LE PARISIEN 20 juin 2003 Scène/ Caubère, torero à Versailles Ce soir Seul en piste dans l'immensité des arènes de Nîmes ce soir-là, Philippe Caubère faisait un étrange torero, sans cape, sans muleta, sans costume de lumière ni épée. Sans rien, sinon la lueur chorégraphique des braseros et des brassées de son talent. Pendant deux heures, il a gesticulé, il a déclamé. Il donnait son corps à Nimeño II, alias Christian Montcouquiol. Ce soir à 22 heures dans les jardins du château de Versailles, Caubère contera à nouveau sa vie et sa double mort. D'abord celle du valeureux torero français, grièvement blessé dans un choc avec un taureau dans les arènes d'Arles, le 10 septembre 1989. Ensuite celle de l'homme, survenue de sa propre volonté à son domicile près de Nîmes, deux ans de souffrance plus tard, le 25 novembre 1991. “ Une belle corrida, c'est comme un choc amoureux ” C'est Alain Montcouquiol, son grand frère, qui par la grâce de sa plume a initié cette résurrection dans “ Recouvre-le de lumière ” (Editions Verdier). “ J'ai été vraiment très touché par l'accident puis par la mort de Christian, commente Philippe Caubère. Mais c'est quand j'ai lu le livre tout fort, que je l'ai déclamé, que j'ai été bouleversé. C'est un langage de théâtre avec une vraie dramaturgie. Il y a là tous les ingrédients d'une pièce de théâtre : dramatique et attendrissante. Il y a l'histoire de cet amour fraternel, celle de la tauromachie française partie à l'assaut de l'Espagne. ” En scène, il détaille l'étonnante trajectoire de ces enfants lancés à la poursuite de la gloire et de la lumière. Philippe Caubère raconte la bohème des frères Montcouquiol, l'un en piste, dans la lumière (Christian), l'autre dans l'ombre, protecteur, pour que s'accomplisse la gloire du premier nommé. Leurs peurs, leurs frissons, depuis la première blessure à Barcelone jusqu'à la reconnaissance, depuis l'apprentissage enfiévré jusqu'à la rouerie des marchands de corrida, depuis les grandes tablées rieuses et désinvoltes de la cuadrilla (l'équipe du torero) dans les bars de Madrid jusqu'au flamenco déchirant et déchiré qui nourrit les interminables nuits de route entre deux arènes. “ Les émotions de corridas sont les mêmes émotions que celles que l'on peut ressentir au théâtre, ajoute le comédien. Une belle corrida, c'est comme une pièce de Chéreau ou d'Ariane Mnouchkine. C'est comme Léo Ferré ou Zouk sur scène. C'est comme un choc amoureux. On ne sait pas pourquoi, en quelques secondes, sur un geste, on bascule dans les larmes. ” Paroles de tragédien, juste recouvert de lumière pour prolonger le mythe fascinant du torero Nimeño II. “ Recouvre-le de lumière ”, ce soir à 22 heures devant les colonnes du Trianon, parc du château de Versailles (Yvelines). Entrée : 30 et 25 (- de 25 ans). Tél. 01.39.20.16.00. Puis tournée dans les arènes de France avant de revenir du 7 novembre au 14 décembre au Théâtre du Rond-Point (Paris VIII e). Claude Massonnet Page 1 sur 1 - Philippe Caubère – Recouvre-le de Lumière - Pièce -