SES - Chapitre 2. La croissance économique est-elle compatible avec l’environnement ?
KH TES1 2015/2016
Activité 1 Limites écologiques et soutenabilité de la croissance
Etudiez la 1ère partie (I) du cours, puis lisez l’article suivant et répondez aux
questions ci-dessous :
1. Quelles sont les deux principales limites écologiques que rencontre la croissance ?
2. Montrez, à l’aide de l’article, que la croissance économique actuelle est source de
pollution et qu’elle conduit à consommer trop de ressources.
3. Quels sont les pays qui polluent le plus ? Quel lien peut-on faire avec la croissance ?
4. A quoi correspond la soutenabilité de la croissance ?
5. Quels sont les trois dimensions du développement durable ? Celui-ci repose-t-il
uniquement sur des préoccupations environnementales ?
6. Donnez un exemple pour illustrer chaque type de capital nécessaire à la croissance.
7. Quelle est la relation entre le stock de capitaux et la soutenabilité de la croissance ?
8. A quelle condition une croissance est-elle soutenable pour les tenants de la
soutenabilité faible ?
9. A quelle condition la croissance est-elle soutenable pour la thèse de la durabilité forte ?
10. A partir de l’article citez deux auteurs associés à la soutenabilité faible et deux auteurs
associés à la thèse de la soutenabilité forte.
Article - Croissance et soutenabilité
Soutenabilité et empreinte écologique
La notion de soutenabilité est plus ou moins directement née des réflexions du Club de
Rome au début des années 1970. [...] Il aura néanmoins fallu attendre le début des
années 1990 pour qu’une forme de mesure synthétique de cette soutenabilité soit enfin
proposée grâce à l’empreinte écologique. Une brève analyse de cet indicateur et de ses
résultats nous permet de bien mesurer les enjeux.
L’empreinte écologique cherche à évaluer la "quantité de nature" nécessaire pour
permettre à une société de répondre durablement à ses besoins en matière d’alimentation,
de logement, de transports et d’autres biens et services. Il s’agit de considérer l’économie
comme un organisme qui consomme des ressources et rejette des déchets. Puisque ces
ressources proviennent de la nature et que les déchets générés y retournent, la question
qui se pose est alors la suivante : quelle partie reproductive de nature est nécessaire pour
répondre durablement à nos besoins ? Autrement dit, quelle surface de sols bioproductifs
nous faut-il pour produire chaque année [...] ce que nous consommons durant cette même
période (énergie, bois, fibres, fruits, légumes, céréales, viande, lait, ressources
halieutiques, etc.) ? Et quelle surface de sols est nécessaire pour assimiler nos déchets et
nos pollutions (déchets ménagers, CO2...) ?
L’empreinte écologique de la France est aujourd’hui estimée à 5,6 hectares par habitant,
tandis que la moyenne mondiale s’élève à 2,3 hectares par habitant. [...] La part de sols
bioproductifs disponibles pour chaque habitant de la planète équivaut en moyenne à 1,8
hectares ce que nous appellerons "seuil de soutenabilité". Or l’empreinte écologique
moyenne mondiale est aujourd’hui supérieure à ce seuil. Cela signifie tout simplement
que, conformément à ce que prédisait le Club de Rome il y a plus de trente ans,
l’humanité consomme aujourd’hui davantage de services issus de la nature que
l’écosystème peut en régénérer.
Dans le même ordre d’idée, les experts du GIEC estiment que pour stabiliser le
réchauffement climatique il ne faudrait pas que les émissions de CO2 dépassent la
capacité de la nature à les assimiler, ce qui représente à peu près 12 milliards de tonnes
par an (environ 1,9 tonne de CO2/hab). En confrontant ces deux indicateurs (CO2/hab et
empreinte/hab) et les PIB de 130 nations du monde, on s’aperçoit alors que, en moyenne,
plus le PIB d’un pays est élevé et plus son empreinte écologique ou ses émissions de
CO2 sont importantes.
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Soutenabilité faible : la croissance comme solution ?
Après avoir longuement nier ou minimiser les problèmes de soutenabilité (épuisement des
ressources ou dégradation générale des écosystèmes) un certain nombre d’économistes
néoclassiques ont finalement veloppé une approche de la soutenabilité que l’on qualifie
généralement de "soutenabilité faible". Cette dernière s’appuie notamment sur la théorie
de Hotelling selon laquelle le prix d’une ressource évolue en fonction de sa rareté, si bien
qu’à épuisement la demande s’annule, remplacée par l’apparition d’un substitut
technologique. Emise dans les années 1930, cette théorie a servi de support au
raisonnement de Solow et Hartwick qui, dans le courant des années 1970, avanceront
l’hypothèse complémentaire selon laquelle le degré de substitution entre actif
d’environnement et capital artificiel est "parfaite". Cette hypothèse de substituabilité
suggère à peu de choses près que l’épuisement des ressources ou la dégradation de
l’environnement sont légitimes à partir du moment ces ressources (ou ces
dégradations) permettent la création d’un capital artificiel (technologique ou financier) qui
sera lui-même légué aux générations futures... en lieu et place du capital naturel dégradé
ou épuisé. [...]
Cette hypothèse a de quoi séduire puisque, grâce à elle, la sacro-sainte croissance
économique apparaît alors non plus comme le problème, mais au contraire comme la
solution : c’est en effet elle qui est censée permettre à l’humanité de développer la
recherche et le capital technologique qui permettront de faire face aux problèmes
écologiques… et ceci, bien entendu, sans avoir besoin de remettre profondément en
cause nos habitudes de production et de consommation. [...]
Soutenabilité forte : la croissance en cause
A l’autre opposé, les tenants de la "soutenabilité forte" adoptent une approche beaucoup
plus prudente vis-à-vis de la technologie. Portée à l’origine par différents penseurs que
l’on rattache parfois au mouvement de l’Ecological economics (René Passet en France,
Nicholas Georgescu-Roegen ou Herman Daly aux Etats-Unis, par exemple) l’approche de
la soutenabilité forte considère que le capital environnemental est constitué d’éléments
fondamentaux qui ne sauraient faire l’objet d’une substitution technologique satisfaisante.
L’eau que nous buvons, l’air que nous respirons, les grands équilibres naturels,
biogéochimiques et climatiques, tout cela relève à leurs yeux d’un bien commun de
l’humanité qui ne peut être remplacé ou dégradé car il conditionne la possibilité de survie
des générations présentes et futures. Puisque l’environnement est fragile et que ses
capacités sont limitées, et puisque le système économique est un sous-système qui tire
ses ressources du système écologique englobant, les tenants de la soutenabilité forte en
déduisent que c’est au système économique de s’adapter et de contraindre ses exigences
afin de respecter les limites de l’écosystème. Herman Daly propose par exemple quelques
règles de précaution minimales permettant d’assurer cette pérennité du capital naturel : ne
pas exploiter les ressources renouvelables au-delà de leurs taux de régénération, ne pas
excéder les capacités d’assimilation et de recyclage des écosystèmes dans lesquels les
déchets sont rejetés, ou encore ne pas exploiter les ressources fossiles au-delà de leur
capacité de substitution par des ressources renouvelables.
Partant de ces principes, et dans la continuité du rapport du Club de Rome, certains
tenants de la soutenabilité forte en arrivent logiquement à remettre en cause la croissance
économique en particulier celle des pays les plus riches. Les défenseurs de la
soutenabilité forte considèrent qu’il est urgent de réduire notre empreinte écologique, en
comptant sur des changements radicaux de comportements individuels et collectifs
davantage que sur l’émergence d’un très hypothétique miracle technologique censé
résoudre à lui seul tous nos problèmes.
Aurélien Boutaud, « Croissance, décroissance et soutenabilité », EcoRev’,
Revue critique d’Ecologie Politique, n°26, 2007
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Activité 2 Travail de groupe sur les limites écologiques de la
croissance et la durabilité
Mardi 29 septembre 2015
Travail 1 - 1ère Heure
A partir des documents p. 156-157 et p. 158-159
En utilisant les données statistiques issues des documents :
1. Montrez que la croissance peut conduire à un épuisement des ressources naturelles et à des
dégats environnementaux.
2. Montrez quels sont les pays qui polluent et utilisent le plus l’environnement.
Travail 2 - 2ème Heure
A partir du document suivant et des documents 4 p. 161, 1 et 3 p. 162
Document - Les différents types de capitaux
Les diverses interprétations de la notion très floue de développement durable mettent toutes
l'accent, cependant, sur quelques points fondamentaux. [...] Les interactions entre le système
économique et l'environnement naturel ne peuvent plus être ignorées, ni les effets à long terme du
développement ou ses conséquences sur l'équité intra et intergénérationnelle. Mais, une fois ces
principes admis, les divergences d'interprétations restent grandes.
La notion de veloppement peut être interprétée de manière plus ou moins extensive. Elle peut
être limitée au seul bien-être économique mesuré par le PIB/habitant. Mais ce dernier n'est qu'une
composante du bien-être ; l'éducation, la santé, la qualité de l'environnement, la répartition des
richesses, peuvent y être inclus. Ce niveau de bien-être dépend du stock global de capital, au sein
duquel on peut distinguer le capital physique produit par l'homme, le capital humain qui inclut les
niveaux d'éducation, de formation, les aptitudes, la santé des personnes, et le capital naturel
représentant le stock d'actifs naturels fournissant les matières premières, les ressources, la
capacité d'assimiler les résidus.
À ces trois formes conventionnelles de capital, on peut en ajouter une autre, plus récemment prise
en considération : le capital social [ou institutionnel] qui désigne, selon la définition de l'OCDE, des
réseaux, des normes, des valeurs et convictions communes facilitant la coopération au sein des
groupes ou entre eux. [...] Les dispositions politiques, institutionnelles et juridiques en vigueur en
sont des compléments importants, influant aussi sur le niveau de bien-être.
Ce dernier est relié au stock global de capital par le biais des décisions d’investissement dont les
effets peuvent s’étendre sur plusieurs générations. La durabilité du développement implique qu’un
lien soit effectué entre les décisions présentes et les besoins futurs. Ne pas compromettre les
potentialités des générations futures, c’est investir aujourd’hui dans l’éducation, la recherche, c’est
aussi faire en sorte que le capital naturel soit préservé, puisse être renouvelé, ou faire l’objet de
substituts s’il est dégradé. Un des points clés du développement durable est précisément de
déterminer dans quelle mesure les différentes formes de capital sont substituables entre elles. Si
la substitution est possible, la destruction d’une forme de capital peut être compensée par
l’accroissement d’une autre forme de capital, et la durabilité du développement n’est pas
compromise.
Si la substitution est impossible, des politiques établissant des seuils critiques poru certaines
catégories de ressources devront être mises en oeuvre. L’hypothèse selon laquelle on peut ou non
substituer d’autres formes de capital au capital naturel fonde largement la distinction établie entre
durabilités faible et forte.
Annie Vallée, Economie de l’environnement, Paris, Seuil, coll. « Points », 2002
1. Expliquez comment la croissance peut être soutenable dans l’approche de la durabilité faible.
2. Expliquez quelles sont les conséquences pour la croissance de l’approche en terme de
durabilité forte.
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Activité 3 Les politiques climatiques
Etudiez la 2ème partie (II) du cours, puis lisez l’article suivant et répondez
aux questions ci-dessous :
1. Qu’est-ce qui différencie un bien collectif et un bien commun ?
2. Pourquoi considère-t-on que le climat ou l’eau potable sont des biens collectifs ?
3. Qu’est-ce que la « tragédie des biens communs » ?
4. Pourquoi le marché ne permet-il pas de protéger ces types de bien ?
5. Expliquez comment fonctionne une norme et donnez un exemple à l’aide de l’article.
6. Quelles sont les limites de l’instauration des normes environnementales ?
7. Comment fonctionne une taxe environnementale et quel est son objectif ?
8. Quelles sont les difficultés rencontrées par l’Etat lors de l’instauration d’une taxe ?
9. Qu’est-ce qu’un marché de quotas d’émission et comment fonctionne-t-il ?
10. Quelles sont les limites du fonctionnement d’un marché de quotas d’émission ?
Article Normes ou Taxes ?
Climat : la taxe sur les carburants plus efficace que les normes
Responsable d'environ 20 % des
émissions mondiales des gaz à effet
de serre, le transport est devenu une
cible évidente pour les régulateurs
dans leur lutte contre le réchauffement
climatique. Les normes de
consommation de carburant se
mettent en place à travers le monde
pour imposer aux constructeurs un
plafond sur les émissions moyennes
de CO2 des voitures vendues dans
l’année. En Chine, au sein de l'Union
européenne, en Inde, au Japon et aux
États-Unis, les régulateurs auront tous fixé des objectifs contraignants d'ici 2020. La
norme européenne impose des émissions moyennes de CO2 inférieures à 120 g/km dès
cette année. Parallèlement à la norme européenne, le gouvernement français encourage
les ventes de véhicules économes en carburant avec son système de bonus/malus.
Les normes de consommation de carburant ont permis de réduire les émissions de CO2
des voitures particulières. Une récente étude de l'économiste Mathias Reynaert indique
que les constructeurs automobiles vendent moins de véhicules énergivores et proposent
des voitures plus économes en carburant.
Parallèlement, les particuliers bénéficient d'une baisse des dépenses de carburant.
D'après le gouvernement Obama, une famille américaine de classe moyenne devra certes
dépenser environ 2 000 dollars de plus pour une voiture neuve, mais économisera trois
fois plus en frais de carburant. En prime, la baisse de la consommation de carburant rend
l'économie moins dépendante de pays étrangers non-alliés. Et tout cela sans que
personne n'ait à verser quoi que ce soit aux impôts.
Pourtant, ces normes d'économies d'énergie présentent de graves inconvénients.
Tout d'abord, elles ne modifient pas les comportements dans le bon sens. Au contraire,
elles entraînent une hausse du trafic : une voiture économe en énergie est moins
coûteuse, on l'utilise donc plus souvent, ce qui amplifie les embouteillages et, selon le
gouvernement américain et sur la base de travaux académiques, annule au moins 10 %
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des économies d'énergie escomptées. Les économistes appellent cela « l'effet rebond ».
Ensuite, les normes ne s'appliquent qu'aux voitures neuves. Celles-ci deviennent plus
chères, ce qui incite les automobilistes à conserver plus longtemps leurs vieux véhicules
énergivores. Selon les travaux des économistes Mark Jacobsen et Arthur van Benthem,
environ 15 % des économies de carburant attendues sont perdues à cause du
développement accru du marché des véhicules d'occasion.
Par ailleurs, ces réglementations présentent souvent des failles considérables. Elles sont
d’abord difficile à tester : les contrôles sont réalisés dans des conditions très particulières,
avec tous les équipements accessoires éteints. Dans une action collective en cours en
Italie contre Fiat et Volkswagen, des groupes de défense des consommateurs affirment
que les économies de carburant peuvent être de 20 à 50 % inférieures aux chiffres
officiels. Plus grave encore, elles sont à l'origine de sérieuses distorsions. Les véhicules
utilitaires de sport SUV sont classés aux Etats-Unis comme des « camions légers »,
catégorie soumise à des normes de consommation de carburant moins strictes que les
voitures particulières. Par conséquent, les constructeurs ont été incités à vendre plus de
SUV, à retravailler certaines voitures de manière à les faire passer dans cette catégorie
l’instar du fameux « PT Cruiser », un petit break de Chrysler), voire à produire d'énormes
véhicules, tels que le Hummer, pour éviter d'avoir à appliquer les règles d'économies de
carburant. De manière similaire, le poids d’une voiture moyenne est désormais plus élevé
au Japon qu’avant la mise en œuvre des nouvelles normes, car celles-ci sont moins
strictes pour les voitures les plus lourdes !
Quelle autre politique envisager ? Un sondage de l'Université de Chicago a montré que 93
% des économistes préfèreraient la mise en place d'une taxe sur le carburant plutôt
qu’une norme de consommation de carburant (mais seulement 23 % des non-économistes
ont la même opinion).
Une taxe sur le carburant offrirait les mêmes avantages qu'une norme de consommation,
sans souffrir de ses défauts. Elle inciterait les consommateurs à économiser le carburant -
que leur voiture soit neuve ou d’occasion - et à choisir une voiture plus verte, ce qui
encourageraient in fine les constructeurs à investir dans les nouvelles technologies. Elle
ne reposerait pas sur des contrôles douteux, et ne risquerait pas de comporter des failles
susceptibles de favoriser les voitures les plus lourdes ! Mieux encore, une taxe sur le
carburant génèrerait des revenus pouvant être utilisés de manière productive, pour réduire
certains impôts distorsifs ou offrir des abattements d’impôts aux personnes les plus
touchées par cette politique.
Les économistes estiment que, pour un même objectif environnemental, les normes de
consommation de carburant coûtent entre deux et dix fois plus cher qu'une taxe sur le
carburant. En fait, la plupart des études concluent que les normes sont si chères que leur
coût pour la société dépasse la valeur du carbone économisé.
Malheureusement, dans bien des pays, les taxes sur le carburant font face à une forte
opposition politique. Certes, ceux-ci devraient, a minima, appliquer des normes uniques
difficilement manipulables, sans distinguer petites et grandes voitures. Mais idéalement, il
faudrait nous débarrasser de notre aversion pour les taxes sur le carburant. Le mot « taxe
» n'est guère attrayant, mais le climat, comme l'économie,, s'en trouveraient soulagés.
Arthur van Benthem (University of Pennsylvania), Mathias
Reynaert (Ecole d’économie de Toulouse)
Le Monde, 16 juillet 2015
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