Cours de l’Ecole nationale des Ponts et Chaussées
Année 2010-2011
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SEANCE 3 : LA PASSATION DES MARCHES PUBLICS
Le terme de commande publique a été employé pour la première fois par le Conseil
constitutionnel, dans sa décision relative à la première loi habilitant le gouvernement à
simplifier le droit
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. Dans cette décision, le conseil constitutionnel consacre l’existence d’un
droit de la commande publique.
La notion de commande publique peut recouvrer deux acceptions. La première
conception permet de regrouper sous ce vocable tous les contrats par lesquels les personnes
publiques commandent l’exécution de prestations à leurs cocontractants. Cette conception
large permet d’inclure dans cette catégorie les délégations de service public. La seconde
conception est plus restrictive : elle limite la catégorie des contrats de la commande publique
aux seuls contrats d’achat des personnes publiques, de fournitures, travaux ou services,
nécessaires pour assurer le bon fonctionnement et le développement de ses services publics.
Le Conseil constitutionnel a rendu quatre décisions principales
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en matière de contrats
publics. Dans sa décision du 26 juin 2003, le Conseil constitutionnel impose le respect d’un
certain nombre de principes en matière de commande publique : l’égalité devant la commande
publique, la protection des propriétés publiques et le bon usage des deniers publics. Les
principes d’égalité de traitement des candidats et de bon usage des deniers publics étaient
visés à l’article premier du Code des marchés publics mais n’avaient pas en tant que tel valeur
constitutionnelle. Le principe d’égalité de traitement impose à l’administration de tout mettre
en œuvre pour assurer la mise en œuvre d’une égale concurrence dans des conditions
satisfaisantes. Par exemple, la procédure de mise en concurrence lancée, les candidats doivent
être traités sur un pied d’égalité. De même, l’attribution du marché public ne peut s’opérer
qu’en fonction de critères définis par l’Administration. Le Conseil constitutionnel joue un rôle
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Cons. Const., 26 juin 2003, Déc. n° 2003-473 DC ; L. n° 2003-591, 2 juillet 2003, JO, 3 juillet 2003, p. 11192,
BJCP, 2003, p. 354
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Cons. Const., 22 août 2002, Déc. 2002-460 DC ; Cons. Const., 29 août 2002, Déc. 2002-461 DC ; Cons.
Const., 26 juin 2003, Déc. n° 2003-473 DC ; Cons. Const., 2 décembre 2004, Déc., n° 2004-506 DC
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croissant dans la formation des règles relatives aux contrats de commande publique. Cette
constitutionnalisation du droit des contrats publics en général est soulignée par la doctrine
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.
L’énoncé de ces principes est largement influencé par le droit communautaire et,
notamment, par les deux directives « Marchés » du 31 mars 2004. On assiste désormais à un
mouvement d’harmonisation des règles nationales des marchés publics sur celles du droit
communautaire. De façon générale, le respect du droit communautaire impose le respect par
toute autorité administrative d’un minimum de « formalisme » pour la passation de tout
contrat public. La Cour de justice des Communautés Européennes a dégagé l’existence de
principes généraux du droit communautaire, lesquels découlent des Traités tel le principe de
transparence des procédures contractuelles publiques qui impose un deg de publicité
adéquat (CJCE, 7 décembre 2000, Teleaustria Verlags Gmbh, aff. C-324/98, AJDA, 2001, p.
106).
Les marchés publics font partie du domaine de la commande publique.
Depuis 2001, on constate une véritable inflation de textes nationaux et
communautaires, gislatifs et réglementaires, visant soit à modifier un certain nombre de
règles relatives aux marchés publics, soit à instaurer de nouvelles formes de contrats d’achat
public :
- Décret 2001-210 du 7 mars 2001 instituant le Code des marchés publics se
substitue à celui issu du décret du 17 juillet 1964
- Loi du 11 décembre 2001 MURCEF modifie un certain nombre de règles
applicables aux marchés publics
- Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d’orientation et de programmation de la
sécurité intérieure (LOPSI) relative aux contrats de construction d’immeubles
affectés à la justice, à la police ou à la gendarmerie nationale
- Loi 2002-1138 du 9 septembre 2002 d’orientation et de programmation de la
justice (LOPJ) relative aux contrats de construction d’établissements pénitentiaires
- Loi n° 2003-850 du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit
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V. en ce sens, DELVOLVE P., Constitution et contrats publics, in l. MODERNE F., Le droit en
mouvement, D., 2004, p. 499
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- Ordonnance 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de
l’organisation et du fonctionnement du système de santé instituant les BEH
- Décret du 6 janvier 2004 relatif au régime de la passation des BEA LOPSI
- Décret du 7 janvier 2004 portant Code des marchés publics
- Directives communautaires du 31 mars 2004
- Ordonnance du 17 juin 2004 relative aux contrats de partenariat
- Décret du 27 octobre 2004 relatif aux modalités d’application du régime de
passation des contrats de partenariat
- Loi BORLOO du 18 janvier 2005 de programmation de la cohésion sociale qui a
complétée le Code des marchés publics en ajoutant un critère social de sélection
des candidatures
- Le décret n°2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics…
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Chapitre 1 : La détermination de la procédure applicable
La passation des marchés publics est dominée par trois principes énumérés à l’article
premier du Code des marchés publics : égalité de traitement des candidats, liberté d’accès à la
commande publique et transparence des procédures de passation. En définitive, c’est la
publicité et la mise en concurrence qui sont censées assurer la transparence du processus de
conclusion des marchés publics. Selon le droit communautaire, ces deux principes doivent
permettre aux collectivités publiques d’obtenir les meilleures prestations au meilleur coût.
La passation d’un marché public est précédée d’une phase au cours de laquelle la
collectivité va devoir effectuer un certain nombre de choix. Une fois ces choix effectués, la
collectivité lancera la procédure proprement dite, aboutissant à la conclusion formelle du
contrat.
Section 1 : Les méthodes de détermination de la procédure applicable
Le choix d’une procédure de passation résulte d’une double lecture du Code des
marchés publics. Il peut s’agir d’abord pour la collectivité d’opter pour un type de marché en
fonction de ses besoins (§ 1). Il peut s’agir de cerner la procédure imposée par le Code en
fonction, notamment, du montant du marché (§ 2).
§ 1 : Le choix d’un marché
Le Code des marchés publics comporte trois catégories de marchés spécifiques qui
font l’objet d’un régime juridique particulier. Chacun d’entre eux est destià répondre à des
besoins précis émis par la collectivité qui passe le marché.
A- Les marchés de maîtrise d’œuvre
Les marchés de maîtrise d’œuvre sont des marchés d’études particuliers passés sur le
fondement de l’article 74 du Code des marchés publics. La mission de maîtrise d’œuvre doit
permettre d’apporter une réponse architecturale, technique et économique au programme
défini par le maître de l’ouvrage. De manière générale, la maîtrise d’œuvre est une prestation
intellectuelle qui s’articule autour de deux éléments : la conception et la surveillance des
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travaux. Ces contrats présentent un fort intuitu personae. Le Conseil d’Etat a d’ailleurs admis
que certaines des compétences du maître d’œuvre à l’égard des entrepreneurs étaient fondées
sur la technique du mandat (CE, 25 juin 1975, Ville de Joigny, Rec. CE, p. 389) accessoire au
contrat de louage d’ouvrage sans que l’accord du maître d’ouvrage soit pourtant nécessaire.
L’article 7 de la loi MOP définit les éléments de conception et d’assistance. Ces
éléments sont les suivants : études d’esquisse, études d’avant-projet, études de projet,
assistance apportée au maître de l’ouvrage pour la passation du contrat de travaux, études
d’exécution ou examen de la conformité au projet d’études réalisé par l’entrepreneur,
coordination et pilotage du chantier, assistance au maître de l’ouvrage lors des opérations de
réception et pendant la garantie de parfait achèvement. L’alinéa 2 de l’article 7 apporte des
précisions : « pour les ouvrages de bâtiment, une mission de base fait l'objet d'un contrat
unique. Le contenu de cette mission de base, fixé par catégories d'ouvrages » et « doit
permettre : au maître d'oeuvre, de réaliser la synthèse architecturale des objectifs et des
contraintes du programme, et de s'assurer du respect, lors de l'exécution de l'ouvrage, des
études qu'il a effectuées ; au maître de l'ouvrage, de s'assurer de la qualité de l'ouvrage et du
respect du programme et de procéder à la consultation des entrepreneurs, notamment par lots
séparés, et à la désignation du titulaire du contrat de travaux ». L’article 8 de la loi MOP
ajoute que « le contenu de la mission de base peut varier en fonction des différents modes de
consultation des entrepreneurs ».
Le décret d’application 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de
maîtrise d’œuvre confiées par les maîtres d’ouvrages publics à des prestataires de droit privé
est venu préciser le contenu de chacun de ces éléments. Celui-ci varie en fonction de la nature
de l’ouvrage : bâtiment ou infrastructure. Il s’agit de tenir compte des spécificités de
l’ouvrage.
B- Les marchés de définition
Les marchés de définition sont définis à l’article 73 du code des marchés publics
« Lorsque le pouvoir adjudicateur n'est pas en mesure de préciser les buts et performances à
atteindre, les techniques à utiliser, les moyens en personnel et en matériel à mettre en
œuvre ».
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