Index et charge glycémiques en pratique Dr Dominique Perin-Calvao - Médecin nutritionniste - DIU de Nutrition humaine - Maîtrise de Psychologie Clinique - Membre de la Société Française de Nutrition L'épidémie de diabesity (DIABETE + OBESITY) continue de s'étendre de façon inquiétante en même temps que l'augmentation de consommation de produits alimentaires fabriqués contenant des glucides simples et la baisse de consommation de fruits. Les habitudes alimentaires de nos enfants, favorisant desserts sucrés et sodas, ne présagent pas d'une amélioration dans les années à venir. Tous les glucides ne sont pas à proscrire. Il convient de : - savoir les choisir - les consommer avec modération. Les aliments sources de glucides Les différents types de glucides du plus simple au plus complexe : > les monosaccharides (une seule molécule) : - glucose : substrat énergétique de base - fructose : dans les fruits > les disaccharides (deux molécules) : - saccharose : sucre de table - lactose : dans le lait > les oligosaccharides (quelques molécules) : - maltodextrines : dans certaines farines > les polysaccharides (longues chaînes de molécules) : - amidons - fibres Plus un glucide est complexe, moins son goût est sucré. Les glucides simples se retrouvent dans : > sucre, confitures, miel, confiseries, sirops, fruits et jus de fruits, sodas, pâtisseries et viennoiserie, glaces et entremets. Les glucides complexes se retrouvent dans : > céréales, farines et pains qui en sont tirés, pommes de terre, légumes, légumineuses et fruits. Quel est l'impact du type d'aliment sur l'élévation de la glycémie ? La théorie consistant à dire que les glucides simples entraînent une augmentation rapide de la glycémie et les amidons une élévation plus lente est aujourd'hui invalidée et remplacée par le concept d'INDEX GLYCEMIQUE. L'index glycémique Sa = aire sous la courbe d'élévation du glucose sanguin après avoir ingéré une dose d'un aliment contenant 50 g de glucides. Sg = aire sous la courbe d'élévation du glucose sanguin après avoir ingéré 50 g de glucose. L'index glycémique permet de comparer le pouvoir hyperglycémiant des aliments. Les aliments ne contenant pas de glucides, comme les graisses ou les viandes ont un index glycémique de 0. Le glucose à un index glycémique de 100 INDEX GLYCEMIQUE FAIBLE < 55 Pâtes cuites 10 minutes INDEX GLYCEMIQUE ELEVE > 70 40 - 50 Baguette 95 Lait 30 Pommes de terre cuites au four 95 Pamplemousse 25 Riz blanc instantané 87 Cerises 23 Purée instantanée 83 Lentilles 22 Navet 72 Quinoa 35 Pastèque 72 Légumes verts < 15 La distinction sucres simples / amidons n'a donc pas l'incidence qui lui était attribuée sur la glycémie. Les cerises, par exemple, ont un effet quatre fois inférieur à celui de la baguette ou des pommes de terre. Variations de l'index glycémique d'un aliment Les valeurs obtenues sont des moyennes après mesure sur plusieurs sujets. L'index glycémique peut varier selon - le sujet - le moment de la journée - de nombreux facteurs influençant la vitesse de digestion. L'index glycémique dépend de la digestion de l'amidon qui le compose. Celle-ci se fait essentiellement dans l'intestin grêle sous l'effet de l'alpha-amylase pancréatique à laquelle échappe une fraction non négligeable de l'amidon qui arrive au côlon : l'amidon résistant. La proportion d'amidon résistant dépend : - de sa nature - de son traitement industriel et culinaire Plus cette proportion est grande, moins l'index glycémique s'élèvera. C'est le cas pour : > les temps de cuisson courts, qui réduisent l'éclatement de l'amidon > les céréales complètes, dont les parois végétales font office de barrière > les grosses moutures, dans lesquelles les enzymes pénètrent moins vite > les fibres visqueuses, qui accélèrent le transit > les acides, les protéines et les lipides, qui ralentissent la vidange gastrique ATTENTION : se méfier de ne pas favoriser une alimentation riche en graisses saturées sous prétexte de limiter la réponse glycémique. La charge glycémique CG = (IG) x (quantité de glucides d'une portion standard d'aliment (g) ) / 100 La charge glycémique reflète la capacité d'un aliment à élever la glycémie pour une portion standard de cet aliment. CG faible < 10 10 < CG moyenne < 20 CG élevée > 20 Ce concept fait disparaître la diabolisation conférée à certains aliments (par exemple la pastèque ou la carotte) FRUITS IG CG Fraises 40 1 Abricots 57 5 Pastèque 72 4 Tous les fruits frais, hormis la banane (limite) ont une charge glycémique faible, alors que leur index diverge. Pomme 38 6 Banane 52 12 Les dérivés au sirop ou en jus ont une charge glycémique moyenne. Confiture de fraises 51 10 Les fruits séchés se placent dans les charges glycémiques moyennes à élevées. Abricots au sirop 64 12 Jus d'orange 46 12 Raisons secs 64 28 PAINS IG CG Pain de seigle noir 41 1 Pain multi-céréales 49 5 Baguette 95 4 Pain au lait 63 6 LEGUMES IG CG Légumes secs < 55 < 10 Légumes courants < 55 < 10 Index et charge concordent plus ou moins. Les pains à faible charge glycémique sont le pain de seigle noir et le pain multi-céréales. MOYEN MNEMOTECHNIQUE : plus un pain est lourd en main, plus ses farines sont de mouture épaisse, moins sa charge glycémique est élevée. Les légumes secs (pois, lentilles, fève de soja, haricots secs...) sont tous à index et charge faibles. De même que l'ensemble des légumes courants en Occident. CEREALES COMPLETES IG CG Maïzena 68 9 Polenta 68 9 Quinoa 35 11 Il existe des disparités avec l'index glycémique. Orge perlée 25 11 Couscous 58 11 Elles sont toujours à préférer aux céréales raffinées ou au groupe pomme de terre - riz - pâtes. Boulgour 48 12 Pilpil de blé 67 13 Elles ont réparties entre charge glycémique faible et modérée. POMMES DE TERRE RIZ PATES IG CG Spaguetti cuisson 5 min 35 17 Spaguetti cuisson 15 min 44 21 C'est dans ce groupe que l'on observe le plus de disparités entre index et charge. Riz basmati 58 22 Les index glycémiques sont très disparates mais favorisent les pâtes et les cuissons rapides. Riz long grain cuisson 5 min 41 16 Riz long grain cuisson 7 min 64 26 Purée instantanée 85 17 Boulettes de pomme de terre vapeur 52 24 CEREALES IG CG Céréales non raffinées < 55 < 10 Céréales raffinées > 70 > 20 Les charges glycémiques sont toutes élevées (hormis pour les spaguetti à cuisson rapide). Pour 30 g de céréales du petit déjeuner, seules les céréales non raffinées ont une charge glycémique basse. L'ensemble des céréales ciblant une clientèle infantile présente des charges glycémiques élevées. L'illusion du light Grâce à ces données, on peut facilement calculer par simple addition la charge glycémique d'un repas ou d'une journée. MENU 1 "light" CG Maïs doux (80 g) 9 Carottes crues (80 g) 1 Blanc de volaille (150 g) 0 Blanc de volaille (150 g) 0 Boulettes de pomme de terre vapeur (150 g) 24 Lentilles (150 g) 5 Baguette (30 g) 15 Pain de seigle noir (30 g) 5 Yaourt allégé aux fruits 10 Pastèque (120 g) 4 Café sans sucre 0 Café sans sucre 0 TOTAL 58 MENU 2 CG TOTAL 15 Le menu 1 peut donner l'illusion d'être "light". Toutefois sa charge glycémique est près de quatre fois supérieure à celle du menu 2, tout aussi consistant, mais dans lequel on a favorisé des charges glycémiques faibles sans pour autant augmenter les lipides. Cette augmentation en lipides est un travers courant des aliments dits "lights", et notamment de certains aliments dits "pour diabétiques". Ces derniers sont le plus souvent fabriqués à base de fructose (pour son pouvoir sucrant élevé, ce qui permet d'en réduire les quantités et pour son index glycémique inférieur à celui du saccharose). Autre inconvénient de ces produits : ils donnent l'illusion au patient d'un vrai bénéfice santé, même s'il en consomme en excès, ce qui est faux. Leur intérêt est donc limité. Les produits à base d'aspartam sont sans glucides. Mais la majorité des produits "sans sucre" comportent des polyols qui restent des glucides (mais ne favorisent pas la carie dentaire). Il est donc essentiel de s'intéresser à l'ETIQUETAGE. En résumé CG faibles CG moyennes CG élevées Légumes (sauf légumes exotiques) Dérivés de fruits (jus, confitures, fruits au sirop) Fruits secs Fruits frais (sauf banane) Céréales complètes (blé, orge, couscous, quinoa, boulgour) Pommes de terre - riz - pâtes Sodas - boissons sucrées Légumes secs Pains blancs ou travaillés Pains "lourds" L'intérêt clinique des index et charges glycémiques Bénéfice d'un régime à faible index glycémique ou à faible charge glycémique dans la prise en charge : - de l'obésité, - du syndrome métabolique, - du diabète de type I ou de type II, - dans les maladies cardiovasculaires, - dans la prévention des cancers du sein ou du côlon. Les aliments à faible charge glycémique ont un effet rassasiant permettant de limiter les apports caloriques. On a tout intérêt à orienter vers une alimentation à charge glycémique faible chez : - le patient obèse, - dysmétabolique, - diabétique, - et même chez le sujet sain. à la place de préférer Jus de fruits Fruits frais Sodas, boissons sucrées Eau Fruits secs Fruits frais Céréales "petit déjeuner" Flocons d'avoine Pains blancs "légers" Pains noirs "lourds" Pommes de terre - riz - pâtes Légumes - légumes secs - céréales complètes Ces recommandations ont l'avantage de pousser à la consommation de fruits et de légumes qui sont essentiels pour leurs apports en micronutriments et en fibres. Consommer des glucides, non pas isolément, mais au cours de repas répartis sur la journée et constitués de lipides et de protéines de bonne qualité nutritionnelle contribue à limiter la charge glycémique et fait progresser le patient vers son objectif santé : l'équilibre alimentaire.