Développement: Théorème des deux carrés
Adrien Fontaine
8 avril 2013
Référence : Daniel Perrin, Cours d’algèbre p56
1 Introduction
Le problème est de déterminer quels entiers nNsont somme de deux carrés : n=a2+b2
avec a, b N. On pose :
Σ = {nN, n =a2+b2, a, b N}
Remarquons tout d’abord que si n3[4], on a n /Σ. En effet, si aest pair, alors a20[4] et si
aest impair, a21[4], donc a2+b20,1,2[4].
L’idée que nous allons utiliser pour étudier Σest de noter que si nΣ,n=a2+b2,ns’écrit dans
Cn= (a+ib)(aib), et que cette relation a lieu en fait, dans l’anneau Z[i]des entiers de Gauss :
Z[i] = {a+ib C, a, b Z}
En particulier, si pNest un nombre premier, qui est somme de deux carrés, pn’est plus
irréductible dans Z[i]. C’est le cas par exemple de
5 = (2 + i)(2 i)
2 Étude de l’anneau Z[i]
Tout d’abord Z[i]est un anneau intègre, puisqu’il est inclus dans C. Définissons une "norme"
sur Z[i]par :
z=a+ib Z[i], N(z) = z¯z=a2+b2N
Il est clair que la norme Nest multiplicative. Cette propriété permet de calculer les inversibles de
Z[i]:
Proposition 1
On a Z[i]×=1,±i}
Démonstration : En effet, si zZ[i]×, il existe z0Z[i]×tel que zz0= 1. D’où, 1 = N(1) =
N(zz0) = N(z)N(z0). Donc, N(z)est inversible dans Zet positif, donc N(z)=1. Il ne reste plus
qu’à résoudre dans Z2, l’équation a2+b2= 1. On trouve que les seules solutions sont (±1,0) et
(0,±i). Donc,
Z[i]×=1,±i}
Cette propriété permet également d’établir un résultat, qui, à la main, peut s’avérer particulière-
ment fastidieux à démontrer :
1
2 ÉTUDE DE L’ANNEAU Z[I]2
Proposition 2
L’ensemble Σdes entiers somme de deux carrés est stable par multiplication.
Démonstration : En effet, si a2+b2et c2+d2Σ. Posons z1=a+ib et z2=c+id Z[i].Ona:
N(z1z2) = N((ac bd) + i(ad +bc)) = (ac bd)2+ (ad +bc)2
Et
N(z1z2) = N(z1)N(z2)=(a2+b2)(c2+d2)
On en déduit l’identité dite de Lagrange :
(a2+b2)(c2+d2)=(ac bd)2+ (ad +bc)2
Cette propriété permet de ramener essentiellement l’étude de Σà la détermination des nombres
premiers pde Nqui sont dans Σ(grâce à la décomposition d’un entier en produit de facteurs
premiers). Pour cela, il nous faut étudier la structure arithmétique de Z[i]. On a la proposition
suivante :
Proposition 3
L’anneau Z[i]est euclidien, avec pour stathme la "norme" N. En particulier, Z[i]est principal.
Démonstration : Soient z1, z2Z[i]non nuls. On commence par faire la division de z1par z2dans
le corps C. Si on écrit z1=a+ib et z2=c+id, alors a, b, c, d étant dans Z, on peut écrire
z1
z2
=P+iQ P, Q Q
(plus précisément, on a P=ac+bd
c2+d2et Q=bcad
c2+d2). Par ailleurs, il existe x, y Zet α, β Qtels
que
P=x+αet Q=y+βavec |α| ≤ 1
2et |β| ≤ 1
2
Donc, on a : z1
z2
= (x+iy)+(α+)
D’où,
z1=z2(x+iy)+(α+)z2=z2q+rq=x+iy et r= (α+)z2
Par ailleurs, comme z2,z2et x+iy sont dans Z[i], on a (Z[i]étant bien sûr un anneau) rZ[i].
Enfin, on a :
N(q) = N((α+)z2)=(α2+β2)N(z2)(1
4+1
4)N(z2)< N(z2)
Donc, Nest bien un stathme pour Z[i].
On est maintenant en mesure de prouver le théorème principal de ce paragraphe. On a :
Théorème 1
Soit pNun nombre premier. On a l’équivalence :
pΣp= 2oup 1[4]
Démonstration : La condition est bien sûr nécessaire, car un nombre premier impair est congru
soit à 1 soit à 3 modulo 4, et on a vu que si p3[4] alors p /Σ.
Pour la réciproque, on établit d’abord le lemme suivant :
2 ÉTUDE DE L’ANNEAU Z[I]3
Lemme 1
On a :
pΣpn’est pas irréductible dans Z[i]
Démonstration : Pour le sens direct, il suffit d’écrire p=a2+b2= (a+ib)(aib)et de
remarquer que aet bsont non nuls, de sorte que ni a+ib, ni aib ne sont dans Z[i]×.
Donc, pn’est pas irréductible. Pour le sens indirect : si p=zz0avec z, z06=±1,±i. On a
N(p) = N(z)N(z0) = p2. De plus, N(z)et N(z0)6= 1, on a donc N(z) = p. Donc, pΣ.
Poursuivons maintenant la preuve du théorème. Comme Z[i]est principal, dire pest non irré-
ductible, revient exactement à dire que l’idéal principal (p) = pZ[i]est non premier, donc que le
quotient Z[i]/(p)est non intègre. Par ailleurs, on dispose de l’isomorphisme,
Z[i]'Z[X]/(X2+ 1)
Donc,
Z[i]/(p)'Z[X]/(X2+ 1, p)'[Z[X]/(p)] /(X2+ 1) 'Fp[X]/(X2+ 1)
On a donc les équivalences suivantes :
(p)non premier X2+ 1 non irréductible dans Fp[X]X2+ 1 a une racine dans Fp
Grâce au lemme ci-dessus, on en déduit :
pΣ⇔ −1est un carré dans Fp
Il reste à montrer que 1est un carré dans Fp, si et seulement si, p= 2 ou p'1[4].
Or, p1[4] revient à dire que le cardinal de (F×
p)2, i.e p1
2est pair. Or, un groupe d’ordre pair,
contient des éléments d’ordre 2 (théorème de Sylow par exemple, ou voir le lemme en annexe).
Un tel élément est un xtel que x2= 1 et x6= 1, c’est donc nécessairement -1. On a donc bien
p1[4] ⇔ −1(F×
p)2.
Ce qui achève la démonstration.
On peut maintenant achever l’étude de Σ.
Théorème 2
Soit n2. On décompose nen facteurs premiers :
n=Y
pP
pvp(n)
Alors, on a nΣvp(n)est pair pour p3[4].
Démonstration : Le sens indirect est clair, d’après la stabilité par multiplication de Σet le théorème
que l’on vient de démontrer.
Pour le sens direct, on suppose que nΣ. Soit p3[4]. On montre par récurrence sur vp(n)que
vp(n)est pair. Si vp(n)=0, c’est clair. Sinon, p|(a2+b2)=(a+ib)(aib), mais comme pest
irréductible dans Z[i],pdivise par exemple a+ib (lemme d’Euclide). Mais alors, comme pest
entier, on a p|aet p|b. Donc p2|n, et si on écrit a=pa0et b=pb0, on a n
p2=a02+b02Σ. Mais,
vp(n
p2) = vp(n)2est pair,d’après l’hypothèse de récurrence donc aussi vp(n).
3 ANNEXE 4
3 Annexe
Montrons qu’un groupe d’ordre pair contient des éléments d’ordre 2.
Soit Gun groupe d’ordre pair. Soit X={gG, g2= 1}.Xest non vide car il contient 1. De
plus, les éléments de G\Xpeuvent être rangés par pair {g, g1}. On a donc, |G|≡|X|[2]. En
pariculier, |x| ≥ 2. Donc, Gcontient des éléments d’ordre 2.
1 / 4 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !