La crise de la dette européenne connaît un nouveau développement avec le plan
européen de taxer les dépôts bancaires à Chypre. Ce dispositif rejeté par le
parlement chypriote suscite de nombreuses critiques. Fallait-il en passer par là ?
Marc Touati : Non ! Les dirigeants européens et le FMI ont pris une
décision irresponsable car cela créé un précédent. Le droit bancaire
européen interdit de taxer unilatéralement les dépôts. Par ailleurs, le risque
de « bank run » existe même si la décision est amendée au bout du
compte. Des mouvements de retrait ont déjà eu lieu et accentuent des
risques de faillite bancaire. Même si l’économie chypriote représente à
peine 0,2% du PIB européen, des banques étrangères, grecques
notamment, sont en première ligne. Cette décision est donc susceptible de
provoquer de l’instabilité bancaire... C’est un jeu dangereux. Il faut trouver
rapidement une autre solution...
Certes mais la crise grecque a précipité la crise chypriote. On évoque des besoins
de financement de 17 milliards d’euros, soit un montant proche du PIB de Chypre!
L’urgence n’était-elle pas de prendre des mesures fortes, même si très
impopulaires ?
M.T : Mais en augmentant la pression fiscale via cette taxation des dépôts, cette mesure va
aggraver la récession ! Or, l’île est en récession depuis son entrée dans la zone euro en
2008. Le taux de chômage atteint 15%. Par conséquent, ce plan Union européenne-FMI de
10 milliards d’euros risque de partir en fumée en quelques mois.
En essayant de guérir le malade, on risque de le tuer ?
M.T : Exactement. J’ai intitulé un chapitre de mon dictionnaire « M comme mourir guéri ».
Le dogmatisme des dirigeants européens empêche de tirer les leçons des effets désastreux
des politiques mises en oeuvre.
Quelles solutions préconisez-vous ?
M.T : Il faut retrouver de la croissance. Mais cela restera un voeu pieux tant que l’euro ne
baissera pas davantage. A 1,30 dollar pour 1 euro, c’est un vrai problème ! Par ailleurs,
point capital, la BCE doit être plus accommodante et financer en direct les Etats comme le
font toutes les autres banques centrales dans le monde...
Mais Mario Draghi a déjà beaucoup fait depuis un an, notamment avec l’annonce
des OMT début septembre 2012...
M.T : C’est vrai mais ce mécanisme n’a pas été encore mis en oeuvre. Même l’Espagne ne
l’a pas demandé. Or, les mesures efficaces sont celles prises en amont et non dans une
situation d’urgence, une fois que la crise est là. Concernant la baisse de l’euro, il faudrait
déjà montrer une volonté politique forte au niveau européen et trouver un accord
international dans le cadre du G20. Enfin, il faut baisser les impôts dans la zone euro et