Cours de bactériologie № 3 Mardi 7 octobre 2008 à 10h30 Enseignant : Mme. Nicolas-Chanoine Ronéotypeuse : Maïra Gaillard Physiopathologie des maladies bactériennes : mécanismes de pathogénicité des bactéries et réponse de l’hôte 1 Plan I. Les mécanismes de pathogénicité des bactéries A. Introduction B. Facteurs bactériens 1) Multiplication bactérienne : effet inoculum 2) Composés de la bactérie Endotoxines et autres composants de la paroi Exotoxines Enzymes modifiant les tissus de l’hôte Autres facteurs de virulence II. Les défenses de l’hôte à l’infection A. L’inflammation B. La cascade du complément C. Le lysosyme D. Les phagocytes E. Les réponses auto-immunes Conclusion 2 I. Les mécanismes de pathogénicité des bactéries A. Introduction : Une infection est un conflit entre l’hôte et les bactéries. Il se produit comme si il y avait une rupture d’équilibre entre des facteurs d’hôtes et des facteurs microbiens. Les défenses de l’hôte : 1er système de défense : les bactéries En effet, il y a plus de bactéries que de cellules dans l’organisme humain, et elles jouent un rôle protecteur primordial contre les infections. Ces bactéries sont appelées des bactéries commensales (« que l’on mange ») qui sont localisées au niveau de toutes les frontières entre l’organisme et l’environnement comme la peau ou les muqueuses. Le reste de l’organisme (séreuses, organes…) est stérile en temps normal. 2nd système de défense : le système immunitaire c'est-à-dire l’immunité innée et adaptative. ‼ Les bactéries commensales ne sont pas reconnues comme étrangères par le système immunitaire et elles n’entrent pas en conflit avec l’organisme. Les bactéries pathogènes : Elles vont être reconnues comme étrangères soit par les bactéries commensales de la peau et des muqueuses, soit par le système immunitaire, si les bactéries commensales les ont laissées passer. ‼ Les bactéries commensales, par exemple celles du tube digestif, peuvent sortir de celuici et devenir alors des bactéries pathogènes en remontant dans l’urètre et en provoquant une infection urinaire. Les bactéries sont regroupées dans un groupe représentant leur espèce (par exemple : le groupe des E. coli). Mais il existe, au sein de l’espèce de bactérie, plein de sous-groupes de bactéries portant des facteurs de virulence différents ou en plus ou moins grand nombre. Plus un sujet est immunodéprimé, plus il peut s’infecter avec des bactéries qui non pas de facteurs de virulence, et qui sont donc, en temps normal, non pathogènes. 3 Il existe donc une relation entre la charge de bactéries et le système immunitaire de l’homme. Exemple : Les personnes atteintes de VIH deviennent, avec le temps, de plus en plus immunodéprimés et sont souvent sujettes à des infections à mycobactéries qui ne sont pas pathologiques chez un sujet immunocompétent. ‼ Pathogène et virulence sont 2 notions pas tout à fait similaire : Pathogène : une bactérie rentre dans l’organisme et est reconnue comme étrangère Virulence : ce sont des traits de caractère de la bactérie, codés par des gènes, qui vont plus ou moins entrer en jeu dans son pouvoir pathogène. De plus, on considère que pour une bactérie, être pathogène, n’est pas un facteur avantageux car elle va être reconnue comme élément étranger et va déclencher la mise en route du système immunitaire. Cette activation du système immunitaire, plus l’utilisation des antibiotiques, signifie une mort certaine pour la bactérie. Pour contrer cela et survivre, elles vont développer des mécanismes leur permettant d’échapper au système immunitaire. B. Les facteurs bactériens : 1) Multiplication bactérienne : effet inoculum L’arrivée de la bactérie dans l’organisme ne suffit pas à déclencher l’infection, il faut qu’il y ait un certain inoculum, c'est-à-dire une quantité ou une densité suffisante de bactéries dans le foyer infectieux. Quand il y a une petite quantité de bactéries, le système immunitaire s’en débarrasse facilement. De plus, chez les immunodéprimés, l’inoculum est plus faible que chez les immunocompétents pour déclarer l’infection. Ce phénomène a été démontré en laboratoire grâce à des modèles animaux, où on a calculé : La dose létale DL50 : la dose qu’il faut pour tuer 50% des animaux La dose infectante DI50 : la dose qu’il faut pour que 50% des animaux déclarent une infection, telle que l’endocardite. 4 On s’est rendu compte qu’il y avait des différences de niveau de la pathogénicité entre les souches bactériennes. En effet, quand on inocule des souris avec des logs croissants de bactéries provenant de 2 souches différentes et que l’on regarde le taux de souris infestées par chacune des souches, on a besoin de plus de bactéries de la souche 2 pour avoir le même pouvoir infestant que la souche 1 (cf. les courbes de mortalité cidessous). De plus, cet inoculum va varier selon les espèces d’animaux, il ne faudra pas le même nombre de bactéries pour infester une souris par rapport à un chat. 2) Les composés de la bactérie Endotoxines et autres composants de la paroi : Ces endotoxines sont portées au niveau de la paroi des bactéries, elles vont être reconnus comme étrangères et peuvent déclencher un choc septique. Les bactéries à GRAM négatif Il y a, sur la paroi de la plupart des espèces à GRAM négatif, un lipopolysaccharide (LPS) qui comporte une partie lipidique (appelé lipide A) ancrée dans la membrane de la bactérie et une chaîne de sucres avec différents motifs permettant de reconnaître les sousgroupes de l’antigène O. Ici, c’est le lipide A qui nous intéresse parce qu’il est toxique. En effet, quand la bactérie est entière, ce lipide A est invisible pour le système immun mais quand la bactérie est lysée grâce aux défenses de l’organisme, le lipide A va être exposé au système immun et va alors avoir son pouvoir toxique. 5 Il existe aussi ailleurs d’autres endotoxines comme le lipo oligosaccharide (LOS) ou d’autres lipoprotéines (comme les spirochètes), mais c’est toujours le lipide les composant qui est toxique pour l’organisme (la prof n’est pas allée plus loin là-dessus). Les bactéries à GRAM positif Il n’y a pas de lipopolysaccharides sur la paroi des bactéries à GRAM positif mais d’autres composés comme l’acide téchoïque, l’acide lipotéchoïque ou des peptidoglycanes. Mais ceux-ci sont moins bien connus à l’heure actuelle bien qu’ils puissent, comme les lipopolysaccharides, jouer un rôle dans le choc septique. 6 On va donc s’intéresser au LPS (lipopolysaccharide) des GRAM négatif et à son rôle dans le choc septique : Le LPS est donc libéré dans l’organisme quand la bactérie est détruite et il va être reconnu par la LPS binding protéine. La LPS binding protéine va former un complexe avec le LPS et celui-ci va être, alors, présenté aux macrophages portant des récepteurs CD4. Cette présentation déclenche une cascade de production de cytokines (TNFα, IL-1, IL-8…) produisant un certain nombre d’effets dans l’organisme, comme l’activation du complément, de la coagulase…, en gros, ça permet l’intervention de cellules de l’immunité. Chez certaines personnes, ces activations, si elles sont trop fortes, vont provoquer une attaque de l’endothélium des vaisseaux, aboutissant ainsi à une défaillance multiviscérale et un choc septique. Cette « hypersensibilité », qu’ont certaines personnes, semble s’expliquer, désormais, par l’existence de facteurs génétiques qui empêcheraient les mécanismes de protection contre ces débordements, de fonctionner. Par exemple, une infection à GRAM négatif comme la pyélonéphrite qui n’est pas considérée comme grave, peut provoquer chez ces personnes, un choc septique potentiellement mortel. Le choc septique est une des complications gravissimes des infections bactériennes, du fait de sa mortalité élevée et qui provoquent chaque année, aux Etats-Unis, 300 000 morts. 7 Quand une personne survit à un choc septique, elle est, malheureusement, souvent atteinte de gangrène périphérique car les petits vaisseaux ont été endommagés lors du choc, ceci pouvant conduire jusqu’à l’amputation (cf. la photo d’orteils du Power point de la prof). La physiopathologie du choc septique est complexe et de nombreuses tentatives d’immunothérapies ont été faites, depuis 20ans, pour tenter d’enrayer cette cascade mortelle. Exotoxines : On retrouve les exotoxines autant chez des GRAM négatif que chez des GRAM positif. Se sont des protéines secrétées par les bactéries, ayant une nomenclature complexe, qui se base sur différents critères : Le type de toxicité vis-à-vis des cellules (leucocidine contre les leucocytes, vérotoxine contre les cellules de véros utilisées en recherche,…) ou une toxicité visà-vis d’un organe (neurotoxine contre le système neurologique, entérotoxine contre le système digestif) La lettre de l’alphabet (grec…) L’espèce bactérienne productrice : toxine cholérique, botulique, tétanique… Le nom des découvreurs : par exemple, la leucocidine Panton-Valentine qui est le produit d’un germe multi résistant et virulent qui se retrouve en ville et non pas à l’hôpital. 8 Ça c’est la « vieille classification », il existe, maintenant, une classification plus homogène qui se fait en fonction de la structure et/ou de l’activité physiologique de l’exotoxine: Les exotoxines de type III : Ces exotoxines sont formées de 2 composés, le composé A qui porte l’activité toxique et le composé B qui permet l’attachement de l’exotoxine à la cellule cible pour qu’elle puisse y pénétrer. Il y a 2 choses à retenir pour les exotoxines III : La complexité de structure est variable mais il se passe, à chaque fois la même chose, d’abord il y a une internalisation du composé A dans la cellule cible puis il se produit une ADP-ribosylation de la protéine ciblée. Les effets de ces deux mécanismes sont variables selon la cible : par exemple, la toxine cholérique entraîne une augmentation de l’AMPc, la toxine diphtérique diminue la synthèse des protéines… Les protéines de l’exotoxine sont donc plus ou moins complexes, parfois les deux sont juste reliées par un pont disulfure, parfois il y a plusieurs unités B pour une A… (il y a des schémas des différentes structures sur le Power point mais il faut juste retenir que la structure est variable d’une exotoxine à une autre). Concernant l’internalisation des toxines, il faut qu’il y ait un récepteur sur la cellule cible. La toxine va donc se lier au récepteur, notamment grâce au composé B et le récepteur va s’ouvrir en pore pour laisser passer la toxine (seulement le composé A), qui va aller jouer son rôle dans le cytoplasme cellulaire. Après l’internalisation du composé A, il y a une ribosylation c'est-à-dire un transfert d’un groupe ADP-ribosyl du NAD à la protéine cible et ce transfert va engendrer l’inactivation de la protéine. 9 Rappel : NAD pour Nicotinamide adénine dinucléotide qui est un dérivé de la vitamine B3 et une coenzyme d’oxydoréduction mise en jeu dans le métabolisme de l’ATP. Par exemple, pour la toxine cholérique : Elle pénètre dans la cellule cible en se fixant au récepteur GM1, puis il y a ribosylation et activation de l’adénylate cyclase qui aboutit à une synthèse de beaucoup d’AMPc. Celui-ci entraîne alors une excrétion de molécules de sel (NaCl) et d’eau ce qui se traduit par une diarrhée liquide et profuse, principal symptôme du choléra. Dans certaines régions du monde, le choléra est présent de façon endémique, en effet la contamination a lieu lors de l’ingestion de nourriture ou d’eau ayant été souillées par les excréments d’une personne atteinte. Le seul traitement est la réhydratation jusqu’à l’élimination de la bactérie. Les exotoxines de type II : Ces exotoxines sont responsables de la désorganisation des membranes cellulaires, ce qui aboutit à la mort des cellules visées. Il existe deux types d’exotoxines II : Les protéines qui s’implantent dans la membrane cellulaire, sans avoir d’activité enzymatique, cela déstructure la membrane, il y a une sortie d’eau et la cellule meurt. Exemple : la toxine α du Staphylocoque aureus 10 Les phospholipases qui modifient les lipides membranaires, il y a alors rupture entre la partie phopho et la partie lipidique de la membrane, provoquant une instabilité membranaire et la cellule éclate. Exemple : la toxine α du Clostridium perfringens Ces exotoxines sont souvent appelées des « hémolysines » car on les a découvertes en étudiant leur effet sur les membranes des globules rouges, qui sont faciles à étudier in vitro. Mais en fait ce sont plutôt des cytotoxines (« qui sont toxiques pour la cellule ») et qui sont responsables des désorganisations membranaires. Les exotoxines de type I : Elles sont aussi appelées super antigènes car ce sont des protéines qui forment des ponts entre les molécules CMH de classe II portées par les macrophages et les récepteurs cellulaires T et B lors de la présentation d’un antigène. Ceci aboutissant à l’activation des cellules immunitaires cytotoxiques et à la synthèse d’anticorps spécifiques. Ces super antigènes ne se contentent pas de stimuler une seule cellule mais plusieurs cellules lymphocytaires, notamment des cellules T, il aura, alors, une production en grande quantité de clones lymphocytaires T qui ne reconnaissent pas spécifiquement le super antigène. Ces clones induisent, ainsi, une production excessive d’IL2 (1000 fois supérieure à la normale), qui va, à son tour, stimuler la production en grande quantité d’autres cytokines (TNFα,…). Cette surproduction de cytokines entraîne des lésions au niveau des endothéliums des vaisseaux et il se produit un choc septique, comme par exemple, lors d’une infection à staphylocoque. 11 On peut donc avoir un choc septique, soit à cause de la présence d’une endotoxine (type LPS) libérée lors de la destruction de la bactérie, soit à cause de la sécrétion d’une exotoxine de type I qui « leurre » le système immunitaire. Ces 2 mécanismes entraînent, alors, une superproduction de cytokines → lésion de l’endothélium → défaillance multi viscérale → choc septique Enfin, les exotoxines ont des actions physiopathologiques différentes selon leur mode de sécrétion : La sécrétion peut être externe à l’individu et la toxine rentre dans l’organisme par ingestion, ultérieurement. Exemple : toxi-infection alimentaire à Staphylocoque aureus La sécrétion de la toxine peut se faire après absorption de la bactérie au niveau : D’une muqueuse (après un repas par exemple) : avec soit une action locale de la bactérie comme pour le choléra, soit une action à distance, comme pour la diphtérie. D’une plaie : avec une action à distance possible comme dans le cas du tétanos. Ainsi, les grands fléaux (choléra, diphtérie…) sont surtout dangereux à cause de la production de toxines et non pas à cause de la multiplication bactérienne. Mais les exotoxines, bien que néfastes pour l’homme, sont utilisées par l’homme dans différents cas : Dans un contexte médical : on utilise des anatoxines comme vaccins contre le tétanos ou la diphtérie, en faisant générer une réponse anti-toxine, ce qui protégera la personne si elle est, de nouveau, exposée. On obtient ces anatoxines par détoxification chimique ou génétique. On utilise aussi la toxine botulique (BIOTOX) qui empêche les contractions musculaires. Elle a été, d’abord, utilisée dans les années 80, pour le traitement du strabisme, puis en ophtalmologie, pour traiter le nystagmus*, en neurologie, pour combattre les torticolis spasmodiques et enfin, plus connu, surtout de nos jours, en dermatologie, on utilise la toxine botulique pour corriger les rides d’expressions ou l’hyperhydrose (excès de transpiration). Dans un contexte militaire : les toxines peuvent ainsi être utilisées pour faire du « bioterrorisme» car elles ont un très fort rapport poids/efficacité, par exemple, 12 l’utilisation d’aérosols botuliques provoque la mort par paralysie générale des muscles. *Le nystagmus est un mouvement d'oscillation involontaire et saccadé du globe oculaire. Les enzymes modifiant les tissus de l’hôte Certaines bactéries vont sécréter des enzymes agissant, non pas sur une seule cellule mais sur un ou des tissus humains, par exemple : La hyaluronidase Les protéases Les élastases La DNAse La coagulase Les hyaluronidases, les protéases sont responsables de destruction tissulaire, les élastases vont modifier les tissus élastiques en les rendant rigides. Des thrombus peuvent se former à cause des hyaluronidases et des coagulases, avec un risque de migration d’emboles infectés par la suite… Par exemple, tout staphylocoque aureus possède ces enzymes et a donc un fort pouvoir pathogène. Les autres facteurs de virulence On a pu observer, qu’au cours de l’évolution des espèces, il y a eu intégration dans les chromosomes bactériens d’éléments jouant un rôle dans la pathogénicité de celles-ci, Il existe, en effet, de multiples gènes aux fonctions variées, qui peuvent être associés à la virulence. Par exemple, si l’on étudie la séquence du chromosome d’E. Coli, on peut voir qu’à certains endroits, il y a eu intégration d’ « îlots de pathogénicité » rendant la souche plus virulente. Ces îlots de pathogénicité sont des regroupements de gènes de virulence au sein de la séquence du chromosome bactérien. Grâce a des méthodes génétiques multiples et sophistiquées, par exemple, de séquençage du génome bactérien, ceci a été vérifié en comparant la virulence d’une souche inactivée pour un gène de virulence et celle d’une souche « sauvage » et la conclusion a été que la souche sauvage était la plus virulente. ‼ Les souches de Coli n’ont pas tous les îlots de pathogénicité en même temps, on divise les bactéries en sous-groupes selon les îlots qu’elles possèdent dans leur séquence. 13 On a détecté, par PCR, chez E. Coli, 43 gènes dans les îlots de pathogénicité qui codent pour : Des gènes variés codant pour des adhésines, qui permettent aux bactéries de rester dans l’organisme malgré la présence d’un flux (par exemple, d’urine) censée les éliminer. Des gènes codant pour des toxines Des gènes codant pour des sidérophores, se sont des protéines capables de « voler » l’hème à l’hémoglobine pour assurer la survie de la bactérie et la rendre plus virulente. Des gènes codant pour des protectin, c'est-à-dire pour des capsules protégeant les bactéries contre le système immun ou contre les antibiotiques Des gènes codant pour des invastin, qui permettent une invasion bactérienne dans les cellules, surtout celles de la barrière digestive. Il faut retenir que, dans une espèce donnée de bactérie, il y a des sous-groupes de population avec des caractéristiques différentes, qui peuvent permettre de prévenir les infections de manière spécifique. Les noms des gènes ne sont pas à connaître, il faut surtout savoir les composés codés par les gènes de virulence. Pour prouver l’existence de ces gènes, une étude a été menée sur la virulence de Klebsiella oxytoca sur des vers appelés Caenorhabditis elegans, qui ont l’avantage d’avoir une immunité innée très semblable à la notre. On commence par cultiver les vers en leur donnant une nourriture à base de bactéries de type E. Coli et on les laisse vivre tranquillement (ils vivent environ 13 jours). Ces vers vont représenter le témoin OP50 sur le graphique ci-dessous (c’est la courbe allant le plus à droite). A côté de cette culture, on donne d’autres souches de bactéries à manger à d’autre vers, et notamment l’entérobactérie appelée Klebsiella oxytoca, qui peut provoquer des diarrhées hémorragiques après un traitement aux antibiotiques du fait de l’existence d’une toxine, qui n’a pas encore été identifiée. On a alors pu distinguer dans cette espèce de bactérie, des sous-groupes n’ayant pas tous la même virulence et notamment on a pu déterminer l’existence de cette toxine dans l’un de 14 ces sous-groupes (les courbes OK1, Milcic et Coquelet sur le graphique), permettant ainsi aux bactéries d’être plus virulente et de tuer plus vite les vers atteints. On pourra donc aller chercher spécifiquement la toxine dans ces souches bactériennes plutôt que dans celles qui ont montrées un niveau de virulence inférieure. Malgré ces avancées, l’explication de la virulence reste complexe, du fait, notamment, de l’existence de multiples produits, qui peuvent, de plus, être coexprimés. En outre, il existe une régulation de l’expression in vivo des gènes de virulence, pouvant aboutir à une production différentielle en fonction de : Du stade de l’infection comme c’est le cas d’une infection à Salmonella typhimurium, entérobactérie qui provoque une infection digestive responsable de diarrhées. En effet, on a regardé l’expression des gènes de virulence de cette bactérie dans différentes conditions de réceptacle : dans la lumière de l’intestin, dans les cellules M de l’épithélium de l’intestin et dans les macrophages, où il existe des taux de nutriments et d’oxygène différents. 15 Localisation de la bactérie Lumière de l’intestin Niveau de nutriments Niveau d’oxygène Haut Très bas Dans les cellules M* ou dans les vacuoles des cellules épithéliales Bas Macrophages Bas Bas Moyen Activation ou répression des gènes Gènes inv* exprimés Gènes spv* réprimés Gènes inv exprimés Gènes spv exprimés Gènes inv réprimés Gènes spv exprimés *inv pour invasine, protéine permettant des invasions cellulaires *spv pour Salmonella plasmid virulence qui entraîne des modifications néfastes des cellules. * les cellules M sont des cellules qui ont la capacité de transporter toutes sortes de particules, bactéries et virus présents dans la lumière intestinale et de les délivrer intacts au niveau du follicule lymphoïde sous-jacent Pour résumer, les gènes d’invasion s’expriment davantage dans la lumière de l’intestin, les bactéries vont donc pouvoir entrer vraiment dans l’organisme mais les gènes de virulence ne s’expriment pas, ils ne sont pas encore « utiles ». Une fois passée au niveau de la barrière intestinale, les deux catégories de gènes s’expriment, en effet, la bactérie doit continuer son invasion et commence à être virulente. Enfin, une fois qu’elle se retrouve dans les macrophages, qui l’ont mangé pour s’en débarrasser, les gènes d’invasion ne s’expriment plus (à cause du taux d’O² plus élevé) car ils sont devenus inutiles, la bactérie étant déjà « dans la place » et ceux de la virulence s’expriment pour que la bactérie fasse son boulot de pathogène. 16 De la densité bactérienne En effet, la bactérie, après s’être installée dans un endroit bien confort, va sécréter un produit qui va être reconnu par d’autres bactéries. Ces bactéries vont donc être attirées sur le site, et lorsqu’il y en a un grand nombre, elles vont, alors, excréter, de manière synchro des produits qui vont dégrader les protéines humaines, grâce au quorum sensing. C’est un mécanisme de contrôle des gènes de virulence qui ne s’expriment que lorsque la population bactérienne est conséquente. Ajout perso : En gros, les bactéries s’échangent des messages par voie moléculaire pour se donner rendez-vous, puis pour coordonner leur action et leurs excrétions. Quand il y a une concentration de bactéries suffisamment importante, il y a beaucoup de produit excrété et on atteint le quorum et les bactéries le perçoivent et deviennent alors très pathogènes en sécrétant des molécules dégradant les protéines humaines (cf les dessins en dessous). Le produit excrété par les bactéries initiales, s’appelle le biofilm, c’est un polysaccharide qui va permettre aux bactéries de se multiplier et de devenir invisible pour le système immunitaire, le foyer infectieux va donc se développer et pérenniser. Le biofilm est donc un moyen de protection qu’ont les bactéries en situation pathogène pour survivre dans l’organisme. 17 II. Les défenses de l’hôte face à l’infection A. L’inflammation : C’est un phénomène local aigu (Chaleur, Rougeur, Tumeur, Douleur), qui peut passer à la chronicité si elle ne se résorbe pas vite. Elle résulte de l’augmentation de la perméabilité vasculaire qui conduit à : Une diapédèse c'est-à-dire à l’arrivée des cellules de l’inflammation Un exsudat séreux puis fibreux par l’arrivée des anticorps et du complément. Quand les bactéries se multiplient à un endroit, les petits vaisseaux, sur place, vont se dilater, provoquant un changement de température et permettre un afflux de cellules. Les leucocytes, circulants dans les capillaires, sont des détecteurs d’éléments étrangers. Quand un élément étranger se trouve dans un tissu, il y a dilatation des vaisseaux, permettant la marginisation des leucocytes qui vont aller attaquer les bactéries dans le tissu. Ces leucocytes et les autres cellules de l’inflammation ont été attirés sur le site par des médiateurs de l’inflammation que sont les cytokines (IL2, TNFα) agissant comme les facteurs chimioattractants, sécrétées par les premiers macrophages ayant détectés les bactéries. Il y a production des médiateurs de l’inflammation par différentes cellules : Par les cellules présentent localement, qui produisent des kinines, de l’histamine, provoquant une augmentation de la perméabilité et des cytokines IL1, IL6 et TNF. Par les bactéries, qui produisent des endotoxines, facteurs chimioattractants Par le foie, qui produit la C Réactive Protéine (CRP) et l’α1-antitrypsine. NB : La CRP est dosée dans les NFSs pour diagnostiquer une inflammation, elle sera fortement augmentée dans une infection bactérienne mais pas lors d’une infection virale. 18 B. La cascade du complément Le complément est indispensable lorsque les bactéries possèdent une capsule car il permet l’opsonisation des bactéries par des anticorps. Les trois composants majeurs du complément sont : Le C5a qui recrute les polynucléaires neutrophiles Le C3b qui permet l’opsonisation des bactéries Le Membrane Attack Complex (MAC) qui permet la lyse des bactéries par destruction de la membrane externe des GRAM négatif. C. Le lysosyme Il est présent dans toutes les sécrétions et dans le sérum et permet la lyse des bactéries à GRAM négatif directement et celle des GRAM positif par action coordonnée avec le complément. Ainsi, l’association entre le complément et le lysosyme est responsable de l’activité bactéricide du sérum. Malheureusement, son spectre d’action est trop faible pour l’utiliser comme un médicament contre les infections. D. Les phagocytes Les premières cellules phagocytaires à arriver sur le site sont les polynucléaires neutrophiles. Ils ont une production intense de 10^10 par jour au niveau de la moelle et ils restent en moyenne 6,5 jours dans la circulation puis se marginalisent au niveau des capillaires. Ensuite, ce sont les monocytes mobiles qui arrivent sur le site et vont être aidés par les macrophages résidents, après une maturation et une différenciation locale. Ces cellules bien qu’arrivant plus tardivement sur le site de l’infection, sont plus actives et considérées comme médiateurs majeurs de l’immunité. En effet, les bactéries opsonisées sont phagocytées par les monocytes et les macrophages, il y a alors formation dans le cytoplasme, d’un phagosome, puis mise en place de mécanismes de destruction dépendants de l’oxygène (burst oxydatif) avec production de peroxyde d’hydrogène. 19 On a enfin une fusion entre le phagosome et les vacuoles azurophiles et spécifiques, formant ainsi un phagolysosome, qui contient de nombreuses enzymes lytiques, indépendantes de l’oxygène. Il reste alors des produits bactériens qui seront présentés aux cellules du système immunitaire, qui pourront alors produire des cellules cytotoxiques et des cellules productrices d’anticorps. ‼ Il arrive dans certains cas que la bactérie résiste à la destruction cellulaire, elle va alors se multiplier et provoquer une infection intracellulaire. C’est le cas de la Légionella, bactérie vivant dans l’eau, qui provoque des infections pulmonaires par inhalation d’aérosols contaminés. En effet celle- ci est phagocytée par les cellules mais elle inhibe la fusion du phagolysosome et n’est donc pas détruite. C’est le cas aussi pour les Mycobactérium tuberculosis et les Chlamydia species, qui inhibent aussi la fusion du phagolysosome. D’autres bactéries, comme la Salmonella typhimurium, Coxellia species, Mycobacterium leprae ou encore Leishmania species sont résistantes aux enzymes lysosomales. Enfin, des bactéries comme Listéria species ne vont pas être détruites car elles ne seront pas reconnues comme étrangères du fait de leur réplication très lente dans le cytoplasme de la cellule infectée. Il est donc plus difficile d’atteindre ces bactéries lors d’un traitement et celui-ci devra être plus long que pour d’autres souches bactériennes. E. Les réponses auto-immunes En temps normal, lors d’une infection, il y a action conjointe des anticorps antibactériens et des cellules cytotoxiques, aboutissant à l’élimination de la bactérie. Mais, il peut arriver que la réponse immunitaire endommage les tissus de l’hôte au lieu de les protéger et ce par deux mécanismes : Les réactions croisées Par exemple, la protéine M du Streptocoque pyogène groupe A, à la surface de la bactérie, empêche la phagocytose et cette protéine a des éléments communs avec la myosine cardiaque humaine. Les anticorps anti-M vont donc réagir contre cette protéine mais aussi contre la myosine, provoquant une destruction tissulaire cardiaque responsable du rhumatisme articulaire (RA), considéré donc comme une maladie auto-immune. 20 En effet, quand il y a une infection à streptocoque donnant une angine, il y a donc production d’anticorps qui provoque des dégâts au niveau cardiaque et glomérulaire (au niveau du rein) et si cette infection est mal soignée ou si elle revient de façon récurrente, elle provoque une atteinte cardiaque et notamment un souffle par destruction de la myosine. Les immuncomplexes Après s’être formés par réactions entre anticorps et antigènes, ils peuvent se déposer dans des endroits dangereux pour l’organisme, comme c’est le cas lors du dépôt dans la membrane basale du glomérule, lors de glomérulonéphrites post-streptococciques. … La prof n’est pas allée plus loin dans son cours et n’a même pas fait de conclusion, je mets ci-dessous celle de son Power point. Conclusion : La virulence bactérienne est plus complexe qu’on ne l’imaginait De nombreux gènes sont mis en jeux simultanément L’élucidation des mécanismes ne fait que commencer Le rôle dans l’évolution des bactéries reste mystérieux… !FIN! 21 22