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HEILIKMAN Jérôme
Groupe 1 L2
TD droit pénal Séance 17
Mardi 3 avril 2007
Dans la philosophie pénale, Tarde défendait la non imputabilité des irresponsables en ces
termes « Pour deux raisons la folie nous rend irresponsable, parce qu’elle nous désassimile et parce
qu’elle nous aliène, parce qu’elle nous fait étranger à notre milieu et parce qu’elle nous fait étranger à
nous même. Elle refond le moi, bien que, le plus souvent, elle le fasse tomber du coté où il penchait
déjà, et le moi nouveau qu’elle lui substitue a pour essence d’être insociable. Voilà pourquoi nos
principes défendent de punir le fou. Toute folie est une extravagance qui nous isole d’autant plus
qu’elle est fixée, consolidée et chronique».
Cet ouvrage s’inscrivait ainsi dans la conception de l’article 64 du Code pénal de 1810 selon
lequel « Il n’y a crime ni délit, lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l’action »
considérant ainsi l’irresponsabilité pénale des criminels et délinquants malades mentaux. En effet, les
rédacteurs estimaient qu’il était d’une part injuste de les punir étant dépourvus de volonté et de
conscience dans l’accomplissement de l’infraction et, d’autre part, inutile car ils étaient incapables de
comprendre le caractère dissuasif de la sanction. Le Code pénal originaire rejoignait dès lors la
tradition du droit romain mais se séparait de celle de l’ancien droit où l’anomalie mentale était
considérée comme un signe de possession démoniaque manifestant clairement l’instinct mauvais.
Néanmoins, le système du Code pénal de 1810 a été unanimement dénoncé comme à la fois
trop limité et trop absolu en ce sens qu’une personne était coupable ou non-coupable sans demimesure. Un travail important de réflexion a donc été mené faisant progressivement rupture avec l’idée
selon laquelle dès lors qu’une infraction était matériellement commise, la responsabilité de l’auteur
était engagée.
Dès lors le droit positif a consacré l’irresponsabilité pénale en cas d’obstacles légaux
consistant soit en un fait justificatif spécifié par la loi faisant disparaître le caractère illicite de l’acte
prohibé autrement dit des causes objectives d’irresponsabilité, soit une cause de non-imputabilité
faisant disparaître l’élément psychologique de l’infraction telle que les troubles psychiques ou
neuropsychiques ayant aboli le discernement c'est-à-dire des causes subjectives d’irresponsabilité.
Par ailleurs, il convient dès à présent de préciser qu’il ne sera pas traité dans ces propos de la
question de la minorité qui fait des mineurs des irresponsables dans certains cas mais uniquement des
troubles psychiques ou neuropsychiques ayant aboli ou atténué le discernement.
En ce sens, l’adoption du nouveau Code pénal de 1992 en son article 122-1, dispose que
«N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble
psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. La personne
qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son
discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient
compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime».
De plus, il convient de préciser le sens des dispositions de l’article. Ainsi, sont désignés
comme des troubles mentaux, tout trouble ayant une conséquence destructrice sur les facultés
intellectuelles des personnes qui en sont affectées les empêchant généralement de comprendre la
portée de leurs actes, voire de les vouloir dans le cas de pulsions irrépressibles, et enfin sont visées les
formes de la maladie mentale d’origine innée ou acquise et dont la manifestation est permanente ou
occasionnelle.
Cependant, le principe de l’irresponsabilité pénale des personnes faisant l’objet de troubles
mentaux apparaît comme une exception à la responsabilité personnelle de l’auteur de l’infraction. En
effet, la notion de responsabilité, dans ses diverses significations, a-t-elle un sens lorsqu’elle
s’applique à une personne atteinte de trouble psychologique ou de maladie mentale ? Néanmoins, fautil penser la responsabilité comme étant « une et indivisible » ou comme admettant plusieurs degrés ?
Finalement si en vertu du principe de la responsabilité pénale de l’auteur principal et du
principe de légalité, il est nécessaire d’incriminer tout irresponsable (I), cette imputabilité n’est pas
effective dans la transformation de la situation de fait en une situation juridique, les juges retenant en
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effet une atténuation voire une abolition de la responsabilité pénale selon le degré de discernement afin
de limiter une sur pénalisation inutile en vue de soins plus adaptés, digne de notre démocratie (II).
I – La nécessaire imputabilité des irresponsables : un jugement en application du principe de la
légalité criminelle
Tout individu ayant commis une infraction, est pénalement responsable des chefs
d’accusations posés à son encontre. Dès lors la responsabilité pénale des malades mentaux se heurte à
certains principes tels que celui de la légalité garantissant l’effectivité de l’application de la loi pénale
ou encore le principe selon lequel tout citoyen doit répondre de ses actes devant la Justice afin de
garantir à tous une certaine égalité devant la loi (A). D’autre part, cette responsabilité pénale est
nécessaire pour éviter de laisser impuni un comportement dangereux au risque de mettre en danger la
sécurité et l’ordre public de la société (B).
A – La répression de tout comportement érigé en infraction pénale : une mission régalienne de l’Etat
1 – l’application du principe de légalité : La nécessité de juger les irresponsables comme tous
citoyens
En réaction à l’arbitraire des tribunaux, le principe de légalité fait aujourd’hui partie des
missions régaliennes de l’Etat. En vertu de l’article 111-3 du Code pénal, «nul ne peut être puni pour
un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention
dont les éléments ne sont pas définis par le règlement. Nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas
prévue par la loi, si l’infraction est un crime ou un délit, ou par le règlement, si l’infraction est une
contravention».
A contrario, sera puni la personne ayant commis un crime ou un délit dont les éléments sont
définis par la loi ou la personne ayant commis une contravention dont les éléments ont été définis par
le règlement. De même, sera puni d’une peine l’auteur de l’infraction lorsque cette peine a été prévue
par les textes. Ce principe en tant que clef de voûte du droit pénal contraint le juge répressif à faire
application parfaite des dispositions de la loi garantissant l’effectivité et l’objectivité de la justice sans
distinction entre les auteurs sains d’esprit et les auteurs atteints d’un trouble mental.
De ce fait, juger une personne irresponsable pour l’infraction commise, revient à appliquer à
cette personne, la sanction effective au mal causé à l’ordre public. Dès lors, si les irresponsables
venaient à ne jamais être juger, la justice entretiendrait une faille saisissable par les criminels, en tant
que même dépourvus de troubles mentaux, ils leurs suffiraient d’assurer leur déficience mentale aux
juges, afin de passer outre la sanction pénale et bénéficier en conséquence du régime spécial des
irresponsables. Cette exigence répond donc au fait que la loi a été rédigée telle que tout comportement
érigé en infraction pénale, doit être jugé en fonction de ses dispositions.
Ainsi, les juges doivent garantir la continuité et la cohérence de la justice en se conformant
aux textes garantissant un affermissement de la réponse judiciaire notamment par la prise en
considération des parties civiles.
2 – Un affermissement de la réponse judiciaire : la prise en considération des parties civiles
Il semble nécessaire que les procédures judiciaires concernant les irresponsables se terminent,
non plus par un non-lieu mais par une décision juridictionnelle portant sur la réalité des faits commis
et sur la fixation des dommages et intérêts dus aux « victimes » afin que des obligations liées à la
protection de ces dernières puissent être imposées par la justice à la personne irresponsable.
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En effet, en tant que toute personne devrait répondre de ses obligations pour le respect des
droits de la « victime », la situation résultant de la cessation immédiate des poursuites lorsque l’auteur
des faits a été reconnu irresponsable est difficilement acceptable pour des victimes ayant le sentiment
d’un débat judiciaire escamoté.
Or même si la Loi du 8 février 1995 a renforcé les droits de la victime en lui ouvrant
notamment la possibilité de demander une contre-expertise, la victime a souvent le sentiment d’être
frustrée du procès pénal, quand bien même l’article 489-2 du Code civil lui assure une réparation
civile de ses dommages.
Par ailleurs, cette exigence d’un procès qui pourrait être un évènement éclairant pour les
parties civiles leur permettant notamment de faire le deuil et de surmonter le drame, trouve une
illustration particulière en matière de prévention de la récidive notamment en matière criminelle et
d’infractions sexuelles. Il convient également de préciser, que le trouble mental s’agissant d’une cause
subjective d’irresponsabilité, opère in personam c'est-à-dire qu’elle supprime uniquement la
responsabilité de l’agent, les coauteurs et complices demeurant responsables d’où la nécessité d’un
jugement.
Néanmoins, ce besoin légitime à se voir reconnaître leur statut ne doit pas conduire à faire
comparaître l’irresponsable pénal devant une juridiction afin de voir prononcer une pseudo-culpabilité,
à savoir la reconnaissance de l’infraction puis la déclaration de non-sanction ce qui ne serait pas
satisfaisant pour les victimes confrontées à des auteurs dans l’incapacité de s’exprimer sur leurs actes
ou leurs responsabilités. C’est pourquoi, il est préconisé une déclaration de culpabilité symbolique ou
solennelle au profit d’une médiation entre l’auteur et la victime.
Enfin, malgré cette délicate articulation, et sur la base de textes rappelant la responsabilité
individuelle de toute personne ayant commis une infraction et en réponse à la légitime attente des
« victimes », il paraît normal de juger les irresponsables comme un moyen pour tenter de neutraliser
leur dangerosité et de ne pas encourager la commission de comportements dangereux.
B – Le jugement comme moyen de protéger la société tout en « responsabilisant » les irresponsables
1 – neutraliser la dangerosité des irresponsables
Il convient d’envisager à présent qu’en dépit du fait que le droit français établisse une
distinction entre les irresponsables souffrant de troubles mentaux et les criminels dépourvus de
déficiences mentales, le principe selon lequel « tous les hommes naissent libres et égaux en droits »
garantit les mêmes droits et obligations aux individus.
De ce fait, ce texte rappelant implicitement la responsabilité individuelle de toute personne
ayant commis une infraction, pourrait justifier que les irresponsables doivent faire l’objet d’une
responsabilité pénale en vue de neutraliser leurs comportements criminels.
Par ailleurs, la société de plus en plus avide de sécurité et qui, par refus de l’aléa et du risque,
se caractérise par la recherche constante d’un coupable, personne physique ou institution, susceptible
d’endosser la responsabilité des faits commis.
En effet, Il est apparu d’une part, que le pourcentage de détenus en détention souffrant de
troubles psychologiques et neuropsychologiques soit en augmentation et que d’autre part la
commission d’infractions par des personnes ayant été, par le passé, prises en charge par la psychiatrie
se soit nettement accru.
Dès lors, face à l’abondance des comportements à déficience psychologique et
neuropsychologique constituant une menace certaine pour la société, l’opinion publique a ainsi été
amenée à se demander pourquoi des personnes, dont la dangerosité apparaissait manifeste, avaient été
laissées ou remises en liberté par les autorités administrative et judiciaire, et pour quelle raison leur
suivi médical avait été interrompu alors qu’elles représentaient une menace pour la société.
Cependant, s’il paraissait inégal de ne pas juger également les malades mentaux comme des
personnes responsables, la question qui convient ici se poser, est celle de savoir si notre conception
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des malades mentaux tend à les considérer comme des personnes à part, ou bien de les appréhender
comme toute autre personne.
D’un point de vue individuel, il semble évident de constater que leur déficience provenant de
quelque origine que se soit, justifie qu’ils soient responsabilisés pour leurs actes. Néanmoins, d’un
point de vue éthique, il semble difficile de juger les malades mentaux comme des personnes ayant agi
en toute connaissance de cause, avec une volonté intrinsèque justifiant ainsi de « responsabiliser »
l’irresponsable tendant à rechercher non pas une vocation répressive mais davantage à concilier la
punition comme un moyen de resocialiser l’individu.
2 – La responsabilité relative des malades mentaux
Outre le fait de protéger la société dans son ensemble, il paraît important de juger les
irresponsables pour les protéger d’un éventuel acte dangereux contre eux-mêmes. D’autre part, punir
un délinquant c’est le contrôler, lui faire comprendre que son acte est condamnable, de favoriser une
prise de conscience de la dangerosité de l’acte puni pour enfin le remettre dans le droit chemin. Cela
est sans aucun doute d'autant plus vrai pour les personnes irresponsables qui ont besoin davantage de
repères.
En ce sens, une responsabilité civile peut être engagée. En effet, l’article 489-2 du code civil
prévoit que «Celui qui a causé un dommage à autrui alors qu'il était sous l'empire d'un trouble mental
n'en est pas moins obligé à réparation». Cette disposition vient ainsi confirmer la règle essentielle
selon laquelle, il est légal et obligatoire de responsabiliser civilement les irresponsables.
Ainsi, au terme de cette première partie, il paraît important de juger les irresponsables au
risque que leur non-imputabilité contreviendrait à certains principes fondamentaux. Néanmoins, en
droit français, toute incrimination de quelconque individu, repose sur la constitution d’un dommage
autrement dit un élément matériel, d’un élément légal incriminant l’infraction consommée et enfin
d’un élément intellectuel de l’infraction, c’est-à-dire d’une intention ou d’une connaissance dans la
commission de l’infraction. Or en présence d’un malade mental souffrant de troubles psychologique
ou neuropsychologique, il apparaît que le trouble aboli ou altère son discernement ou le contrôle des
actes au moment de la commission de l’infraction.
Dès lors, l’élément intellectuel n’étant pas constitué, l’auteur ne peut se voir appliquer les
mêmes peines qu’une personne responsable se serait vue infliger en cas d’adoption du même
comportement dangereux, et ceci même si ce comportement reste dans tous ses éléments condamnable
au même titre. Aussi, la non-imputabilité des irresponsables doit être constatée par les juridictions
tendant à rechercher non pas une vocation répressive mais davantage à concilier la punition comme un
moyen de resocialiser l’individu, autrement dit privilégier le fondement utilitaire à la fonction
rétributive de la sanction et, enfin, personnaliser la peine par des solutions thérapeutiques.
II – la constatation de la non-imputabilité des irresponsables : vers des solutions thérapeutiques
contre le risque de procès expiatoires
La société associe à tort la folie des actes criminels particulièrement graves à celle de leur
auteur, et a de ces derniers une représentation qui repose sur des présupposés aussi partiels que
contestables. Ainsi, l’opinion publique omet que ces individus considérés « mentalement dangereux »
sont aussi des sujets vulnérables, victimes d’autrui, qui ont besoin d’être protégés et accompagnés. De
ce fait, que le trouble pénal soit une cause d’irresponsabilité ou une cause d’atténuation de la
responsabilité (A), la position traditionnelle du droit pénal est celle du retrait au profit d’autres
autorités permettant une personnalisation de la peine et une prise en compte accrue du malade (B).
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A – la modération de la peine : une juste proportionnalité avec le degré de responsabilité.
1 - Une non-imputabilité : le trouble mental ayant aboli le discernement ou le contrôle des actes
Les causes d’irresponsabilité des malades mentaux, effective en droit français, sont basées sur
des appréciations scientifiques de leurs comportements. En présence d’un trouble ayant aboli le
discernement ou le contrôle des actes au moment des faits, le délinquant ne peut faire l’objet d’une
condamnation comme le dispose l’article 122-1 du Code pénal en son alinéa 1er.
En conséquence, lorsque l’existence d’un trouble mental est reconnue, le juge d’instruction
doit rendre une ordonnance de non-lieu, le tribunal de police ou le tribunal correctionnel relaxer le
prévenu, la cour d’assises prononcer l’acquittement. Si elle avait été mise en détention provisoire, la
personne reconnue irresponsable devra être libérée sur le champ et le juge pénal ne peut prendre à son
encontre aucune mesure curative ou punitive. En effet, juger ces malades mentaux nous positionnerait
dans le cadre d’une société à vocation sécuritaire faisant primer le répressif sur le social.
Cependant, il faut préciser que le trouble psychique ou neuropsychique ne peut constituer une
cause d’irresponsabilité pénale qu’à la condition d’être concomitant aux faits et en rapport direct avec
l’infraction commise. La présence d’un manque de discernement ou de contrôle des actes, c’est-à-dire
d’une incompréhension de la portée des actes, doit être caractérisée au moment des faits afin que
l’auteur irresponsable, ne fasse pas l’objet d’une poursuite pénale.
2- Une atténuation de la responsabilité pénale : le trouble ayant altéré le discernement ou entravé le
contrôle des actes
L’ancien Code instituait un système de tout ou rien : l’individu était soit totalement
irresponsable avec une abolition de sa responsabilité, et dans le cas contraire, il devait être jugé dans
les conditions de droit commun, même s’il était atteint de troubles mentaux partiels. Pour remédier à
cette situation, une circulaire de 1905 recommandait d’octroyer le bénéfice des circonstances
atténuantes à l’anormal mental, de sorte qu’il se voyait appliquer une peine moindre que s’il avait joui
de toutes ses facultés intellectuelles.
Cette responsabilité atténuée est désormais consacrée par l’alinéa 2 de l’article 122-1 du
nouveau Code pénal qui dispose que « La personne qui était atteinte au moment des faits d’un trouble
psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes
demeure punissable : toutefois la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la
peine et en fixe le régime ».
Ainsi, en suggérant à son terme des circonstances atténuantes en cas de trouble ayant
simplement altéré le discernement ou entravé le contrôle des actes, le législateur admet implicitement
une responsabilité partielle, si l’on veut bien admettre qu’il y a “proportionnalité”, pour une même
infraction, entre le “degré” de responsabilité supposé et la peine encourue.
Le juge devra dès lors prendre en compte le trouble non seulement à la détermination de la
peine mais également à la fixation de son régime.
Malgré tout, la prise en compte du sort du malade mental par le droit pénal est apparue à
beaucoup comme insuffisante, et des efforts ont été accomplis afin que le sort du malade mental soit
davantage considéré. C’est ainsi que face au risque des effets pervers d’une peine privative de liberté
sur un individu déséquilibré, un aménagement de la sanction judiciaire ainsi qu’un traitement médical
approprié est apparu préférable.
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B – Du jugement par équité aux remèdes extra-juridiques plus utiles qu’une répression judiciaire vers
une personnalisation de la peine
1 – L’aménagement de la peine
Force est de constater, qu’il est très souvent complexe d’évaluer la dangerosité d’une personne
ainsi que sa capacité de discernement ou de contrôle de ses actes d’autant que le trouble n’est pas
obligatoirement de caractère linéaire et permanent mais peut en effet être transitoire, croître ou
s’atténuer voire disparaître. Le juge doit pourtant effectuer cette évaluation afin de moduler les
obligations mises à la charge du délinquant en appréciant les facteurs situationnels tels que les
circonstances du passage à l’acte ou la nature de l’infraction, individuels avec l’environnement social
et familial et enfin victimologiques à savoir son attitude à l’égard de la victime.
Ainsi, en cas d’emprisonnement, il faut signaler que l’article 131-4 du Code pénal en donnant
une échelle des peines, va permettre au juge de définir librement le quantum d’une sanction selon le
degré de responsabilité du délinquant.
En outre, à tous les stades de la procédure, l’intervention d’un expert est possible afin de
définir ce qui serait le plus efficace pour l’irresponsable. En plus de l’exemption de peine ou du sursis,
peines classées parmi les « modes de personnalisation des peines » dans le Code pénal, il peut se voir
proposer un aménagement de sa peine comme la semi-liberté ou le fractionnement de sa peine ou
encore être décidé que l’irresponsable sera placé sous surveillance électronique avec le port d’un
bracelet.
Cependant, il importe de rappeler que les juridictions répressives peuvent assortir certaines
peines privatives de liberté d’une période de sûreté, durant laquelle le condamné estimé
particulièrement dangereux ne peut bénéficier d’aucune mesure d’individualisation de sa peine. Cette
mesure est applicable de plein droit pour les infractions particulièrement graves lorsqu’une
condamnation à un emprisonnement ferme d’une durée supérieure ou égale à dix ans est prononcée.
Dès lors, dans certaines procédures criminelles l’atténuation de responsabilité, subséquente à
l’altération du discernement constatée chez l’accusé, ne se traduit guère par une diminution de la peine
prononcée, mais au contraire par son aggravation. Pourtant, il a été à plusieurs reprises souligné que
les personnes atteintes de troubles mentaux sont présupposées à tort particulièrement dangereuses. En
outre, ce n’est pas le moindre des paradoxes que de constater que les individus dont le discernement a
été diminué puissent être plus sévèrement sanctionnés que ceux dont on considère qu’ils étaient
pleinement conscients de la portée de leurs actes.
C’est pourquoi, des alternatives sont envisagées au-delà de la juridiction répressive à la
recherche renouvelée d’un difficile équilibre entre santé, justice et social.
2 – la position traditionnelle de retrait du droit pénal au profit d’un encadrement thérapeutique
« Qui sait voir le fou qu’il est, est sur la voie de la sagesse ». En ce sens, l’orientation vers des
soins appropriés du détenu malade mental est une des missions essentielles de la justice. Cette
obligation d’un suivi thérapeutique ne constitue pas une immixtion de l’autorité judiciaire dans le
champ sanitaire, puisque son contenu relève exclusivement du corps médical. Elle est considérée
comme respectée dès lors que le condamné a rencontré un médecin et, le cas échéant, engagé le suivi
estimé nécessaire par le praticien.
Ainsi, le principal dispositif a été mis en place par la loi du 17 juin 1998 qui part du principe
selon lequel le délinquant sexuel est souvent un malade qui s’ignore, ce qui suggère de lui proposer
fermement un traitement auquel il n’aurait pas pensé spontanément. Dès lors a été institué le suivi
socio-judiciaire qui peut comprendre une injonction de soins avec l’intervention d’un médecin
coordinateur qui fera le lien entre le magistrat et le médecin traitant du délinquant. Les déficients
mentaux feront alors l’objet d’une meilleure prise en considération de l’éventuelle atténuation de leur
responsabilité pénale mais a contrario tout refus de la part du condamné sera considéré par le magistrat
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comme la manifestation d’une volonté insuffisante de réadaptation sociale et il ne pourra alors
bénéficier de réductions de peines supplémentaires.
Par ailleurs, lorsque la déclaration d'irresponsabilité concerne une personne susceptible d'être
dangereuse pour la collectivité, une mesure d'internement peut être prise à l'issue d'une procédure
purement administrative. Dans ce cas, le code de la santé publique oblige en effet les autorités
judiciaires à aviser le préfet, qui doit prendre « sans délai toute mesure utile » tel que par exemple
décider une hospitalisation d'office en se fondant sur un avis médical circonstancié portant sur l’état
actuel du malade.
Enfin, aujourd’hui, le très grand nombre de détenus souffrant de troubles mentaux montre la
faillite ou les limites, tant du régime légal actuel de l’irresponsabilité pénale répondant aux attentes
d’une société coercitive que du système de soins psychiatriques français.
Il convient dès lors d’éviter soigneusement deux fortes tentations : assimiler les crimes les plus
horribles à des crimes de malades mentaux, mais aussi penser que la psychiatrie puisse soigner et
protéger de toute récidive les sujets atteints de troubles de la personnalité en rapport direct avec une
précarisation qui se développe. C’est à ce prix que la société pourra résister à la démesure et faire
œuvre de justice avec pondération et humanité envers les irresponsables.
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