Soin infirmier à médiation musicale

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Soin infirmier à médiation musicale
Création de cette activité
Cette idée d’activité musicale m’est venue lors d’un stage en hôpital de jour accueillant surtout des patients psychotiques pendant ma formation. J’avais une
MSP et voulais présenter une activité que j’aurais moi-même créé. Etant musicien et ayant constaté les effets bénéfiques de la pratique d’instruments, j’ai
proposé le projet au service qui l’a accepté. J’ai eu trois semaines pour expérimenter le projet et l’adapter, avec des résultats encourageants. Un an et demi
plus tard, j’effectuais mon stage DE dans cette même structure et repris cette activité. Entre temps ma vision de cette dernière s’était enrichie de cours et TP
sur la musicothérapie, de réflexions menées avec un collègue ayant une approche complémentaire du soin musical ainsi que de mon expérience de musicien
et d’animation. J’ai donc abordé ce projet de façon beaucoup plus globale, attractive mais aussi cohérente. Le travail nécessaire pour la présentation du projet
a mon examen m’a de plus obligé à être rigoureux dans l’application de mes idées et a pousser à fond mon raisonnement. J’ai ici eu 5 semaines pour
expérimenter avec notamment 2 patients ayant participés a l’essai précédent. La forme changea assez peu, mais c’est plus mon approche de l’activité, de ses
buts et de la dynamique interne au groupe qui s’était modifiée pour plus de souplesse, de vie et de plaisir. L’adaptation et l’improvisation sont les maîtres
mots de la position du soignant qui tout en représentant le cadre et le fil conducteur doit faire en sorte que la participation réelle et symbolique de tous soit
optimale. Le soin ici n’est envisageable que par le patient : le soignant n’est qu’un catalyseur pour une alchimie thérapeutique commune. Les résultats et le
bilan ont parus très intéressants pour l’équipe, le médecin et mon jury.
Embauché 2 mois plus tard au service St Louis (service contenant accueillant surtout des psychotiques chroniques et des caractériels), j’ai alors proposé de
réactiver cette activité en tenant compte de la spécificité de la structure et de ses impératifs, mais aussi des attentes de mes collègues et des médecins.
En définitive, je pense que la forme de cette activité semble utilisable dans nombre de structures psychiatriques pour adultes ou adolescents, mais également
aussi pour le domaine social et éducationnel. Mais le cœur même de cet atelier réside dans ce que le groupe fait avec et comment il le vit. Il importe donc
que ce soit eux qui fassent fonctionner ce que les soignants proposeront et adapteront à la dynamique commune.
Quand ?
L’activité a débuté au mois de janvier, car les possibilités du service ne permettaient pas un démarrage plus rapide. Elle a lieu une fois par semaine, sur une
durée d’une heure et demi.
Où ?
Elle a lieu dans une petite pièce claire, agréable. Cette salle est à l’écart du service et isolée dans l’établissement. Cela permet une formalisation du soin dans
un lieu précis uniquement dédié à la musique et qui permet donc une relation autre avec le soin et les soignants (en tenue civile).
Qui ?
Un effectif comportant 4 à 5 patients et 2 soignant-e-s (dont au moins 1 infirmier-e) paraît être le plus adapté à cette activité. Ce nombre varie aussi en
fonction de l’activité des personnes (activité autre, changement de service, isolement, présence de stagiaires…).
Forme :
Installation en cercle de tous les participants, soignants et patients mélangés.
Matériel : 2 postes musicaux dont 1 enregistreur ; instruments de percussions (maracas, cymbalettes, tambourins, djembé, derbouka, cloche…), 1 guitare ou
autre instrument d’accompagnement.
Déroulement :
Partie 1 :
-présentation de la séance
-choix d’un thème musical et écoute de celui ci ; choix des instruments
-jeu de percussion en accompagnement du thème
-échange d’impressions
-répétition des 2 étapes précédentes
-enregistrement du jeu en accompagnement, écoute et échange
Partie 2
-choix d’une chanson connue de tous
-changement d’instrument
-jeu ensemble de la chanson
-échange
-répétition des 2 étapes précédentes
-enregistrement, écoute et échange
-bilan de la séance, suivi de transmissions écrites précises et analysées
Intérêts et objectifs
au niveau du groupe :
-cadre précis, contenant avec 1 objectif commun à tous dans la réalité.
-prise en compte de l’Autre et de la nécessité d’être ensemble dans le jeu, le rythme et le groupe.
-étudier la dynamique de groupe, les relations internes et la place prise par chacun.
-faire à plusieurs quelque chose de l’ordre du singulier.
-susciter un plaisir commun.
au niveau individuel :
-pouvoir s’exprimer dans une communication alternative, non verbale.
-pouvoir s’adapter à un support fixe (partie 1).
-pouvoir improviser en tenant compte de l’autre (partie 2).
-s’adapter à des changements d’instruments (éviter la répétition et le figement) et de rôle (chant, percussions, …).
-amener la personne à expliquer son choix, à porter un jugement, à argumenter, à s’exprimer devant le groupe.
au niveau moteur et sensitif :
-développer la coordination, le rythme, la dextérité.
-permettre de se reconnaître (son jeu) lors de l’exercice mais aussi lors de l’écoute des bandes : développement de l’oreille musicale mais aussi de
l’individuation.
-approche tactile par les différents matériaux : bois, peau, plastique, métal, … et voir leurs rapports à ceux ci.
A noter que ces 3 catégories interagissent constamment entre elles. On pourra donc en définitive mettre en avant 3 objectifs principaux : un travail de l’ordre
de la socialisation et donc aussi du cadre, un second sur l’affirmation de soi par rapport à la réalité et un troisième du champ de la communication et de l’art.
Bilan au bout de 2 mois :
Sur les cinq patients participant à la première séance, 3 continuent à suivre l’activité, un a été exclu pour investissement aléatoire et non adapté, et une a vu
sa participation stoppée car l’indication s’est révélée inadapté ( potentialité trop limitées ).
Au niveau des soignants, j’ai été présent à la quasi-totalité des séances et un groupe de 3 soignants m’a aidé à encadrer cette activité thérapeutique.
Cette permanence d’une majorité des personnes a permis d’inscrire ceci dans la continuité et la progression. Néanmoins l’arrivée régulière de nouvelles
personnes permet de rappeler le cadre et les buts régulièrement, permet aux " anciens " d’avoir un rôle actif d’enseignement et une implication différente
mais aussi de servir d’une certaine manière d’étalon de progression et donc de valorisation des progrès.
Actuellement une réelle dynamique de groupe et d’osmose musicale est en train de se mettre en place. Le travail du rythme s’enrichi avec l’arrivée de
variations et d’une polyrythmie. On constate aussi la demande de difficulté en lien avec l’apprentissage des bases rythmique et un réel investissement dans la
démarche musicale et l’exploration artistique.
Le bilan se révèle donc actuellement comme très enrichissant pour tous les participants et est un encouragement à continuer cette activité thérapeutique sous
cette forme tout en en complexifiant les outils. Affaire à suivre…
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