ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Chapitre 23 : Espaces vectoriels de dimension finie. 1 Bases et dimension Définition 1.0.1 Un espace vectoriel E est dit de dimension finie si il possède une famille génératrice finie. Dans le cas contraire on dit que E est de dimension infinie. Exemple. On a vu que c’était le cas de Kn , de Kn [X] et de Mn,p (K). Théorème 1.0.1 (Existence de Bases pour les espaces de type fini ) Soit L = (e1 , . . . , ek ) une famille libre de E et f1 , . . . , fn ∈ E tels que G = (e1 , . . . , ek , f1 , . . . , fn ) engendre E. Alors il existe une famille B de vecteurs de E vérifiant L ⊂ B ⊂ G et tel que B est une base de E. Démonstration : Parmi les familles libres incluses dans G contenant L, il en existe une de cardinal maximum que l’on note B. On a B = (e1 , . . . , ek , fi1 , . . . , fip ). Montrons que B est génératrice. Soit j ∈ [[ 1 ; n ]]. Alors soit fj ∈ B auquel cas il est combinaison linéaire d’éléments de B, soit fj ∈ / B. Dans ce cas, par définition (e1 , . . . , ek , fi1 , . . . , fip , fj ) est liée : il existe λ1 . . . λk+p+1 ∈ K non tous nuls tel que λ1 e1 + · · · + λk ek + λk+1 fi1 + · · · + λk+p fip + λk+p+1 fj = 0 Comme B est libre, on a nécessairement λk+p+1 6= 0 (sinon on a une combinaison linéaire nulle d’éléments de B). Donc fj = − 1 (λ1 e1 + · · · + λk ek + λk+1 fi1 + · · · + λk+p fip ) λk+p+1 et fj est combinaison linéaire d’éléments de B. Ainsi on a G ⊂ Vect (B) et par définition E = Vect G ⊂ Vect B. Donc B est génératrice, c’est une base. Théorème 1.0.2 Tout espace de dimension finie admet une base. Démonstration : En appliquant ce résultat à L = ∅, et à G la famille génératrice finie. La proposition suivante va nous permettre de définir la dimension d’un espace de dimension finie. Proposition 1.0.1 Soit (e1 , . . . , en ) et (f1 , . . . , fn+1 ) deux familles de vecteurs de E tel que ∀j ∈ [[ 1 ; n + 1 ]] , fj ∈ Vect (e1 , . . . , en ) Alors la famille (f1 , . . . , fn+1 ) est liée. J. Gärtner. 1 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Démonstration : On montre ce résultat par récurrence sur n. – Initialisation : Si f1 et f2 sont combinaison linéaire de e1 alors f1 = λe1 et f2 = µe1 . Si λ = µ = 0 alors f1 = f2 = 0 et (f1 , f2 ) est liée. Sinon on a µf1 −λf2 = λµ(e1 −e1 ) = 0 et (f1 , f2 ) est liée. – Hérédité. Soit n ∈ N, n > 2. Supposons le résultat vrai pour n − 1. Soit (e1 , . . . , en ) et (f1 , . . . , fn+1 ) deux familles de vecteurs de E tel que ∀i ∈ [[ 1 ; n + 1 ] , fi ∈ Vect (e1 , . . . , en ). Il existe donc des scalaires (ai,j )i∈[[ 1 ; n+1 ]], j∈[[ 1 ; n ]] tels que f1 = a1,1 e1 + · · · + a1,n en .. . = ... fn+1 = an+1,1 e1 + · · · + an+1,n en Si tous les ai,n sont nuls, alors f1 , . . . , fn s’expriment en fonction des e1 , . . . , en−1 donc par hypothèse de récurrence, (f1 , . . . , fn ) est liée et (f1 , . . . , fn+1 ) aussi. Sinon, quitte à changer l’ordre des vecteurs, on a par exemple an+1,n 6= 0. Dans ce cas ai,n fn+1 (on applique l’algorithme du on pose pour tout i ∈ [[ 1 ; n ]] gi = fi − an+1,n Pivot...) Par construction, g1 , . . . , gn sont combinaison linéaire des e1 , . . . , en−1 donc par hypothèse de récurrence, i existe λ1 , . . . , λn non tous nuls tels que λ1 g1 +· · ·+λn gn = 0. C’est-à-dire n X ai,n λi fi − fn+1 = 0 an+1,n i=1 on a donc une combinaison linéaire nulle à coefficients non tous nuls. Pn ai,n fn+1 = 0 λ1 f1 + · · · + λn fn − i=1 an+1,n et (f1 , . . . , fn+1 ) est liée. Remarque. Quitte à ajouter des 0, on a donc aussi que si (f1 , . . . , fn ) sont combinaison linéaire des e1 , . . . , ep avec p < n, alors ils sont liés. Théorème 1.0.3 Toutes les bases d’un espace de dimension finie ont même nombre de vecteur. Ce nombre est appelé dimension de E. On note dim E. Démonstration : Si (e1 , . . . en ) et (f1 , . . . , fp ) sont deux bases de E, alors tous les fi sont combinaison linéaires des ei . Comme la famille (f1 , . . . , fp ) est libre, la proposition ci-dessus montre que p 6 n. En renversant les rôles, n 6 p et p = n. Exemple. 1. ∅ est la seule base de {0}. E est de dimension 0 si et seulement si E = {0}. 2. En comptant les éléments des bases canoniques, on a ∼ Kn = n, dim Kn [X] = n + 1 et dim Mn,p (K) = np. Remarque. Attention aux corps de base ! C est de dimension 1 sur C, mais de dimension 2 sur R. Proposition 1.0.2 Si E est de dimension n et F est de dimension p, alors E × F est de dimension n + p. Démonstration : En effet, si (e1 , . . . , en ) est une base de E et (f1 , . . . , fp ) une base de F , alors E × F a pour base ((e1 , 0), . . . , (en , 0), (0, f1 ), . . . , (0, fp )). J. Gärtner. 2 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Théorème 1.0.4 (Extraction de Base) Si E est de dimension finie, alors de toute famille génératrice de E on peut extraire une base. Démonstration : C’est le tout premier théorème de ce chapitre, appliqué à L = ∅. Ainsi : Proposition 1.0.3 Si E est de dimension finie n > 1 alors 1. toute les familles génératrices finies de E ont plus de n vecteurs. 2. une famille génératrice de n vecteurs est une base de E. 3. Aucune famille de n − 1 vecteurs n’est génératrice. Théorème 1.0.5 (Base incomplète) Si E est de dimension finie n. Soit (e1 , . . . , ek ) une famille libre de E. Alors il existe des vecteurs ek+1 , . . . , en (que l’on peut prendre dans une famille génératrice quelconque) tels que (e1 , . . . , en ) soit une base de E. Démonstration : Soit L = (e1 , . . . , ek ) et (f1 , . . . , fp ) une famille génératrice. Alors on applique le premier théorème à G = (e1 , . . . , ek , f1 , . . . , fp ). Proposition 1.0.4 Si E est de dimension finie n > 1 alors 1. toute les familles libres de E ont moins de n vecteurs. 2. une famille libre de n vecteurs est une base de E. 3. Aucune famille de n + 1 vecteurs n’est libre. Exemple. Pour montrer dans un espace de dimension finie dont on connait la dimension qu’une famille est une base, il suffit de montrer qu’elle est libre et qu’elle a le bon nombre de vecteurs. (On peut aussi montrer qu’elle est génératrice et qu’elle a le bon nombre de vecteurs, mais il est souvent plus facile de montrer qu’une famille est libre). Par exemple dans C2 [X] la famille (X 2 + X + 1, X + 3, 2) est libre et comporte 3 vecteurs. Comme dim C2 [X] = 3 on a bien une base. 2 Sous-espaces en dimension finie, rang 2.1 Sous-espaces Théorème 2.1.1 Tout sous-espace F d’un espace de dimension finie E est de dimension finie. Démonstration : Soit F un sous espace d’un espace de dimension n. Les familles libres de F sont des familles libres de E elles ont donc au plus n éléments. Soit B une famille libre de F de cardinal maximal. Alors en raisonnant comme au tout premier théorème de ce chapitre, on montre que B est génératrice, donc une base. On a donc une famille génératrice finie pour F qui est de dimension finie. J. Gärtner. 3 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Théorème 2.1.2 Soit E un espace vectoriel de dimension finie. Si F et G sont deux sous-espaces de E, avec F ⊂ G, alors dim F 6 dim G avec égalité si et seulement si F = G. Démonstration : Soit B une base de F . C’est une famille libre de F donc de G. Ainsi dim F 6 dim G. Si dim F = dim G alors B est une famille libre de G de cardinal égal à dim G donc c’est une base et F = G. Si F = G il est clair que dim F = dim G... 2.2 Rang d’une famille de vecteurs Définition 2.2.1 Soit (e1 , . . . , en ) une famille de vecteurs. On appelle rang de cette famille, et on note rg (e1 , . . . , en ) la dimension de V ect(e1 , . . . , en ). Proposition 2.2.1 Soit E un espace de dimension finie n > 1. Soit F = (u1 , . . . , up ) une famille finie de p vecteurs de E. Soit r = rg (F). Alors 1. r 6 n 2. r 6 p 3. r = n ⇔ F est génératrice de E 4. r = p ⇔ F est libre. 5. r = n = p ⇔ F est une base. 6. Si λp 6= 0, r = rg (u1 , . . . , up−1 , Pp i=1 λi ui ). Démonstration : Soit F = Vect (F ). Alors rg (F ) = dim F = r. Alors F est un sev donc dim F 6 dim E. F est une famille génératrice de F donc le cardinal de cette famille p est au moins égal à la dimension r de F . De plus r = n ssi dim F = dim E donc ssi F = E et F engendre E. Si r = p alors puisque la famille F est génératrice de F , c’est une base donc est libre. Réciproquement si cette famille est libre, c’est une base car elle est génératrice. Donc dim F = p. Les autres points sont immédiats. Définition 2.2.2 (Matrice d’une famille de vecteurs) Soit E un espace de dimension n, de base B. Soit f1 , . . . , fp des vecteurs de E. Notons (a1,j . . . , an,j ) les coordonnées de fj dans la base B. Alors la matrice de la famille (f1 , . . . , fp ) relativement à la base B est a1,1 . . . a1,p .. ∈ M (K) Mat B (f1 , . . . , fn ) = A = (ai,j ) = ... n,p . an,1 . . . an,p Exemple. Dans R3 [X], soit P1 = (X − 1)2 , P2 = (X − 2)2 et P3 = X − 3. Alors la matrice de (P1 , P2 , P3 ) dans la base canonique est 1 −8 −3 −2 12 1 1 −6 0 0 1 0 J. Gärtner. 4 ECS3 Carnot 2.3 Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Rang d’une matrice Définition 2.3.1 Soit A ∈ Mn,p (K). On appelle rang de A le rang de la famille de ses vecteurs colonne dans Mn,1 (K) et on note rg (A). Exemple. rg 1 2 0 = 2. 0 2 0 Comme le rang de A ∈ Mn,p (K) est le rang d’une famille de p vecteurs d’un espace de dimension n, on a Proposition 2.3.1 Si A ∈ Mn,p (K) alors rg (A) 6 inf(n, p). Proposition 2.3.2 Soit E un espace de dimension n muni d’une base B et f1 , . . . , fp des vecteurs de E. Soit A la matrice de ces vecteurs dans la base B. Alors rg (f1 , . . . , fp ) = rg (A). Démonstration : On utilise l’isomorphisme ϕ entre E et Mn,1 (K) qui a un vecteur associe la colonne de ses coordonnées dans la base B. On a donc un isomorphisme entre Vect (f1 , . . . , fp ) et Vect (ϕ(f1 ), . . . , ϕ(fp )). Ce qui donne l’égalité des rangs. Calcul du rang : Pour calculer le rang d’une matrice A (donc aussi d’une famille de vecteur) on peut entre autres appliquer l’algorithme du pivot de Gauss à A. On arrive après opérations élémentaires sur les lignes (et éventuellement sur les colonnes) à une matrice du type a1,1 a1,2 a1,3 . . . . . . a1,p a2,2 a2,3 . . . . . . a2,p .. .. . . ar,r . . . ar,p 0 .. . 0 cette matrice est alors facile à trouver en pratique. Par exemple la matrice Le rang de 1 2 3 4 0 0 2 2 0 0 1 2 a clairement pour rang 3 : les deux premières colonnes sont liées et indé0 0 0 0 pendentes des deux dernières. De plus C3 et C4 ne sont pas colinéaires. En général, le rang sera k où k est le nombre de lignes telles que aj,j = 0 avec j ∈ [[ 1 ; r ]]. Exercice. Sur la matrice ci-dessus, utiliser la méthode du Pivot de Gauss pour calculer le rang. La justification de cette méthode passe par la Proposition 2.3.3 Soit A une matrice et B une matrice obtenue à partir de A par opérations élémentaires J. Gärtner. 5 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 sur les lignes ou les colonnes. Alors A et B ont même rang. Démonstration : Cas des colonnes : on effectue des combinaisons linéaires qui ne changent pas la dimension de l’espace engendré. t Cas des lignes : c’est une conséquence du fait que rg A = rg A. On obtient une nouvelle justification de l’algorithme qui permet de déterminer si une matrice est inversible : il suffit de vérifier que son rang est égal à sa taille. En particulier Proposition 2.3.4 Si A ∈ Mn,p (K) est de la forme A= a ∗ 0 B avec B ∈ Mn−1,p−1 (K) et a 6= 0, alors rg A = rg B + 1. Si A est triangulaire, elle est inversible si et seulement si tous ses coefficients diagonaux sont non nuls. Démonstration : La première assertion en claire en regardant l’espace engendré par les lignes. La seconde se montre par récurrence. 1 −2 3 0 6 −1 4 −2 −1 −5 . Exercice. Calculer le rang de A = 1 2 5 0 7 2 −10 3 3 9 2.4 Dimension de l’ensemble des solutions d’un système linéaire homogène Interprétation en terme de famille de vecteurs Imaginons que l’on veuille résoudre un système AX = B. Alors si C1 , . . . , Cp sont les colonnes de A, on cherche à écrire B comme combinaison linéaire des Cj . Les coefficients de cette combinaison sont donnés par X. Le système admet donc une solution si et seulement si B ∈ Vect (C1 , . . . , Cp ). Si cette famille est libre, il y a au plus une solution. Si cette famille est une base (donc A inversible) il existe une unique solution qui correspond aux coordonnées de B dans cette base. Ceci justifie à postériori la discussion sur le nombre de variables indépendantes dans la détermination des solutions d’un système linéaire après méthode du Pivot. 3 Somme de sous-espaces 3.1 Somme de deux sous-espaces Définition 3.1.1 Soit (E, +, ·) une espace vectoriel, F et G deux sous-espaces. Alors on note F + G = {u + v, u ∈ F, v ∈ G} La proposition suivante n’est pas au programme mais aide à la visualisation. J. Gärtner. 6 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Proposition 3.1.1 F +G est un sous-espace de E qui contient F et G. C’est même le plus petit sous-espace de E contenant F et G. Ainsi F + G = Vect (F ∪ G). Démonstration : Sous espace : il contient 0 = 0 + 0 et si u, u′ ∈ F , v, v ′ ∈ G, λ ∈ K, alors u + v + λ(u′ + v ′ ) = (u + λu′ ) + (v + λv ′ ) ∈ F + G car F et G sont des sous-espaces. Contient F et G car u + 0 ∈ F + G et 0 + v ∈ F + G. Enfin, si H est un sous espace contenant F ∪ G, alors si u ∈ F et v ∈ G on a u + v ∈ H, donc F + G ⊂ H. Exemple. DESSIN dans R2 ne pas confondre + et ∪. Si F et G sont deux droites vectorielles distinctes, F + G = R2 . Exercice. Dans F(R, R). Soit F l’ensemble des fonctions polynomiales de degré au plus 2 et G l’ensemble des fonctions de classe C 2 sur R, négligeables devant x 7→ x2 au voisinage de 0. Montrer que F + G = C 2 (R, R). 3.2 Somme directe de deux sous-espaces Définition 3.2.1 Soit F et G deux sous espaces de E. On dit que la somme de F et de G est directe, et on note F ⊕ G lorsque ∀w ∈ F + G, ∃! (u, v) ∈ F × G, w = u + v autrement dit les éléments de F + G s’écrivent de façon unique sous la forme uv avec u ∈ F et v ∈ G. Proposition 3.2.1 Les assertions suivantes sont équivalentes. 1. F et G sont en somme directe. 2. ∀u, u′ ∈ F, ∀v, v ′ ∈ G, (u + v = u′ + v ′ ⇒ u = u′ et v = v ′ ). 3. ∀(u, v) ∈ F × G, u + v = 0 ⇒ u = v = 0 4. F ∩ G = {0} Démonstration : 1 ⇒ 2 est la définition. 2 ⇒ 3 est le cas particulier ou u′ = v ′ = 0. 3 ⇒ 4 : {0} ⊂ F ∩ G car F et G sont deux sous espaces. Si u ∈ F ∩ G on écrit u − u = 0 avec u ∈ F et −u ∈ G donc u = 0 d’après 3. Donc F ∩ G = {0}. 4 ⇒ 1 : si w ∈ F + G s’écrit u + v et u′ + v ′ avec uu′ ∈ F et v, v ′ ∈ G alors u − u′ = v ′ − v ∈ F ∩ G = {0} donc u = u′ et v = v ′ . Exemple. Dans R4 considérons F = {(x, y, z, z, ), x, y, z ∈ R} et G = {(x, y, y, z), x, y, z ∈ R}. Ce sont bien des sous espaces. On a F + G = R4 car si (a, b, c, d) ∈ R4 on peut écrire (a, b, c, d) = (a, b, c, c)+(0, 0, 0, d−c). Par contre la somme n’est pas directe car par exemple (0, 1, 1, 1) ∈ F ∩ G. Définition 3.2.2 Soit F, G deux sous espaces. Ont dit que F et G sont supplémentaires dans E lorsque F ⊕ G = E (i.e. la somme F + G vaut tout l’espace et est directe). J. Gärtner. 7 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Exemple. DESSIN dans R2 . Exemple. Dans R3 soit F le sous espace défini par l’équation 2x − 4y + 3z = 0 et G = Vect (1, 0, −1). Alors F et G sont supplémentaires. On procède par analyse/synthèse : Si u = (x, y, z) ∈ R3 s’écrit v + w avec v ∈ F et w ∈ G. Alors w = (λ, 0, −λ) pour λ ∈ R et v = (x − λ, y, z + λ). Comme v ∈ F on a nécessairement 2x − 2λ − 4y + 3z + 3λ = 0. Donc λ = −2x + 4y − 3z. Donc si v et w existent on a nécessairement v = (x, y, z) − (−2x + 4y − 3z)(1, 0, −1) = (3x − 4y + 3z, y, 2x − 4y + 4z) w = (−2x + 4y − 3z)(1, 0, −1) = (−2x + 4y − 3z, 0, 2x − 4y + 3z) Réciproquement ces éléments conviennent. On a donc décomposé tout élément de R3 de manière unique sur F et G. Exemple. Dans F(R, R) l’ensemble I des fonctions impaires et l’ensemble P des fonctions paires sont supplémentaires. En effet, si f ∈ I ∩ P alors f (−x) = f (x) = −f (x) donc f est nulle : I et P sont en somme directe. f (x) + f (−x) f (x) − f (−x) + qui donne De plus si f ∈ F(R, R), on peut écrire f (x) = 2 2 une décomposition suivant P et I. Finalement on a bien I ⊕ P = F(R, R). 3.3 Cas de la dimension finie Théorème 3.3.1 Soit E un espace vectoriel de dimension finie n. Soit F un sous espace de E. Alors F admet un supplémentaire dans E. Démonstration : Si F = {0} on choisit E et si F = E on choisit {0}. Sinon : F est de dimension finie p 6 n − 1 donc il existe une base BF = (e1 , . . . , ep ) de F . C’est une famille libre de E que l’on complète en une base B = (e1 , . . . , en ). Posons G = Vect (ep+1 , . . . , en ). Alors Pn B est une base, on a clairement E = FP+p G puisque Pn tout x ∈ E s’écrit Pp comme λ e + λ e . De plus si x ∈ F ∩ G alors x = λ e = i i i i i i 1 p+1 1 p+1 λi ei donc λ1 e1 + · · · + λp ep − λp+1 ep+1 − · · · − λn en = 0. Par unicité de l’écriture dans une base, tous les λi sont nuls et x = 0. Dans la preuve du théorème ci-dessus on a montré Proposition 3.3.1 Une base de F ⊕ G était obtenue en concaténant une base de F et une base de G. En particulier dim F ⊕ G = dim F + dim G La formule suivante n’est pas au programme, mais tellement utile ! Théorème 3.3.2 (Formule de Grassman) Si E est de dimension finie et F , G deux sous-espaces, alors dim(F + G) = dim F + dim G − dim F ∩ G J. Gärtner. 8 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 Démonstration : Posons H = F ∩G. C’est un sous-espace de G qui admet un supplémentaire G′ dans G : H ⊕ G′ = G. Alors on a F + G = F ⊕ G′ . En effet la somme F + G′ est directe : si x ∈ F ∩ G′ , alors comme G′ ⊂ G on a u ∈ H = F ∩ G et u ∈ G′ . Comme H ∩ G′ = {0} on a u = 0. De plus on a clairement F + G′ ⊂ F + G car G′ ⊂ G et si u ∈ F + G, on a u = uF + uG et uG = uH + uG′ donc u = uF + uH + uG′ et uF + uH ∈ F , donc F + G ⊂ F + G′ . Ainsi dim F + G = dim F + dim G′ = dim F + (dim G − dim H) = dim F + dim G − dim F ∩ G. Remarque. La preuve ci-dessus utilise la même idée que la preuve du calcul de Card A∪B. Enfin, on a montré dans cette section le Théorème 3.3.3 Soit F, G deux sous-espace d’un espace de dimension finie n. Alors les assertions suivantes sont équivalentes : – F et G sont supplémentaires dans E – F ∩ G = {0} et dim F + dim G = n – E = F + G et dim F + dim G = n En dimension finie on utilise souvent cette proposition pour montrer que deux espaces sont supplémentaires, mais en dimension infinie, la seule possibilité est de raisonner par analyse/synthèse. 3.4 Cas général : somme et somme directe de k sous-espaces. Définition 3.4.1 Soit E un K-espace vectoriel et F1 . . . Fk des sous-espaces vectoriels de E. On note k X Fl = F1 + · · · + Fk = {u1 + · · · + uk , ∀i ∈ [[ 1 ; k ]] , ui ∈ Fi } l=1 la somme des Fj . On dit que F = i.e. ssi : k P Fl est somme directe des Fj si on a de plus unicité de l’écriture l=1 ∀x ∈ F, ∃!(x1 , . . . , xk ) ∈ F1 × · · · × Fk , x = x1 + · · · + xk L On note dans ce cas F = kl=1 Fl = F1 ⊕ F2 ⊕ · · · ⊕ Fk . Remarque. ATTENTION : les seules possibilités pour montrer que plusieurs sous-espaces sont en somme directe sont résumées dans la proposition suivante. En particulier il est FAUX (comme pour la notion d’indépendance !) que des espaces deux à deux en somme directe sont en somme directe. On prendra l’exemple de trois droites vectorielles du plan ! Les sommes directes de sous-espaces sont très utiles pour décomposer l’espace, comme on le verra dans le chapitre sur les applications linéaires. Comme dans le cas de somme de deux sous-espaces, on peut caractériser en dimension finie les sommes directes par « concaténation de bases ». C’est l’objet de la proposition suivante : Proposition 3.4.1 Soit E un espace vectoriel de dimension finie et F1 . . . Fk des sous-espaces de E. Soit J. Gärtner. 9 ECS3 Carnot Chapitre 23 — Espaces vectoriels de dimension finie 2013/2014 P B1 ,. . . Bk des bases respectives de F1 . . . Fk . On pose F = kl=1 Fl . Alors les assertions suivantes sont équivalentes : L 1. F = kl=1 Fl (autrement dit F1 . . . Fk sont en somme directe). 2. Unicité de l’écriture de 0E : ∀(x1 , . . . , xk ) ∈ F1 × · · · × Fk , x1 + · · · + xk = 0 ⇒ x1 = x2 = · · · = xk = 0 3. La famille B obtenue en concaténant B1 . . . Bk est une base de F k P dim Fl . 4. dim F = l=1 Démonstration : On note Bl = (el1 , . . . , elnl ) la base choisie de Fl . – 1 ⇒ 2 Ceci résulte de la définition : soit x1 ∈ F1 , . . . , xk ∈ Fk . Alors si x1 + · · ·+ xk = 0 = 0 + · · · + 0 par unicité on a nécessairement ∀l, xl = 0. – 2 ⇒ 3 Montrons que la famille (e11 , . . . , e1n1 , e21 , . . . , e2n2 , . . . , eknk ) est une base de F . 1. Elle est génératrice : en effet soit x ∈ F . Il existe par définition x1 ∈ F1 . . . xk ∈ Fk tels que x = x1 + · · · + xk . Chaque xl ∈ Fl = Vect (Bl ) donc il existe nl P al1 . . . alnl ∈ K tels que xl = ali eli . Mis côte à côte on a donc l’écriture x = i=1 nl k P P l=1 i=1 ali eli ∈ Vect (B). On a donc F ⊂ Vect (B) et comme Vect (B) ⊂ F par construction, on a bien que B est génératrice de F . 2. Elle est libre : On s’inspire de la description que l’on vient d’obtenir. Soit x ∈ nl k P P ali eli avec les ali ∈ K. Supposons que x = 0 F = Vect B, que l’on écrit x = l=1 i=1 et montrons que ∀l ∈ [[ 1 ; k ]] , ∀i ∈ [[ 1 ; nl ]] , ali = 0. Pour cela on décompose x nl P de la façon suivante : x = x1 + · · · + xk avec pour tout l xl = ali eli . D’après 2), si x = 0 on a x1 = · · · = xk = 0 donc ∀l ∈ [[ 1 ; k ]] , nl P i=1 i=1 ali eli = 0E ∈ Fl . Mais par unicité de l’écriture dans la base Bl on en déduit que ali = 0 pour tout i et tout l. Ainsi B est libre. – 3 ⇔ 4 : évident car toutes les bases d’un espace ont même nombre d’éléments... – Il suffit donc pour finir de montrer que 3 ⇒ 1. Soit x ∈ F . Supposons que x = x1 + · · ·+xk = y1 +· · ·+yk avec xl , yl ∈ Fl pour tout l. Montrons que ∀l ∈ [[ 1 ; k ]] , xl = yl . nl k P P ali eli . (xl −yl ) = 0. Soit ali des scalaires tels que xl −yl = On a par hypothèse que i=1 l=1 Alors on a nl k P P l=1 i=1 ali eli = 0 et par unicité de l’écriture dans une base on en déduit que tous les ali sont nuls et en particulier que xl − yl = 0 d’où l’unicité de l’écriture et la somme directe. J. Gärtner. 10