4 Anneaux factoriels, principaux, euclidiens, théorème chinois

4 Anneaux factoriels,
principaux, euclidiens,
théorème chinois, modules de
torsion sur un anneau principal
Version du 23 octobre 2005
16 Anneaux factoriels
16.1 Éléments irréductibles et éléments associés
Soit Aun anneau commutatif intègre.
Définition 16.1.1 1) Un élément pAest dit irréductible s’il est non
nul, non inversible, et vérifie la propriété suivante : si p=ab, avec a, b A,
alors aou best inversible.
2) On dit que deux éléments non nuls a, a0Asont associés s’il existe
un élément inversible uA×tel que a0=ua.
3) On peut donc reformuler la définition 1) en disant que pest irréductible
ssi ses seuls diviseurs sont les éléments qui lui sont associés, et les inversibles.
Définition 16.1.2 Un idéal Ide Aest principal s’il est engendré par un
seul élément, c.-à-d., si I= (a), pour un certain aA. Un tel an’est pas
unique en général ; en effet, on a le lemme suivant.
Lemme 16.1.3 Soient a, b A\ {0}. Alors aet bsont associés ils en-
gendrent le même idéal.
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102 Algèbre et théorie de Galois 2005-2006
Démonstration. est clair. Réciproquement, si (a) = (b), il existe α, β
Atels que b=αa et a=βb. Alors, b=αβa et comme Aest intègre il vient
αβ = 1. Donc αet βsont inversibles. Ceci prouve le lemme. ¤
Définition 16.1.4 Soient a, b A. On dit que aet bsont premiers entre
eux ou sans facteur commun, si tout diviseur commun à aet best un
élément inversible. Ceci équivaut à dire que Aest le seul idéal principal
contenant aet b.
Lemme 16.1.5 Soit pAirréductible et aA\{0}. Si a6∈ (p)alors aet
psont sans facteur commun.
Démonstration. Soit bun élément non inversible divisant aet p. Alors, b
est associé à pet il en résulte que pdivise a. Ceci prouve le lemme. ¤
Notation On écrira a|b(resp., a-b) pour signifier que adivise (resp., ne
divise pas) b.
16.2 Anneaux factoriels, lemmes d’Euclide et Gauss
Définition 16.2.1 Soit Aun anneau commutatif. On dit que Aest facto-
riel s’il est intègre et vérifie les deux conditions suivantes : existence (E)
et unicité (U) de la décomposition en facteurs irréductibles, c.-à-d.,
(E) Tout aA\ {0}, non inversible, s’écrit
a=p1···pr,
r1et les pisont des éléments irréductibles de A;
(U) La décomposition précédente est unique au sens suivant : si l’on a
deux décompositions
a=p1···pr=q1···qs,
où les piet les qjsont irréductibles, alors s=ret il existe une permutation
σSrtelle que piet qσ(i)soient associés, pour tout i= 1, . . . , r. C.-à-d., de
façon plus concise, la décomposition est unique à l’ordre des termes et aux
inversibles près.
On rappelle que (E) est satisfaite si Aest noethérien (Proposition 2.6.4).
Mais il y a aussi des exemples d’anneaux factoriels qui ne sont pas noethé-
riens, c.-à-d., la décomposition en facteurs irréductibles peut exister sans que
Asoit nécessairement noethérien.
Patrick Polo 103
Proposition 16.2.2 Soit Aun anneau commutatif intègre vérifiant (E). Les
propriétés suivantes sont équivalentes.
1) Avérifie (U).
2) Pour tout élément irréductible pA, l’idéal (p)est premier.
3) Avérifie le Lemme d’Euclide, c.-à-d., si pAest irréductible et divise
un produit ab 6= 0, il divise aou b.
4) Avérifie le Lemme de Gauss, c.-à-d., pour tout a, b, c A\ {0}, si a
divise bc et si a, b sont sans facteur commun, alors adivise c.
Démonstration. Il est clair que 2) et 3) sont équivalents. L’implication 4)
3) est facile. En effet, soit pirréductible divisant un produit ab 6= 0. Si
p-aalors, d’après le lemme précédent, aet psont sans facteur commun, et
l’hypothèse 4) donne alors que pdivise b.
Montrons que 2) (U). Plus précisément, montrons que si l’on a une
égalité
()p1···pm=uq1···qn,
uest inversible et les piet qjsont irréductibles, alors m=net il existe
une permutation σSntelle que piet qσ(i)soient associés, pour i= 1, . . . , n.
On peut supposer mn.
Si m= 0, le terme de gauche vaut 1et ceci entraîne n= 0, car sinon
q1serait inversible, ce qui n’est pas le cas pour un élément irréductible.
Supposons m > 0et le résultat établi pour m1.
Il résulte de ()que l’on a
q1···qn= 0
dans l’anneau A/(p1); comme ce dernier est intègre, par hypothèse, on ob-
tient que p1divise l’un des qi, donc lui est associé (puisque qiest irréduc-
tible). Donc, quitte à changer la numérotation des qj, on peut supposer que
p1=vq1, avec vinversible. Alors, comme Aest intègre, on déduit de ()
l’égalité
p2···pm=uvq2···qn,
et le résultat cherché découle alors de l’hypothèse de récurrence. Ceci prouve
que 2) (U).
Montrons maintenant que 1) 4). Supposons Afactoriel et soient
a, b, c, d A\ {0}tels que ad =bc, avec aet bsans facteur commun.
Montrons que adivise c. On a des égalités
a=αp1···pn, d =δp0
1···p0
r,
b=βq1···qs, c =γq0
1···q0
t,
104 Algèbre et théorie de Galois 2005-2006
avec α, β, γ, δ inversibles, n, r, s, t 0, et les pi, p0
j, qket q0
`irréductibles. On
a donc une égalité
(∗∗)up1···pn·p0
1···p0
r=q1···qs·q0
1···q0
t,
avec uinversible. Montrons, par récurrence sur n, que ceci entraîne que a|c.
Si n= 0, alors aest inversible et l’assertion est claire. Supposons n1et
le résultat établi pour n1.
Comme aet bsont sans facteur commun, p1ne peut être conjugué à l’un
des qj; l’hypothèse (U) entraîne donc que p1est associé à un q0
k. Quitte à
renuméroter les q0
k, on peut supposer que p1=vq0
1, avec vinversible. Alors,
comme Aest intègre, on déduit de (∗∗)l’égalité
uvp2···pn·p0
1···p0
r=q1···qs·q0
2···q0
t,
et le résultat cherché découle alors de l’hypothèse de récurrence. Ceci prouve
que si Avérifie (E) et (U), il vérifie 4). Ceci achève la démonstration de la
proposition. ¤
Remarque 16.2.3 a) En procédant comme ci-dessus, on peut démontrer
directement l’implication : Afactoriel 3).
b) Ce qu’on appelle Lemme d’Euclide, resp. de Gauss, est l’assertion que
si Aest factoriel, il vérifie la condition 3), resp. 4). Pour mémoire, énonçons
ci-dessous ces deux lemmes sous leur forme usuelle.
Proposition 16.2.4 Supposons Afactoriel et soient a, b, c A\ {0}tels
que adivise bc.
(Lemme d’Euclide) Si aest irréductible, il divise bou c.
(Lemme de Gauss) Si aest sans facteur commun avec b, il divise c.
Remarque 16.2.5 Le Lemme de Gauss est équivalent à l’assertion ()
ci-dessous :
()Si aet bsont sans facteur commun et divisent x, alors ab
divise x.
En effet, soient a, b Asans facteur commun. Supposons que Avérifie le
Lemme de Gauss et que a, b divisent x. Alors xégale bc et est divisible par
a. Comme aet bsont premiers entre eux, adivise c, donc c=ad et x=bad
est divisible par ab.
Réciproquement, supposons ()vérifiée et x=bc divisible par a. Alors
xest divisible par ab, d’où x=abd, et comme Aest intègre il vient c=ad,
donc adivise c.
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Corollaire 16.2.6 Supposons Afactoriel, soient a1, . . . , anA, deux à
deux sans facteur commun, et soit bun multiple commun aux ai. Alors best
divisible par a1···an.
Démonstration. On procède par récurrence sur n. Si n= 2, c’est la pro-
priété (). Supposons n3et le résultat établi pour n1. Par hypothèse
de récurrence, il existe cAtel que
b=a2···anc.
Alors, par application répétée du Lemme de Gauss, on obtient que a1divise
c. Ceci prouve le corollaire. ¤
16.3 PPCM et PGCD dans un anneau factoriel
Remarque 16.3.1 Soit Aun anneau commutatif et soient a1, . . . , anA.
L’ensemble des multiples communs aux aiest égal à l’idéal
(a1)∩ ··· ∩ (an).
D’autre part, un élément dde Adivise tous les aisi, et seulement si, (d)
contient l’idéal (a1, . . . , an)engendré par les ai.
Définition et proposition 16.3.2 Soit Afactoriel et soient a1, . . . , an
A\ {0}.
1) L’idéal I:= (a1)∩ ··· ∩ (an)est principal. Soit Mun générateur de
cet idéal (Mest unique à multiplication par un inversible près, c.-à-d., tout
autre générateur de Iest associé à M); alors Mest un multiple commun
aux ai, qui divise tout multiple commun des ai. On dit que Mest un PPCM
(plus petit commun multiple) des ai. Par abus de notation, on écrira M=
ppcm(a1, . . . , an).
2) L’ensemble des idéaux principaux contenant (a1, . . . , an)possède un
unique élément minimal J. Tout générateur dde Jest un diviseur commun
aux ai, et si fest un autre diviseur commun aux ai, alors (f)contient J= (d)
et donc fdivise d. Donc, dest un diviseur commun aux ai, qui est divisible
par tout diviseur commun des ai. Par conséquent, tout élément associé à d
est un PGCD (plus grand commun diviseur) des ai. Par abus de notation,
on écrira d=pgcd(a1, . . . , an).
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