INTÉGRATION, CONFLIT, CHANGEMENT SOCIAL LA CONFLICTUALITÉ SOCIALE: PATHOLOGIE, FACTEUR DE COHÉSION OU MOTEUR DU CHANGEMENT SOCIAL ? Notions clés Conflit social: : Correspond à la manifestation d'un antagonisme entre des groupes sociaux aux intérêts matériels ou symboliques divergents qui veulent modifier le rapport de force en leur faveur. Mouvements sociaux: Ensemble d'actions collectives mettant en cause l'ordre social et cherchant à le transformer. Tout mouvement social a une dimension protestataire, à la différence d'une action collective. Action collective: Action intentionnelle d'un ou plusieurs groupes ayant pour fin la satisfaction d'objectifs particuliers ou généraux. Régulation de conflit : Mise en place de règles et d'institutions capables de canaliser les oppositions mais aussi de permettre leur expression et d'organiser la négociation entre les partenaires sociaux. Les organisations syndicales, et la mise en place d'une réglementation, voire une législation en sont les principaux piliers. Syndicats: Association assurant l'organisation et la défense des salariés pour la reconnaissance et le respect de leurs droits professionnels économiques et sociaux. A) Qu'est ce qu'un conflit social ? Les conflits sociaux naissent de la dépendance entre les individus ou les groupes sociaux: il ne peut y avoir de conflit dans l'isolement. Marx Weber mettait ainsi en évidence, comme source de conflits, l'impossibilité pour tous le monde d'accéder à tout en même temps ainsi que les divergences dans les manières de concevoir l'organisation sociale. > Dans la Tipologie d'Albert.O.Hirschman, Exit, Voice and loyalty (1970), pour obtenir un changement lorsqu'un désaccord se manifeste, trois solutions s'offrent à l'individu: "la sortie" (exit), qui consiste à faire jouer les mécanismes du marché, le fait de " faire entendre sa voix" (voice), ce second choix donne aux associations, groupes d'intérêts ou syndicats, la possibilité de porter les revendications d'un collectif, ou enfin l'acceptation de la norme ( loyalty): Les acteurs acceptent le système, soit par inertie ou par fidélité. Le conflit reste à l'état latent. > Mancur Olson fait apparaître le paradoxe de l'action collective: Elle peut ne pas avoir lieu même si les individus ont clairement conscience de leur intérêts et sont mécontents de leur situation. Dans une perspective individualiste, les individus se livrent à un calcul coût avantage de l'action collective. Or, les acquis sociaux de l'action collective bénéficient à tous sans que l'on ait à en payer le prix. La mobilisation a un coût, entraîne une perte de temps ou peut freiné le déroulement de la carrière. C'est pourquoi les individus vont adopter le comportement du " passager clandestin" en attendant que les autres agissent à leur place. Cependant Olson considère que des moyens peuvent être utilisés pour déclencher l'action collective: la contraire ou l'incitation collective, en réservant les bénéfices de l'action collective à ceux qui font l'action. B) Le conflit est- il une pathologie sociale ? Pour Emile Durkheim, la division du travail fonde la solidarité organique dans les sociétés modernes. Toutefois, un excès de division du travail peut conduire, au contraire, à un défaut d'intégration et de régulation. Cette idée a été prolongée par les fonctionnalistes américains comme Talcott Parsons. Ils ont une vision organique de la société constituée d'organes qui ont chacun une fonction. En reprenant la distinction de Durkheim entre le "normal" et le " pathologique", ils vont considérés que le conflit est une pathologie, cad une maladie qui peut remettre en cause le bon fonctionnement du corps social. Cette analyse peut-être critiquée sur plusieurs points. Si le conflit social intervient de façon régulière, il devrait être classé comme un fait social " normal" et non comme une pathologie. Si le conflit est normal, il peut en revanche prendre des formes plus ou moins régulées. Enfin, le conflit social peut-être intégrateur. Cette approche du conflit est celle de Georg Simmel, et a été prolongé par des auteurs comme Lewis Coser: Le conflit renforce l'identité du groupe. En effet les l'opposition avec un autre groupe social permet de mieux définir les traits caractéristiques du groupe et de mieux en délimiter les frontières. Le conflit renforce la cohésion et les liens sociaux au sein du groupe comme le montre la forte syndicalisation pendant les mouvement de 1936. Le sentiment d'appartenance est ainsi renforcé. Les conflits se sont pacifiés et institutionnalisés, en obéissant à des règles qui en organisent le fonctionnement. > Institutionnalisation des acteurs des conflits avec la création des communautés d'entreprises, la reconnaissance des institutions qui vont représentés les acteurs du conflit syndical. > Institutionnalisation des formes d'actions où un certain nombre de forme de l'action collective deviennent légales/ autorisées > Institutionnalisation des objets : les conflits du travail se font dans les règles et vont aboutir à produire de nouvelles règles: salaires, condition du travail, sécurité sociale… On rend ainsi la violence illégitime. On assiste à une régulation des conflits via cette triple institutionnalisation. Permet aussi de sortir du schéma de la lutte des classes. C) Quelle est la place du conflit dans le changement social ? Marx affirme que les classes existent bien et peuvent avoir une conscience. Elles sont fondées sur les moyens de production. Les prolétaires louent leur force de travail, les capitalistes disposent du capital. Le conflit entre les classes traversent toute l'histoire. Le capitalisme est voué à l'échec puisqu'ils subissent la baisse tendancielle des taux de profit. Il s'effondre, victime de ses contradictions. Selon la théorie du conflit élaborée par Marx, la lutte des classes est au coeur du changement social. Cependant la triple institutionnalisation permet de sortir du conflit des classes. Elle permet à la société ouvrière de participer à la société de consommation sans pour autant passer par la révolution. Dans les années 1960, Alain Touraine montre que dans les sociétés post-industrielles, les conflits sont + de nature culturelle que de nature matérielle, et voient l'émergence de "mouvements sociaux". Selon lui, un MS consiste en la combinaison de 3 principes: - Principe d'identité: les acteurs doivent se reconnaître un certain nombre d'orientation communes - Principe d'opposition: le conflit permet de désigner l'adversaire - Principe de totalité : lutte qui vise des enjeux sociétaux Les évolutions récentes montrent que certains conflits défensifs visent plus particulièrement à s'opposer à des transformations sociales jugées défavorables par certains acteurs: délocalisation, fermetures d'usines, évolutions sociétaires jugées négatives. On se mobilise davantage pour défendre les acquis. *2 exemples de conflits défensifs: - 1830: Révolte de Canus à Lyon : Les ouvriers se mobilisaient contre les changements technologiques. - Les mouvements de Nimby: Vise à garantir la sécurité entre les voisins. D) Les mutations des conflits sociaux Les mutations des conflits du travail: Sur une longue période, le nombre de journées individuelles non travaillées et le taux de syndicalisation ont baissé de manière très significative. Toutefois, en déduire que les conflits du travail sont en déclin serait excessif. En effet, entre 2002 et 2004, les établissements de + de 20 salariés touchés par des conflits ont été + nmbx qu'entre 1996 et 1998. Mais les répertoires d'actions collectives évoluent. Les grèves de deux jours et plus reculent au profit d'autres modes d'expression: débrayages ou bien conflits sans arrêt de travail, tels que les refus d'heures supplémentaires ou les pétitions. À la fin du XXè siècle, Ronald Inglehart souligne que les mouvements sociaux apparus dans les années 1960 s'appuient davantage sur des valeurs post-matérialistes. Le conflit concernerait - la répartition de richesse, salaire ou pouvoir mais plutôt la qualité de vie, la liberté d'expression ou la participation politique des citoyens. Ceci résulte du dvp qui génère altruisme et solidarité, l'égalité hommesfemmes, le respect de l'environnement.. Ils ne concernent pas seulement la classe ouvrière mais aussi les classes moyennes. Cependant, les revendications matérialistes sont loins d'avoir disparus et l'apparition des "nouveaux mouvements sociaux" (NMS) n'a pas fait disparaître les conflits du travail. Les NMS étudiés par Alain Touraine correspondent aux actions non issues du mouvement ouvrier ( mouvement des droits civiques, campagnes pacifistes, luttes féministes, combats écologiques..) Leur acteurs et enjeux, plus qualitatifs, sont très divers. Ces NMS, selon Touraine, sont caractéristiques d'une nouvelle société, la société postindustrielle, où le pouvoir appartient aux détenteurs du savoir et de l'info, cad des experts qui via des appareils de gestion et d'info ( médias, système éducatif, administrations), planifient le dvp économique et social et donc modèlent les grandes orientations de la société. On débouche sur la conclusion qu'ainsi que ces mouvements incarnent de nvx enjeux de mobilisation collective, mais qu'ils ne sont pas des MS destinés à changer l'ordre social mais davantage des groupes de pression.