ENTRER EN PHILOSOPHIE AVEC PLATON ET DESCARTES
Donc l’organisation de l’État sera-t-elle parfaitement
ordonnée pour nous, si un tel gardien veille sur elle en ayant la
connaissance de ces choses ?
Nécessairement, mais alors toi, Socrate, que dis-tu qu’est le
Bien ? plutôt science que plaisir ou quelque chose d’autre en
marge de cela ?
»
De plus, s’il faut en philosophe connaître le Bien et son
rapport aux essences, pour connaître ce qu’est vraiment la justice
et concevoir une juste constitution de l’État, il faut aussi que
soient philosophes ceux qui seront chargés de son application,
qu’ils soient formés à la vraie philosophie
et accèdent à la
connaissance du Bien qui est objet de cette science.
« Tu m’as souvent entendu dire que l’idée du Bien est la plus
grande des connaissances. C’est par elle, que les choses justes et
les autres choses que nous employons sont utiles et avan-
tageuses, et tu sais que rien de ce que nous connaissons sans
elle, même si nous le savions au mieux, ne nous est un profit, de
même que cela n’est rien pour nous, ce que nous possédons sans
le Bien.
»
On remarquera en passant le style très « objectivé » pour
parler de la justice et des autres valeurs morales, ainsi que pour
poser le problème critique de la valeur de notre connaissance de
la justice, comme si la connaissance de la justice était garantie de
l’extérieur par une puissance étrangère à l’esprit de l’homme et
non par un usage correct de son pouvoir de connaître.
Et pourtant la pensée de Platon n’est pas prisonnière de ce
style et de cette problématique objectiviste. Car connaître le
« Bien en soi », c’est savoir ce qui est authentiquement bon pour
l’homme, c’est-à-dire son « être humain » selon ses propres
nécessités et ce qui est en rapport avec « son être humain » selon
ces mêmes nécessités de son être. Le « Bien en soi » n’est pas le
Dieu transcendant, mais Dieu est ce qui est le plus, et même à
l’infini, le Bien en soi. En Dieu le Bien en soi n’est pas limité
comme dans le cas de l’homme.
Si finalement la lumière du Bien en soi, en son statut
« symbolique » de réalité extérieure transcendante, n’est autre
que la lumière de l’esprit lui-même en sa réalité propre, par où il
est bon, alors c’est bien par une démarche critique que Platon
justifie sa connaissance de la justice. Cette procédure peut en
outre s’appliquer à la justification de toutes les autres valeurs
morales. Elle a une portée générale. Enfin, en analysant ainsi sa