Après Claudine et le Théâtre, Philippe Caubère (et sa Comédie Nouvelle) présente 68 selon Ferdinand spectacle comique en deux soirées : premier épisode : Octobre deuxième épisode : Avignon deuxième partie de son autobiographie théâtrale comique et fantastique : L’Homme qui danse écrit, mis en scène et joué par Philippe Caubère après avoir été improvisé vingt ans plus tôt devant Jean-Pierre Tailhade et Clémence Massart Page 1 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - assistant à l’écriture et à la mémorisation : Roger Goffinet scénographie, lumières et direction technique : Philippe Olivier, dit “ Luigi ” régie générale et régie son : Jean-Christophe Scottis régie lumière : Emmanuelle Stäuble assistante régie : Anne Dartigues styliste : Christine Lombard création de la jupe de la mère d’après un peinture de Egon Schiele : Sophie Comtet attaché de presse : Vincent Serreau photos : Michèle Laurent afiche réalisée par l’agence Copenhague production : Véronique Coquet pour La Comédie Nouvelle coproduction : Le Théâtre du Chêne Noir à Avignon (Gérard Gélas) musique : Le Mystère des voix Bulgares Le Mépris de Georges Delerue Page 2 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - 68 selon Ferdinand Octobre Vous vous souvenez peut-être qu’à la fin du Théâtre selon Ferdinand, notre héros parvenait in extremis à obtenir d’un examinateur compréhensif et désespéré, son bac. Au début de ce nouvel épisode, Claudine revient sur la scène, non plus pour l’occuper avec sa propre histoire, mais pour assister, à la demande de son “p’tit garçon”, à la suite de la prestation. Elle commence à faire, — au public et à madame Colomer, des commentaires sur ce bac 68 obtenu avec tout juste onze de moyenne, “alors qu’il aurait p’têt’ pu profiter d’ la situation pour obtenir une p’tit’ mention”. Cela donne à Ferdinand l’idée de lui demander de devenir présentatrice de son spectacle. Elle le fait aussitôt, non sans ironie, ni plaisir évident. Tapant sur un tambour imaginaire et ridicule elle annonce au public ébahi que son p’tit garçon va leur interpréter son premier cours de théâtre, “Mon Dieu, quel évènement!” Octobre 1968, Ferdinand débarque au “Cours Molière” et rencontre dans le hall obscur une extraordinaire créature pleine de charme et d’érotisme: Marlène. Reine des lieux, elle lui annonce que le cours ne s’appelle plus dorénavant “cours Molière” mais “Studio 35” en fonction du numéro de la rue, mais surtout des récents évènements politiques. Et nous voila partis dans une évocation burlesque du théâtre de ces années-là : Living Theatre, Grotowsky, Barba, etc. Après une audition très chaude où, tel un Artaud de pacotille, il hurle jusqu’à en perdre la voix et la raison les mots du poète beatnik Bob Kaufmann, il est admis. Dès le lendemain, après une furieuse séance d’expression corporelle au cours de laquelle Ferdinand se déchaîne, envoûté par la passion qu’il éprouve pour cette forme de théâtre nouvelle et inattendue et par l’effet qu’exerce sur lui la mystèrieuse Marlène, voici qu’une autre femme fait son apparition: Micheline. C’est la prof’ de théâtre classique. Pas si classique que ça, d’ailleurs. Stanislavsky, Apollinaire et même l’expression corporelle, — vue sous un autre angle, il est vrai, — sont au rendez-vous. Pas de doute: entre les deux écoles, — et surtout les deux femmes —, c’est la guerre ; incarnée par l’importance que Marlène donne immédiatement à Ferdinand pour l’opposer à Bruno, champion de Micheline, qu’elle humilie sans pitié. On assiste aussitôt après sous les yeux éblouis quoique effrayés de Ferdinand à la vengeance de Micheline: le triomphe du grand Bruno dans le rôle d’Iliouchine… Avignon Nous sommes toujours à Aix-en-Provence, au Centre Dramatique, cette fois (je précise que cet épisode est totalement imaginaire : une fois n’est pas coutume…). Roger, le directeur, a été violemment remis en cause par son équipe. Tel Jean-Luc Godard à Grenoble, pour ceux qui s’en souviennent, il doit expier son passé de directeur bourgeois et réactionnaire ayant livré Molière et Shakespeare à la classe ouvrière. Le plus féroce de ses inquisiteurs est Gérard, dit “Gégé”. Acteur récemment révolutionnaire, il profite de la situation pour essayer de jouer le premier rôle d’une création collective qui doit évoquer les évènements ayant agité Avignon l’été précédent. Malheureusement, il ne parvient pas à taper sur sa grosse caisse en mesure tout en disant son texte. De toute façon, le masque à gaz dont il s’affuble l’empêche de parler de façon audible. Le voila donc à son tour violemment contesté. Henri, lui, n’a qu’une idée: la haine féroce qu’il porte à Béjart pour avoir empêché son groupe de jeunes danseurs, le groupe Électron, de s’exprimer dans un petit coin du Palais des Papes pendant une représentation de La Messe pour un temps présent. Patrick, le drogué, dort dans son coin sans presque jamais s’éveiller. On le respecte beaucoup car il a “une forme de rigueur dans sa dope” et surtout parcequ’il est beau, mou et désenchanté. Tout le monde en est fou : c’est l’égérie. La tête pensante, c’est Michel, le cadre politique ; le commissaire du peuple. Très dur, casquette vissée sur la tête, lunettes cerclées de fer sur le nez, il ramène tout à la Révolution russe. Lénine, Trostky, Kommisserskaïa et Lounatcharsky sont ses mots de passe et ses chevaux de bataille. Page 3 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - C’est dans ce marigot que Ferdinand débarque sur les recommandations (perfides) de Bruno, son nouvel ami. Interrogations et interrogatoires se succèdent à propos de l’origine sociale et politique de ce drôle de paroissien arrivant tout droit — quelle horreur !— de l’immonde Cours Molière. Notre héros trouve alors une idée de génie: se dire “fils de toute petite bonne atrocement exploitée par des patrons abjects”. C’est l’enthousiasme général, on lui confie la responsabilité du spectacle. Devant un public avachi et clairsemé, —tout ce bazar se passe en public —, il va improviser une histoire du Festival d’Avignon totalement fantaisiste jusqu’aux fameux évènements de l’été 68 qu’il évoque de mille façons. Il n’oublie pas cependant, afin d’avoir la paix et pouvoir faire l’andouille tout son soûl, de demander au groupe d’incarner la classe ouvrière en descendant dans la salle tout en faisant: “Ôââââââh…”, car elle n’a pas de langage. Il leur jure qu’elle reviendra à la fin faire la révolution. Mais le spectacle s’achèvera sur Roger, abandonné de tous et totalement dégradé, vingt, trente, cent quarante ans plus tard, tapant— à contre-temps — sur le vieux tambour de Gégé et obligeant, d’une voix chevrotante, ses petits enfants à venir écouter pour la ènième fois “la terrible et triste épopée d’une révolution manquée…” Extraits d’un dialogue entre Gao Xinjian, prix Nobel de littérature et Denis Bourgeois. G. X.— “ Il y a eu une période où le théâtre était un théâtre d’auteurs — de Molière à Claudel — c’était d’abord un art de la dramaturgie. Et avant encore, en Occident comme en Orient, le théâtre était un théâtre d’acteurs, comme la commedia d’ell arte. À notre époque, le théâtre est devenu un théâtre de mises en scène. C’est le rôle du metteur-en-scène qui devient prédominant. Il a chassé les deux pôles antérieurs qui sont pourtant les deux pôles fondamentaux du théâtre. Maintenant les acteurs deviennent des objets, des décors vivants, qu’on peut déplacer comme des ustensile. Et le texte est utilisé dans sa dimension auditive. C’est l’époque des metteurs en scène. Moi, je pense que pendant un certain temps, c’était amusant, j’étais fasciné (…) mais ça a fini par se scléroser, et maintenant ça m’ennuie. Je trouve souvent le théâtre fade et, surtout, artificiel. (…) Il faut renouveler la théâtralité. Pour moi, ce qu’il y a de fondamental, c’est la communication entre les acteurs et avec le public. Il faut toujours maintenir cette communication. (…) Il faut étudier l’art du jeu des acteurs. Qui parle? Il y a l’individu vivant et, de l’autre côté, le rôle interprété. C’est comme ça en général qu’on pense le jeu des acteurs. (…) Mais si on approche, on peut trouver un passage entre le comédien et son rôle, un état d’acteur neutre.(…) À partir d’une base de neutralité, il peut passer aussi bien à son rôle du moment qu’à son rôle dans la vie, qu’à son identité propre (…). L’acteur, par son jeu, peut alors explorer toutes les gammes de l’écriture théâtrale: il peut devenir un conteur, il peut s’adresser directement au public, il peut revêtir un personnage. Sans maquillage, sans éclairage, sans décor, sans toute la mise-en-scène et les machineries du théâtre, il a déja ce potentiel. Pourquoi le théâtre moderne oublie-t’il de faire confiance à l’acteur? Retrouver ce potentiel renouvellerait déja l’écriture théâtrale.” D. B. — “ C’est ce que font le acteurs dès qu’ils sont en situation de monologue.” G. X. — “ Dans ce cas-là, la poésie, et même la prose, peuvent participer du théâtre. Une fois qu’on pressent l’extrème plasticité de l’acteur, on peut réfléchir à un type d’écriture moderne pour le théâtre. Il y a plein de possibilités, mais il faut aussi former des acteurs qui soient capables de développer tous ces potentiels. Et d’ailleurs, par ce biais, l’acteur retrouvera sa place originale au sein du théâtre.” Page 4 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - Au plus près du réel. Dialogues sur l’écriture (1994-1997) Éditions de l’Aube. Page 5 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - 68 selon Ferdinand au Théâtre du Rond-Point, par Philippe Caubère. Jouer Octobre et Avignon, les deux épisodes de mon nouveau spectacle, au Théâtre du Rond-Point est le merveilleux cadeau que Jean-Michel Ribes, — que je ne connaissais que par ses pièces et par ses mise-en-scène —, a bien voulu me faire pour cette fin d’année 2002. Et, même s’il est vrai que je l’ai beaucoup sollicité, je tiens à l’en remercier sans manière et sans réserve. Je vois dans cette coïncidence : la réouverture de ce lieu emblématique avec mission d’y défendre et promotionner les auteurs vivants, et ma recherche d’un théâtre à Paris pour y donner mes nouvelles pièces, un signe. Là plus qu’ailleurs, il va me falloir prouver ce que je répéte depuis des années : à savoir que les seize spectacles (Aragon et Suarès mis à part) que j’ai créés depuis plus de vingt ans ne sont pas les péripéties de l’exploitation d’un succés de théâtre, mais les épisodes successifs, tous nécessaires, d’un récit théâtral comique et fantastique. Il y a eu trois étapes : La Danse du Diable, prologue à l’ensemble (quoiqu’ à l’époque j’étais loin de me douter dans quoi j’avais mis le doigt…), les onzes épisodes du Roman d’un acteur ensuite, L’Homme qui danse enfin ; dont je présente aujourd’hui deux nouveaux épisodes, créés au mois de Septembre 2001 au Théâtre du Chêne noir en Avignon. En restent à en réaliser deux ou trois pour achever le cycle. “Et aprés ?… ” Me demande-t’on toujours, avec un léger sourire ironique et le sourcil sévèrement fronçé, “… c’est fini ? ” “Heu… oui ”, je fais. “Enfin, à condition… ”, — quand même, il y a en une ! — “ que j’arrive au bout.” Évidemment, personne ne me croit. “ Ça ne finira jamais : quand tu auras fini de raconter ton enfance ou ta vie au Théâtre du Soleil, tu raconteras comment tu as raconté ton enfance et ta vie au T du S… ” Après tout, pourquoi pas ? N’empêche qu’alors ça ne sera — ne serait— plus du tout la même chose, ni dans la forme, ni dans le ton, ni dans le fond. Ces trois aventures sont des œuvres artistiques à part entière, liées bien sûr, mais indépendantes les unes des autres. Le matèriau sur lequel je travaille aujourd’hui sont les textes précisément transcrits (je veux dire: au mot près) des improvisations que j’ai faites en 1980 dont, à l’épopque, j’avais tiré La Danse du Diable. Ce que je réalise aujourd’hui en est la version intégrale. Ce qui explique , d’ailleurs, qu’au lieu d’une seule soirée, il y en a déja quatre, et qu’il y en aura six ou sept si j’arrive au bout. Ce qui est bizarre, j’avoue, c’est que l’ “histoire” est la même. Et qu’au fond, je la raconte pour la troisième fois. Il faut bien que je me pose la question : pourquoi ? Je crois que ce qui était sorti de moi en 80 m’effrayait. Je ne savais pas quoi faire avec ça. Je m’étais inspiré du spectacle du Théâtre du Soleil L’Âge d’or pour parler de moi, de mes soucis d’acteur ou d’auteur en herbe, — d’acteur de “chez Ariane” surtout, ce qui est une situation particulière et même, n’ayons pas peur des mots : tragique —, seulement ça donnait des heures et des heures enregistrées sur des K7 audios d’ improvisations d’une violence et d’une impudeur extrèmes, dont je ne n’étais pas sûr qu’elles n’appartenaient pas plus au psychodrame qu’au théâtre. Je ne savais comment corriger, mettre en forme, transformer en spectacle, bref écrire tout ça. Pour m’en sortir et pour bouffer (parce que ça compte), j’ai picoré de-ci de-là, beaucoup éliminé (surtout ce qui concernait le personnage d’Ariane…) et, en quelques jours, vite fait, fabriqué La Danse du Diable. Deux ans après, comme je n’avais rien réglé de ce qui me tourmentait, et que le remords de ne pas avoir osé me rongeait, j’ai tout ré-improvisé. Dans un style plus romanesque, plus picaresque, plus anecdotique ; j’allais dire : plus “bon enfant” inspiré du Capitaine Fracasse ou du Roman comique. Mais, douze ans plus tard, ce Roman d’un acteur achevé, à nouveau le remords m’a chopé… Je ne pouvais me cacher que la façon que j’avais eu de sortir cette histoire la première fois, à l’âge de trente ans, à peine sorti du Théâtre du Soleil, dans un état de grande angoisse, de grande espèrance aussi, restait, sinon la meilleure, du moins la plus pointue, la plus psychanalytique ; la plus drôle surtout. Je n’ai jamais retrouvé dans les improvisations qui m’ont amené au Page 6 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - Roman d’un acteur la même urgence ni le même défi. C’est qu’il s’agissait alors de sauver ma vie. Sans déconner. Sauf qu’à prèsent, ce n’était plus l’ “histoire” qui m’intéressait, — je l’avais racontée —, mais la forme. Le style, comme on dit. Et j’ai pensé que tout ceci, au fond, n’avait été, n’était, ne serait qu’un long apprentissage. Alors, j’ai annulé le spectacle sur André Suarès que j’avais déja vendu, monté, répété et joué… et j’ai replongé. Telle est, en quelques mots, écrits pour ceux que mon parcours intéresse ou intrigue, la genèse de ce travail qui me tient depuis ma jeunesse. Imaginé à partir de mon enfance, de mon adolescence, de ma vie de jeune homme, ce récit théâtral parle de ma mère, d’Ariane encore dans les prochains épisodes, mais, au-delà : du théâtre, des comédiens et des années 60. De 68 dans ces deux nouveaux épisodes, d’Avignon 68 en particulier. Cette drôle d’ “œuvre” vise cependant moins à l’éternité ou au prestige intellectuel qu’à donner à son public comme à son interprète le plus grand et le plus vif plaisir possible. Alors, j’espère de tout mon cœur que vous en serez. Car, comme me dit souvent une amie suisse : “Y a pas d’mal à s’faire du bien !” Avril 2002. Page 7 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - BIOGRAPHIE DE PHILIPPE CAUBÈRE Né le 21 septembre 1950, à Marseille. 1968-71 : comédien au TEX, Théâtre d'Essai d'Aix-en-Provence, créé et dirigé par Éric Eychenne, en compagnie de Maxime Lombard, Jean-Claude Bourbault et Bruno Raffaëlli. 1971-76 : comédien au Théâtre du Soleil, en compagnie de Maxime Lombard, Jean-Claude Bourbault et Clémence Massart, dans 1789, 1793 et L’Âge d'or . Janvier 76 : commence, parallèlement à son travail de comédien, l’écriture de ce qui sera édité vingt-trois ans plus tard sous le titre Les Carnets d’un jeune homme. 1977 : joue Molière dans le film d'Ariane Mnouchkine. 1978 : met en scène et joue Dom Juan de Molière au Théâtre du Soleil, en compagnie de Maxime Lombard, Jean-Claude Bourbault, Clémence Massart, Jonathan Sutton et Françoise Jamet. 1979 : comédien, en compagnie de Bruno Raffaëlli, à l'Atelier Théâtral de Louvain-la-Neuve (Armand Delcampe), sous la direction d'Otomar Krejca. Interprète Lorenzo dans Lorenzaccio de Musset au Palais des Papes pour le Festival d'Avignon (Paul Puaux) et en tournée, et Touzenbach dans Les Trois sœurs de Tchékhov. De 1980 à 81 : écriture. Puis, improvisations sous la direction de Jean-Pierre Tailhade et Clémence Massart qui donneront, l’année suivante, La Danse du diable et, vingt ans après, L’Homme qui danse. Mars 1981 : création d’une première version de La Danse du diable, au “ Ciné Rio ” à Bruxelles (Stéphane Verrue et Christian Baggen). Mai : fin de l’écriture des onze Carnets d’un jeune homme. Juillet : la version finale de La Danse du diable est créée à la Condition des Soies pour le Festival d'Avignon (Bernard Faivre d’Arcier). De 1981 à 83 : représentations au Théâtre des Quartiers d’Ivry (Philippe Adrien) et à Paris, au Théâtre Edouard VII (repris par Véronique Coquet), puis en tournée en France et en Europe. De 1983 à 85 : improvisations sous l’œil de Véronique Coquet, Pascal Caubère et Clémence Massart, puis écriture et répétitions (avec, comme comédiens, Clémence Massart, Bruno Raffaëli, Pascal Caubère, Pierre Meunier, Jean-Marie Bon et Jacques Pibarot.) pour un projet de film, Le Roi misère , qui deviendra finalement Le Roman d'un acteur. Fondation avec Véronique Coquet de la société de production “ La Comédie Nouvelle ”, qui permettra de produire l’ensemble du travail. Avril 1986 : création d’Ariane ou l'Âge d'or au Théâtre Tristan Bernard (Edy Saïovici). Page 8 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - Octobre : création de Jours de colère (Ariane II ) en alternance avec Ariane I au Théâtre des Arts Hébertot (Véronique Coquet), suivie d’une tournée des deux spectacles en France et en Europe pendant toute l’année 87. Premier trimestre 1988 : édition du texte et du spectacle (enregistrement audio) de La Danse du diable par “ La Comédie Nouvelle ” (coffret repris plus tard par Joëlle Losfeld). De septembre 1988 à mars 89 : création des Enfants du soleil, de La Fête de l'amour et du Triomphe de la jalousie, joués en alternance au Théâtre des Arts Hébertot (Félix Ascot). D’août à décembre 89 : interprète Joseph dans les films d’Yves Robert La Gloire de mon père et Le Château de ma mère, d'après l'œuvre de Marcel Pagnol. Avril 1991: création du Chemin de la mort et du Vent du gouffre, joués en alternance au Théâtre de la Renaissance (Niels Arestrup et Jean-Jacques Gomila). Janvier 1992: création du Champ de betteraves, du Voyage en Italie et du Bout de la nuit, joués en alternance au Théâtre de la Renaissance. Janvier 1993: création des Marches du palais et premier essai du Roman d'un acteur (les onze spectacles en alternance) au Théâtre Daniel Sorano de Toulouse (Jacques Rosner.) Juillet : création du Roman d'un acteur au Cloître des Carmes, à l’invitation d’Alain Crombecque pour le Festival d’Avignon (Bernard Faivre d’Arcier). De septembre 93 à juillet 1994 : tournée en France et en Belgique du Roman d'un acteur et de La Danse du diable, et édition de l’album-photos de Michèle Laurent Le Roman d'un acteur au Cloître des Carmes (repris par Joëlle Losfeld). Septembre 1994 : édition chez Joëlle Losfeld de la première moitié du texte du Roman : L’Âge d’or. De septembre à décembre : Le Roman d'un acteur au Théâtre de l'Athénée (Patrice Martinet) dont Bernard Dartigues filme intégralement tous les “ filages ” et toutes les représentations. Série de La Danse du diable au Théâtre Jean Vilar de Suresnes (Olivier Meyer). Juillet 1995 : Dernières représentations de La Danse du diable au Théâtre des Carmes (André Benedetto), en Avignon. Mise en scène de Que je t'aime ! de Clémence Massart créé au Théâtre des Carmes, puis à Paris, au Théâtre Tristan Bernard (Edy Saïovici) et en tournée en France. Septembre : lecture jouée de poèmes d’Aragon à la fête de l’Huma à l’invitation de Charles Silvestre. Janvier 1996 : sortie du film de Bernard Dartigues Les Enfants du soleil au cinéma Max Linder (Jean-Jacques Zilberman, Brigitte Aknin et Vincent Melilli) à Paris, puis dans toute la France. Page 9 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - Juillet : création du spectacle Aragon en deux parties : Le Communiste et Le Fou sur l’île du Frioul, en face de Marseille, pour le “ Festival des îles ” (Maurice Vinçon) De décembre 96 à avril 1997 : Aragon au Café de la Danse à Paris (Sylvia Uzan et Loïc Barrouk) et à La Manufacture des Œillets à Ivry (Éric Danel). Février-mars 1997 : sorties des films Ariane ou l’Âge d’or et Jours de colère au cinéma Max Linder. Mai : Présentation en Sélection Officielle (hors compétition) au Festival de Cannes et sortie simultanée à Paris du film Les Marches du palais. De mai 97 à février 1998 : tournée Aragon dans toute le France. Juillet-aôut 98 : Tournage d’Aragon sur l’ïle du Frioul par Bernard Dartigues et sortie sur Canal + des quatre premiers films du Roman. Lectures jouées de Marsiho et de Vues sur l’Europe d’André Suarès, au Frioul et au Théâtre du Peuple à Bussang (Jean-Claude Berrutti). Février 99 : sortie des Carnets d’un jeune homme (1976-1981) aux éditions Denoël. 1er mai 99 : présentation de la première partie du film Aragon (Le Communiste) à la Cinémathèque française pour l’association des “ Amis de l’Huma ” en présence de Robert Hue et Lise London. Juillet : création du spectacle Marsiho au Théâtre des Salins de Martigues (Laurent Ghilini et Michèle Hettiger). 23 janvier 2000 : premier essai de Claudine ou l’éducation au Théâtre des Salins. 23 juin : premier essai du Théâtre selon Ferdinand au Théâtre des Salins. Juillet : création de Claudine et le théâtre à la Carrière Boulbon pour le Festival d’Avignon (Bernard Faivre d’Arcier), édition du texte de la pièce chez Joëlle Losfeld, et sortie vidéo et DVD d’Ariane ou l’Âge d’or, Jours de colère et Les Marches du Palais chez Les Films du Paradoxe. Septembre-octobre : tournée en France de Claudine et le théâtre. Novembre-décembre : Claudine et le théâtre au Théâtre de l’Athénée. Janvier à mars 2001 : deuxième tournée de Claudine et le théâtre. 21 septembre : création de 68 selon Ferdinand (Octobre et Avignon) au Théâtre du Chêne Noir (Gérard Gélas) en Avignon. Septembre à décembre 2001 : tournée des deux nouveaux spectacles, en alternance avec les deux épisodes de Claudine et le théâtre. Page 10 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - Mai 2002 : lecture jouée de Recouvre-le de lumière d’Alain Montcouquiol au cloître des Jésuites à Nîmes, à l’occasion du cinquantenaire de la Féria. Projets 2002 Lectures jouées de Recouvre-le de lumière : le 16 août, au “ Banquet du livre ” (Jean-Michel Mariou), à Lagrasse, dans l’Aude. Et les 6 et 7 septembre, à la chapelle du Méjean (Actes-Sud) en Arles, pendant la Féria des prémices du riz. Octobre : parution de 68 selon Ferdinand (Octobre et Avignon) chez Joëlle Losfeld et tournée des deux épisodes. Novembre-décembre : création à Paris, au Théâtre du Rond-Point (Jean-Michel Ribes). Parallèlement, sortie, en novembre, de deux nouveaux films du Roman d’un acteur : La Fête de l’amour et Le Triomphe de la jalousie, en alternance avec Les Enfants du soleil, sous le titre La Trilogie amoureuse, dans la salle Jean Tardieu du Théâtre du Rond-Point ; et, en décembre, du film Aragon, à l’occasion du vingtième anniversaire de sa mort, en alternance avec La Trilogie. Projets ultérieurs Printemps/été 2003 : création du spectacle Recouvre-le de lumière d’Alain Montcouquiol aux arènes de Nîmes, suivie d’une tournée d’été dans toutes les arènes françaises (ainsi que quelques lieux de théâtre), en suivant la saison tauromachique. Hiver 2003 : création de Recouvre-le de lumière à Paris avec, peut-être, en alternance, celles de Marsiho et de Vues sur l’Europe d’André Suarès, sous le titre global Le Sud. 2004 : reprise du travail d’écriture et préparation du dernier volet de L’Homme qui danse (deux nouveaux spectacles), dont la création est prévue pour la rentrée d’octobre 2004. Celle de l’intégrale l’est pour le printemps/été 2005. Restera à monter et sortir les cinq films de la deuxième partie du Roman d’un acteur : La Belgique, à en éditer le texte, filmer L’Homme qui danse, en livrer l’édition finale, et, pour finir tout ça, tourner en province et filmer Le Sud. Après, c’est la retraite… Page 11 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - LE DAUPHINE LIBERE Le 28 SEPTEMBRE 2001 THEATRE Caubère : entre le texte et le corps Le deuxième épisode de “68 après Ferdinand” révèle un Philippe Caubère caustique, très caustique, devant un parterre en transe. Le seul moyen de rencontrer l’acteur caméléon et de le chercher au croisement du texte et du corps. Le tentaculaire Caubère s’attaque dans la deuxième partie de son spectacle aux monstres sacrés : Jean Vilar, Gérard Philipe, Béjart et aux événements incontournables : mai’68 et le Festival d’Avignon. Le combat entamé dans le premier épisode entre les deux professeurs de théâtre se poursuit dans cette partie avec un combat entre deux visions du théâtre : l’une représentée par Jean Vilar et l’autre par Julian Beck. Ce combat de titans se déroule à l’intérieur d’un théâtre post-soixante-hui-tard qui accueille un groupe représentatif de l’esprit Mai 68 : le directeur de théâtre bourgeois qui s’est reconverti aux nouvelles méthodes “révolu-tionnaires”, le cadre politique, le drogué/acteur/interprète reconnu de tous, et j’en passe. Deux visions du théâtre donc pour une certaine nostalgie. Caubère passe avec une facilité dé-concertante de la satire mordante (les réunions du groupe de théâtre) à des moments poétiques portés par la musique envoûtante du “Mépris” de Godard (avec l’évocation d’un personnage vingt ans plus tard). Les interrogations de Caubère se cristallisent le mieux dans la déclamation des stances remaniées du “Cid”. Tour à tour, “en cet affront, Vilar est l’offensé et l’offenseur, ce pauvre Julian Beck” (et inversement). Entre “Don Diègue” et “Chimène”, ou plutôt entre Vilar et Beck, il y a une réaction d’attraction-répulsion tout en finesse. Et le spectateur de se demander : où est Caubère ? A quel moment de ce dilemme l’acteur se livre-t-il ? Tel un caméléon, Caubère se découvre aux seuls moments où le corps prend le relai du texte ou plus simplement aux instants très brefs où le comédien change de personnage. Ces moments éphémères démasquent un acteur qui aime laisser parler le texte et faire partager cet amour aux spectateurs. Ni distanciation, ni identification, Caubère s’est créé un théâtre qui a pour ambition de ne pas choisir. Entier. F.G. Page 12 sur 20 - Philippe Caubère – 68 selon Ferdinand – Pièce - LA MARSEILLAISE OCTOBRE 2001 Philippe Caubère au Gymnase One Superman show Après "Claudine" et "Le Théâtre", l'homme qui met sa vie en scène attaque les deux derniers volets de sa tétralogie autobiographique comique et fantastique. D'EMBLEE Philippe Caubère donne le ton. Il s'avance vers son public. Prend la parole. Présente son "Mérou" de souffleur, sur le côté de la scène, caché dans "un bocal". Explique que s'il a des trous de mémoire ce n'est pas parce qu'il aurait mal appris sa leçon. Pour lui le théâtre n'en est pas une. Ni à apprendre, ni à donner. Donner ? Oui, mais autre chose. De soi, beaucoup. Avant tout. Il a pris la parole simplement, sans chichis, histoire de tisser avec son public une complicité. Une confidence de l'homme sur son travail d'acteur sur l'homme. Noir, musique : signal de départ pour plusieurs heures de spectacle. Une véritable performance. Claudine, titre éponyme du premier volet de L'Homme qui Danse, est la mère de Ferdinand, le double théâtral de Philippe Caubère. C'est une bourgeoise de droite, déchirée entre Pétain et De Gaulle, avec des principes et du cœur. Un personnage décalé. Une figure de théâtre à elle seule. Héroïne malgré elle du temps qu’elle a vécu. Son adolescence pendant l’occupation, sa vie de femme et de mère. Philippe Caubère lui rend un hommage plein de tendresse : il met en scène son accouchement (métaphore de ses vingt années de recherches scéniques et autobiographiques). Il y a quelque chose de touchant à voir cet homme, la cinquantaine venue, revivre sa vie, reprendre sa vie à partir de la douleur de l’enfantement quarante minutes durant. Un grand moment. Et tout y passe dans un joyeux tourbillon : les premiers pas de Ferdinand ; les premiers mots de Ferdinand ; les premières maladies de Ferdinand ; le début de l’adolescence de Ferdinand, son copain, ses ambitions révolutionnaires, son amour immodéré pour Johnny, pour la masturbation, les dessous de sa mère. Et le problème qu’il doit solutionner, pour sa rédaction de Français “ Qu’est-ce que le bonheur ”. Claudine a un exemple : “ Le bonheur, c'est du malheur qui se repose ”. Pendant trois heures, Caubère revient à la source de son envie de théâtre : la théâtralité de sa mère. Sublime impudique Quand on retrouve Ferdinand, à 15 ans, dans Le Théâtre, second volet de L'Homme qui danse, il est seul dans sa chambre. La nuit est noire sur les collines de La Fare les Oliviers. Il planche toujours sur son sujet, le bonheur. Il a quinze ans et rêve. Rêve de théâtre, de grandeur, de gloire. Dans sa chambre, il a 15 ans et, déjà, est le plus prolixe des auteurs de tous les temps. Un à un, dans sa chambre arrivent les personnages célèbres et familiers qui ont bercé son enfance, qui marquent son adolescence : De Gaulle, Mauriac, Sartre et Johnny, bien sûr. Tous sont à ses pieds, reconnaissent l’excellence de son travail. Dans sa chambre à 15 ans, Ferdinand joue le théâtre de sa vie d’artiste. Pendant trois heures, Caubère revient sur son rêve de gosse, moteur de sa dramaturgie : faire du théâtre. Car, avant d’être un sublime impudique, Caubère est un cabot magnifique. Un faiseur de théâtre. Populaire et intelligent. A quoi reconnaît-on les faiseurs de théâtre ? Les sublimes, les magnifiques ? Ils n’ont pas besoin d’artifices pour amuser et tenir en haleine une salle comble. Caubère est seul en scène. Le théâtre, débarrassé de ses pendrillons, est à nu. Le plateau, recouvert de tapis d’orient, une chaise au centre. C’est de l’homme, en jeu dans une valse de personnages qui créent le mouvement, la force, le geste, le verbe, que naît le Monde. Et celui que Caubère tend n’est pas seulement le sien. C’est le monde de tous révélé à chacun dans une surprenante communion d’esprit et de rire. Francis COSSU Page 13 sur 20 - Philippe Caubère – 68 selon Ferdinand – Pièce - LA MARSEILLAISE Le 26 septembre 2001 "68 et Ferdinand" au Chêne Noir Premier volet : Octobre ou le cours Mirabeau Avec "Octobre ou le Cours Mirabeau", première partie de "68 et Ferdinand", Philippe Caubère revient à ce qui a toujours fait l'essentiel du métier de comédien. L a première partie de "68 et Ferdinand", créée le 21 septembre au Théâtre du Chêne Noir, a confirmé, s'il en était besoin, l’immense talent de comédien, auteur, conteur, mime, etc… de Philippe Caubère. Dans le décor gothique aux murs dénudés qui était celui, initial, du lieu où Gérard Gélas installa jadis son théâtre, Caubère/Ferdinand nous conte, deux heures durant, son audition d'entrée et son premier cours de théâtre sous les yeux de Claudine, sa mère, qui l'accompagne. Omniprésente côté cour, elle sera l'observatrice, le témoin de cet événement la commentatrice aussi, bref, une sorte de coryphée, tout au long de ce spectacle qui, d'un bout à l'autre, ne cesse de déclencher la plus vive hilarité dans tout le public. Claudine, la mère de Ferdinand/Caubère nous expose la situation de départ : son fils Ferdinand a réussi son baccalauréat en 1968 avec onze de moyenne "alors qu'il aurait pu profiter de la situation pour obtenir une p'tite mention. Pensez ! 98% des candidats ont été reçus…" cette année là. Tous deux arrivent à Aix, cours Mirabeau, dans le cours Molière, rebaptisé "Studio 35" après les évènements de mai… Molière ayant sans doute été récupéré par les bourgeois !… C'est sur le mode burlesque que Philippe Caubère nous montre ce que furent ces deux premiers cours : il est à lui tout seul les personnages et chacun d'eux, les professeurs, les élèves… Dans ses métamorphoses successives, tantôt elfe bondissant, tantôt monstre grimaçant, il séduit, fascine. Capable de changer à chaque instant de personnage en modifiant sa voix, sa diction, sa démarche, il est en même temps partout et nulle part. Sa présence lui permet d'occuper tout le plateau scénique, d'être à lui seul tout un spectacle devant lequel on ne s'ennuie pas une seconde. Au bout du compte, on ne sait ce qu'il faut le plus admirer chez ce diable d'homme : ses qualités manifestes d'auteur, de conteur, ou celle du mime, de l'acteur protéiforme qui, au moyen du moindre artifice vestimentaire, de sa parole, de sa gestuelle très travaillée mais aussi très inspirée, de ses dons de mime, son talent de caricaturiste parfois cruel, jamais méchant, sa souplesse, son élégance et enfin, surtout, sa complicité, la connivence qu'il sait établir d'emblée avec tout le public. Il revient ainsi, encore une fois, à ce qui a toujours constitué l'essentiel du métier de comédien, qui existe en chacun de nous, chaque être humain dans sa vie sociale, sa relation à autrui, ici transcendées par le métier, la technique, la magie de la représentation théâtrale et la présence collective du public. Henri Lépine Page 14 sur 20 - Philippe Caubère – 68 selon Ferdinand – Pièce - MIDI LIBRE le 19 septembre 2001 GRAND AVIGNON Création mondiale au Chêne Noir à Avignon Philippe Caubère revient avec "68 selon Ferdinand" Place à la suite des aventures du héros de "Claudine ou l’éducation" Philippe Caubère est-il un avare de bande dessinée, un descendant direct de Molière ou, simplement, un habitant de cette planète (encore incomprise) que l’on nomme Marseille? Après son passage dans la sulfureuse troupe d'Ariane Mnouchkine, ses triomphes au théâtre, au cinéma et son rocambolesque "Lorenzaccio” au festival d’Avignon, il a voulu se transformer, avec talent, en dramaturge, en metteur en scène, en éclairagiste tout en continuant à être le grand comédien qui s’est révélé voilà bien des années. Son envie dévorante d’aller plus loin dans sa façon de raconter le théâtre et rencontrer les hommes l’a amené, dans son feuilleton unique, grandiose, époustouflant de 1993, au cloître des Carmes, invité par Alain Crombecque. Seul sur scène pendant ce mois de juillet inoubliable, il nous a envahis de ses mots, de ses passions, de ses regards et de son humour avec les onze épisodes du “Roman d'un acteur". Puis il est revenu dans la carrière Boulbon, en juillet 2000, avec “Claudine et le théâtre”, à l’invitation de Bernard Faivre d'Arcier. On croyait la boucle bouclée. Mais Philippe Caubère n’en finira jamais de raconter, d’improviser la vie et le théâtre, sa vie et ses souvenirs qu’il accommode avec sa mémoire, son intelligence et ses vagabondages. Le réservoir est inépuisable, ses interventions aussi et son talent se doit d’apparaître sans cesse sur les scènes du monde. Il revient et a choisi Avignon pour sa nouvelle pièce, pour cette création mondiale très attendue. Il a choisi le Chêne-Noir en hommage aux comédiennes et comédiens qui débordent de talent à quelques mètres de cette cour d’honneur du palais des Papes qui leur est interdite. Chez son complice Gérard Gélas, il va nous raconter quelques épisodes sortis de sa mémoire, peut-être aussi de son imagination. Ce nouveau spectacle “68 selon Ferdinand”, en deux épisodes est la suite des aventures du héros de “Claudine ou l’éducation”. C’est la suite de ce qu’on appelle l’autobiographie de P. Caubère. Mais les pulsions qui nous entraînent dans ce monde comique, fantastique, burlesque parfois, poétique toujours, nous obligent à reculer les frontières de la mémoire et de l’imagination. Quand on demande à Caubère ce qu’est un bon spectacle, il répond : “ C’est un travail fait par des gens qui vont au bout de leurs rêves... ”.. E.M Page 15 sur 20 - Philippe Caubère – 68 selon Ferdinand – Pièce - LA PROVENCE Le 27 septembre 2001 SPECTACLES 68 selon Caubère : éblouissant et nocturne Il avait averti, Caubère : "Le premier épisode fera l'unanimité, le second divisera ; j'espère que j'attaque tout le monde et tire sur tout ce qui bouge !". En effet. Mais ce n'est pas ce qui gêne dans cet épisode 2 consacré au festival d'Avignon 68 et à la façon dont les gens de théâtre l'ont vécu. Du moins tels que Ferdinand imagine et recrée les événements, dans un terrible règlement de comptes avec lui-même et avec "cette révolution transformée en évolution". Au contraire, nouveau bonheur, le prodigieux acteur essaie dans son écriture et son jeu une couleur nouvelle, loin du comique joyeux et flamboyant qui est le sien habituel-lement. Une tonalité très noire qui nous vaut des moments d'anthologie : le long poème nocturne d'André Benedetto –En 68 je n'ai vu que des flics– ainsi que toute la fin du spectacle, véritablement goyesque dans le cauchemar et la caricature, lorsque le directeur de Centre dramatique d'Aix en Provence, inventé par Philippe Caubère, devenu vieillard gâteux, veut raconter 68 à ses petits enfants. C'est prodigieux comme du Michel Simon. Cependant, cependant… Caubère ne ressasse-t-il pas lui-même un peu trop ses souvenirs, vrais ou réinventés, ne dessine-t-il pas parfois à traits trop lourds ses personnages ? Chaplin disait que quand il croyait avoir fini une œuvre, il "secouait l'arbre" et ne gardait que ce qui résistait. Trois heures sur la corde raide, Caubère n'a sûrement eu pas le temps encore de "secouer l'arbre". Son spectacle "68 selon Ferdinand" serait encore plus étonnant et non moins un exploit de comédien avec quelques dizaines de minutes en moins. Danièle Carraz Page 16 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - LA PROVENCE Le 15 octobre 2001 THEATRE —> AU GYMNASE Les quatre (premiers ?) épisodes d’une vie Philippe Caubère s’installe “chez lui” avec son “autobiographie théâtrale comique et fantastique”. Qui n’est sans doute pas achevée... Il ne fait rien comme tout le monde et il le revendique. “Ré-écrire une pièce de théâtre est quelque chose qui ne se fait pas. Rajouter plutôt que couper, encore moins. Parler de la même chose depuis vingt ans – bientôt plus – ne se fait pas du tout. Bref je ne fais rien comme il faut...” Mais Philippe Caubère était intimement persuadé, malgré le succès du L’homme qui danse et de La danse du diable, déjà œuvres autobiographiques, que son travail n’était pas achevé. Il a donc envisagé de se lancer à nouveau dans l’aventure, en reprenant bien sûr son personnage, son double, Ferdinand, à qui il fait (re)vivre tous les épisodes d'une existence dont on ne sait plus au fond – mais est-ce vraiment important ? – si elle fut vécue ou si elle est fantasmée. Alors nous repartons dans ces quatre – premiers ? – épisodes à la rencontre de Claudine, la mère "fondatrice" dans tous les sens du terme, la femme qui apprend la vie mais aussi la guerre parce qu'il faut la combattre, cette relation s'inscrivant dans le cadre politique de l'époque, celui de la guerre d'Algérie et des syndicats. Ordre chronologique Par la suite dans Le théâtre selon Ferdinand, il y a la découverte de cette expression artistique, mais aussi les "grandes figures" qui accompagnent le jeune homme, de Johnny Hallyday aux femmes qui marquent son quotidien. Les deux autres parties de l'autobiographie théâtrale comique et fantastique ont été créées il y a quelques jours à Avignon puis présentées à Aix. Pour la première fois, le public a donc l'opportunité, à Marseille, la ville natale de l'acteur-auteur-metteur en scène d'assister aux quatre époques présentées chronologiquement. Liberté Octobre ou le Cours Mirabeau et Avignon sont indissociables : à Aix, Ferdinand découvre le "nouveau théâtre", né des "événements" de 68, et la création collective, les affrontements entre les tendances et bien d'autres choses encore. Caubère poursuit son chemin sans se soucier des modes. Il est seul en scène et il aime ça, sans véritable narcissisme mais en artisan qui veut mener à bien ce qu'il a commencé, qui veut aller au terme de l'exploration entamée. Sans décor, avec juste quelques accessoires, il se met en scène, joue sa vie et celle de son double, interprète tous les personnages. Il aime cette liberté et fait partager son plaisir aux spectateurs. Et ce n'est sans doute pas fini : Ferdinand n'est pas encore au bout de sa route… Michèle Taddei Page 17 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - La Provence Le 20 octobre 2001 RENCONTRE Philippe Caubère se soigne aux rires Il joue à Marseille, sa ville natale, les quatre premiers épisodes de son autobiographie théâtrale. Terrifié par l’aventure, mais heureux de la vivre S’il a un jour choisi d’arpenter la scène en solitaire, ce n’est pas par narcissisme mais plus simplement parce qu’il ne se sentait pas à son aise dans le paysage théâtral ambiant. Philippe Caubère est un frondeur : “Le Théâtre est le seul art qui n’a pas évolué. Malgré quelques tripatouillages qui ne sont là que pour masquer la pénurie d’idées neuves”. Le voilà donc qui poursuit sa quête, à travers des spectacles qui racontent sa vie à peine dissimulée, quête déjà présente dans La danse du diable et Le roman d'un acteur. “Mais, dit-il, l'art, c'est long…" Il ne sait pas encore combien d’épisodes seront nécessaires pour arriver jusqu’en 1978-1979. Six ou sept peut-être. Il en a déjà écrit - et joué - quatre. Le cinquième est en route. Pourquoi 78-79 ? “C’est l’année de la fin, là où mon rêve d’être un acteur romantique s’est brisé. J’ai joué Lorenzaccio à Avignon et je me suis "planté". J’ai cru que tout était terminé. Me lancer dans l’autobiographie a été une thérapie”. Il sait déjà que l’histoire qu’il raconte se terminera mal : “Ce sera exactement comme je me sentais à ce moment-là. Il n'y aura pas de note optimiste". Actuellement, il est face au public marseillais, dans la ville où tout a commencé, sa vie certes, certes, mais aussi son éveil au spectacle. “C’est déjà terrifiant de se lancer dans cette aventure, mais sur la scène du Gymnase c'est encore plus dur. Je me souviens de Jean Ferrat, de Johnny, du Richard III de Patrice Chéreau, et des adieux de Brel en 64. Que je n'ai pas vus d’ailleurs, puisque ma mère m’avait puni. Je crois que je lui en veux encore, par-delà la mort... Lorsqu’il écrit, i1 fait du vélo, de la natation. Quand il joue, il est trop fatigué et se contente de massages. Comme les sportifs de haut niveau. Même s’il se compare plus volontiers à un guerrier : "Etre artiste, c'est faire la guerre. On sait qu'on va faire mal aux autres, mais on y est obligé pour tenter de sauver sa peau. On est d'un égoïsme féroce. Je n'ai pas d'enfant parce que je ne veux pas leur faire vivre ça. Et parce qu’il faut être libre pour s’abandonner à la création". Il rêve pourtant de réunir sa famille pour Noël dans la maison de sa grand mère, rachetée il y a quelques années : "J’ai envie de voir mes neveux ici, dans ces pièces". Paradoxes ? Oui. "Et après ?" dirait-il. De toute façon, il a assume. Comme il a assumé ses interrogations : ne raconter que sa vie, être seul en scène, n'est-ce pas rechercher le confort ? Il a consulté la Faculté. Et en est revenu avec une certitude... incertaine : "Je ne saurais jamais vraiment pourquoi je fais ça, parce que si un jour j’écris une pièce avec plusieurs personnages, je sais que j'aimerais la jouer avec des partenaires, que j’y prendrais du plaisir… Pour l’instant, je soigne mes doutes avec les rires et la présence du public. C’est un excellent pansement ! " Il a d’ailleurs prouvé, au cinéma, qu'il pouvait travailler en équipe, avec Molière certes mais aussi avec La gloire de mon père : “Je ne cours pas après les films, j'ai fait Molière parce c’était Ariane et La gloire par admiration pour Yves Robert. Maintenant, je m’occupe de la sortie en vidéo du Roman d’un acteur”. Et il savoure: “Je préfère n'avoir fait que peu de films mais être fiers d’eux. Je ne ferai jamais du cinéma alimentaire. Je ne fais pas ce métier pour gagner de l'argent, je suis même étonné d'arriver à en vivre…" Michèle Taddei Page 18 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - La Provence Le 28 octobre 2001 THEATRE –> AU GYMNASE Philippe Caubère et l’incertitude artistique On peut refaire le monde, la seule vérité sera toujours la rencontre spirituelle entre un artiste et le public Insatiables. Nous sommes insatiables. À peine le rideau tombé - enfin, le noir fait - sur le quatrième et dernier épisode en date de L'Homme qui danse, nous voilà en train de piaffer : à quand la suite ? Combien de mois faudra-t-il patienter pour découvrir ce qui s’appellera sans doute Ariane et Ferdinand ? Comment Caubère, cette fois, se présentera-t-il? Vêtu de quels atours ? Propulsé dans quel imaginaire ? Nageant dans quelles eaux ? Celles du rire, de l’émotion, de la tendresse, de la désillusion, ou dans toutes celles-ci comme toujours mêlées ? Cet Avignon, celui de l’été 68 revu en 69 puis sous la lumière crue d’une servante qui fait défiler les années et transforme Ferdinand et ses acolytes en anciens combattants d’une révolution culturelle avortée, est sans doute le plus “théâtral” des épisodes pour l’heure connus. Jusque là, nous étions dans le domaine public, dans des situations partagées, dans des références communes. Là, les figures - même célèbres - sont plus secrètes. Vilar et Béjart certes, mais aussi le Living Theater et Julian Beck, Paul “pipe”, Benedetto et d’autres, dont les spectateurs n’ont pas forcément les “clefs”... Et pourtant, tout le monde - ou presque - marche. Parce qu’au delà d’un moment de la grande histoire d’un festival, Philippe Caubère met en jeu toutes les questions qui, un temps et encore maintenant pour quelques esprits qui rêvent toujours de “revanche”, ont agité les “intellectuels”, les théoriciens de la chose scénique. Épouvantablement drôle C’est drôle bien sûr, épouvantablement drôle parce que s'exposent tous les délires. Parce que Caubère “y va” plus que d’habitude presque, sans retenue, sans interrogations. Il “balance”, il excelle, il regarde ce passé recomposé avec un recul critique et pourtant une sorte de tendresse désabusée qui ne vient nullement d’une adhésion tardive mais bien plus du sentiment d’avoir été jusqu’aux portes d’une nouvelle approche du théâtre et de ne pas avoir su les ouvrir. Et les stances qu’il dédie à Vilar comme à Beck sont cette sorte de rêve d’idéal, qui pourrait bien être ce qu’il cherche, de spectacle en spectacle. Philippe Caubère exulte, joue avec “Clémence-la-vraie”, son souffleur occasionnel, fait des numéros à la Michel Simon et mais oui - à la Louis de Funès. Il a les dix-neuf ans triomphants de Ferdinand et l’âge de Roger, celui de la solitude du dernier survivant, du radoteur sympathique et pathétique. Toujours caustique, il porte néanmoins sur ses années d’apprentissage, sur son entrée dans le métier un regard jamais détaché mais plus mûr. Comme s’il avait redécouvert ce que Ferdinand savait au fond dès le début, que les certitudes artistiques n’existent pas et qu’il n’y a qu’une chose qui compte, la rencontre entre un public et un artiste. Quels que soient les chemins empruntés, pourvu qu’ils soient sincères. Même dans ce mensonge sublime qu’est le théâtre. Michèle Tadd Page 19 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - s-” VAUCLUSE MATIN le 25 septembre 2001 Caubère : quand le théâtre se moque du théâtre Deuxième partie de son autobiographie théâtrale, “68 selon Ferdinand” est une satire violente contre le théâtre des années 70 mais aussi une occasion pour l’acteur-metteur en scène de régler ses comptes avec le théâtre d’aujourd’hui. A savourer au théâtre du Chêne Noir à Avignon L e spectateur est tout de suite averti : c’est un spectacle "intellectuel" qui s’adresse aux intellectuels. Pourtant si le public doit être averti, c’est surtout du fait qu’il rentre dans un univers particulier, celui de Philippe Caubère. Univers dans lequel le théâtre côtoie l’histoire et l’autobiographie pour deux heures de pure méchanceté. La cible favorite de l’acteur est le théâtre soixantehuitard avec tout ce qu’il porte comme fausses inovations. Celui qui est en première ligne pour cet assassinat public est le prof de théâtre qui inaugure le rôle du metteur en scène sclérosant. Ferdinand, inscrit à un cours de théâtre, fait tour à tour l’expérience de deux méthodes opposées (mais pas tant que ça). La première met l’accent sur "l’expression corporelle" dans un déchaînement et un oubli de toutes les inhibitions. Le spectateur est entrainé dans un maelström de dérision où le corps est mis à mal. Vient ensuite la méthode "classique", aussi déjantée que la première, car le professeur se transforme en un metteur en scène qui étouffe le comédien en représentation par des indications aussi farfelues les unes que les autres. Mais que veut donc Caubère ? D’où lui vient cette rage? Il veut faire table rase du passé, dénoncer le théâtre qui s’est enlisé et n’a pas dépassé Mnouchkine et Savary. Il n’hésite pas à dénigrer Mnouchkine avec un rictus d’heureuse cruauté tout en rappelant "ce que je lui dois". La satire dénonce le peu de confiance dont bénéficie l’acteur pris, comme ici, dans des rivalités intestines entre professeurs. Mais c’est aussi une manière de rappeler que l’acteur est porteur de qualités qui peuvent se passer de la mise en scène et oublier les gros décors. La force de Caubère consiste surtout en une incroyable capacité à faire rire. De tout, même du pire. Il nous rappelle aussi avec violence que l’acteur est avant tout un corps qui se livre. Majestueux. Florentina GHERMAN Page 20 sur 20 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce -