Fiche SES 2.2 : La conflictualité sociale : pathologie, facteur de

Fiche SES 2.2 : La conflictualité sociale : pathologie, facteur de
cohésion ou moteur du changement social ?
Selon Durkheim, un conflit est un disfonctionnement de la société. Au contraire, pour
Marx, c’est un moteur du changement social. N’existe-t-il pas d’autres facteurs ?
Comment évoluent-ils ?
A Qu’est-ce qu’un conflit social ?
Conflit social : Antagonisme entre des groupes sociaux qui ont des intérêts divergents
(matériels, symboliques) et qui vont essayer de modifier les rapports de force en leur
faveur. Il faut d’abord qu’il y ai une conscience, puis une action collective. Ces conflits
peuvent être latent. Dans un conflit social, il y a des revendications, des causes ainsi
qu’un adversaire identifié.
Mouvement social : Il n’y a pas forcément d’adversaire identifié. Ce dernier essaye de
transformer l’ordre social.
Action collective : Action concertée avec un objectif commun.
Mais le conflit ne débouche pas cessairement sur la mobilisation. Face à une injustice,
une norme sociale qui ne convient pas, il existe 3 possibilités : c’est la typologie
d’Albert O. Hirschman :
- Exit : On ne va pas participer car on n’a pas conscience que d’autres personnes
ont la même situation ou que le groupe n’a pas les moyens de se mobiliser ;
- Loyalty : L’individu va être loyal et va accepter son injustice. Il est suffisamment
bien intégré pour dire que la norme est légitime ;
- Voice : Prise de parole/revendication. L’individu va rentrer dans l’action
collective pour tenter de transformer la société.
L’action collective ne peut pas avoir lieu même si tout le monde y a intérêt : c’est le
paradoxe de l’action collective. Les individus rationnels vont faire un calcul coût-
avantage et vont s’apercevoir que la mobilisation a un coût (perte de salaire,
ralentissement de la carrière, perte de temps), tandis que même si on n’y participe pas,
on en bénéficie. C’est le comportement de passager clandestin.
On va subir un contrôle social moins fort (individu plus anonyme), le contrôle
informel des pairs est moins fort.
Ainsi des solutions sont préconisées par Olson pour que l’action se déroule :
- contrainte : On peut empêcher les autres salariés d’accéder à l’usine. On va ainsi
exercer une pression sur ceux qui ne participent pas pour les inciter à rejoindre
l’action ;
- l’incitation sélective : On réserve des bénéfices de l’action collective à ceux qui
l’amènent, ou par exemple une adhésion au syndicat facilitée.
Il y a cependant une limite à cette théorie. Il n’y a pas seulement le calcul coût-
avantage dans la mobilisation. Il peut y avoir un altruisme (des militants blancs dans une
manifestation de personnes noires).
Synthèse :
Un conflit social correspond à la manifestation d’un antagonisme entre groupes sociaux
aux intérêts matériels ou symboliques divergents qui veulent modifier le rapport de
force en leur faveur. Il y a donc une dimension collective dans le conflit social.
Le conflit peut être latent ou ouvert. Un conflit latent est un conflit caché, qui ne
s’exprime pas. En effet, dans une situation de conflit, Albert O. Hirschman a montré que
les individus avaient le choix entre : le refus de participer, qu’il appelle la défection
(exit) ; l’acceptation des normes (loyalty) ; enfin une participation protestataire pour
changer le système (voice), débouchant sur l’action collective.
Cependant, Mancur Olson, va faire apparaître le paradoxe de l’action collective : elle peut
ne pas avoir lieu même si les individus ont clairement conscience de leurs intérêts et
sont mécontents de leur situation. En effet, dans une perspective individualiste, les
individus se livrent à un calcul rationnel coût-avantage de l’action collective.
Or, les acquis sociaux de l’action collective bénéficient à tous sans que l’on ait à en payer
le prix. Les individus vont donc adopter le comportement du « passager clandestin » en
attendant que les autres agissent à leur place. Cependant, Olson considère que des
moyens peuvent être utilisés pour déclencher l’action collective : la contrainte ou
l’incitation sélective, en réservant les bénéfices de l’action collective à ceux qui font
l’action.
B Le conflit social est-il une pathologie sociale ?
La lutte des classes selon Durkheim :
La division du travail provoque la lutte des classes. Cette division excessive aboutit à une
spécialisation trop importante et moins de contacts entre les individus. Il y a ainsi un
éloignement physique des patrons et des ouvriers. Ils vont moins ressentir un sentiment
de complémentarité. Chez Durkheim, la division du travail trop poussée coupe les liens
sociaux. Les intérêts des individus vont diverger car ils ne sont plus en contact. Chaque
groupe se préoccupe de ses intérêts.
Le conflit résulte des formes pathologiques de la division du travail : c’est un signe du
dysfonctionnement de la société.
Cette idée a été reprise par l’école des fonctionnalités, notamment avec Talcott Parsons.
Il voit le corps social comme un corps humain, chacun a une fonction (ils peuvent
dysfonctionner et y nuire). Selon eux, toute société est un système intégré
d’éléments/d’individus. Chacun de ces éléments a une fonction qui contribue à
maintenir le système. Ce dernier fonctionne sur l’adhésion de normes et de valeurs
fondamentales.
Quand il y a un conflit, soit :
- les hommes ne remplissent pas leurs fonctions ;
- l’organisation du travail est mal pensée (bureaucratie) ;
- la division du travail est trop poussée ;
- il y a un manque d’adhésion aux valeurs/normes communes.
Durkheim a eu plusieurs idées pour limiter les antagonismes des classes. L’Etat doit
produire :
- la régulation : avec des normes et valeurs, on va faire la promotion de ses valeurs
communes et créer une cohésion sociale ;
- l’intégration : on préconise de recréer des corporations (rapprocher les individus
pour les faire fortement intégrer).
Dans une certaine mesure, le conflit est le signe d’un dysfonctionnement social. Par
manque d’intégration et de régulation, c’est une pathologie sociale, car les normes ne
sont pas claires, inadaptées et trop souples. Si le lien social est défaillant, l’individu sera
mal intégré, insuffisamment régulé par les normes et se retrouvera régulièrement en
situation d’anomie dans la société.
Durkheim ne préconise pas la lutte des classes car elle n’a pas de sens.
Les conflits remettent ainsi en cause l’intégration sociale. La solidarité organique ne
produit pas une solidarité comme elle le devrait. Elle débouche sur des conflits, signes
de manque de cohésion sociale. On va donc nuire à la cohésion sociale.
L’anomie selon Durkheim et Merton est l’inadéquation entre le but et les moyens. Elle
peut à la fois toucher un groupe social mal intégré dans la société et toute une société
car la division du travail est anormale.
Il existe cependant une critique à Durkheim : il établit que le crime ou une déviance est
un fait social normal. Pourrait-on dire la même chose du conflit ?
Il existe différentes sortes de conflits. L’idée de Durkheim de dire que le conflit est le
signe d’une pathologie dans la société n’est pas nécessairement vraie. Il y a des
mécanismes qui se discutent sur la défense du sort des travailleurs dans le conflit du
travail. Il peut y avoir des formes anomiques, et donc un dysfonctionnement. Le conflit
est un fait social normal. Il y en a de plus ou moins intenses avec différentes formes.
Aujourd’hui, les conflits sont institutionnalisés.
Tous les conflits ne remettent pas en cause la cohésion sociale. Par exemple, avec mai
68, il y a plusieurs grilles de lecture.
L’origine est une révolte étudiante qui porte sur les valeurs (liberté
d’expression/sexuelle…).
La société donne la manifestation a des individus moins régulés. Il y a de conflits par
excès de normes (qui correspondent plus à certains individus).
C’est un signe de changement dans la société. Lorsque l’on ne trouve pas de solution, on
débouche sur un conflit.
Certains conflits peuvent être pathologiques. Ils sont une partie intégrante de la société.
Dans leurs formes et leurs durés, ces derniers peuvent être pathologiques. Mais
peuvent-ils être aussi un facteur d’intégration ?
Ainsi, pour Georg Simmel, le conflit social renforce la cohésion du groupe. Il permet de
désigner un ennemi, solidifie le groupe, et il est enfin l’occasion de se rassembler (action
collective). Il renforce le sentiment d’appartenance (renforce la cohésion sociale). Il va
ainsi renforcer la sociabilité et les liens sociaux. En s’opposant aux autres, on va être
identifié par les autres. Il y est aussi question d’une solidarité financière. On pourra aussi
rapprocher les groupes sociaux (syndicats et patrons) en créant une interaction entre
eux. Mais le groupe risque de dissoudre lorsqu’il aura vaincu ses adversaires, car il n’y
aura plus d’objets au conflit.
Pour Thomas Wieder, le conflit de 1936 est un facteur d’intégration pour la classe
ouvrière car il a permis un rassemblement. Ils n’étaient plus isolé dans leur lutte, mais
souder. Ils ont trou des représentants dans les syndicats. Ils ont eu une meilleure
intégration à la vie économique, avec une fonction importante dans l’ordre social. C’est à
ce moment qu’a émergé le syndicalisme de masse, qui a permis une augmentation de la
cohésion du groupe.
On peut ainsi parler d’une véritable institutionnalisation du conflit de classe ouvrière.
Les acteurs des conflits sont reconnus comme légitime par l’Etat.
Dans son ouvrage Classes et conflits de classe dans une société individuelle (1973), Ralf
Dahrendorf distingue une triple institutionnalisation :
- des acteurs : il y a une reconnaissance des syndicats et des partis politiques.
Aujourd’hui, il y a des acteurs associés dans la négociation, dans la gestion de
certains organismes (présence dans les entreprises obligatoire) ;
- des formes d’action : certaines sont légitimes comme la manifestation, grève,
pétition,… Ces actions sont prévue par la loi,… ;
- des objets : ce sur quoi porte le conflit. Sur les salaires (conventions collectives)
avec le SMIC et la durée du travail. Il y est aussi question des conflits individuels,
mais aussi de la protection sociale et du droit syndical. On essaye de faire évoluer
les choses.
Mendras a dit « L’ordre social est fondé sur des conflits résolus ». Selon lui, il n’est pas
pathologique, mais il fonde la société.
L’institutionnalisation régule les conflits : ils sont pacifiés. Malgré cette
institutionnalisation, il peut y avoir des formes violentes, notamment avec les émeutes
de banlieues.
Il existe 2 types de conflits :
- dans les règles : dans un cadre régulé et routinisé (partis politiques) ;
- sur les règles : remettent en cause ce cadre.
Synthèse :
Pour Emile Durkheim, le conflit social est une menace pour la cohésion sociale.
Normalement, la division du travail social devrait produire de la solidarité. Mais, un
excès de division du travail peut conduire, au contraire, à un défaut d’intégration et de
régulation. Cette analyse a été prolongée par les fonctionnalistes américains comme
Talcott Parsons. Ils ont une vision organique de la société constituée d’organes qui ont
chacun une fonction. En reprenant la distinction de Durkheim entre le « normal » et le
« pathologique », ils vont considérer que le conflit est une pathologie sociale, c’est-à-dire
une maladie qui peut remettre en cause le bon fonctionnement du corps social.
Cette analyse peut être critiquée sur plusieurs points. Si le conflit social intervient de
façon régulière, il devrait être classé comme un fait social « normal » et non comme une
pathologie. Si le conflit est normal, il peut en revanche prendre des formes plus ou moins
régulées. D’autre part, les conflits qui remettent en cause la société dans son fondement
sont peu nombreux. Enfin, le conflit social peut être intégrateur.
Cette approche du conflit est celle de Georg Simmel, et a été prolongé par des auteurs
comme Lewis Coser : le conflit renforce l’identité du groupe. En effet, l’opposition avec
un autre groupe social permet de mieux définir les traits caractéristiques du groupe et
de mieux en délimiter les frontières. Le conflit renforce la cohésion et les liens sociaux
au sein du groupe comme le montre la forte syndicalisation pendant le mouvement de
1936. Le sentiment d’appartenance des membres du groupe est renforcé.
Les conflits se sont pacifiés et institutionnalisés en obéissant à des règles qui en
organisent le fonctionnement. Les acteurs des conflits ont acquis une reconnaissance
officielle, et se sont associés à la gestion de la Sécurité Sociale. Un répertoire légitime
d’actions collectives s’est imposé. Enfin, l’objet des conflits s’est également
institutionnalisé (droit du travail). Le conflit produit donc des règles, et renforce donc
l’ordre social.
C Quelle est la place du conflit dans le changement social ?
Marx pense que le conflit social est le moteur de l’histoire.
Changement social : Transformation durable de l’organisation sociale et/ou de la culture
d’une société. Exemple : la féminisation.
Conception Marxiste des classes : vision antagoniste, réaliste entre deux classes :
Bourgeois (ils ont les moyens de productions) et Prolétaires (ils travaillent pour eux). Sa
vision est fondée sur la propriété des moyens de production. Il distingue la classe en soi
(visible) et la classe pour soi (qui peut se mobiliser).
Selon l’analyse Marxiste, le conflit peut être source de changement social. Il cherche la
disparition des classes sociales, et pour cela, la dictature du prolétariat est nécessaire. Il
prend ainsi le contre-pied de Durkheim, car selon lui, dans la division du travail, la
solidarité est complémentaire.
Le conflit est un trait permanent de toutes les sociétés.
Les capitalistes ont la plus value. En même temps, il y a une baisse du profit. Mais ces
derniers vont toujours exploiter les travailleurs. Le capitalisme est donc voué à sa perte
(il creuse l’antagonisme entre les classes en paupérisant les travailleurs). Il mène à des
crises de surproduction de plus en plus fréquentes.
Le conflit permet d’obtenir un changement social.
Une amélioration des conditions de vie ouvrres est permise par les conflits du travail
au 19 et au 20 siècle, notamment avec :
- la création de l’Etat Providence ;
- un partage plus favorable de la Valeur Ajoutée ;
- des conquêtes sociales, qui sont des conséquences de conflits.
Ainsi, oui, le conflit est moteur de changement social, car il débouche sur une
amélioration des conditions de vie.
On peut aussi parler d’une institutionnalisation des conflits sociaux en France. En effet,
on est passé d’un conflit violent qui a débouché sur une Révolution Prolétaire vers des
conflits institutionnalisés et qui portent sur l’amélioration des droits. Il y a donc une
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