SFAR, Syndromes coronariens aigus non ST+, N. Assez 1, F

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DEPT DE MEDECINE GENERALE / UNIVERSITE PARIS DIDEROT
TRACE D’APPRENTISSAGE
Le présent modèle doit être utilisé pour UNE TRACE D’APPRENTISSAGE AU FORMAT WORD
Nom et prénom de l’étudiant auteur de la présente trace : Lorène THELOT-BACH
Nom et prénom du tuteur : Marc FRARRIER
Numéro du semestre du DES au cours duquel cette trace a été produite : 5ème semestre
Date de réalisation de la trace: 28/10/2012
Le maître de stage du stage concerné par cette trace a-t-il évalué cette trace ? :
COMPETENCES VISEES PAR CETTE TRACE
1
2
3
Oui
Compétence 2 : Communiquer de façon efficiente avec le patient et/ou son entourage
Compétence 3 : Prendre une décision adaptée en situation d'urgence (potentielle/vraie)
Compétence 7 : Prendre des décisions fondées sur les données actuelles de la science, adaptées aux besoins
et au contexte
Si votre tuteur estime que cette trace mérite d’être publiée sur le site en tant que trace remarquable, acceptez vous
qu’elle le soit:
1 Oui
Prise de décision en ville face à une douleur thoracique
Narration du cas :
Alors que j’étais au cabinet, pendant mon stage SASPAS, préparant les consultations à suivre, se présente à
l’accueil, Mme F. âgée de 39 ans, dyspnéique et qui dit ne plus pouvoir respirer. La secrétaire la fait patienter et me
demande si je peux la voir. Je lui réponds que je peux la voir tout de suite.
La patiente entre dans le cabinet, j’ouvre son dossier et voit qu’elle vient régulièrement pour le suivi d’une
dépression avec des angoisses multiples. Je l’interroge sur ce qui se passe et elle me raconte que depuis la veille au
soir, le 17/07/2012, alors qu’elle était au repos, elle a eu une douleur dans la poitrine et cette douleur l’empêche
de respirer. Je lui demande de préciser la topographie de cette douleur et elle me décrit une douleur rétro sternale,
compressive qui irradie dans le bras gauche. Cette douleur l’oppresse, elle est croissante depuis la veille au soir, de
façon continue et elle rend sa respiration difficile (il est étrange qu’une personne aussi angoissée n’ai pas appelé les
pompiers !!!) ; Elle n’est pas augmentée à l’inspiration ou à la toux.
Je pense alors qu'il faudra que je fasse un ECG après avoir un peu compléter l'interrogatoire.
Je continue de l’interroger et elle m’apprend qu’elle vient de laisser ses 2 enfants pour les vacances, qu’elle a eu du
mal à se séparer de ses enfants mais que « ça va mieux ». Elle me précise que son moral est moyen en ce moment.
Je lui demande de s’adosser (car elle ne peut pas s’allonger) sur la table d’examen et continue de discuter avec elle.
Dans sa famille personne n’a eu de problèmes cardiaques, elle n’a pas de dyslipidémie, pas d’hypertension
artérielle, pas de diabète. Par contre elle fume avec un tabagisme estimé à 20 paquets/années et elle est en
surpoids avec un IMC à 37.
Plus nous discutons, plus elle se calme et la polypnée diminue largement. Je lui demande si la douleur persiste et
elle me répond qu’elle se sent un peu mieux mais que la douleur est toujours présente.
Je finis par penser que c'est également possible qu'il s'agisse d'une crise d’angoisse car elle est nettement moins
dyspnéique qu’à l’arrivée. Cependant elle semble tout de même inquiète et insiste sur le fait qu’elle a mal.
Pendant que nous discutons je prends ses constantes et lui explique que nous allons réaliser un ECG afin de s’avoir
s’il y a un problème cardiaque ou pas.
La TA est difficile à prendre et j’ai du mal avec le brassard, elle semble être à 16/9, le pouls est à 90/min,
l’auscultation cardio-pulmonaire est normale, les pouls sont tous perçus, il n’y a pas de signes d’insuffisance
cardiaque. Elle ne présente ni cyanose, ni signes de détresse respiratoire.
Je la rassure en lui disant que je vais la prendre en charge et que tout va bien se passer.
Je décide de faire l’ECG parce que dès son arrivée j’avais décidé de le faire, devant cette douleur typique de
syndrome coronarien. Cependant étant donné ses antécédents d’angoisses et l’amélioration des symptômes au
cours de la discussion je ne suis pas certaine de trouver des anomalies à l’ECG.
Je réalise l’ECG et retrouve un rythme sinusal, régulier, des complexes QRS fins, pas d’ondes de Pardee mais la
présence d’ondes T négatives en territoire en DII, DIII et avf. De plus les ondes T sont aplaties de façon diffuse.
Mme F. le 18/07/2012
Je demande à la patiente de ne pas bouger et lui dit que je vais demander avis à une de mes collègue. Mes maitres
de stage étaient tous en vacances donc je demande confirmation à la remplaçante présente dans le cabinet car je
ne voudrais pas appeler le SAMU pour rien.
Elle confirme ma suspicion de syndrome coronarien et me précise que je peux l’appeler si j’ai besoin d’aide.
J’appelle donc le SAMU après avoir prévenue la patiente que son ECG n’est pas parfaitement normal et que je
considère nécessaire de faire des examens complémentaires à l’Hôpital. Je transmets les informations au médecin
régulateur du SAMU et elle m'annonce qu'elle envoi une équipe le plus vite possible.
En attendant je rassure la patiente, je prépare la lettre pour transmettre les informations au SAMU avec les
traitements habituels et les ATCD de la patiente.
Finalement les pompiers arrivent (car l’équipe de SAMU ne pouvait être les premiers sur les lieux), ils prennent les
constantes et lui administrent de l'oxygène en attendant le SAMU. Un des pompiers dit à la patiente, remarquant
qu’elle s’améliore sous oxygène, qu’il y a de nombreuses bronchites en ce moment et me regarde pour que je
confirme. Ne voulant pas affoler la patiente avec nos différents doutes je réponds qu’effectivement ce n’est
probablement pas très grave et l’important c’est qu’elle soit prise en charge et que l’on fasse les examens
complémentaires nécessaires afin de faire le diagnostic de cette douleur thoracique. Le SAMU arrive assez
rapidement et prend en charge la patiente.
J'avais énormément de retard dans ma consultation mais les patients avaient tous été prévenu par la secrétaire et
comprenaient très bien la situation.
Une patiente me demande ce qui arrive à Mme F. car elle la connait bien. Je lui réponds que je ne sais pas
exactement mais que j'ai jugé nécessaire qu'elle soit transférée à l'hôpital pour des explorations complémentaires
(je ne veux pas trahir le secret médical!!!).
Je finis ma consultation et pendant toute la journée, de façon intermittente, je me remémore Mme F. et me
demande si je n'aurais pas dû faire plus vite, lui donner quelques chose (aspirine...), ce que j'aurais fais si je n'avais
pas eu d’appareil à ECG etc...
J'apprends par la suite qu’à l’arrivée à l’hôpital sa troponine était à 45 avec un pic à 932 le 19/07/2012. Elle a subit
une coronarographie qui montrait une sténose de la partie moyenne de l'artère circonflexe traitée par angioplastie.
Problèmes posés :
1.
2.
3.
4.
Difficultés du diagnostic clinique de syndrome coronarien aigu (SCA) en médecine générale
Intérêt d’n appareil à ECG en cabinet de ville ?
Problèmes liés aux a priori sur les patients en médecine générale
Angoisse et syndrome coronarien ?
1. Difficultés diagnostic du syndrome coronarien aigu en médecine de ville
Il arrive très souvent, qu’en médecine générale on soit confronté à une douleur thoracique. Toute la prise en
charge découle de notre évaluation du risque de syndrome coronarien aigu ou pas. Quels sont les moyens à notre
disposition pour permettre cette évaluation ?
La conférence de consensus de l’HAS de 2006, traite des différentes stratégies de décision et de prise en charge
selon les syndromes coronariens aigus (SCA), des caractéristiques des filières de prise en charge d’un patient avec
une douleur thoracique, et des situations particulières de prise en charge.
Cette conférence de consensus concernant l’évaluation du risque initial chez le médecin généraliste recommande :
- Une démarche de type bayesienne c'est-à-dire que l’évaluation clinique établit une probabilité initiale,
réévaluée à travers la lecture de l’électrocardiogramme (ECG) permettant de choisir entre débuter la
thérapeutique de désobstruction coronaire, poursuivre la démarche diagnostic par le dosage des
troponines ou mettre en place une autre stratégie
- De plus compte tenu des pertes de chances induites par le retard diagnostique et thérapeutique pour les
patients en phase aigue d’un IDM, l’objectif est de « prescrire le 15 ». Le médecin régulateur du SAMU est
le « gardien du temps » du déroulement de l’intervention.
Le reste des recommandations de cette conférence concernent plutôt les services du SAMU ou des urgences et la
prise en charge cardiologique.
Une synthèse bibliographique de l’HAS de 2007 traite de la prise en charge des syndromes coronariens, à la phase
aigue, en phase post-infarctus et des indicateurs principaux de qualité de prise en charge des SCA à la phase aigue.
L’incidence exacte des syndromes coronariens aigus est mal connue, en France, en l’absence d’enquêtes
prospectives efficaces. Des estimations font état d’une fréquence de 2500 syndromes coronariens aigus par million
d’habitants. Cependant les pronostics des SCA restent réservés avec des taux de mortalité entre 1 et 10% selon le
type et l’âge des malades.
On décrit deux types de SCA :
- Les syndromes coronariens aigus avec sus-décalage persistant de ST (SCA ST+), qui signifie que l’occlusion
coronaire est totale
- Et les syndromes coronariens aigus sans sus-décalage de ST (SCA ST-) qui regroupe l’angor instable et les
infarctus sans ondes Q
Le SCA ST+ est un problème de santé publique important en raison de sa fréquence et de ses conséquences en
termes de morbi-mortalité. Dans ces cas-là, il faut systématiquement envisager une reperfusion, par angioplastie
ou fibrinolyse, dans les 12 premières heures d’un infarctus.
Le SCA ST- concerne les patients présentant une douleur thoracique faisant évoquer par son siège, son type, son
mode de survenue et sa durée une origine coronarienne. La première approche clinique inclus
l’électrocardiogramme qui montre soit un sous décalage du segment ST, soit une inversion de l’onde T, des ondes T
aplaties, ou des atypies de repolarisation, voire même un électrocardiogramme normal. Ces états correspondent en
générale, à une rupture de la plaque avec une thrombose sub-occlusive ne nécessitant pas le même degré
d’urgence que dans les SCA ST+ (qui signifie l’occlusion coronaire totale et la nécessité d’une recanalisation dans les
meilleurs délais). Dans ces cas là une stratification du risque est réalisée et permet de décider de la prise en charge.
Les patients à haut risque de mort ou d’infarctus dans les 30 jours sont ceux présentant un sous-décalage du ST
et/ou une élévation des troponines et tous les diabétiques. Il est recommandé de traiter ces patients par : aspirine,
Clopidogrel, bétabloquants et anticoagulants, un inhibiteur des récepteurs GpIIb/IIIA et de recourir dans les 48
heures à une coronarographie suivie ou non d’une revascularisation selon l’état des lésions. Les autres patients
(sans récurrence des douleurs, non diabétiques, sans sous-décalage ST, avec troponine normale sur 2 mesures à 612 heures d’intervalle) sont considérés à faible risque et recevront le même traitement hormis les inhibiteurs des
Gp2B/3A et feront l’objet d’explorations complémentaires non invasives, destinées à prouver l’ischémie coronaire,
qui dûment prouvée sera expertisée d’une manière plus ou moins différée par une coronarographie pour évaluer
l’existence et l’étendue des lésions coronaires et identifier celles qui pourront faire l’objet d’une revascularisation.
Les indicateurs principaux de qualité de prise en charge des SCA sont :
- Le pourcentage de SCA ST+ ayant bénéficié d’une décision de reperfusion : objectif principal du traitement
des patients présentant un SCA ST+ de moins de 12 Heures
- Le délai de 1er contact médical- fibrinolyse pour les SCA ST+ : inférieur à 30 minutes
- Le délai 1er contact médical- angioplastie pour les SCA ST+ : inférieur à 90 minutes
- Le pourcentage de SCA ayant reçu de l’aspirine dans les 12 premières heures sauf contre-indication : qu’il
s’agisse d’un SCA ST+ ou d’un SCA ST- (l’administration d’aspirine à dose initiale de 150 à 325 mg a montré
une diminution de la mortalité)
- L’existence d’un réseau contractualisé pour la prise en charge des SCA ST+ : la collaboration des différents
acteurs médicaux est essentielle pour diminuer le temps de prise en charge des patients.
De plus, en 2010, l’HAS a recommandé, dans un guide de bon usage des technologies de santé, de ne pas utiliser les
marqueurs biologiques en médecine ambulatoire. En effet les SCA étant une urgence vitale, sa suspicion peut
suffire au praticien (généraliste ou spécialiste) pour décider l’hospitalisation immédiate sur la base de
l’interrogatoire et de l’examen clinique (et de l’ECG, s’il peut être fait). Il n’y a donc pas lieu de prescrire un dosage
des marqueurs biologiques de nécrose myocardique. Donc si les symptômes sont typiques, le médecin doit appeler
le 15 et si les symptômes sont atypiques avec une incertitude clinique, le médecin doit appeler le 15 et discuter
avec le médecin régulateur du SAMU d’une possible hospitalisation ou de la poursuite des explorations en
ambulatoire.
La seule exception est le cas de patients asymptomatiques au moment de la consultation (douleur plus de 72H
auparavant, chez qui on suspecte qu’il s’agissait d’une douleur de SCA sans complication).
Enfin, il existe des scores permettant de stratifier le risque d’évolution vers l’infarctus ou le décès. Le plus connu et
le plus utilisé est le score TIMI, qui repose sur 7 variables :
Tableau I. Détermination du score TIMI (un point par item).
Âge 65 ans
1
3 facteurs de risque (antécédents familiaux, diabète, HTA, cholestérol, tabac) 1
Maladie coronaire connue (sténose > 50 %)
1
Prise d'aspirine dans les 7 jours
1
Angor sévère dans les 24 dernières heures
1
CPK MB ou troponine positives
1
Modification du segment ST supérieur à 0,5 mV
1
Un score TIMI 5 définit un patient à risqué élevé
Un score TIMI supérieur ou égal à 5 définit un patient à haut risque. Ce score est corrélé au pronostic des patients.
Il est couramment utilisé dans les choix thérapeutiques. Il existe deux groupes de patients :
- Les patients « à haut risque » d'évolution vers l'infarctus ou le décès et devant justifier d'une stratégie
invasive
- Les patients « à faible risque » pour lesquels il est préconisé un traitement médical et une épreuve d'effort
pour décider la réalisation de la coronarographie.
Il existe également le score GRACE, qui est utilisable pour tous les types de SCA mais avec de nombreuses variables
rendant son utilisation parfois difficile en pratique.
Cependant tous ces scores ne sont pas utilisables en médecine générale car ils nécessitent tous un dosage des
troponines.
Discussion :
Les recommandations que nous avons montrent bien l’importance de la coordination entre les différents acteurs
médicaux et l’importance d’un diagnostic, d’une évaluation du risque et d’une prise en charge rapide des patients
présentant une douleur thoracique suspecte d’être un syndrome coronarien aigu. Cependant en médecine de ville
nous avons peu d’outils à notre disposition permettant une évaluation du risque d’infarctus. En effet les scores
existant, TIMI ou GRACE, utilisent tous des variables que nous ne pouvons pas utiliser en médecine générale. Le
dosage des marqueurs biologiques permettant le calcul de ces scores n’est pas réalisable en ville car il peut
retarder la prise en charge initiale. De plus il n’existe aucun moyen fiable de discerner une douleur de SCA d’une
douleur autre (angoisse, EP, douleur intercostale…). Tous les éléments que nous avons peuvent nous orienter vers
un diagnostic sans aucune certitude, même l’électrocardiogramme peut être normal en cas de SCA !!!
Concernant l’interrogatoire :
Il recherche une douleur thoracique typique c'est-à-dire rétro-sternale, constrictive ou écrasante, brûlante ou
pesante (blockpnée). La douleur peut également avoir une localisation atypique (mâchoire, bras gauche, poignet,
épigastre…).
Cette douleur est à mettre en rapport avec :
- Les circonstances de survenue (notamment à l’effort)
- L’existence de facteurs de risque coronarien (hérédité, âge, sexe, tabac, HTA, hypercholestérolémie,
diabète).
Les symptômes d’appel de syndrome coronarien aigu sont :
- Soit une douleur prolongée plus de 15 minutes mais ayant régressé
- Soit des douleurs répétées
- Soit une douleur continue persistante
En pratique toutes les douleurs susceptibles de correspondre à une insuffisance coronarienne aigue justifient une
hospitalisation d’urgence en milieu spécialisé. En cas de douleur continue persistante, l’hospitalisation doit être
immédiate pour permettre la mise en route du traitement de reperfusion, et le moyen le plus direct est l’appel du
15.
Concernant la clinique :
L'examen clinique est en règle générale normal et peu contributif en l'absence de complication. Il permet surtout
d'éliminer un diagnostic différentiel et d'évaluer le retentissement du SCA (troubles du rythme, tolérance
hémodynamique).
Concernant l’ECG :
Cet examen est essentiel pour faire la part entre les SCA avec sus-décalage du segment ST (urgence immédiate) et
ceux sans sus-décalage du segment ST. Un aspect normal ne permet pas d'écarter le diagnostic en présence d'une
douleur évocatrice et justifie de poursuivre les investigations. Les anomalies de la repolarisation doivent être
recherchées par un médecin entraîné. Le risque va croissant selon que le patient présente un ECG initialement
normal, une inversion de l'onde T isolée et enfin un franc sous-décalage du segment ST. La présence de ces
anomalies dans au moins deux dérivations d'un même territoire électrocardiographique renforce la probabilité de
SCA et permet de suspecter le territoire vasculaire coronaire atteint. La dépression du segment ST est l'élément le
plus prédictif de la mortalité à J30 et à un an. Un sus-décalage du segment ST étant exclu, il peut s'agir :
- D'anomalies des ondes T : grandes ondes T, pointues et symétriques, positives, évoquant une ischémie
sous-endocardique ; ou ondes T négatives évoquant une ischémie sous-épicardique
- D'anomalies du segment ST : un sous-décalage du segment ST, évoquant un courant de lésion sousendocardique ; un sus-décalage transitoire du segment ST, évoquant un courant de lésion sousépicardique
- D'anomalies de l'onde Q : durée > à 0,004 s ; profondeur supérieure à 1/3 de l'amplitude du QRS
- Autres : présence d'un bloc de branche gauche empêchant toute analyse du segment ST.
Donc en conclusion, il y a, en réalité, peu de doutes à avoir, en ambulatoire, car nous n’avons pas vraiment les
moyens de faire un diagnostic certain. En effet les moyens à dispositions nous permettent simplement de suspecter
ou pas un syndrome coronarien aigu. Finalement, même si c’est frustrant pour nous, à l’heure actuelle, notre rôle
est de prévenir les services d’urgence en cas de suspicion de syndrome coronarien et non de faire le diagnostic. Il
n’y a donc aucune honte à faire transporter aux urgences un patient qui présente une douleur thoracique chez qui
on suspecte un possible SCA. Devant cette douleur typique, même en l’absence d’appareil à ECG, ou même si l’ECG
était normal il aurait fallu appeler le SAMU afin de faire un cycle de troponine aux urgences et que la patiente soit
prise en charge dans un service pouvant intervenir rapidement en cas d’urgence.
Il est possible que dans un avenir proche, nous puissions faire des dosages de troponine « rapides », en
ambulatoire, répétés si nécessaire à 6-12 heures et éviter d’adresser les patients à faible risque aux urgences mais
actuellement ce n’est pas encore le cas !!!
Il arrive souvent qu’en médecine générale, la symptomatologie ou les éléments cliniques n’entrent pas vraiment
dans le « cadre » de ce que nous avons appris. Dans ce cas précis, la patiente était jeune, sans antécédents
familiaux avec 2 facteurs de risque cardiovasculaire, la douleur était apparue au repos et ne s’était pas arrêtée
depuis la veille. Tout n’entrait pas dans le « cadre : syndrome coronarien aigu ». Dans une grande majorité des cas,
il est possible en médecine générale, de reconvoquer le patient et de réévaluer la situation à 24-48 Heures, mais
pas en cas de suspicion de SCA !!!
J’ai remarqué, tout au long de mes stages, en ambulatoire, que j’avais tendance à vouloir faire le diagnostic tout de
suite, comme à l’hôpital, et que finalement au cours du temps j’ai appris petit à petit à différer les examens
complémentaires, à revoir les patients, à ne pas toujours trouver un diagnostic…
Cependant il est important de distinguer dans quelle situation nous sommes et en cas de pronostic vital en jeu
comme dans le SCA, il faut savoir appeler le 15 et déléguer aux services du SAMU et aux services spécialisés.
2. Intérêt d’un appareil à ECG en ambulatoire ?
En ambulatoire, l’appareil à ECG, ne permet pas d’éliminer un syndrome coronarien aigu de façon certaine, en cas
de doute diagnostic, car il peut être normal malgré la présence d’une obstruction coronarienne. Alors quel est
l’intérêt d’avoir un appareil à ECG en cabinet?
Comme nous l’avons vu précédemment il est primordiale de différencier rapidement si on se trouve devant un SCA
ST- ou un SCA ST+ car les pronostics et prise en charge de chacun d’entre eux sont différents. En effet le SCA ST+
nécessite une reperfusion la plus rapide possible et le pronostic vital est mis en jeu. En cas d’appareil à ECG dans le
cabinet il est possible de savoir rapidement de quoi il s’agit et de prévenir le SAMU lors de l’appel téléphonique ce
qui permet une prise en charge bien plus rapide (organisation immédiate du SAMU avec les médecins du service
d’USIC pour coronarographie en urgence, mise en route d’une fibrinolyse si possible, mise en route des traitements
adéquats…). De plus le sus décalage du segment ST est assez facile à détecter même pour un médecin non
spécialiste. Enfin l’ECG peu être très utile dans le cadre du suivi de certaines maladies chroniques, comme l’HTA, le
diabète, les suivis post-infarctus… et le coût de l’appareil n’est pas si excessif par rapport à toutes les utilisations
possibles en médecine générale.
De plus nous avons un rôle important dans la période post-infarctus qui consiste en un suivi rapproché des patients
conjointement au suivi avec le cardiologue. Dans cette prise en charge il est primordial de pouvoir réaliser des ECG
comparatifs, notamment en cas de nouvelle douleur angineuse ou d’essoufflement inhabituel.
3. Le problème des a priori en médecine…
Quand j’ai vu le dossier de la patiente avec ses antécédents de dépression et d’angoisses j’ai rapidement remis en
cause ma première intuition. Or on peut rapidement être « dérouté » par des a priori, sans même avoir fini
l’interrogatoire, l’examen clinique et les examens complémentaires si besoin.
Prescrire, a présenté un article très intéressant, en 2008, traitant des trois strates de données qui participent en
permanence à nos prises de décision.
En effet d’après l’auteur, trois strates de données, trois domaines d’influence participent en permanence à toutes
nos décision : les données de références issues de l’évaluation ; les éléments d’ordre pragmatique à prendre en
considération pour chaque patient ; la note personnelle d’irrationnel qui gouverne chaque médecin.
Les données de l’évaluation ne permettent pas, à elles seules, d’exercer correctement ; elles sont nécessaire mais
non suffisantes. En pratique il faut aussi tenir compte d’une multitude de facteurs personnels, affectifs, sociaux,
économiques, physiques, etc., propres à chaque patient et qui doivent enrichir la réflexion du prescripteur et
participer à la décision médicale. Il faut aussi que chaque médecin apprenne à se connaitre et à maîtriser les
pulsions de son inconscient. Une initiation aux sciences humaines, aux différences culturelles, aux données
administratives, économiques, sociales, etc., les échanges d’expérience, entre professionnels et avec les étudiants,
doivent ici jouer pleinement leur rôle.
Il est vrai qu’en voyant le dossier de la patiente et après avoir discuté avec elle j’ai vraiment douté de mon
jugement 1er qui reposait sur des données de la science (douleur thoracique constrictive irradiant dans le bras
gauche = SCA). Heureusement que j’ai su maitriser cette « pulsion » et que j’ai fais l’ECG et appelé le SAMU. Parfois
il est vraiment très important, à mon avis, de savoir se « raccrocher » à des connaissances simples et de ne pas trop
se faire envahir par les doutes liés au contexte particulier du patient et de notre état d’esprit au moment de la
consultation.
4. Angoisse/syndrome coronarien aigu
Une étude britannique a été publiée dans l’European Heart Journal, réalisée chez 208 patients admis pour SCA au
St Georges Hôpital de Londres entre Juin 2007 et Octobre 2008. Des tests psychologiques évaluant le niveau
d’anxiété et la peur de mourir ont été effectués 2 ou 3 jours après l’admission, ainsi qu’un dosage des TNF-alpha
circulant, cytokine hautement pro-inflammatoire. Entre 3 et 4 semaines après l’accident, la variabilité du rythme
cardiaque des patients et leur taux de cortisol salivaire ont été mesuré lors de visite à domicile.
Les résultats ont montré :
- Premièrement, lors d’un SCA, 21% des patients expriment une angoisse et une peur de mourir à un niveau
intense, tandis que 66% l’expriment à un niveau plus modéré
- Deuxièmement, cette angoisse n’est pas une donnée purement psychologique, puisqu’elle est corrélée au
taux de TNF-alpha plasmatique. Cette cytokine est associée à une réponse inflammatoire intense. On note
que cette corrélation est indépendante des facteurs sociodémographiques, du risque clinique (en
particulier de la sévérité du SCA et de l’existence d’antécédents) et de l’intensité de la douleur ressentie.
Cette étude pose plusieurs problèmes notamment la corrélation entre facteurs psychologiques et physiologiques
ne permet pas bien de savoir quel est le facteur causal et quelle est la conséquence. De plus il s’agit d’une étude
observationnelle ce qui fait que les conclusions sont très difficiles à tirer de cette étude.
Par conséquent on ne sait pas trop dans quelle mesure un soutien psychologique aux patients, améliorerait le profil
clinique, ni à l’inverse si la réduction de l’inflammation aigüe aurait des effets bénéfiques sur le plan émotionnel.
Cependant il parait logique qu’il y ait tout de même une corrélation entre l’aspect émotionnel et les paramètres
physiologiques et que de meilleures explications et un comportement rassurant pourrait être d’un grand bénéfice
pour les patients.
Je n’ai pas trouvé d’autres études permettant de faire une corrélation entre angoisse et syndrome coronarien aigu.
Conclusion :
Ce cas était vraiment très intéressant pour ma future pratique pour plusieurs raisons :
- Tout d’abord j’ai été rassuré par le fait d’avoir détecté cette urgence qui s’est présentée au cabinet. J’avais
déjà géré des urgences en ambulatoire mais j’avais eu moins de doutes concernant le diagnostic. C’était
plus des problèmes de prise en charge et de communication avec les patients.
- Je pense qu’il est primordial de faire attention à nos « préjugés » concernant certains patients (surtout les
patients dépressifs et angoissés), et je me souviendrais très longtemps de cette patiente, lorsque j’aurai
des doutes concernant une urgence et je me rappellerai que chaque patient quel qu’il soit peut toujours
présenté un état clinique nécessitant une prise en charge en urgence !!
- Notre rôle actuellement concernant le syndrome coronarien aigu est de détecter les douleurs suspectes de
SCA et de si possible pouvoir différencier un SCA ST+ d’un SCA ST- puis de prévenir au plus vite les secours.
Mais finalement il n’y a pas tant de douleurs thoraciques typiques !!!! J’espère cependant que notre rôle
dans cette prise en charge changera et que des examens simples et rapides seront bientôt réalisables en
ville !!!
Bibliographie :
-
SFAR, Syndromes coronariens aigus non ST+, N. Assez 1, F. Rouyer 1, F. Lapostolle 2, C.
Adriansen 1, E. Wiel 1, P. Goldstein, 2007
-
HAS, prise en charge de l’infarctus du myocarde à la phase aiguë en dehors des services de
cardiologie, Novembre 2006
-
HAS, Les syndromes coronaires aigus (SCA), 2007
-
HAS, Maladie coronaire, Mars 2007
-
HAS, Syndrome coronarien aigu : pas de marqueurs biologiques en médecine ambulatoire,
Septembre 2010
-
Revue Prescrire, Les trois strates, Août 2008 ; 28 :298
-
“Fear of dying and inflammation following acute coronary syndrome”, Andrew Steptoe, Gerard J.
Molloy, Nadine Messerli-Bu¨rgy, Anna Wikman, Gemma Randall, Linda Perkins-Porras, and Juan
Carlos Kaski. European Heart Journal; (2011) 32 : 10.1093/eurheartj/ehr132
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