’à s’abstenir de considérer la détermination mutuelle et simultanée de toutes les variables
économiques. A cette exception près, cependant, tous les grands théoriciens de l’économie de cette
période avaient au minimum une formation moyenne en mathématiques. Jevons, Marshall,
Wicksteed, Wicksell et Cassel sont des exemples de ce que l’on peut appeler des économistes
littéraires, bien que Marshall et Wicksell aient été techniquement des mathématiciens compétents.
Des économistes comme Cournot, Walras, Edgeworth et Pareto furent, de façon évidente, des
économistes mathématiciens, quoiqu’ici aussi le fait mérite d’être mentionné que Walras n’avait
que l’instinct mais aucunement la technique d’un mathématicien. Néanmoins il est frappant de
constater que parmi les grands économistes de la deuxième moitié du XIXe siècle, seuls J.-B. Clark
et Böhm-Bawerk parvinrent à apporter une contribution fondamentale à la théorie économique
sans connaître ou utiliser les mathématiques. »
Mark Blaug, La pensée économique, 1999 (traduction française de la cinquième édition).
Chapitre 8 (extrait).
1.2. Utilité cardinale et utilité ordinale.
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