Anne Cassou-Noguès
© NRP lycée, n°45, mai-juin 2011
Quelques éléments de réponse
1/ Stepan arrive de Suisse, qu’il a gagnée après s’être échappé du bagne (acte I).
C’est pour cela qu’il n’a pas un rôle de premier plan dans l’attentat du Grand Duc. Il
revient pour remplacer Schweitzer qui a été tué en manipulant une bombe.
2/ Dora s’occupe du « matériel » : c’est elle qui s’occupe de la fabrication de la
bombe. Elle sera épaulée par Stepan. Kaliayev doit lancer la première bombe,
Voinov la deuxième. Annenkov dirige le groupe (acte I).
3/ Foka a tué trois personnes un soir de beuverie (« j’avais soif », « J’ai tout démoli. Il
paraît que j’en ai tué trois », acte IV). Comme il a été condamné à vingt ans de
prison, il a accepté de tenir le rôle du bourreau : à chaque exécution, on lui enlève un
an sur sa peine.
4/ Skouratov propose à Kaliayev de le gracier s’il dénonce ses camarades (acte IV).
5/ La grande-duchesse demande à voir Kaliayev pour qu’il accepte sa grâce, qu’il
vive afin qu’il se repente (acte IV).
6/ Stepan et Kaliayev s’opposent dès l’entrée en scène de ce dernier. Stepan est
sombre (« Cela m’arrive quelque fois [de sourire] », acte I) et taciturne : il prononce
des phrases brèves qui sont comme des lois révolutionnaires (« Il faut de
l’expérience », « Il faut une main ferme » « Un vrai révolutionnaire ne peut pas
s’aimer », acte I). Kaliayev, le Poète, est au contraire joyeux (« Kaliayev rit », « Il
rit », quatre fois dans le premier acte) et plein d’enthousiasme (« J’aime la beauté, le
bonheur ! […] Mais la révolution pour la vie, pour donner une chance à la vie, tu
comprends ? »). Mais ces différences superficielles s’accroissent ensuite : Kaliayev
se révèle être un « meurtrier délicat » tandis que Stepan défend l’idée que la fin
justifie les moyens (cf. supra, séance 6).
7/ Camus pensait déjà à sa pièce quand il assiste aux répétitions des Mains sales
mais une réplique a dû lui rappeler son sujet : « En Russie, à la fin de l’autre siècle, il
y avait des types qui se plaçaient sur le passage d’un grand-duc avec une bombe
dans leur poche » (deuxième tableau, scène 4).
8/ Une telle question suppose que l’élève fasse appel à ses connaissances de
seconde sur le théâtre classique. Il doit préciser que même si la pièce ne respecte
pas stricto sensu les trois unités, quatre des cinq actes se déroulent dans un même
lieu, que la durée de l’ensemble n’excède pas une dizaine de jours, que l’unité
d’action est respectée (tout tourne autour de l’attentat du Grand Duc et la pièce
commence alors qu’il est imminent). L’élève précisera également que la
vraisemblance est respectée (l’intrigue s’inspire d’une histoire vraie que Camus a
« tâché à rendre vraisemblable ») comme la bienséance puisque le crime a lieu hors-
scène. À cet égard, on pourra étudier des extraits de la mise en scène de Guy-Pierre
Couleau. Quand Annenkov et Dora attendent des nouvelles de l’attentat, ils guettent
à travers une fenêtre invisible, exposant leurs visages au regard des spectateurs.
C’est à travers eux, leur espoir et leur crainte, que l’on perçoit l’attentat.