dossier - Neurologies

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Revue pluridisciplinaire en neurologie d www.neurologies.fr
Réfexion
Conseil génétique
Comment répondre
à vos patients qui vous demandent
un profil génétique ? p. 136
Marie Met-Domestici
Diagnostic
Biomarqueurs de la maladie
d’Alzheimer
Le principe des tests sanguins
basés sur l’analyse d’expression
génétique et leur utilisation
potentielle p. 169
Isabelle Saulnier, Florent Lachal et Thierry Dantoine
Le point sur…
Les troubles du contrôle
des impulsions
Quels troubles ? Chez quels patients ?
Comment les prendre en charge ? p. 173
David Maltête
Jonction neuromusculaire morcelée
d’une fibre musculaire humaine.
dossier
(p.141)
Pathologies neuromusculaireS
L’évolution des connaissances
Coordonné par Philippe Petiot
1 Les données à connaître pour diagnostiquer une pathologie neuromusculaire - Philippe Petiot
2 Dysglobulinémie et neuropathies : comment faire le lien ? - Françoise Bouhour
3 Les myopathies distales : un groupe hétérogène d’affections génétiques - Hélène Gervais-Bernard
4 Les syndromes myasthéniques congénitaux : un diagnostic complexe - Perrine Devic
Avril 2012 • Volume 15 • n° 147 • 8 E
sommaire
Revue pluridisciplinaire en neurologie Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier
• Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu •
­Rédactrice : Violaine Colmet Daâge • Secrétaire
de Rédaction : Annaïg Bévan • Chef de Fabrication
et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de
­Production : Cécile Jeannin • Chef de Studio : Laurent Flin • Chef de publicité : Emmanuelle Annasse •
Service Abonnements : Claire Lesaint • Impression :
Imprimerie de Compiègne 60205 Compiègne
Rédacteur en chef
Pr Franck Semah (Lille).
www.neurologies.fr
Avril 2012 • Vol. 15 • N° 147
n ActualitÉs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p. 134
Comité de rédaction
Dr Alain Ameri (Meaux), Dr Stéphane Auvin (Paris),
Dr Nadia Bahi-Buisson (Paris), Dr Yannick Béjot
(Dijon), Dr Stéphanie Bombois (Lille), Dr Bénédicte
Défontaines (Paris), Dr Romain Deschamps
(Paris), Dr David Devos (Lille), Dr Michel Dib (Paris),
Dr Valérie Domigo (Paris), Dr Olivier Gout (Paris),
Dr Antoine Gueguen (Paris), Dr Gilles Huberfeld
(Paris), Dr David Laplaud (Nantes), Dr Christine
Lebrun-Frénay (Nice), Dr Christian Lucas (Lille),
Dr Dominique Mazevet (Paris), Dr Christelle
Monaca (Lille), Pr Yann Péréon (Nantes), Dr Sylvain
Rheims (Lyon), Dr Catherine Thomas-Antérion
(Saint-Etienne), Dr Tatiana Witjas (Marseille),
Pr Mathieu Zuber (Paris).
n réflexion
Conseil aux patients qui demandent un profil génétique :
un nouvel aspect de la relation médecin-malade . . . . . . . . . . . . . . p. 136
Marie Met-Domestici (Nice)
n Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Pathologies neuromusculaireS
L’évolution des connaissances
Coordonné par Philippe Petiot
Comité de lecture
Pr
David
Adams
(Le
Kremlin-Bicêtre),
Dr Caroline Arquizan (Montpellier), Dr Nadine Attal
(Boulogne), Pr Jean-Philippe Azulay (Marseille),
Pr Franck Baylé (Paris), Dr Catherine Belin (Bobigny),
DrFlorentBorgel(Grenoble),PrEmmanuelBroussolle
(Lyon), Dr Gaëlle Bruneteau (Paris), Dr Catherine
Chiron (Paris), Pr Christophe Cognard (Toulouse),
Dr Bernard Croisile (Lyon), Pr Philippe Decq (Créteil),
Dr Olivier Delalande (Paris), Pr Philippe
Derambure (Lille), Dr Thierry Dubard (Reims),
Pr Franck Durif (Clermont Ferrand), Dr Marie
Girot (Lille), Dr Hassan Hosseini (Créteil),
Dr Lucette Lacomblez (Paris), Dr Michel
Lantéri-Minet (Nice), Dr Laurent Maurs (Tahiti),
Dr Caroline Papeix (Paris), Pr Pascale Pradat-Diehl
(Paris), Pr Didier Smadja (Fort-de-France), Dr Bruno
Stankoff (Paris), Pr Marc Verny (Paris), Pr Hervé
Vespignani (Nancy),
Comité scientifique
Dr Claude Adam (Paris), Dr Annick Alperovitch
(Paris), Pr Philippe Azouvi (Garches), Pr Jean-Louis
Baulieu (Tours), Dr Gérard Besson (Grenoble),
Dr Arnaud Biraben (Rennes), Pr William Camu
(Montpellier), Pr Mathieu Ceccaldi (Marseille),
Pr Patrick Chauvel (Marseille), Pr François
Chollet (Toulouse), Pr Michel Clanet (Toulouse),
Pr Philippe Damier (Nantes), Dr Hubert Déchy
(Versailles), Dr Jean-François Demonet (Toulouse),
Pr Didier Dormont (Paris), Pr Gilles Edan (Rennes),
Dr Marie-Odile Habert (Paris), Pr Jean-Jacques
Hauw (Paris), Dr Lucie Hertz-Panier (Paris),
DrPierreHinault(Rennes),DrLaurentLaloum(Paris),
Dr Gilles Lavernhe (Gap), Dr Denis le Bihan (Saclay),
PrOlivierLyon-Caen(Paris),PrJean-LouisMas(Paris),
Pr Vincent Meininger (Paris), Dr Patrick Metais
(Metz), Pr Thibault Moreau (Dijon), Pr Jacques Moret
(Paris), Pr Jean-Philippe Neau (Poitiers), Pr JeanPierre Olié (Paris), Pr Jean Pelletier (Marseille),
Pr Muriel Rainfray (Bordeaux), Dr Danièle Ranoux
(Limoges), Pr Jean Régis (Marseille), Dr Pascal
Rémy (Corbeil-Essonne), Pr Philippe Ryvlin (Lyon),
Pr Yves Samson (Paris), Dr Isabelle Serre (Reims),
Pr Pierre Thomas (Nice), Pr Pierre Vera (Rouen),
Dr France Woimant (Paris)
Neurologies est une publication
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Les articles de “Neurologies” sont publiés sous la
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et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon
sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.
p. 141
1 n Les neuropathies périphériques : démarche diagnostique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 142
Philippe Petiot (Lyon)
2 n Dysglobulinémie et neuropathies : comment faire le lien ?. . . . . p. 149
Françoise Bouhour (Lyon-Bron)
3 n Les myopathies distales : un groupe hétérogène
d’affections génétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 156
Hélène Gervais-Bernard (Lyon)
4 n Les syndromes myasthéniques congénitaux :
un diagnostic complexe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 162
Perrine Devic (Lyon)
n diagnostic
Identification de patients atteints de la maladie d’Alzheimer :
utilisation de tests sanguins basés sur l’analyse d’expression génétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 169
Isabelle Saulnier, Florent Lachal et Thierry Dantoine (Limoges)
n le point sur…
Les troubles du contrôle des impulsions :
prévenir et détecter précocement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 173
David Maltête (Rouen)
n NeuroAgenda . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n Congrès : quand Soumettre vos abstracts ? . . . . .
n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n Appels à projets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n à lire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n Rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p. 140
p. 140
p. 154
p. 161
p. 172
p. 177
Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).
Photo de couverture : Dr Perrine Devic, Laboratoire de biologie moléculaire de la cellule (UMR 5239 CNRS)
du Pr Laurent Schaeffer, Ecole Normale Supérieure de Lyon.
actualités de la profession
Sommeil
EN BREF Une enquête sur les troubles
Epilepsie et
antirétroviraux
L’AAN et l’International
League Against Epilepsy ont
publié de nouvelles recommandations sur les risques
d’interactions entre antiépileptiques et antirétroviraux.
Pour en savoir plus : Birbeck GL
et al. Evidence-based guideline:
Antiepileptic drug selection
for people with HIV/AIDS:
report of the Quality Standards
Subcommittee of the American
Academy of Neurology and
the Ad Hoc Task Force of the
Commission on Therapeutic
Strategies of the International
League Against Epilepsy.
Neurology 2012 ; 17 : 139-45.
SEP : un Prix pour l’ICM
Le Prix Marie-Ange Bouvet
Labruyère, sous l’égide de
la Fondation de France, qui
récompense un chercheur
ou une équipe de l’ICM pour
ses travaux innovants sur les
maladies de la myéline, a été
attribué pour 2011 à Violetta
Zujovic (Inserm U975, équipe
“Approche moléculaire et
cellulaire de la remyélinisation”).
Pour en savoir plus : www.
fondationdefrance.org
Alzheimer : Bon usage
des médicaments
La HAS met en ligne une
fiche de bon usage des
médicaments de la maladie
d’Alzheimer, avec ces objectifs :
Que peut-on attendre de ces
médicaments ? A quel stade de
la maladie doit-on commencer le traitement ? Quels
médicaments prescrire selon le
stade de la maladie ? A quelle
posologie ? A quelles conditions
poursuivre le traitement ?
134
du sommeil en France
E
n 2008, dans le cadre du Programme d’actions
sur le sommeil 2007-2010, l’InVS (Institut de
veille sanitaire) a mis en place une enquête épidémiologique visant à disposer de données chiffrées
sur la fréquence et la gravité des troubles du sommeil en France.
8 257 ménages (22 273 personnes) ont été interrogés. Un questionnaire valide a été retourné par
15 941 personnes, dont 12 636 âgées de 16 ans et
plus.
34 % ont déclaré la présence de troubles du sommeil, à la fréquence d’au moins 3 nuits/semaine.
Les femmes sont plus concernées que les hommes
(prévalence : 39 % vs 29 %). Ces troubles sont plus
fréquents avec l’âge : 22 % chez les 16-24 ans
(plutôt difficultés d’endormissement), 44 % après
75 ans (plutôt réveils nocturnes fréquents). Près
de 80 % déclarent une symptomatologie chronique, avec des troubles du sommeil depuis plus
de 3 mois. La prévalence du syndrome d’apnées
du sommeil (SAS) a été estimée à 2,4 % chez les
16 ans ou plus, la prévalence des symptômes évocateurs de SAS (ronflements fréquents associés à
des apnées ou à une somnolence diurne) à 4,9 %.
34 % de la population déclare être habituellement un peu, voire très fatiguée après une nuit
de sommeil, et la prévalence d’une somnolence
diurne excessive est de 19 %. Une personne sur 5
présente une insomnie chronique accompagnée
d’un retentissement diurne (fatigue ou somnolence excessive). La prévalence est plus forte chez
les femmes que chez les hommes (22 % vs 15 %).
Elle augmente avec l’âge jusqu’à la classe des 4554 ans puis diminue légèrement ensuite.
Les femmes sont plus nombreuses que les hommes
à avoir déjà consulté pour des problèmes de sommeil (14 % vs 8 %) et à prendre habituellement des
médicaments pour dormir (12 % vs 5 %). Parmi les
personnes souffrant d’insomnie chronique s’accompagnant d’un retentissement diurne, 27,5 %
déclarent avoir déjà consulté un médecin pour ces
troubles. 22 % prennent de façon habituelle des
médicaments pour dormir. Une très forte influence
de l’âge sur la consommation de médicaments
est observée : 6 % des moins de 25 ans déclarent
prendre des médicaments et quasiment la moitié
(49 %) chez les plus de 75 ans. Seules 15 % des
personnes ayant des symptômes évocateurs de
SAS ont déclaré avoir déjà bénéficié d’un enregistrement du sommeil.
ß
Pour en savoir plus :
C. Gourier-Fréry et C. Fuhrman, Département des
maladies chroniques et traumatismes, Institut de
veille sanitaire Les troubles du sommeil Synthèse
des études menées à l’Institut de veille sanitaire.
Mars 2012.
Démences
Alzheimer : un nouveau gène
identifié dans les formes précoces
D
ans un communiqué du 3 avril, l’Inserm annonce qu’une équipe française, celle de Dominique Campion et Didier Hannequin (Unité Inserm 1079 “Génétique du cancer et des maladies
neuropsychiatriques” et Centre national de référence malades Alzheimer jeunes, CHU de Rouen)
a mis en évidence une nouvelle mutation qui pourrait être à l’origine de certaines formes précoces
de maladie d’Alzheimer. Cette équipe a étudié 130
familles qui ont été identifiées par 23 équipes hospitalières françaises dans le cadre du Plan Alzheimer et parmi lesquelles l’un des membres est atteint d’une forme précoce de la maladie.
Parmi ces familles, 116 portaient des mutations sur
les gènes déjà connus. En revanche, pour les 14
familles restantes, aucune mutation sur ces gènes
n’avait été observée.
L’étude du génome des patients des 14 familles, grâce
aux nouvelles techniques de séquençage complet de
leur ADN, a permis de mettre en évidence des mutations sur un nouveau gène SORL1. Deux des mutations
identifiées sont responsables d’une sous-expression
de SORL1, laquelle a pour conséquence une augmentation de la production du peptide β-amyloïde.
ß
Pour en savoir plus : Potier C et al. High frequency of potentially pathogenic SORL1 mutations in autosomal dominant early-onset Alzheimer disease. Molecular Psychiatry du 3 avril 2012.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
REFLEXION
Conseil aux patients qui
demandent un profil génétique
Un nouvel aspect de la relation médecin-patient
n Les neurologues risquent d’avoir à faire face à une nouvelle demande de la part des patients
et de leur famille : comment aborder les problèmes de conseils vis-à-vis de la littérature grandissante sur les susceptibilités génétiques aux maladies neurologiques et aux traitements. Ce
problème devient particulièrement aigu aux Etats-Unis et commence à arriver en Europe. Un
article récent publié dans Neurology Clinical Practice explicite la problématique rencontrée à
partir d’un cas clinique.
D
ans cet exemple publié
dans Neurology Clinical
Practice, l’épouse souffre
de céphalées chroniques, tandis
que le mari présente une histoire
familiale avec des AVC précoces.
Ils souhaiteraient intégrer un programme de recherche durant le
quel les profils génétiques de chacun seront établis, avec en toile de
fond l’espoir d’obtenir une explication aux céphalées de Madame,
et, d’autre part, estimer le risque
de Monsieur de souffrir d’un AVC.
Néanmoins, ayant consulté les
offres des compagnies privées qui
proposent ces analyses sur internet, ils consultent le neurologue
de Madame pour avis.
Ce type d’article soulève plusieurs
problèmes :
• d’une part la potentialité que de
plus en plus de demandes pour
avis génétiques puissent arriver
auprès de médecins non spéciali*Conseillère génétique, Unité d’oncogénétique médicale, Centre
Antoine Lacassagne, Nice
136
Marie Met-Domestici*
sés en génétiques, comme les neurologues ;
• d’autre part la distinction qui
doit être faite entre l’étude du profil génétique dans le contexte d’un
programme de recherche sur une
anomalie identifiée ou pas, et dans
le cadre d’une entreprise privée via
internet.
Des profils
génétiques réalisés
avec un encadrement
médical
Dans l’exemple donné, c’est un
neurologue qui est sollicité par un
couple de patients pour un avis
qui concerne la sphère génétique.
D’autres praticiens pourraient
être amenés à entendre ce type de
requête.
Si un avis d’un généticien ou d’un
médecin formé en génétique
semble d’emblée souhaitable, il est
dit ici que l’éloignement peut justifier de se référer à un autre spécialiste. Il existe également, dans
certains CHU, des conseillers gé-
nétiques qui peuvent recevoir les
patients et leur famille en consultation, recueillir les informations
et orienter la prise en charge.
Les compagnies privées qui proposent l’analyse du profil génétique
sur internet suggèrent d’impliquer
un médecin pour l’interprétation
des résultats afin que le patient ne
soit pas seul devant des informations dont il ne pourrait pas comprendre la portée, mais cela n’est
pas obligatoire et les résultats sont
adressés au patient.
La Food and Drug Administration
qui régit aux Etats-Unis la commercialisation des denrées et des
médicaments pourrait demander
prochainement à ce qu’un médecin soit impliqué dans la communication des résultats aux patients.
La HAS n’a pas encore a priori entamé de réflexion sur le sujet.
De la même façon, les chercheurs
en génétique et les éthiciens qui se
penchent sur ce problème proposent l’implication de généticiens
et/ou de conseillers en génétique.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
REFLEXION
D’une manière générale, l’évolution des pratiques qui ont trait à
la génétique laisse présager que de
plus en plus de médecins non généticiens - dont des neurologues
- soient amenés à donner leur avis
quand à des résultats d’analyses
génétiques que les patients pourraient leur présenter et qu’ils auraient sollicités eux-mêmes.
Ainsi, il semblerait logique que les
praticiens soient amener à devoir
développer leurs connaissances
en la matière.
Le neurologue mis à contribution
ici va devoir rationaliser les espoirs et les croyances des patients,
leur exposer les risques de bénéficier d’informations non attendues
et non souhaitées et, enfin, leur
expliquer les implications d’une
inclusion dans un programme de
recherche en génétique qui sont
toutes particulières.
Ainsi, sont mises à contributions
les notions que le neurologue peut
avoir de génétique et d’éthique en
relation avec la génétique. Il est bon
de rappeler que même si le neurologue est interpellé, il n’est normalement pas habilité à demander ou
à rendre un test génétique.
Les limites et les
promesses d’un
profil génétique
La balance risque/bénéfice est
d’une importance capitale dans
tout acte médical, et d’intérêt majeur ici puisque l’on parle d’étudier
les caractéristiques génétiques
d’un individu.
En toile de fond, ce sont les principes de bienfaisance et de nonmalfaisance de la bioéthique qui
doivent être en ligne de mire
lorsque l’on mène ces réflexions.
Les patients qui s’orientent ici vers
une analyse du profil génétique es138
pèrent que l’on puisse utiliser les
informations obtenues afin d’améliorer leur santé, que ce soit au
moment même ou bien dans leur
avenir médical.
Puisque les données de génétique
peuvent s’apparenter à la médecine prédictive dans certains cas
de figure, c’est le champ de la prévention qui est intéressé, et c’est
par ce biais là que l’on peut espérer
agir positivement pour sa santé.
Sur un plan plus global et communautaire, si les études de profil génétique étaient amenées à
s’étendre, cela pourrait fournir un
grand nombre de données qui permettraient de résoudre nombre
de dilemmes diagnostiques. Le
séquençage de nouveaux variants
alléliques par le biais de ces examens pourrait conduire à affiner
certains diagnostics pour lesquels
des études de gènes candidats
avaient échoué. L’étude plus approfondie des génomes pourrait
également guider l’utilisation des
médicaments et des dosages de ces
derniers.
La génétique apporte également
des informations dans l‘ajustement de certains traitements d’intérêt en neurologie.
Par exemple, certains individus
d’origine asiatique partagent un
allèle HLA-B ancestral nommé
HLA-B*1502. Ces individus présentent des effets secondaires importants aux traitements par carbamazépine. La connaissance du
statut allélique pour ce locus peut
permettre d’orienter le traitement
vers une autre molécule antiépileptique afin d’éviter ces effets secondaires.
Si tous ces points positifs sont
encourageants, le neurologue interrogé par ses patients doit être
en mesure de leur expliquer que,
parfois, il peut être difficile d’associer des conditions de santé aux
variants génétiques découverts.
La relation patient/médecin devient tout autre. Le neurologue
est habitué à suivre son patient
pour céphalées chroniques et il se
retrouve avec la gestion de la relation avec le couple ou les apparentés. Il s’agit donc de sortir du
colloque singulier habituellement
rencontré en médecine. C’est en
effet le propre de la génétique qui
élargit les données et sort du cadre
du patient seul face à son médecin,
mais s’intéresse à des couples ou
bien à des familles.
En même temps, puisque il s’agit
d’analyser le profil génétique pour
chacun des individus du couple,
il en va de l’extrême personnalisation et de l’information la plus
complète concernant chacun des
individus.
Cette dualité : mine d’information sur chaque individu et collecte d’informations intimistes
pour différents individus en même
temps est aussi le propre de la génétique.
Les risques à tout
vouloir savoir
Comme les auteurs le soulignent,
les individus présentés ici s’exposent aux aléas d’une recherche génétique sans conseil génétique. S’il
n’y a pas de conseil génétique au
préalable, les patients s’exposent
à bon nombre d’évènements inattendus.
Chercher à obtenir un profil génétique, c’est d’abord s’exposer à obtenir pour résultats des faux-positifs et des faux négatifs, avec les
inconvénients que cela procure :
une ré-assurance alors qu’une prévention aurait pu être aménagée
ou bien alors une inquiétude, voire
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Conseil aux patients qui demandent un profil génétique
une détresse psychologique qui
aurait pu être évitée.
Le patient s’expose aussi à obtenir
des informations qu’il ne cherchait pas. Il peut ainsi se découvrir
UNE susceptibilité pour telle ou
telle affection, plus grave que l’explication qu’il attendait.
Dans le registre de la bienfaisance/non malfaisance toujours,
que penser de découvrir lors d’un
profil génétique une susceptibilité à développer une pathologie
grave sans que l’on puisse mettre
en place un dispositif de prévention ? Dans le champ de la neurologie, que penser de la découverte
fortuite d’une mutation conduisant à la chorée de Huntington ou
bien à la maladie d’Alzheimer alors
que l’on ne peut rien faire en terme
de prévention ? Beaucoup de patients expriment leur volonté de
ne pas savoir lorsqu’ils sont correctement informés de toutes ces
éventualités. Les généticiens sont
régulièrement confrontés au problème.
Les patients peuvent aussi, à l’issu
de l’examen, devenir détenteur
d’informations qu’ils doivent moralement et éthiquement transmettre à leurs apparentés afin de
leur permettre de se protéger.
Enfin, les analyses globales des
caractéristiques génétiques peuvent poser un problème majeur
lorsque leurs résultat est inscrit
dans le dossier médical d’un patient. Même si, aux Etats-Unis
comme en France, des lois visent
à protéger les données génétiques,
comme par exemple, l’interdiction
de les faire figurer dans les dossiers informatiques pour cause
d’absence de vérification des accès,
il peut toujours y avoir des risques
à ce que ces données soient réperNeurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
toriées (allusion dans un courrier
de consultation par exemple…).
Participer à une
étude pour avoir son
profil génétique
Les neurologues qui participent
actuellement en France à des
études cliniques thérapeutiques
de phase II ou III sont amenés à
proposer aux patients de participer à des études de pharmacogénétique ou pharmacogénomique.
Lorsque les patients viennent demander un avis avant de participer
à l’étude pour laquelle il doit signer
le consentement avant le prélèvement sanguin, il est important
de rappeler les particularités des
études à visée génétique.
Tous les résultats obtenus serontils communiqués aux patients ? Il
s’agit là de confronter les principes
éthiques d’autonomie du patient :
qui doit savoir ? satisfaire? aux
principes de bienfaisance/non
malfaisance ? Le patient doit-il
avoir connaissance de faits qui ne
lui servent pas à améliorer sa santé
mais qui peuvent l’inquiéter ?
Le patient va-t-il être au courant
de toutes les recherches qui seront
effectuées à partir de son prélèvement ? Quelle est la quantité de
données qui va être disponible à
partir de ces examens ? Des variants de significations inconnus
peuvent être mis à jour. Comment
expliquer ces informations ?
Il est entendu que les patients signent un consentement éclairé
avant d’engager une telle démarche, mais les notions abordées
sont si spécifiques que l’interlocuteur qui fait face doit être formé
spécialement à cela.
L’avantage majeur de bénéficier
d’un profil génétique dans le cadre
d’un projet de recherche réside
surtout dans le partage des données des sociétés savantes. Plus
on a de données à analyser, plus
l’échange et le croisement des données est aisé et instructif.
Le pendant de risque à ce bénéfice
collégial est le risque d’identification des personnes, puisque du
matériel génétique est utilisé.
Il en va donc de bon nombre de réflexions importantes et de nombre
d’éclaircissements à donner aux
patients pour qu’il puisse choisir
entre confier son ADN à un programme de recherche ou bien engager une démarche privée.
Et pour l’avenir ?
Il est probable que les profils génétiques se feront en routine dans
l’avenir et qu’ils feront partie des
examens médicaux de base.
Il est important de mettre en garde
les praticiens des dérives possibles
de l’inclusion systématiques des
données au dossier médical du
patient et de la nécessité d’un encadrement légal afin de protéger
la vie privée et de lutter contre les
n
discriminations possibles.
Correspondance
Marie Met-Domestici
Unité d’Oncogénétique médicale
Centre Antoine Lacassagne
30 avenue Valombrose
06000 Nice
Mots-clés :
Conseil génétique, Ethique, Patient
Cet article est une réflexion à partir du manuscript Advising patients
about obtaining genomic profiles,
de Donna T. Chen, MD, MPH, et Lois
L. Shepherd, JD, paru dans la revue
Neurology Clinical Practice de décembre 2011.
139
neuroagenda
11e Réunion Francophone sur la maladie
d’Alzheimer et les syndromes apparentés
5th International Congress of Child and
Adolescent Psychiatry
22-24 mai 2012 - Toulouse
8 octobre 2012 - Téhéran
• Renseignements et inscriptions
MCI France - 24 rue Chauchat - 75009 Paris
Tél. : 33 (0) 1 53 85 82 82
Fax : 33 (0) 1 53 85 82 83
E-mail : [email protected]
Site : www.alztoulouse2012.com
• Renseignements et inscriptions
Iranian Academy Of Child And Adolescent Psychiatry
Roozbeh Hospital, South Kargar Ave
1333795914 Tehran - IRAN
Site : http://congress.iacap.ir/index.php/cnfs/5th-1391
La sclérose en plaques dans la francophonie congrès ARSEP
1er juin 2012 - Paris
28th congress of ECTRIMS 2012
10-13 octobre 2012 - Lyon
• Renseignements et inscriptions
ECTRIMS 2012 - c/o Congrex Switzerland Ltd.
Peter Merian-Strasse 80 - P.O. Box - 4002 Basel / Switzerland
Tél. : +41 61 686 77 11 - Fax : +41 61 686 77 88
E-mail : [email protected]
Site : www.ectrims.eu/conferences.htm
• Renseignements et inscriptions
Fondation ARSEP
Parivry
14 rue Jules Vanzuppe - 94200 Ivry-sur-Seine
Site : http://unisep.org
2 Versailles International Neurointensive
Care Symposium
nd
8th World Stroke Congress 2012
10-13 octobre 2012 - Brasilia
World Stroke Organization
21 juin 2012 - Versailles
• Renseignements et inscriptions
Kenes International
1-3 Rue de Chantepoulet - CH-1211 Geneva 1, Switzerland
Tél. : +41 22 908 0488 - Fax: +41 22 732 2850
E-mail : [email protected] - Site : www.kenes.com/stroke/
• Renseignements et inscriptions
Emergence - 60 bd du Maréchal Alphonse Juin
44100 Nantes
Site : http://www.e-mer-gence.fr/vincs2012/
CONGRÈS
Quand soumettre vos abstracts ?
z 28th congress of ECTRIMS 2012
10-13 octobre 2012, Lyon
Date limite de soumission des abstracts : 23 mai 2012
Site : www.ectrims.eu/conferences.htm
z 8th International Conference on
Frontotemporal Dementias - FTD 2012
5-7 septembre 2012, Manchester
Date limite de soumission des abstracts : 1er juin 2012
Site : www2.kenes.com/ftd2012/Pages/Home.aspx
z 2nd International Congress on Neurology and
Epidemiology - ICNE
8-10 nov 2012, Nice
Date limite de soumission des abstracts : 30 juin 2012
Site : www.neuro-conference.com/2012/
z 11th International Congress on Alzheimer’s
and Parkinson’s Disease
6-10 mars 2013, Florence
Date limite de soumission des abstracts : 10 octobre 2012
Site : www2.kenes.com/adpd/Pages/Home.aspx
z International Paediatric Sleep Association z 9th International Congress on Mental
IPSA 2012
5-7 décembre 2012, Manchester
Disorders & Other Non-Motor features in
Date limite de soumission des abstracts : 11 juin 2012
Parkinson’s Disease and Related Disorders
Site : www2.kenes.com/ipsa2012
z 15th World Congress on Pain Clinicians WSPC 2012
18-21 avril 2013, Séoul
Date limite de soumission des abstracts : 19 novembre 2012
Site : www2.kenes.com/mdpd/pages/home.aspx
27-30 juin 2012, Grenade
z 3rd World Parkinson Congress 2013
Date limite de soumission des abstracts : 13 juin 2012
Site : www2.kenes.com/wspc/Pages/home.aspx
1-4 octobre 2013, Montreal
140
Date limite de soumission des abstracts : 3 décembre 2012
Site : www.worldpdcongress.org/
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
DOSSIER
Pathologies
neuromusculaires
L’évolution des connaissances
Dossier coordonné par Philippe Petiot
L
es pathologies neuromusculaires ont connu,
ces dernières années, des avancées importantes.
Après le démembrement génétique des neuropathies héréditaires et des dystrophies musculaires
(et qui continue bien entendu), on constate à présent à un enrichissement des connaissances dans
le domaine de certaines entités cliniques, de l’immunologie et de certains syndromes encore mal
connus il y a peu de temps.
Nous avons donc choisi de présenter quatre sujets
qui reflètent bien cette évolution.
• Le premier concerne la présentation d’une démarche diagnostique électro-clinique simple des
neuropathies périphériques, préalable indispen-
sable à l’identification de certains syndromes et
étiologies.
• Le second traitera des données récentes concernant les neuropathies associées aux gammapathies
monoclonales.
• Le troisième abordera la description et la classification des myopathies distales.
• Enfin, le dernier présentera les principales caractéristiques cliniques, électrophysiologiques et
génétiques des syndromes myasthéniques congénitaux. n
Philippe Petiot
(Service de neurologie, Hôpital de la Croix-Rousse,
Lyon)
1 Les neuropathies périphériques : démarche diagnostique ������� p. 142
Philippe Petiot (Lyon)
2 Dysglobulinémie et neuropathies : comment faire le lien ? ����� p. 149
Françoise Bouhour (Lyon-Bron)
3 Les myopathies distales :
un groupe hétérogène d’affections génétiques ������������������������� p. 156
Hélène Gervais-Bernard (Lyon)
4 Les syndromes myasthéniques congénitaux :
un diagnostic complexe ��������������������������������������������������������������������� p. 162
Perrine Devic (Lyon)
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
1 Les neuropathies périphériques
Démarche diagnostique
n Dans cet article, on ne traitera pas bien sûr de l’ensemble des étiologies des neuropathies,
et nous renverrons le lecteur vers des articles de synthèse référencés dans la bibliographie.
L’objectif est surtout de proposer une démarche simple amenant le clinicien à définir un “cadre”
reposant sur les données cliniques, électriques et parfois biologiques. Une fois cette démarche
adoptée, nous proposerons les grands cadres étiologiques à connaître pour chacune de ces
situations.
Introduction
Si le diagnostic positif d’une neuropathie périphérique ne pose habituellement pas en soi de difficultés
majeures, l’orientation étiologique
est souvent plus délicate. En effet,
les causes sont nombreuses et le
neurologue est parfois confronté à
plusieurs obstacles.
Si la cause est parfois évidente, elle
peut non seulement en cacher une
autre mais, parfois, il faudra faire
une enquête approfondie reposant
sur plusieurs indices, à la fois cliniques et paracliniques. Or, si l’on
peut proposer de standardiser le
bilan comme cela a été proposé
dans diverses recommandations
(1), il est hors de question de demander une liste systématique
d’explorations pour des raisons
économiques, bien sûr, mais aussi
compte tenu de la complexité,
de l’accessibilité et du caractère
parfois “invasifs” de certaines
d’entre elles. Ainsi, il est impératif d’abord de définir des cadres
“syndromiques” dont l’objectif
sera de restreindre le clinicien à
ne rechercher qu’une liste limitée d’étiologies, et donc de guider
*Service de neurologie, Hôpital de la Croix-Rousse, Lyon
142
Philippe Petiot*
au mieux les explorations complémentaires. En caricaturant un
peu, il n’y a pas un “bilan de neuropathie”, mais le “bilan d’une neuropathie”.
Bien sûr, tout neurologue sait que
parfois, malgré de nombreuses
recherches et analyses approfondies, le diagnostic étiologique reste
non défini, dans le cadre des “fameuses” neuropathies dites “idiopathiques”. Or, ce groupe se réduit
d’année en année, tenant compte
des nouveaux concepts (permettant parfois de proposer certains
traitements), mais aussi de la mise
à disposition de nouveaux “outils”
diagnostiques. Le diagnostic de
neuropathie idiopathique reste
encore possible, mais il doit répondre à des critères précis et ne
pas être qu’un simple diagnostic
d’exclusion.
L’étape clinique
En dehors de certaines situations
dont nous reparlerons, le diagnostic positif de neuropathie périphérique repose sur le classique “syndrome neurogène” qui ne pose
habituellement aucune difficulté
au clinicien.
Par contre, deux étapes vont dès à
présent être déterminantes :
1. caractériser au mieux ce syndrome neurogène afin d’en définir
les particularités intrinsèques ;
2. préciser le contexte général
et rechercher les signes associés,
constituant les caractéristiques
extrinsèques qui seront des “indices d’alerte” déterminants pour
aller plus loin dans la démarche
diagnostique.
Caractéristiques
intrinsèques
de la neuropathie
• L’ancienneté, les modalités
d’installation et d’évolution
sont souvent déterminantes :
- en effet, une neuropathie de survenue rapide, voire brutale, est
toujours liée à une cause définie,
qu’elle soit inflammatoire ou générale ;
- une installation très lente et progressive peut classiquement se
rencontrer dans le cadre des neuropathies idiopathiques, mais est
parfois aussi la caractéristique de
certaines neuropathies comme
celle liée à l’anticorps anti-MAG,
certaines
polyradiculonévrites
chroniques ou les neuropathies
héréditaires par exemple ;
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
- une évolution par poussées est
volontiers évocatrice d’un processus inflammatoire, mais peut aussi
se rencontrer dans certaines neuropathies métaboliques (porphyries, mais aussi maladie de Fabry,
maladie de Tangier) ;
- enfin, axiome incontournable,
une neuropathie récente et rapidement évolutive sans cause a
priori, impose un bilan complet
et parfois rapide, allant parfois
jusqu’à la biopsie de nerf.
• Si l’aréflexie est quasi constante,
il est important d’en préciser l’étendue en la corrélant au déficit sensitif ou moteur constaté. En effet, une
aréflexie diffuse présente d’emblée
ou contrastant avec un déficit focalisé, voire uniquement distal, est un
indice très important pour suspecter un processus non longueur-dépendant comme on peut l’observer
dans les ganglionopathies ou les
polyradiculonévrites chroniques
(PRNc) par exemple.
• Si la plupart des neuropathies
sont sensitives et motrices, certaines ont une présentation uniquement ou quasi exclusivement
sensitive ou motrice, caractéristique fondamentale dans certains
cadres syndromiques voire étiologiques.
Par exemple, une neuropathie symétrique motrice aiguë évoque
une forme axonale motrice pure
de syndrome de Guillain et Barré
(avec anticorps antigangliosides
de type IgG, souvent précédée
d’une infection à Campylobacter
jejuni), ou une porphyrie.
• En cas d’installation progressive,
une participation proximale
symétrique
“pseudomyopathique” se rencontre dans certaines PRNc, alors qu’une forme
motrice pure asymétrique fait
classiquement discuter une neuNeurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
ropathie multifocale à blocs de
conduction. Inversement, une
neuropathie exclusivement sensitive (2) offre au clinicien deux
orientations possibles. Soit elle
est symétrique et distale, et cette
présentation se rencontre dans
de nombreuses situations étiologiques ; par contre, une forme
asymétrique ou non longueur-dépendante est un pattern très évocateur d’une neuronopathie sensitive ou ganglionopathie (8), plus
rarement d’une multineuropathie
sensitive.
• Une neuropathie ataxiante
constitue un cadre très particulier. Elle s’observe plus volontiers
dans les neuropathies ayant une
composante sensitive profonde
prédominante, associée parfois à
un tremblement. Trois diagnostics
doivent être évoqués en première
ligne : PRNc sensitive, ganglionopathie ou neuropathie avec antiMAG. L’électroneuromyogramme
(ENMG) va alors occuper une
place déterminante. Dans certains
cas, l’ataxie ne sera pas sensitive
mais cérébelleuse et l’association
“neuropathie et syndrome cérébelleux” ouvre un champ étiologique très particulier (3).
• Si le déficit sensitif touche exclusivement les petites fibres avec
hypoesthésie thermoalgique isolée
(4), la présentation est trompeuse
car l’aréflexie est absente. Elle est
de répartition plus volontiers longueur-dépendante avec troubles
sensitifs quadridistaux (sauf dans
la forme neuronopathique décrite
par Gorson et al.) (5). Parfois, cette
atteinte des petites fibres est associée à une dysautonomie qu’il faut
systématiquement rechercher à
l’interrogatoire : diarrhées chroniques, troubles génito-sphinctériens, fluctuations tensionelles.
Si elle peut évoluer ensuite vers
une atteinte plus globale des
fibres sensitives, un tel début se
rencontre sous nos contrées dans
un cadre assez restreint d’étiologies : diabète, amylose, syndrome
de Gougerot-Sjögren, maladie de
Fabry… Pour cette dernière, une
accentuation des symptômes sensitifs subjectifs aux changements
de température est très évocatrice.
• Si les douleurs sont fréquentes
au cours des neuropathies, elles
constituent rarement un indice
diagnostique en soi. Par contre,
leur absence est inhabituelle dans
certains cadres étiologiques : ganglionopathies paranéoplasiques,
neuropathies des petites fibres,
certaines neuropathies toxiques…
• Certaines neuropathies s’accompagnent d’une atteinte des nerfs
crâniens. Elle est classique dans
le syndrome de Guillain-Barré
(paralysie faciale en particulier)
et parfois rencontrée au cours de
certaines PRNc. L’existence de
troubles oculomoteurs est évocatrice du CANOMAD (chronic
ataxic neuropathy, ophthalmoplegia, IgM paraprotein, cold agglutinins and disialosyl antibodies), des
mitochondriopathies ou du syndrome de Miller-Fisher. Une dysphagie ou une dysphonie est aussi
décrite dans le SANDO (sensory
ataxic neuropathy with dysarthria
and ophthalmoparesis) ou le CANOMAD. Enfin, une hypoesthésie
faciale est parfois associée à certaines neuropathies du syndrome
de Gougerot-Sjögren, mais peut
aussi s’observer au cours d’une
ganglionopathie.
Caractéristiques
extrinsèques de la
neuropathie
Un examen général et neurologique complet sont impératifs
dans la démarche diagnostique
143
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
d’une neuropathie. Il est impossible de faire une liste exhaustive
des situations parfois rencontrées
au cours de l’expertise clinique
d’une neuropathie, et nous ne donnerons uniquement que quelques
exemples particulièrement évocateurs d’un contexte étiologique
particulier.
Il peut tout d’abord s’agir de
signes neurologiques centraux
associés. Par exemple :
• l’association neuropathie motrice-mouvements anormaux et/
ou syndrome parkinsonien oriente
vers une neuroanthocytose ;
• un tremblement est volontiers
observé au cours des neuropathies
anti-MAG et des ganglionopathies ;
• une surdité est fréquente dans
les mitochondriopathies, la maladie de Refsum et la neuropathie de
Charcot-Marie-Tooth (CMT) liée
à l’X ;
• une épilepsie fait discuter une
cytopathie mitochondriale ;
• des anomalies de la substance
blanche à l’IRM cérébrale se rencontrent au cours de nombreuses
pathologies :
mitochondriopathies,
adrénoleucodystrophies,
certains CMT X, de rares cas de
PRNc… ;
• enfin, l’association neuropathie/
myopathie évoque classiquement
une myopathie inflammatoire ou
une mitochondriopathie.
Sur le plan général, la liste est encore plus longue mais il faut insister sur :
1. les signes cutanés rencontrés au
cours des vascularites (purpura),
du POEMS (polyneuropathie, organomégalie,
endocrinopathie,
gammapathie monoclonale et
signes cutanés avec hyperpigmentation ou hypertrichose par
exemple) ou de la maladie de Fabry (angiokératome) ;
144
2. des malformations osseuses
(scoliose, pieds creux) évocatrices
d’un CMT ;
3. des signes articulaires observés
dans les connectivites ;
4. une hypertrophie nerveuse est
classique dans la lèpre ou dans certaines formes de CMT ;
5. une hypertrophie de certains
organes est évocatrice du POEMS ;
6. une cardiopathie est rencontrée
au cours des mitochondriopathies,
l’amylose ou la maladie de Fabry.
L’électro­
neuromyogramme
L’électromyogramme (ENMG) occupe bien sûr une place fondamentale dans cette deuxième phase de
la démarche diagnostique.
Diagnostic positif
L’ENMG permet en effet de confirmer le diagnostic de neuropathie,
ce qui n’est pas là son intérêt principal, même si une neuropathie est
parfois de découverte un peu inattendue au cours de certaines présentations cliniques (cytopathie
mitochondriale par exemple où
elle n’est souvent révélée que par
l’étude des conductions).
Inversement, il peut être pris à
défaut dans certaines situations.
La plus classique est celle des
neuropathies des petites fibres
qui, par définition, s’accompagnent d’un ENMG normal (car ce
dernier n’explore que les fibres
de gros diamètres). Le diagnostic repose alors sur les potentiels
évoqués sensitifs au laser (dont
il reste à définir la sensibilité) et
surtout sur la biopsie cutané, avec
évaluation de la densité des fibres
amyéliniques dans le derme, qui
est la technique de référence
(mais non encore disponible dans
tous les centres , 4). Les étiologies
sont classiquement l’amylose (à
rechercher systématiquement),
le diabète, le syndrome de Gougerot-Sjögren (où elles semblent
assez fréquentes), la maladie de
Fabry, l’infection à VIH, certaines
gammapathies monoclonales…
Cependant, des formes idiopathiques ne sont pas rares.
Plus exceptionnellement, certaines PRNc s’accompagnent d’un
ENMG normal, dans une forme
sensitive pure qui ne concerne
que les racines sensitives postérieures (6). L’analyse du LCR (à la
recherche d’une dissociation albumino-cytologique), l’imagerie
par résonance magnétique (IRM)
lombaire (montrant parfois une
hypertrophie et une prise de gadolinium radiculaire) et les potentiels évoqués sensitifs (objectivant
des anomalies proximales des
conductions nerveuses périphériques) permettent d’en porter le
diagnostic et de proposer un traitement parfois efficace.
Diagnostic
physiopathologique
L’ENMG doit toujours être interprété en fonction du contexte clinique et biologique, et il ne fait pas
à lui seul le diagnostic étiologique
(en dehors de quelques situations très particulières comme les
NMBC par exemple). Il reste cependant déterminant pour orienter le clinicien vers certains cadres
syndromiques. Nous utiliserons
un arbre décisionnel simple qui
permet de définir les principales
catégories “électrocliniques” qui
nous aiderons à restreindre et finalement à simplifier la recherche
étiologique.
Globalement, il existe trois grands
cadres syndromiques :
• neuropathie axonale ;
• neuropathie démyélinisante ;
• neuropathie axonomyélinique.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Nerfs
latences
distales (ms)
Vitesses de conduction
(m/s)
Ondes F (ms)
(amp > 1 mV)
Vitesses proximales
(m/s)
>5
>6
< 37
< 32
> 38,4
< 40
Ulnaire:
- amp > 4,8mV
- amp < 4,8mV
> 4,4
> 5,3
< 37
< 32
> 38,4
< 40
Fibulaire commun :
- amp > 1,6mV
- amp < 1,6mV
> 6,5
> 7,8
< 32
< 28
> 66
< 36
Tibial postérieur :
- amp > 4mV
- amp < 4mV
> 7,8
> 9,3
< 32
< 28
> 66
< 36
Médian :
- amp > 4mV
- amp < 4mV
Cette simple distinction n’est pas
toujours très aisée à faire en pratique, car il peut coexister une
atteinte axonale secondaire à un
processus initialement démyélinisant et inversement. C’est la
raison pour laquelle de nombreux
critères
électrophysiologiques
sont proposés et régulièrement
mis à jour pour essayer de sortir
de ce dilemme parfois difficile.
Nous ne rentrerons pas dans cette
discussion souvent fastidieuse
et nous renvoyons le lecteur aux
nombreuses revues publiées ces
dernières années qui donnent lieu
d’ailleurs à de régulières mises à
jour (7, 8).
❚❚Les neuropathies
démyélinisantes
Elles sont classiquement définies
par un allongement des latences
distales motrices, un ralentissement des vitesses de conduction
nerveuse motrice, un allongement
des latences des ondes F et par la
présence de blocs de conduction
(cependant parfois rencontrés
dans certaines neuropathies axonales aiguës comme certaines
mutlinévrites) ou de dispersions
des réponses motrices (allongement de la durée). Depuis près de
20 ans, de nombreuses équipes
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
ont proposé leur propre classification et il est difficile d’en faire une
synthèse opérationnelle. S’inspirant de ces multiples études, un
remarquable travail collaboratif
français (7) a publié des critères
simples utilisables en pratique
quotidienne (Tab. 1).
L’individualisation d’une neuropathie démyélinisante est fondamentale car une cause définie
est retrouvée dans la grande majorité des cas. Il faut alors utiliser
un arbre diagnostic simple permettant de s’orienter vers ces différentes étiologies qui sont majoritairement héréditaires (parfois
métaboliques) ou dysimmunes.
L’homogénéité des altérations
des conductions doit d’abord être
prise en compte. En effet, une démyélinisation homogène sur les 4
membres (ralentissement identique des vitesses de conduction
aux membres supérieurs et inférieurs, à quelques m/sec près) est
très évocatrice d’un CMT de type 1
(9) et il faut alors aller directement
à la biologie moléculaire (gène
PMP22 dans la majorité des cas).
En cas de démyélinisation hétérogène, une neuropathie hé-
réditaire reste possible dans le
cadre des neuropathies par hypersensibilité des nerfs à la pression
(délétion PMP22) car l’hétérogénéité est liée alors à de multiples
ralentissements, mais alors plus
prononcés dans les sites d’entrappements (canal carpien, ulnaire au
coude par exemple), sur un fond de
neuropathie diffuse quasi contant
(10). La sémiologie clinique comporte alors une composante tronculaire sauf dans les rares formes
“polynévritiques” pouvant mimer
une polyradiculonévrite chronique (PRNc) et il est d’ailleurs
parfois utile de vérifier la biologie
moléculaire dans les formes de
PRNc résistantes aux traitements
immunosuppresseurs.
Sinon, on entre alors le plus souvent dans le vaste cadre des neuropathies démyélinisantes dysimmunes. Il faut à ce stade revenir à
la clinique et orienter le diagnostic
selon le caractère symétrique ou
asymétrique de la sémiologie.
Dans les formes cliniquement
symétriques, il faut s’intéresser
à la localisation préférentielle des
lésions démyélinisantes sur les
données ENMG. En cas de lésions
myéliniques très distales, l’index
de latence terminal (distance en
145
DOSSIER
Tableau 1 - Altérations de la conduction nerveuse en faveur d’une démyélinisation (7).
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
mm/VCM en m/sec x LDM en
msec) est un outil précieux car il
évalue le rapport proximo-distal de la démyélinisation. Dans
cette situation où il est abaissé,
on évoque en premier lieu l’hypothèse d’une neuropathie avec IgM
antiMAG (11), même si de nombreuses formes électrocliniques
ont été rapportées récemment. Il
peut aussi s’agir de certaines PRNc
avec démyélinisation distale prédominante appelée DADS (distal
acquired demyelinating symetric
neuropathy) dont certaines sont
associées à une gammapathie IgM
monoclonale sans activité antiMAG. Dans les formes où la démyélinisation est plus proximale,
le diagnostic de PRN chronique
ou aiguë est alors évoqué, volontiers soutenu par l’existence d’une
dissociation albuminocytologique
qui n’est toutefois par constante.
Pour les caractéristiques électrocliniques des PRNc, nous renvoyons à nouveau le lecteur vers
l’excellent travail du groupe français (7) et vers celui du groupe européen révisé récemment (8).
Devant une présentation asymétrique, s’il s’agit d’une forme
cliniquement motrice pure (16),
on s’orientera alors vers une neuropathie motrice multifocale avec
blocs de conduction (NMMBC),
parfois associée à des anticorps antigangliosides de type IgM antiGM1
(30 à 40 % des cas). Les conductions sensitives sont le plus souvent normales ou peu altérées. S’il
s’agit d’une neuropathie sensitive
et motrice sur le plan électrique
et clinique (12), il faudra discuter alors un syndrome de Lewis et
Sumner (SLS). La distinction entre
ces deux formes est fondamentale
sur le plan thérapeutique car dans
les NMMBC, seules les immunoglobulines intraveineuses (IgIV)
ont montré leur efficacité alors
que dans le SLS, le traitement est
identique à celui proposé pour les
PRNc (IgIV, immunosuppresseurs,
échanges plasmatiques).
❚❚Les neuropathies axonales
Dans ce cadre, il existe deux difficultés déroutantes pour le clinicien. Les étiologies sont tout
d’abord extrêmement nombreuses
et inversement, il existe un nombre
important de formes dites idiopathiques. Comme pour les neuropathies démyélinisantes, il faut alors
essayer d’individualiser différents
sous-groupes (définis également
sur des critères cliniques et électrophysiologiques) qui vont constituer
parfois des “pôles d’attraction” qu’il
est important de connaître car associés à un nombre plus restreint
d’étiologies.
• Neuronopathie sensitive
ou ganglionopathie
Il s’agit de neuropathie cliniquement et électriquement sensitive
pure dont la présentation n’est
habituellement pas longueur-dépendante.
Elles peuvent ainsi débuter aux
membres supérieurs, voire ne toucher que les membres supérieurs,
ou s’accompagner d’emblée de
troubles sensitifs profonds des 4
membres, parfois asymétriques (localisées uniquement aux membres
supérieurs dans certains cas) avec
aréflexie diffuse. Une ataxie n’est
pas rare, voire un tremblement
en cas de grande déafférentation.
Dans les formes subaiguës, les douleurs sont fréquentes.
Un travail récent propose une
échelle d’évaluation diagnostique
(Tab. 2) fort utile en pratique quotidienne (13). Les PES (révélant des
anomalies proximales prédominantes) ou l’IRM peuvent être aussi
utiles dans certains cas (hypersi-
Tableau 2 - Critères diagnostiques des neuronopathies sensitives (13).
A. Pour un patient présentant une neuropathie sensitive clinique, le diagnostic de neuronopathie est possible en cas
de score > 6.5Oui
Points
a. Ataxie des membres inférieurs ou supérieurs au début ou au cours de l’évolution q
+3.1
b. Présentation asymétrique des troubles sensitifs au début ou au cours de l’évolution
q
+1.7
c. Déficit sensitif non restreint aux membres inférieurs au cours de l’évolution q
+2.0
d. Si au moins 1 PAS absent or 3 PAS < 30 % des valeurs limites inférieurs aux membres supérieurs
(sans entrappements) q
+2.8
e. Moins de nerf présentant des altérations des conductions motrices aux membres inférieurs q
+3.1
B. Le diagnostic de neuronopathie est probable si le score > 6,5 et si :
1. Le bilan initial n’objective pas d’anomalies biologiques ou ENMG excluant le diagnostic de neuronopathie
2. Le patient présente une des pathologies suivantes : syndrome paranéoplasique avec anticorps antineuronaux
ou un cancer au cours des 5 dernières années ; traitement aux sels de platine ; syndrome de Gougerot-Sjögren
3. si l’IRM révèle des hypersignaux des cordons postérieurs de la moelle
C. Le diagnostic de neuronopathie est certain s’il existe des anomalies histologiques évocatrices des ganglions rachi­
diens postérieurs (même si la biopsie des ganglions n’est pas recommandée)
146
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
gnaux des cordons postérieurs). De
présentation asymétrique, les étiologies sont alors assez restreintes :
syndrome de Gougerot-Sjögren,
formes paranéoplaqiues (avec anticorps anti-Hu dans la majorité des
cas), cirrhose biliaire primitive. Des
formes idiopathiques sont possibles,
souvent considérées comme dysimmunes mais dont le traitement reste
souvent difficile. En cas de forme
d’emblée diffuse et symétrique, on
peut citer la maladie de Friedreich,
certaines cytopathies mitochondriales, ou celles en rapport avec la
toxicité des sels de platine ou l’intoxication par la vitamine B6.
• Neuropathie axonale
et asymétrique
En dehors des neuronopathies
sensitives décrites précédemment, on entre dans le groupe
particulier des multineuropathies
avec des signes électrocliniques à
la fois sensitif et moteur (avec souvent une excellente corrélation
topographique entre les données
cliniques et électriques).
Elles sont souvent de début brutal,
volontiers douloureuses et évolutives. Elles sont le plus souvent
liées à une vascularite. Il s’agit
d’une urgence neurologique et,
en dehors d’un bilan général à la
recherche d’une vascularite systémique, la biopsie de nerf doit
souvent être rapidement proposée
à la recherche d’anomalies histologiques évocatrices afin de proposer un traitement adapté. Parfois,
cette vascularite ne concerne que
le système nerveux périphérique,
mais un traitement doit aussi être
proposé dans cette situation (corticoïdes par exemple).
• Neuropathie sensitive
ou sensitivo-motrice
non longueur-dépendante
Dans ce cadre, l’ENMG retrouve
une neuropathie axonale sensiNeurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
tivo-motrice associée parfois à
quelques critères de démyélinisation cependant insuffisants pour
affirmer le diagnostic de PRNc (8).
L’existence d’une aréflexie d’emblée
diffuse, d’une ataxie, d’un déficit moteur proximal, d’une présentation
clinique quadri-distale simultanée
ou d’une atteinte des nerfs crâniens
sont autant d’arguments pour évoquer un processus non longueurdépendant (7). Parfois, il existe une
évolution par poussées. Ces formes
très singulières considérées autrefois comme “idiopathiques” ont
donné lieu à de très nombreuses
publications ces dernières années,
car un grand nombre d’entre elles
sont en réalité des PRNc observée
au stade “axonal”, appelées encore
PRNc atypiques (7, 14).
Le diagnostic repose alors sur :
l’existence d’une éventuelle dissociation albumino-cytologique
dans le liquide céphalo-rachidien ;
une hypertrophie des racines
lombaires avec parfois prise de
contraste à l’IRM lombaire ; des
altérations évocatrices aux PES.
Surtout, il peut s’agir d’une excellente indication de biopsie de nerf
(15) à la recherche de signes histologiques évoquant un processus
démyélinisant associé, à condition
d’être réalisée dans un centre spécialisé habituée à ce type d’analyse
(coupes semi-fines, technique du
teasing, microscopie électronique).
L’individualisation de ces formes
est importante car on peut alors
proposer un traitement par corticoïdes, IGIV ou échanges plasmatiques pouvant, dans certains cas,
améliorer les patients.
• Neuropathie cliniquement
sensitive longueur-dépendante
En dehors des neuropathies des petites fibres, l’ENMG révèle des altérations concernant uniquement les
conductions sensitives avec microvoltage distal et isolé des potentiels
évoqués sensitifs, ou peut s’accompagner d’une souffrance mixte des
fibres motrices et sensitives. Les
étiologies sont alors nombreuses
et regroupent les grands cadres
étiologiques bien connus des neuropathies périphériques (toxique,
carentielle, infectieuse, dysimmunes au cours des connectivites,
cryoglobuline, amylose, causes héréditaires ou métaboliques…).
Le contexte clinique et les signes
cliniques associés décrits précédemment sont souvent d’une aide
précieuse. Si la neuropathie est sévère et/ou évolutive, seul un large
bilan complémentaire systématique (pouvant aller jusqu’à la biopsie de nerf) permettra d’identifier
une cause précise. Il faut isoler les
formes idiopathiques du sujet âgé
dont la présentation est souvent
caractérisée par une dissociation
électroclinique évocatrice (ENMG
plus “malade” que le patient).
• Neuropathie sensitivomotrice longueur-dépendante
Comme dans le groupe décrit précédemment avec atteinte clinique
sensitive pure, les étiologies sont
nombreuses et la démarche du diagnostique étiologique est proche.
Là encore, une neuropathie sévère
et évolutive doit imposer la réalisation d’un bilan le plus exhaustif
possible.
Dans les formes chroniques et anciennes, on peut être amené à discuter une forme axonale de CMT,
qualifiée alors de type 2, dont la
rentabilité diagnostique de la biologie moléculaire est nettement
inférieure à celle des CMT 1 vus
précédemment.
Dans les formes sporadiques, il a
été isolé une entité particulière
qualifiée de CMT-like dont le mécanisme physiopathologique reste
discuté (héréditaire ? dégénératif ?) mais qui correspond à une
réalité clinique.
147
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
• Neuronopathie
ou neuropathie motrice pure
Il s’agit d’une atteinte cliniquement
et électriquement motrice pure.
Dans certains cas, elles sont de présentation longueur-dépendante,
prédominant aux membres inférieurs, alors que d’autres peuvent
débuter aux membres supérieurs.
D’un point de vue physiopathologique, il peut s’agir d’une souffrance du motoneurone mais parfois d’une axonopathie motrice
isolée. Certaines sont héréditaires
(17) dans le cadre des amyotrophies spinales distales (ou dHMN
pour distal hereditary motor neuropathy). D’autres peuvent être
acquises, comme dans la forme
motrice axonale de syndrome de
Guillain-barré associée à l’infection à Campylobacter jejuni.
Existe-t-il des formes dysimmunes chroniques ? Cela reste
débattu car un certains nombres
d’observations rapportées seraient
en réalité des NMMBC (pour lesquelles les blocs de conduction ne
pourraient être mis en évidence)
et pourraient alors bénéficier d’un
traitement par immunoglobulines
intraveineuses (18).
❚❚Les neuropathies
axono-myéliniques
Une telle conclusion apparaît souvent dans les comptes-rendus
d’ENMG, en raison des difficultés
souvent rencontrées pour identifier
le caractère primitivement axonal
ou démyélinisant de la neuropathie.
Pourtant, il faut éviter le plus possible une telle conclusion et réserver
cette appellation à un cadre assez
restreint d’étiologies. En effet, une
telle présentation est rencontrée essentiellement au cours du diabète,
de l’insuffisance rénale chronique,
du POEMS, de certaines neuropathies paranéoplasiques (avec anticorps anti-CV2) ou dans certaines
neuropathies métaboliques (adrénoleucodystrophie par exemple).
Conclusion
Si l’ensemble des étiologies rencontrées au cours des neuropathies ne s’intègre pas toujours
dans cette démarche diagnostique,
cette dernière permet souvent de
limiter les explorations inutiles.
Avec ces arbres diagnostiques
simples, le clinicien ou l’électrophysiologiste pourront, dans la
majorité des cas, adopter une prise
en charge adaptée et proposer,
dans certains cas, un traitement
n
approprié. Correspondance
Dr Philippe Petiot
Service de neurologie
Hôpital de la Croix-Rousse
103, Grande rue de la Croix-Rousse
69004 Lyon
E-mail : [email protected]
Remerciements
Au Dr Thierry Maisonobe qui a beaucoup
inspiré ce travail.
Mots-clés : Neuropathie
périphérique, Diagnostic, Clinique,
Electrophysiologie, ENMG, Neuropa­
thie axonale, Neuropathie démyéli­
nisante, Neuropathie axonomyéli­
nique, Syndrome de Guillain-Barré,
CANOMAD, Mitochondriopathies,
Syndrome de Miller-Fisher, SANDO,
Syndrome de Gougerot-Sjögren,
Ganglionopathie, Neuroanthocytose,
Neuropathies anti-MAG, Maladie
de Refsum, Neuropathie de CharcotMarie-Tooth, POEMS, Maladie de
Fabry, Vascularites, Connectivites
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Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
2 Dysglobulinémie
et neuropathies
Comment faire le lien ?
n
La gammapathie monoclonale est le point commun d’un groupe hétérogène d’affections.
Elle se caractérise par la prolifération et le dépôt d’immunoglobulines constitués par un seul
type de chaîne lourde (M, G ou A) et une seule chaîne légère (kappa ou lambda). Il est clairement établi qu’il existe un lien entre neuropathie périphérique et dysglobulinémie monoclonale.
L
a gammapathie monoclonale est le point commun d’un groupe hétérogène d’affections allant de la
gammapathie monoclonale bénigne (MGUS) aux hémopathies et
à certaines affections systémiques
comme l’amylose AL ou la cryoglobulinémie.
Par opposition aux gammapathies
polyclonales secondaires à tout
processus inflammatoire, la gammapathie monoclonale se caractérise par la prolifération et le dépôt
d’immunoglobulines constitués
par un seul type de chaîne lourde
(M, G ou A) et une seule chaîne légère (kappa ou lambda).
Une MGUS est rencontrée chez
1 % de la population de plus de
25 ans, le plus souvent de type IgG
(75 %). Sa prévalence augmente
avec l’âge, étant de 3 % chez les sujets de plus de 70 ans.
Il est clairement établi qu’il existe
un lien entre neuropathie périphérique et dysglobulinémie moService d’ENMG-Pathologies neuro-musculaires, Hôpital
Neurologique, Lyon-Bron
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Françoise Bouhour*
noclonale :
• la prévalence d’une gammapathie monoclonale chez des patients souffrant d’une neuropathie
périphérique dite idiopathique est
de 5 à 10 % ; le plus souvent il s’agit
d’un gammapathie IgM (50 % des
cas) (1) ;
• chez les patients suivis pour une
dysglobulinémie monoclonale, la
prévalence d’une neuropathie est
élevée : 1/3 des patients suivis pour
myélome multiple, 5 à 10 % des
patients connus pour une maladie
de Waldenström ; enfin, 17 % des
sujets suivis pour une amylose systémique ont une neuropathie périphérique (2).
Etablir ce lien est parfois difficile et nécessite souvent un faisceau d’arguments tant cliniques
qu’électrophysiologiques,
voire
histologiques (3, 4).
On distingue :
1. les neuropathies de mécanisme
dysimmunitaire ;
2. la cryoglobulinémie ;
3. l’amylose primitive ;
4. l’infiltration du nerf par des cellules malignes :
5. les neuropathies “hors classes”.
1. Les neuropathies
de mécanisme
dysimmunitaire
La neuropathie anti-MAG
(Myelin associated protein)
Liée à une dysglobulinémie IgM
La MAG est une glycoprotéine
membranaire ayant pour rôle, le
maintien de l’intégrité de la structure de la myéline. La présence
d’anticorps anti-MAG entraîne
une “décompaction” des lamelles
de myéline mais aussi une perturbation du transport axonal (Fig. 1).
Elle représente 50 % des neuropathies en lien avec une dysglobulinémie IgM, le plus souvent bénigne, de type IgM kappa (5).
L’âge de début se situe entre 40 et
75 ans, avec une large prédominance masculine (80 %).
Le tableau clinique est dominé
par une ataxie sensorielle responsable d’un handicap ambulatoire important avec chutes ; elle
s’accompagne de paresthésies
quadridistales prédominant aux
membres inférieurs avec hypoesthésie en chaussette. Les douleurs neuropathiques sont rares.
L’atteinte sensitive aux membres
149
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
supérieurs peut être responsable
d’un tremblement postural. L’aréflexie est diffuse. Il n’y a pas d’atteinte des nerfs crâniens ni de dysautonomie (6).
L’évolution est lente et progressive
avec aggravation de l’ataxie et apparition d’un déficit moteur distal
des membres inférieurs (7).
L’ENMG met en évidence une
neuropathie myélinique à prédominance distale, caractéristique
de cette affection. Les vitesses de
conduction motrice sont ralenties
mais de façon non homogène ; la
conduction motrice distale, dont
les latences distales motrices sont
le reflet, est plus ralentie que la vitesse proximale (calcul de l’Index
de Latence Terminale, ou ITL).
Il n’existe habituellement pas de
bloc de conduction ou de dispersion de la réponse motrice. Les
réponses sensitives sont souvent
abolies (8). L’ENMG permet de
différencier la neuropathie antiMAG “classique” d’une polyradiculonévrite chronique associée à
une dysglobulinémie, ce qui a un
intérêt essentiellement thérapeutique (Fig. 1).
Le diagnostic repose donc sur
l’électrophysiologie, sur la mise en
évidence du pic IgM en immunofixation dans le sérum du patient
et sur le dosage par technique
Elisa des anticorps anti-MAG. La
biopsie de nerf n’est réalisée qu’exceptionnellement.
Le traitement est guidé par le bilan hématologique. Si la sécrétion
d’IgM est en lien avec une maladie
de Waldenström ou un lymphome,
le traitement sera celui de l’hémopathie.
Si la gammapathie est bénigne, la
décision de traitement dépend de
la sévérité clinique car peu de traitements ont prouvé leur efficacité
(9) ; le rituximab peut être proposé
150
Figure 1 - Neuropathie anti-MAG. Les anticorps anti-MAG entraînent une décompaction des lamelles de myéline.
mais les résultats des essais sont
mitigés (10).
Le syndrome CANOMAD
(Chronic Ataxic Neuropathy,
Ophtalmoplegia, IgM-protein and
Disialosyl antibodies)
Lié à une dysglobulinémie IgM
Le tableau clinique est dominé,
dès le début, par une ataxie sensorielle associée à des paresthésies
et douleurs neuropathiques des
membres inférieurs (11).
L’évolution se fait vers la majoration des troubles de l’équilibre, auxquels s’associe un déficit moteur
modéré, une hypoesthésie, une aréflexie diffuse et des troubles oculobulbaires (90 % des cas).
Dans certains cas, le tableau se
rapproche de celui de polyradiculonévrite chronique sévère (tétraparésie avec atteinte bulbaire et
défaillance respiratoire).
L’évolution est lentement progressive, rémittente dans 30 % des cas.
Les anomalies électrophysiologiques sont variables puisque, dans
50 % des cas, le tableau ENMG est
celui d’une atteinte myélinique
diffuse et homogène aboutissant
au diagnostic de polyradiculonévrite chronique ; dans 30 % des
cas, les anomalies ne portent que
sur les vitesses de conduction sensitives, avec une réduction des réponses sensitives évoquant donc
une neuropathie axonale sensitive. Enfin, chez 10 % des patients,
l’ENMG est normal.
L’étude du LCR met en évidence
une dissociation albumino-cytologique dans 80 % des cas.
Par ailleurs, l’activité agglutinines
froides caractérisée par la propriété du sérum à agglutiner des
globules rouges normaux à basse
température (4 °C) et dépistée par
un test de Combs direct est présente chez 50 % des patients. Cette
activité est le plus souvent asymptomatique.
Le diagnostic repose sur :
1. la mise en évidence du pic d’IgM
en immunofixation (mais il peut
parfois être trop faible pour être
dépisté par cette technique) ;
2. et la positivité des anticorps
anti-­gangliosides disyalilés.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
De façon similaire aux PRNC, le
traitement repose sur les immunoglobulines intraveineuses et
échanges plasmatiques parfois
associés à un traitement immunosuppresseur. A l’heure actuelle,
dans les formes sévères, le rituximab est proposé en première intention (12).
PRNC associé à une dysglobulinémie IgG
Neuropathie anti-MAG
DOSSIER
La gammapathie monoclonale est
le plus souvent bénigne (80 % des
cas).
Bloc de conduction
Latence distale
Désynchronisation du PGAM
Les polyradiculonévrites
chroniques (PRNC)
Liées à une dysglobulinémie
IgM/IgG/IgA
Les PRNC associées à une dysglobulinémie ne sont pas différentes
des PRNC idiopathiques si ce n’est
sur le plan clinique où l’atteinte
sensitive et ataxique est plus marquée et l’atteinte des nerfs crâniens moindre (13).
Dans la majorité des cas, le début est subaigu ou chronique, les
troubles sensitifs initialement
quadridistaux ont une évolution
ascendante, bilatérale et symétrique, s’accompagnant dans un
second temps d‘une atteinte motrice tant distale que proximale.
L’aréflexie est diffuse.
Sur le plan électrophysiologique
(Fig. 2), la neuropathie est myélinique de distribution homogène,
bilatérale avec une atteinte sensitive souvent plus marquée aux
membres supérieurs. La dissociation albumino-cytologique dans le
LCR est notée dans 70 % des cas.
L’évolution est soit progressive
soit rémittente.
Ces PRNC associées à un pic monoclonal répondent aux traitements “immunologiques” dans
80 % des cas (échanges plasmatiques, IgIV ou corticoïdes) (14).
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Latence distale = 2.65 ms (normale <3.4 ms)
Ralentissement Vitesse conduction motrice = 40m/s
Bloc de conduction poignet/coude = 40%
Désynchronisation des réponses proximales
Latence distale = 8.3 ms (normale < 4 ms)
ITL = 0.20 (ralentissement distal si < 0.25)
Ralentissement Vitesse conduction motrice = 33 m/s
Absence de bloc et de désynchronisation
Figure 2 - Caractéristiques électrophysiologiques distinguant la polyradiculonévrite
chronique et la neuropathie anti-MAG.
Le syndrome POEMS
linique associée à une dégénérescence axonale sévère, sensitive et
motrice, diffuse mais prédominant aux membres inférieurs.
Il s’agit d’une affection rare, au
potentiel évolutif élevé, dont les
critères diagnostiques majeurs
comportent une neuropathie sensitivo-motrice sévère et une gammapathie monoclonale le plus
souvent IgG λ ou IgA λ.
Cette dysglobulinémie est en en
lien avec, soit un plasmocytome,
soit un myélome multiple, soit une
MGUS (15).
La neuropathie peut précéder l’atteinte hématologique de plusieurs
mois. Elle correspond à une polyradiculonévrite subaiguë et sévère ; l’atteinte sensitive et motrice
est longueur-dépendante, mais
d’évolution rapidement ascendante avec un handicap ambulatoire marqué (perte de la marche)
chez la majorité des patients (16).
Devant cette neuropathie, le diagnostic de POEMS sera confirmé
par :
• la présence d’une dysglobulinémie IgG ou IgA ;
• la découverte de lésions osseuses
sclérotiques (radiographies ou
IRM du squelette) et/ou d’une hyperplasie ganglionnaire angiofolliculaire (scanner TAP) ;
• l’élévation du taux sérique du
vascular endothelial growth factor
(> 700 pg/ml) (17).
(Polyneuropathy, Organomegaly,
Endocrinopathy, M component
protein, Skin changes)
L’ENMG apporte des arguments
en faveur d’une neuropathie myé-
Le traitement de la neuropathie dépend en partie de l’affection hématologique sous-jacente. On propose
un traitement par Melphalan intensif et autogreffe de cellules souches
périphériques, protocole permettant une amélioration clinique dans
80 % des cas. En cas de contre-indication, la thalidomide peut être une
alternative intéressante (18).
151
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
2. La cryoglobulinémie
DOSSIER
Les cryoglobulines sont des immunoglobulines circulantes qui
précipitent à 4 °C et se dissolvent
à 37 °C.
Elles peuvent être de type IgM,
IgG ou IgA.
Elles sont classées en 3 sousgroupes :
• type 1, monoclonal le plus souvent IgM en lien avec un processus
lymphoprolifératif (Waldenström
ou myélome) ;
• les cryoglobulinémies mixtes :
- type 2 composée d’une IgM monoclonale dirigée contre une IgG
polyclonale compliquant le plus
souvent les infections à VHC ;
- type 3 : IgM et IgG polyclonales
survenant au cours de certaines
pathologies inflammatoires chroniques) (19).
La physiopathologie de l’atteinte
neuropathique est liée soit à l’activité anticorps anti-MAG ou anti-glycolipide portée par la cryoglobuline (type 1 surtout), soit aux
dépôts de complexes immuns circulants générant une vascularite
touchant les vaisseaux de petits
et moyens calibres (multinévrite,
neuropathie sensitive longueurdépendante ou neuropathie des
petites fibres, atteinte rénale,
purpura vasculaire), soit, enfin,
à la précipitation intravasculaire
de cryoglobuline (thrombi dans
vaisseaux de petit calibre) (20).
Dans ce chapitre, la cryoglobulinémie est de type 1 et sa responsabilité
dans le mécanisme lésionnel de la
neuropathie est difficile à affirmer
en l’absence de lésions de vascularite. L’atteinte neurogène périphérique est le plus souvent en lien avec
une cryoglobulinémie mixte (21).
3. L’amylose primitive
ou AL
Elle est rare (500 cas/an en
France) et se caractérise par le dépôt extracellulaire de fragments
de chaînes légères monoclonales
d’immunoglobulines
adoptant
une configuration β plissée.
Le plus souvent, la production de
substance amyloïde se fait dans
le cadre d’un myélome ou d’une
MGUS.
Figure 3 - Biopsie des glandes salivaires accessoires avec dépôt d’amylose (coloration
rouge congo).
152
Les amyloses AL peuvent être
localisées ou disséminées, les
organes cibles étant le cœur et
le rein, asymptomatiques ou au
contraire de pronostic redoutable
(médiane de survie de 18 mois).
Certains aspects cliniques sont
quasi pathognomoniques tels la
macroglossie (10 % des patients) et
le pupura périorbitaire spontané.
L’atteinte cardiaque est présente
chez 40 % des sujets à la phase initiale, symptomatique chez 20 %
sous la forme d’une cardiomyopathie restrictive engageant le
pronostic vital chez la moitié des
patients. L’atteinte rénale, la plus
commune, se caractérise par une
protéinurie abondante responsable d’un syndrome néphrotique
dans la moitié des cas.
La neuropathie complique le tableau clinique dans 20 % des cas.
Elle peut être inaugurale et isolée ; dans ce cas précis, le retard
diagnostique est fréquent (12 à
18 mois), expliquant le pronostic
plus sombre de ces formes (22).
Le tableau initial est celui d’une
neuropathie sensitive et douloureuse (50 % des cas) par atteinte
des petites fibres amyéliniques.
L’ENMG est alors normal.
L’évolution se fait vers une neuropathie sensitivo-motrice, diffuse,
souvent longueur-dépendante. A
l’ENMG, l’atteinte est axonale à
prédominance sensitive (souvent
abolition des réponses sensitives).
Face à cette neuropathie, quelques
éléments doivent alerter le clinicien : la fréquence d’un canal
carpien associé (25 % des cas) et
l’association à une dysautonomie
se manifestant par une hypotension orthostatique, des troubles
du transit, des troubles vésicosphinctériens et sexuels (23).
La pathogénie de la neuropathie
est complexe, mais fait intervenir
la contrainte mécanique des dépôts de substance amyloïde, des
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
phénomènes ischémiques liés à la
localisation périvasculaire de certains dépôts et peut être une toxicité directe sur le nerf.
Le diagnostic repose sur :
1. la mise en évidence d’une protéine monoclonale sérique et/ou
urinaire (80 % des cas) : il s’agit par
ordre de fréquence d’une IgG puis
IgA, rarement une IgM ; les chaînes
légères libres trouvées dans les
urines sont de type lambda :
2. l’obtention d’une preuve histologique d’amylose (Fig. 3) ; en
cas de neuropathie, la biopsie de
nerf a une rentabilité diagnostique de 85 % ; cependant le prélèvement de tissu autre, telles la
graisse sous-cutanée, la peau et
les glandes salivaires accessoires
(moins agressif ), garde une bonne
sensibilité de l’ordre de 50 à 70 % ;
(M-Dex) permettant une réponse
clinique chez la moitié des patients, résultats meilleurs que ceux
de l’autogreffe de cellules souches
proposée donc en seconde intention (médiane de survie 57 mois
versus 22 mois) (24). Dans certains cas, l’association “agent alkylant-corticoïdes-thalidomide ou
bortezomid” a été proposée (25).
4. Infiltration du
nerf par des cellules
malignes
Compliquant les lymphomes malins non hodgkiniens, l’infiltration
nerveuse peut être soit satellite
d’une infiltration méningée soit
isolée. Dans les 2 cas, l’atteinte est
volontiers pluri-radiculaire aux
membres inférieurs, accompagnée
de douleurs rebelles. Le diagnostic
Devant toute neuropathie associée à une
dysglobulinémie, il est primordial d’identifier le
processus physiopathologique liant les deux
affections entre elles, car de cette démarche,
découle toutes les modalités de prise en charge.
l’anatomopathologiste doit être
informé de la suspicion d’amylose
afin d’orienter la technique (utilisation des colorations adéquates
- rouge Congo - pour révéler les
dépôts de substance amyloïde) et
d’étudier tout le tissu biopsié. Il
est important de préciser le type
d’amylose et en cas de doute, une
recherche d’amylose héréditaire
devra être proposée (16) ;
3. la recherche et l’évaluation systématique d’une hémopathie B.
Le traitement cible le clone plasmocytaire (myélome) ou lymphoplasmocytaire à l’origine de la
protéine pathogène ; le protocole
privilégié en France est l’association melphalan-dexaméthasone
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
repose alors sur l’étude du LCR,
l’imagerie par IRM des racines
lombosacrées, voire sur la biopsie
chirurgicale “radioguidée”.
5. Les neuropathies
“hors classes”
En dehors des cadres nosologiques précédemment décrits, il
est parfois difficile d’établir un lien
de causalité formelle entre la dysglobulinémie et la neuropathie ;
on se pose même la question d’une
association fortuite étant donné la
fréquence de la dysglobulinémie,
notamment IgG chez le sujet agé.
La neuropathie est alors sensitive, longueur-dépendante, à dé-
but distal et progressif, l’ataxie est
discrète et le déficit moteur est inconstant. L’atteinte sensitive des
membres supérieurs serait plus
marquée et plus fréquente que
dans la neuropathie idiopathique
du sujet âgé (26).
L’ENMG est celui d’une neuropathie axonale sensitivo-motrice
sans autre élément discriminatif ;
l’étude du LCR est normale (13).
Le plus souvent, l’évolution est
lente et aucune thérapeutique
(notamment ciblant la dysglobulinémie) n’est alors proposée. Dans
de rares cas de formes sévères, un
traitement immunologique a permis une rémission clinique, renvoyant à un diagnostic probable de
polyradiculonévrite chronique.
Dans ce chapitre, doivent être
mentionnées les neuropathies iatrogènes, les traitements recommandés dans les dysglobulinémies
étant volontiers neurotoxiques
(thalidomide, bortezomid, vincristine en particulier) (27).
n
Correspondance
Dr Françoise Bouhour
Service d’ENMG-Pathologies
neuro-musculaires
Hôpital Neurologique
59 boulevard Pinel
69677 BRON cedex
E-mail : [email protected]
Mots-clés :
Neuropathie périphérique,
Dysglobulinémie monoclonale,
Gammapathie monoclonale,
Diagnostic, ENMG, Neuropathie
anti-MAG, CANOMAD, Polyradiculonévrites chroniques, POEMS,
Cryoglobulinémie, Amylose primitive,
Lymphome
153
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
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Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
3 Les myopathies distales
Un groupe hétérogène d’affections génétiques
n Les myopathies se manifestent classiquement par un déficit moteur pur, proximal, touchant
les ceintures pelviennes et scapulaires. Le concept de myopathies distales, touchant initialement et préférentiellement les extrémités, est apparu en 1902 (1). Il correspond à un groupe
hétérogène d’affections génétiques, caractérisées par un déficit moteur pur, débutant ou prédominant en distal, associé à des anomalies histologiques musculaires, confirmant le processus myopathique.
O
n exclut classiquement
de ce cadre nosologique,
les myopathies suivantes,
dont le déficit moteur est volontiers distal, mais associé à un
phénotype souvent plus riche qui
permet d’en évoquer le diagnostic
facilement :
• dystrophie myotonique de type I
ou maladie de Steinert : associant
un déficit moteur distal des mains
et des loges antéro-externes de
jambes, une myotonie électrique
ou électroclinique et une atteinte
pluri-systémique (cardiopathie,
diabète, cataracte…) ;
• dystrophie musculaire facioscapulo-humérale, comprenant
volontiers une atteinte de la loge
antéro-externe de jambe mais associée à une atteinte scapulaire
constante (phénotype scapulo-­
péronier) et une atteinte faciale
fréquente qui permettent d’en
évoquer le diagnostic ;
• myosite sporadique à inclusion,
touchant le sujet de plus de 50 ans,
associant une atteinte volontiers
proximale des membres inférieurs
et distale des membres supérieurs,
prédominant sur les muscles fléchisseurs ;
*Service de neurologie, Hôpital Pierre Wertheimer, Lyon
156
Hélène Gervais-Bernard*
• myopathie oculo-pharyngo-­
distale, autosomique dominante ou
récessive, d’âge de début variable
(7-50 ans), se manifestant initialement par un ptosis, un déficit des
muscles faciaux et bulbaires, et dans
les 5 ans qui suivent un déficit distal
des 4 membres. Les CPK sont modérément augmentées (1 à 8 fois la normale) ; l’électromyogramme révèle
volontiers des averses myotoniques,
et la biopsie musculaire montre des
vacuoles bordées.
Orientation
diagnostique devant
un déficit distal
moteur pur
Les principaux diagnostics différentiels des myopathies distales
sont les atteintes neurogènes périphériques, génétiques, à présentation motrice, soit :
• la forme spinale de CharcotMarie-Tooth ;
• les amyotrophies spinales distales.
Evoquer un processus myopathique devant un déficit moteur
pur reposera donc sur :
Une analyse clinique rigoureuse :
• absence de pieds creux, de
troubles sensitifs ou d’abolition
précoce des réflexes (qui orienteraient vers une atteinte neuropathique) ;
• sélectivité de l’atteinte motrice
(ex. : déficit de la loge antéro-externe et préservation du muscle
pédieux “signe du trop beau pédieux” ; atteintes associées faciale
ou scapulaire…) ;
• antécédents personnels (ex. :
cardiopathie, volontiers associée à
certaines myopathies).
Un dosage élevé de CPK (non
spécifique), qui peut manquer.
L’électromyogramme, avec mise
en évidence de tracés trop riches,
microvoltés. Cependant dans certaines myopathies (ex. : myopathie de Nonaka), les tracés sont
volontiers trompeurs, pseudoneurogènes.
Enfin, la biopsie musculaire
confirmant le processus myopathique, et pouvant mettre en évidence, dans certains cas, des lésions spécifiques qui orienteront
l’enquête étiologique (vacuoles
bordées, lésions myofibrillaires,
immunomarquages et western
blot révélant une déficit protéique…).
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Age de début
Welander
Atteinte
mains
Enfant à
Adulte jeune
AD/Spor
Ant > Post
Post
Adolescence
jusqu’à 40 ans
AD/Spor
AR/Spor
Ant > Post mixte Post
Ant > Post mixte
AR/Spor
Ant > Post
Tardif
AD/Spor
Post
Atteinte
des
mains
MYH7
19p13
DNM2
nébuline
Desmine
eβcristalline
victoria
Flamine C
19p13
MPD3
dysferline
GNE
AR/Spor
Ant > Post Post > Ant
Atteinte
des
mains
Pas
d’atteinte
des mains
Welander
MATR3
VCP
ZASP
19pf13
Titine
VCR
Post
Miyoshi like
Myotiline
ZASP
Figure 1 - Arbre décisionnel en fonction de l’âge de début, du mode de transmission et de la sélectivité de l’atteinte. D’après Udd et al.
(2). AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; spor : sporadique ; ant : antérieur ; post : postérieur.
Orientation
étiologique devant
une myopathie distale
Jusqu’au début des années 2000,
ce groupe d’affection était relativement restreint, comprenant 5
formes principales : la myopathie
de Nonaka et les dysferlinopathies
pour les formes récessives, les myopathies de Laing, Udd et Welander
pour les formes dominantes. Depuis 10 ans, avec les avancées de
la biologie moléculaire, ce cadre
clinique s’est élargi, avec mise en
évidence de plus d’une dizaine de
gènes en cause (2).
L’enquête étiologique devant une
myopathie distale, va s’orienter en
fonction des éléments suivants :
• mode de transmission autosomique dominant ou récessif ;
• âge de début précoce ou tardif ;
• sélectivité de l’atteinte musNeurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
culaire : début aux membres inférieurs ou supérieurs ; loges
musculaires les plus touchées (antérieures ou postérieures) ou au
contraire épargnées. On s’aidera
volontiers de l’imagerie musculaire (IRM musculaire ou à défaut
scanner musculaire) pour préciser
cette sélectivité ;
• les données histologiques de la
biopsie musculaire : présence ou
non de vacuoles bordées, d’une désorganisation du réseau intermyofibrillaire ; on complètera l’analyse
par un immunomarquage et un
western blot des protéines musculaires, voire une analyse en microscopie électronique.
En combinant ces différents critères, des algorithmes ont été
proposés pour guider l’enquête
étiologique devant un tableau de
myopathie distale (2) (Fig. 1 et 2).
Les myopathies
distales
autosomiques
récessives
Myopathie de Nonaka ou
myopathie par mutation GNE
Cette entité a été individualisée
au Japon en 1981 (3), puis dans la
population iranienne (4) ; elle est
ubiquitaire.
Elle débute dans la deuxième
décennie, par une faiblesse des
muscles de la loge antéro-externe
de jambe, se manifestant par un
steppage. L’évolution se fait vers
une atteinte de la loge postérieure
de jambe et des muscles proximaux avec une épargne durable, à
la fois clinique et radiologique du
muscle quadriceps.
Les CPK sont modérément augmentées, à 3 à 4 fois la normale.
L’électromyogramme (EMG) est
157
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
Vacuoles bordées
Oui
Myopathie
myofribillaire
Ant > Post
Desmine
eβcristalline
Mixte
Flamine C
Post > Ant
Myotiline
Zasp
Flamine C
Non
Pas de myopathie
myofribillaire
Ant
GNE
Titine
MATR 3
VCP
Mixte
Ant/post
Welander
MPD3
19p13
Ant
MVH7
Nébuline
FSH
DM1
Mixte
Dysferline
Post
Dysferline
Victoria
DNM2
Myoshi-like
Figure 2 - Arbre décisionnel en fonction des lésions anatomopathologiques. D’après Udd et al. (2). AD : autosomique dominant ; AR :
autosomique récessif ; spor : sporadique ; ant : antérieur ; post : postérieur.
d’interprétation difficile, avec des
tracés volontiers “neurogènes”. La
biopsie musculaire révèle des vacuoles bordées.
Le gène en cause est le gène GNE
(5), situé en 9p1-q1, codant pour
une protéine intervenant dans la
synthèse de l’acide sialique.
Myopathie de Miyoshi,
ou dysferlinopathie
Décrite au Japon (6), sa répartition géographique est ubiquitaire.
Elle débute vers 20 ans par une faiblesse et une atrophie des mollets,
parfois asymétrique, responsable
d’une difficulté à courir, à sauter
ou à se mettre sur la pointe des
pieds. Elle respecte les muscles
intrinsèques du pied ; l’évolution
se fait vers une atteinte proximale (la loge postérieure de cuisse
étant plus atteinte que la loge
antérieure), et des membres supérieurs avec atrophie fréquente
de la portion inférieure du biceps
brachial et respect des muscles
fixateurs de l’omoplate.
158
Les CPK sont souvent très élevées
(10 à 150 fois la normale).
L’EMG montre des tracés myogènes avec une importante activité
de fibrillation.
La biopsie musculaire révèle des
lésions de type dystrophique et
volontiers d’importants infiltrats inflammatoires, qui peuvent
conduire à poser à tort le diagnostic de polymyosite.
L’analyse en immunohistochimie
et western blot permet de mettre
en évidence le déficit en dysferline
(NB : le western blot met aussi en
évidence, dans la moitié des cas, un
déficit dit “secondaire” en calpaïne).
La dysferline est une protéine membranaire, de fonction inconnue,
dont le déficit est aussi responsable
d’un phénotype de myopathie des
ceintures (LGMD2B) ; les deux phénotypes peuvent coexister au sein
d’une même famille.
Nébulinopathie
La nébuline est une protéine du
sarcomère, habituellement res-
ponsable d’un tableau de myopathie congénitale, avec atteinte
initiale proximale, caractérisée
histologiquement par la présence
de bâtonnets.
Un phénotype distal a été récemment individualisé chez 7 patients
issus de 4 familles finlandaises
distinctes (7), touchant la loge
antéro-externe des jambes, les extenseurs des doigts et les fléchisseurs de nuque.
L’âge de début est variable : coexistence de formes infantiles et
adultes. Les bâtonnets ne sont pas
présents sur la biopsie musculaire,
qui montre des anomalies non
spécifiques.
L’analyse moléculaire révèle 2
mutations faux-sens à l’état homozygote.
Myopathie par mutation
de l’anoctamin-5
L’anoctamin-5 est une protéine
transmembranaire, de rôle incomplètement connu, porteuse
d’une probable fonction canalaire
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
chlore. Un déficit en anoctamin-5
a récemment été associé avec un
tableau de myopathie des ceintures (LGMD2L) et un tableau
de myopathie distale (8) appelé
MMD3, pour Miyoshi muscular
dystrophy-3, compte tenu de la
présentation clinique similaire à
la myopathie de Miyoshi : soit un
déficit touchant préférentiellement la loge postérieure de jambe,
volontiers asymétrique.
Les CPK étaient constamment
augmentées de façon importante
(5-75 fois la normale).
Les myopathies
distales
autosomiques
dominantes
Myopathie de Welander
Il s’agit de la première myopathie
distale individualisée (9), présente
exclusivement dans les pays nordiques. Le gène en cause, non encore identifié, est situé en 2p13.
Le début est tardif, après 40 ans,
et se caractérise par une atteinte
distale des membres supérieurs,
touchant préférentiellement les
muscles extenseurs des doigts
responsable d’une difficulté pour
les gestes fins. L’évolution, lente,
se fait vers une atteinte de la loge
antéro-externe de jambe, responsable d’un steppage.
Les CPK sont normales à modérément augmentées (1 à 3 N), la
biopsie musculaire est non spécifique mais peut montrer à un stade
tardif des vacuoles bordées.
Myopathie de UddMarkesbery-Griggs,
ou dystrophie musculaire
tibiale, ou titinopathie
Individualisée par Udd en 1993
(10), elle est liée à une mutation
du gène codant pour la titine, protéine du sarcomère. Elle est fréNeurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
quente dans les pays nordiques
(Finlande), mais a été décrite
aussi en France, en Angleterre et
en Espagne (2, 11). Les mutations
décrites (mutation finlandaise,
française A et B, et espagnoles)
touchent le dernier exon (363) ;
une mutation, responsable d’un
phénotype plus sévère, a été décrite en France, sur l’exon 362. A
l’état homozygote, la mutation est
responsable d’un phénotype plus
sévère avec atteinte des ceintures,
LGMD2J.
Le début est tardif, après 35 ans.
Le déficit touche initialement le
muscle tibial antérieur de façon
très sélective (d’où son nom de
dystrophie musculaire tibiale), et
peut évoluer vers une atteinte des
muscles extenseurs des orteils. Les
muscles intrinsèques du pied sont
respectés (signe du “trop beau pédieux” qui devant cette atteinte
distale oriente vers un processus
myogène et non neurogène), de
même les muscles proximaux des
membres inférieurs.
Les CPK sont normales à modérément augmentées.
Les tracés EMG sont myogènes ;
il existe volontiers une activité
de fibrillation importante dans le
muscle tibial antérieur. L’imagerie
musculaire révèle l’atteinte sélective du tibial antérieur. La biopsie
musculaire (dans le tibial antérieur) met en évidence des anomalies non spécifiques ; quelques
vacuoles bordées peuvent être observées chez la moitié des patients.
Myopathie de Laing
ou myopathie distale à début
infantile
Décrite par Laing, en Australie,
en 1995 (12), elle est liée à une
mutation du gène MYH7, qui
code pour la chaîne lourde de la
myosine. Les néo-mutations sont
fréquentes, et l’histoire familiale
peut donc manquer.
Elle débute dans l’enfance entre
4 et 20 ans, par une atteinte sélective des extenseurs des orteils
(signe du “gros orteil tombant”)
(13). L’évolution est très lente, vers
une atteinte des extenseurs des
chevilles, doigts, poignets, et fléchisseurs du cou dans la troisième
décennie. L’atteinte proximale
survient après 40 ans.
Les CPK sont peu augmentées (1 à
3 N).
Les tracés EMG sont de nature
myogène. L’imagerie musculaire,
confirme la sélectivité de l’atteinte
aux muscles de la loge antéro-externe de jambe. La biopsie musculaire est non spécifique, sans
vacuoles bordées.
Myopathies myofibrillaires
(MMF)
Il s’agit d’un groupe de myopathies,
dont le concept date de 1996, caractérisées par des anomalies histologiques communes (14, 15) : une
désorganisation des myofibrilles
autour de la strie Z, et une accumulation sarcoplasmique anormale
de protéines. Il s’agit donc d’un
diagnostic anatomopathologique.
Ce groupe comprend aujourd’hui
6 gènes codant pour des protéines
impliquées dans la strie Z : desmine, aβ cristalline, filamine C,
myotiline, ZASP et BAG3.
De transmission autosomique
dominante, elles ont un phénotype clinique assez homogène :
associant un début souvent tardif
après 40 ans, un déficit initial touchant plus volontiers les membres
inférieurs de topographie variable
(soit distal, soit proximal, soit
proximo-distal) (16).
Quelques particularités cliniques
permettent d’orienter vers la protéine en cause :
• la présence d’une cardiopathie
est plus fréquemment associée à
la desmine, mais peut se voir avec
toutes les MMF ;
159
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
• une dysphonie laryngée associée
à une neuropathie est plutôt évocatrice de myotilinopathie
• une cataracte orientera vers une
aβ cristalline ;
• une neuropathie peut se rencontrer dans toutes les MMF à l’exception des desminopathies ; elle
est particulièrement fréquente
dans les myotilinopathies.
Il existe une sélectivité de l’atteinte
musculaire, mise en évidence par
l’imagerie qui guide l’analyse moléculaire de ces myopathies (17).
Les CPK sont normales à modérément augmentées, elles peuvent
être augmentées jusqu’à 15 fois la
normale pour les mutations BAG3
(16).
L’ENMG peut montrer une réduction des vitesses de conduction
nerveuse, et volontiers des tracés
mixtes neurogènes et myogènes ;
des décharges myotoniques sont
décrites (16).
Filaminopathies distales
Les mutations du gène codant
pour la filamine, à l’origine d’une
myopathie myofibrillaire sont situées dans la région C-terminale
du gène. En 2011, ont été individualisées des filaminopathies, non
myofibrillaires par mutations de la
région N-terminale du gène (18).
La maladie débute dans la 3e décennie par une atteinte des
muscles thénariens responsable
d’une diminution de la force de
préhension, puis évolue vers la
4e décennie par une atteinte de la
loge postérieure de jambe entraînant des difficultés à courir et à
sauter, et vers la 5e décennie par
une atteinte proximale, conduisant à l’utilisation d’une canne.
Les CPK sont modérément augmentées (1.5 à 2.5 N). La biopsie
musculaire n’est pas de type myofibrillaire et met en évidence des
anomalies non spécifiques.
160
Myosite à inclusion
héréditaire par mutation vcP
Il s’agit d’une affection génétique,
autosomique dominante, par mutation du gène VCP (codant pour
la valosin-containing protein) associant une myopathie à inclusion,
une maladie de Paget et une démence frontotemporale. Le syndrome peut être incomplet.
Le début survient après 35 ans, par
un déficit qui peut être soit proximal, soit distal (19). Les CPK sont
normales à modérément augmentées.
La biopsie musculaire oriente l’enquête étiologique en mettant en
évidence des vacuoles bordées.
Myopathie distale avec
atteinte pharyngée et des
cordes vocales
Affection autosomique dominante, individualisée en 1998 (20),
elle est due à une mutation du
gène MATR3 (21) codant pour une
protéine de la matrice nucléaire.
Elle débute vers l’âge de 45 ans, par
une atteinte distale touchant initialement les membres inférieurs,
puis les membres supérieurs.
Dans la plupart des cas s’y associe
une atteinte des cordes vocales et
des troubles de déglutition.
Les CPK sont normales à modérément augmentées. L’EMG est
myogène. La biopsie musculaire
met en évidence des vacuoles bordées.
Myopathie distale à début
précoce par mutation KLHL9
Individualisée en 2010 dans une
seule large famille allemande (22),
elle débute par un déficit amyotrophiant du muscle tibial antérieur
survenant précocement entre 8
et 16 ans. La progression est très
lente, permettant la préservation
de la marche jusqu’à la 7e décennie.
Les CPK sont normales à significativement augmentées (9N).
L’EMG peut monter quelques latences distales motrices allongées.
Myopathies
centronucléaires
autosomiques dominantes
par mutation DNM2
Différentes des formes liées à l’X
ou récessives, elles se caractérisent par un début plus tardif et distal. La biopsie musculaire oriente
le diagnostique en révélant des
centralisations nucléaires multiples et des cores centraux.
Conclusion
La mise en évidence, dans la dernière décennie, de nouvelles entités et leur caractérisation moléculaire ont complexifié le diagnostic
étiologique des myopathies distales. L’enquête étiologique repose
sur l’analyse du mode de transmission, de l’âge de début, de la sélectivité de l’atteinte musculaire et la
présence de lésions histologiques
spécifiques sur la biopsie musculaire
n
Correspondance
Dr Hélène Gervais-Bernard
Service de neurologie
Hôpital Pierre Wertheimer
59, boulevard Pinel
69003 Lyon
E-mail :
[email protected]
Mots-clés : Myopathies distales,
Myopathie de Nonaka, Myopathie
de Miyoshi, Dysferlinopathies,
Nébulinopathie, Anoctamin-5,
Myopathie de Welander, Myopathie
de Udd-Markesbery-Griggs,
Myopathie de Laing, Myopathies
myofibrillaires, Filaminopathies
distales, Myosite à inclusion
héréditaire par mutation VCP,
Electromyogramme, Biopsie
musculaire, Génétique
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
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15. De BleeCker JL, Engel AG, Ertl BB. Myofibrillar myopathy with abnormal
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and gene localization to 5q31. Am J Hum Genet 1998 ; 63 : 1732-42.
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myopathy associated with a recurrent missense mutation in the gene encoding the nuclear matrix protein, Matrin 3. Am J Hum Genet 2009 ; 84 :
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APPELS A PROJETS
Fondation CNP Assurances : appel à projets pour l’amélioration
de la prise en charge de la douleur
La Fondation CNP Assurances, sous l’égide de la Fondation de France, lance un nouvel appel à projets sur le
thème de la lutte contre la douleur.
L’objectif est de soutenir des initiatives favorisant :
• la promotion des bonnes pratiques de prise en charge
de la douleur physique et des stratégies de soins centrées sur le patient, ainsi que leur évaluation ;
• l’évaluation et une prise en charge adaptée de la
douleur physique en santé mentale pour les populations
vulnérables ou dyscommunicantes.
Il peut s’agir d’initiatives conduisant à : une meilleure
compréhension, une meilleure évaluation et un meilleur
traitement de la douleur physique ; une réponse thérapeutique rapide et efficace pour soulager la douleur ;
une application systématique des protocoles analgésiques reflétant l’état actuel des connaissances ; une
évolution des pratiques en matière d’amélioration de la
prise en charge de la douleur en santé mentale.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Appel à projets est destiné à :
Equipes médicales et associations soucieuses d’améliorer la prise en charge de la douleur.
Dossiers de candidature
• Disponibles sur : http://www.cnp.fr
• ou par courriel à : [email protected]
Envoi des dossiers
• 1 exemplaire par courrier à :
Fondation CNP Assurances - 4, place Raoul Dautry 75716 PARIS Cedex 15
• 1 exemplaire par courrier électronique (version non
protégée en format Word) à :[email protected]
Les dossiers de candidature devront être déposés avant
le 30 juin 2012.
Pour en savoir plus : Fondation CNP Assurances
Fax : 01 42 18 92 85 - E-mail : [email protected]
161
DOSSIER
Bibliographie
1. Gowers WR. A Lecture on myopathy and a distal form: delivered at the
National Hospital for the Paralysed and Epileptic. Br Med J 1902 ; 2 : 89-92.
2. Udd B. 165th ENMC International Workshop: distal myopathies. 6-8th
February 2009 Naarden, The Netherlands. Neuromuscul Disord 2009 ; 19 :
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3. Nonaka I, Sunohara N, Ishiura S et al. Familial distal myopathy with rimmed vacuole and lamellar (myeloid) body formation. J Neurol Sci 1981 ;
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4. Argov Z, Yarom R. “Rimmed vacuole myopathy” sparing the quadriceps.
A unique disorder in Iranian Jews. J Neurol Sci 1984 ; 64 : 33-43.
5. Kayashima T, Matsuo H, Satoh A et al. Nonaka myopathy Is caused by
mutations in the UDP-N-acetylglucosamine-2-epimerase/N-acetylmannosamine kinase gene (GNE). J Hum Genet 2002 ; 47 : 77-9.
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in eight families including an autopsied case. Brain 1986 ; 109 (Pt 1) : 31-54.
7. Wallgren-Pettersson C, Lehtokari VL, Kalimo H et al. Distal myopathy
caused by homozygous missense mutations in the Nebulin gene. Brain
2007 ; 130 (Pt 6) : 1465-76.
8. Bolduc V, Marlow G, Boycott KM et al. Recessive mutations in the putative calcium-activated chloride channel anoctamin 5 cause proximal
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adult-onset distal myopathy in 66 Finnish patients. Arch Neurol 1993 ; 50 :
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distal myopathies. Muscle Nerve 2001 ; 24 : 1440-50.
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
4 Les syndromes myasthéniques
congénitaux
Un diagnostic complexe
n Les syndromes myasthéniques congénitaux constituent une entité nosologique hétérogène
en pleine expansion. Il est important de les rechercher en cas d’antécédents familiaux, néonataux (hypotonie, détresse respiratoire…), de syndrome myasthénique séronégatif associé
à une sémiologie évocatrice et/ou résistant au traitement immunosuppresseur, de tableau de
myopathie des ceintures fluctuante, ou en cas d’obtention d’un double potentiel global d’action
musculaire lors de l’étude des conductions nerveuses (en absence de surdosage en anticholinestérasiques).
L
es syndromes myasthéniques congénitaux (SMC)
sont caractérisés par un
dysfonctionnement de la jonction
neuromusculaire (JNM), non lié à
des auto-anticorps comme on l’observe dans la myasthénie autoimmune, mais secondaire à un gain
ou une perte de fonction d’une
protéine de la machinerie jonctionelle. Ils forment une entité
nosologique hétérogène en pleine
expansion et, à ce jour, 14 gènes
ont été identifiés et codent pour
des protéines impliquées dans la
synthèse (ChAT), la dégradation
(COLQ) et le récepteur de l’acétylcholine, ainsi que pour d’autres
protéines post-synaptiques, parmi lesquelles la rapsyne, Dok7 et
Musk (1-3).
Il est proposé de les classer selon
le mécanisme de dysfonction de la
JNM :
• pré-synaptique ;
• de la fente synaptique ;
• ou post-synaptique.
*Service de neurologie, Hôpital de la Croix-Rousse, Lyon
162
Perrine Devic*
Tableau 1 - Drapeaux rouges cliniques et paracliniques orientant
vers un syndrome myasthénique congénital.
Clinique
- Antécédents familiaux
- Antécédents néonataux (hypotonie, détresse respiratoire…)
- Myopathie des ceintures fluctuante
- Réflexe pupillaire photomoteur ralenti, myosis, rétinopatie, maculopathie
- Absence de réponse aux immunosuppresseurs
Paraclinique
- Double PGAM
- Anti-RACH et anti-Musk négatifs
La prévalence des SMC est estimée à 1/500 000 habitants en
Europe et la plupart des cas sont
post-synaptiques (1-3).
Sémiologie et
“drapeaux rouges”
Bien que la majorité des cas débutent dès la petite enfance, de
plus en plus de cas débutant à l’âge
adulte sont rapportés.
La présentation clinique (Tab. 1) peut
être celle d’un authentique syndrome myasthénique. L’atteinte
oculomotrice est fréquente
(ptosis, diplopie), parfois associée
à une sémiologie bulbaire avec
dysphonie, dysphagie et troubles
de la mastication. Une participation des muscles proximaux peut
également se rencontrer.
La sensibilité aux anticholinestérasiques est fréquente mais
ces derniers peuvent, dans certaines formes, aggraver la sémiologie. Par contre, si ces symptômes sont communs à la forme
autoimmune, ils ne sont pas sensibles aux immunosuppresseurs
et s’ils peuvent être fluctuants,
leur variabilité s’observe non pas
sur la journée mais sur plusieurs
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Figure 1 - Bloc de la jonction neuromusculaire : décrément supérieur à 10 % lors des
Figure 2 - Double potentiel global
stimulations répétitives à 3Hz.
d’action musculaire (COLQ ou canal lent)
semaines, plusieurs mois voire
plusieurs années.
Dans certains cas, il peut s’agir
d’un tableau pseudo-myopathique avec déficit musculaire
des ceintures prédominant. Une
fluctuation sur une longue période
peut aussi s’observer. L’existence
de signes oculomoteurs, même
minimes comme un ptosis, est
alors évocatrice.
Des formes très précoces avec
hypotonie néonatale ont été rapportées, évoluant parfois de façon
favorable ultérieurement et il est
donc important de rechercher les
antécédents de la période néonatale en cas de suspicion de SMC.
Une arthrogrypose est également
possible.
Enfin, des accès récurrents de détresse respiratoire souvent favorisés par le stress, les infections,
la fièvre, les vomissements, les efforts ou le froid ont été décrits.
Quelle que soit la forme clinique,
la présence d’antécédents familiaux, que l’on recherchera systématiquement, facilitera le diagnostic même s’ils peuvent faire
défaut dans les formes sporadiques fréquentes en raison d’une
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
transmission toujours autosomique récessive sauf dans le syndrome du canal lent.
Sur le plan paraclinique
Le bloc de la jonction neuromusculaire est le plus souvent objectivé par l’existence d’un décrément
anormal (Fig. 1) aux stimulations répétitives (supérieur à 10 % entre la
première et la cinquième stimulation lors d’un train de 10 stimulations à 3 Hz) et/ou la présence
d’un jitter en fibre unique. Ces
anomalies sont donc identiques
à celles décrites dans la myasthénie autoimmune. Il est important
de multiplier les couples nerfsmuscles étudiés et de privilégier
les territoires bulbaires ou faciaux
qui sont parfois les seuls à être
le siège d’un décrément. Outre
la séronégativité, certains signes
électromyographiques tels qu’un
double potentiel global d’action
musculaire (PGAM) doivent
orienter le clinicien vers la recherche d’un SMC (Fig. 2).
Diagnostics différentiels
Parmi les diagnostics différentiels,
on discutera bien sûr une myasthénie autoimmune séronégative
pour les anticorps anti-RACH et
anti-Musk. La non-réponse aux
traitements immunosuppresseurs
et la recherche d’anti-RACH de
faible affinité et d’anti-LRP4 seront déterminants (ENS Lyon).
Devant une présentation plus
myopathique, il faut insister sur
la nécessité de faire une recherche
systématique de bloc de la jonction neuromusculaire à toute
maladie musculaire pour laquelle
l’histologie n’est pas contributive,
en précisant que la mise en évidence d’un bloc de la JNM à l’EMG
peut aussi se rencontrer au cours
des myopathies, notamment centronucléaires ou des cytopathies
mitochondriales (4).
Physiologie
de la jonction
neuromusculaire (Fig. 3)
L’arrivée du potentiel d’action neuronal entraîne l’afflux intracellulaire
de calcium, puis l’exocytose de quantas d’acétylcholine. L’acétylcholine
libérée par la terminaison axonale
pré-synaptique se fixe ensuite sur les
RACH post-synaptiques et entraîne
un afflux de cations (sodium et à un
moindre degré calcium) intracellulaire, ce qui génère des potentiels de
plaque miniatures. Si le potentiel de
plaque (sommation des potentiels
de plaque miniatures de la plaque
motrice) est supérieur au seuil, un
potentiel de fibre musculaire sera
163
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
généré par l’ouverture des canaux
sodiques voltage dépendant de façon à propager le potentiel à l’ensemble de la fibre musculaire, qui
peut alors se contracter. Il existe,
chez le sujet sain, une marge de
sécurité de la JNM qui se définit
par la différence entre le potentiel
de plaque et celui nécessaire à la
contraction de la fibre musculaire.
L’acétylcholine sera ensuite dégradée en choline et acétate par l’acétylcholinestérase et la choline recaptée
par la terminaison pré-synaptique
(transport sodium dépendant) pour
former de nouvelles vésicules d’acétylcholine grâce, entre autres, à l’action de la choline acétyl-transférase.
!
La genèse d’un potentiel miniature de plaque est dépendante de
la bonne organisation de la membrane post synaptique, comportant notamment l’organisation des
RACH en clusters.
Figure 3 - Organisation de la jonction neuromusculaire. D’après Gomez et al, Autoim-
L’agrégation des RACH en clusters
pour former un bouton synaptique
est conditionnée par plusieurs protéines dont les mutations sont associées à des SMC. Musk, une protéine kinase spécifique du muscle,
est fondamentale dans la bonne
organisation post-synaptique de
la membrane par son rôle central
dans la voie agrine-lrp4-musk-rapsyne (5, 6). Musk peut être activée
soit “de l’intérieur” par dok-7, une
protéine cytosolique, soit “de l’extérieur” par lrp4. La fixation de lrp4
sur musk est favorisée par l’agrine
et permet en retour la phosphorylation de dok7 (5, 6). Dok-7 intervient donc à la fois comme ligand
et comme substrat de musk (7).
L’agrine est une protéine libérée
par le neurone moteur et sous-tend
donc un contrôle neuronal de la différentiation post synaptique.
L’activation de Musk entraîne :
1. l’organisation en clusters des
164
munity 2010.
RACH via l’activation de la rapsyne ;
2. l’expression des protéines spécifiques post-synaptiques ;
3. la génération de signaux rétrogrades régulant la différentiation
pré-synaptique.
Enfin, la différentiation post-synaptique nécessite un fonctionnement correct du cytosquelette
(actine) et du métabolisme (mitochondries) de la fibre musculaire.
SMC pré-synaptiques
Impliquées dans moins de 10 %
des SMC, les altérations pré-synaptiques sont de transmission
autosomique récessive et comprennent les mutations du gène
CHAT (8) et des phénotypes très
rares (moins de 5 cas index) pour
lesquels aucune mutation n’a encore pu être déterminée, tel que le
SMC Lambert-Eaton-like (3, 9).
Le phénotype CHAT habituel
comporte un début néonatal ou
dans la petite enfance et associe :
• un syndrome myasthéniforme
oculobulbaire sensible aux anticholinestérasiques ;
• à des décompensations respiratoires brutales graves et récurrentes (episodic apnea) favorisée par le stress, les infections, la
fièvre, les vomissements, les efforts et le froid (8).
Bien que les stimulations répétitives (SR) à 3 Hz soient souvent
normales, à la différence de l’étude
en fibre unique, un décrément
persiste 5 à 10 minutes après
des trains de 5 minutes de SR à
10 Hz ou un effort (8).
Le gène impliqué code pour l’acétylcholine transférase, une enzyme catalysant la synthèse d’acétylcholine à partir de la choline.
SMC de la fente
synaptique
Impliquées dans environ 15 % des
SMC et de transmission exclusivement autosomique récessive, les
altérations du fonctionnement de
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
la fente synaptique sont à ce jour
en grande partie liées aux mutations de la queue collagénique de
l’acétylcholine estérase (COLQ)
responsables d’un déficit d’acétylcholine estérase grevé d’un pronostic sévère (10, 11).
Mutation du gène COLQ
Le tableau est celui d’une myopathie des ceintures comportant
souvent une atteinte faciale (ptosis) et débutant dans la première
décennie, le plus souvent avant
l’âge de un an (11).
L’évolution est progressive chez
50 % des patients et peut être
sévère (perte de la marche, scoliose, hypoventilation liée à un
syndrome restrictif ). On recherchera des antécédents d’episodic
apnea et un ralentissement du
réflexe pupillaire photomoteur,
présents respectivement chez la
moitié et le quart des patients (11).
L’élément clinique prépondérant
est l’absence de réponse, voire
l’aggravation des symptômes
avec la prise d’anticholinestérasiques.
Sur le plan électrophysiologique,
l’obtention d’un PGAM dédoublé après stimulation unique
du nerf (Fig. 2) est très évocatrice,
peut être facilitée par l’administration de Tensilon ou de 3,4 DAP,
et doit faire discuter un syndrome
du canal lent ou un surdosage en
anticholinestérasiques. Le défaut
de fonction de l’acétylcholine estérase entraîne en effet une exposition prolongée de la fente synaptique à l’ACH qui persiste alors
après la période réfractaire de la
plaque et déclenche un second
PGAM pour une même stimulation du nerf. S’ensuit également
une désensibilisation et down
régulation des ACHR, assortie
d’une dégénérescence de la plaque
motrice et de la fibre musculaire
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Figure 4 - Jonction neuromusculaire morcelée d’une fibre musculaire humaine. Microscopie optique*40 ; IF bleue : chromatine ; verte : RACH ; rouge : axone.
pouvant se traduire par des stigmates électriques “myopathiques”
(11).
Malheureusement, l’arsenal thérapeutique reste très limité puisque
seules l’éphédrine (15 à 90 mg/j en
deux à trois prises), et à un moindre
degré la 3,4 DAP, permet une amélioration inconstante des symptômes (11).
Mutation du gène de la
glutamine-fructose-6phosphate transaminase 1
(GFPT1)
Décrite en 2011, il s’agit d’une mutation probablement fréquente
parmi les patients présentant un
tableau de myopathie des ceintures fluctuante, sensible aux
anticholinestérasiques (12).
L’atteinte faciale et respiratoire
est rare. Les premiers symptômes
apparaissent le plus souvent dans
la première décennie mais des cas
de début plus tardif sont décrits,
l’évolution est ensuite peu progressive et la majorité des patients
restent ambulatoires.
La présence d’agrégats tubulaires sur la biopsie musculaire
est très évocatrice (12).
SMC post-synaptiques
Mutations des sous-unités
du RACH
On distingue les mutations aboutissant à une altération qualitative
des RACH (20 % des SMC, canal
lent ou rapide) et quantitative des
RACH (40 % des SMC, déficit en
RACH) (1-3).
❚❚Canal lent
Le terme de canal lent fait référence à l’ouverture prolongée
du RACH lié soit à la fermeture
165
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
DOSSIER
retardée soit à l’ouverture trop facile des RACH, responsable d’un
courant synaptique (afflux de cations) lent à décroître.
En découlent deux conséquences :
• la présence d’un PGAM répété
pour une stimulation unique (le
courant synaptique est plus long
que la période réfractaire de la
fibre musculaire) ;
• et la dégénérescence musculaire
sous synaptique liée à la toxicité
de l’influx excessif de calcium intracellulaire et entraînant une
diminution du nombre de RACH,
ce qui compromet le fonctionnement de la jonction neuromusculaire (13, 14).
Comme la présence d’un PGAM dédoublé, l’absence de réponse aux
anticholinestérasiques peut en
imposer pour une mutation COLQ.
C’est le seul SMC de transmission
autosomique dominante.
Sur le plan clinique, le début est parfois tardif à l’âge adulte et il existe
une atteinte prépondérante des
muscles cervicaux et extenseurs
distaux du membre supérieur
(13, 14).
Un traitement par quinidine et
fluoxétine est proposé, permettant
de bloquer les RACH dont l’ouverture est prolongée (15).
❚❚Canal rapide
Le mécanisme physiopathologique
est inverse : il s’agit de l’ouverture
anormalement brève des RACH en
réponse à la fixation d’acétylcholine
résultant, soit d’une faible probabilité d’ouverture, soit d’une fermeture
trop précoce du récepteur. La transmission des mutations est récessive,
mais un effet “dominant négatif”
a été décrit (l’allèle accompagnant
l’allèle muté étant nul, c’est l’allèle
muté qui s’exprime) (16, 17).
166
❚❚Déficit en RACH
Il s’agit de la cause la plus fréquente
des SMC (1-3). Transmises selon le
mode autosomique récessif, les mutations CHRNE affectent la sousunité ε des RACH.
Il s’agit le plus souvent d’un syndrome myasthéniforme, parfois
pseudo-myopathique, dont l’atteinte oculaire est prédominante,
faisant discuter une mutation
MUSK ou une autre cause d’ophtalmoparésie progressive (mitochondriopathies…). S’installant en
règle dès la première décennie,
les symptômes sont souvent peu
évolutifs et l’atteinte respiratoire
rare.
L’efficacité des anticholinestérasiques peut être renforcée par
l’adjonction de 3,4DAP (18, 19).
Mutations du gène DOK7
La présentation habituelle est soit
celle de “myasthénie des ceintures” associée à une faiblesse des
muscles d’innervation bulbaire
respectant le plus souvent les
muscles oculomoteurs, soit celle
de pseudo-myopathie des ceintures associant atrophie, déficit
moteur progressif, scoliose, élévation faible de la créatine kinase
(20-22).
Les mutations du gène DOK7 sont
transmises sur le mode autosomique récessif. Les symptômes
débutent généralement après
l’acquisition de la marche, voire à
l’âge adulte.
Si les inhibiteurs de l’acétylcholine estérase sont inefficaces
ou délétères, l’éphédrine (15 à
90 mg/j en deux à trois prises),
l’albutérol et, à un moindre degré, la 3,4 DAP permettent en
revanche une amélioration progressive et retardée (évaluée
après 6 mois) de la sémiologie
(20-22).
L’ENMG en SR et en fibre unique
montre un décrément et/ou des
signes myogènes, mais jamais de
PGAM dédoublés contrairement
aux mutations de COLQ.
La biopsie musculaire peut révéler des aspects myopathiques non
spécifiques en montrant une atrophie des fibres II, une prédominance des fibres I, une nécrose des
fibres musculaires, une diminution de l’activité des enzymes oxydatives, et/ou une lipidose (22).
Il n’est pas observé d’agrégats tubulaires à la différence d’autres
formes de “myasthénies des ceintures” en partie liées à GFPT1 (12).
Mutations du gène
de la rapsyne (RAPSN)
Bien que les symptômes débutent
habituellement avant l’âge de 2 ans,
un début tardif est possible (23, 24).
La transmission est autosomique
récessive. Le phénotype peut être
celui d’une hypotonie néonatale,
parfois accompagnée d’athrogrypose et d’episodic apnea, ou d’un
syndrome myasthénique séronégatif avec ptôsis volontiers asymétrique. La classique absence d’atteinte oculomotrice initialement
décrite a récemment été remise en
question par l’équipe de la Mayo
Clinic qui décrit une ophtalmoparésie constante ou intermittente chez
près du quart de ses patients (24).
Une forme d’évolution bénigne
affectant les Juifs originaires du
Proche-Orient a été décrite et comporte une dysmorphie évocatrice
avec prognathisme, palais ogival et
visage allongé (25).
L’ENMG peut être pris en défaut,
mais la prise de 3,4DAP ou la réalisation d’un train à 10 Hz pendant
5 minutes peuvent le sensibiliser.
Il est important de différencier ce
décrément non spécifique de celui
observé dans les mutations CHAT
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
qui persiste 5 à 10 minutes après la
stimulation.
L’évolution est lente et les inhibiteurs de l’acétylcholine estérase
bénéfiques dans la majorité des cas
(23-25).
Autres mutations
Le pattern de transmission est exclusivement autosomique récessif.
❚❚Gène de la protéine Musk (MUSK)
Le tableau clinique est celui soit d’un
ptosis associé à une ophtalmoparésie
progressive et à un déficit des ceintures, soit d’une hypotonie néonatale
avec insuffisance respiratoire et/ou
episodic apnea nécessitant souvent
une trachéotomie et évoluant vers
un déficit musculaire sévère atrophique avec scoliose (26, 27).
Similairement aux mutations
DOK7, la biopsie musculaire retrouve des signes myopathiques
aspécifiques. Les inhibiteurs de
l’acétylcholine estérase seuls ou en
association avec la 3,4DAP et l’albutérol sont faiblement efficaces à la
différence de l’éphédrine dont l’effet
semble nul (26, 27).
❚❚Gène de l’agrine (AGRN)
Récemment décrite et peu fréquente (2 cas), les mutations du
gène de l’agrine sont responsables
d’une fatigabilité proximale fluctuante installée dès la petite enfance, assortie d’un ptôsis, sans atteinte oculomotrice (28).
❚❚Gène du canal sodique voltagedépendant SCN4
Seul un cas est référencé (29). Il
s’agit d’une patiente présentant dès
la naissance des episodic apnea, une
fatigabilité et une faiblesse bulbaire,
puis une atteinte oculomotrice et un
ptôsis bilatéral peu fluctuant.
Les SR à 3 Hz ne retrouvent pas
de décrément à la différence des
SR à 50 Hz pendant 2 s. On retient
surtout la normalité apparente du
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
muscle et de la jonction neuromusculaire en microscopie au repos,
alors que la stimulation de la fibre
musculaire à -40mV n’engendre pas
de potentiel d’action.
Sur le plan thérapeutique les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase associés à l’acétazolamide sont efficaces.
❚❚Plectinopathie
L’association d’un syndrome myasthéniforme à une épidermolyse
bulleuse et/ou une dystrophie musculaire progressive doit orienter la
recherche génétique vers une mutation de la plectine, protéine cytosolique nécessaire au maintien de
l’architecture cellulaire et particulièrement exprimée sous la plaque
(30, 31).
L’étude histologique conforte la
suspicion en montrant, outre des
anomalies structurales des noyaux,
des organelles et de la jonction neuromusculaire, l’absence de plectine
dans la fibre musculaire en immunohistochimie.
❚❚LAMB2
Seule une patiente est décrite dans
la littérature et présente un tableau
sévère de myopathie des ceintures
débutant dès la petite enfance, associée à un syndrome de Pierson
(néphropathie et atteinte oculaire
avec myosis) (32).
Conclusion
Les SMC représentent une entité
hétérogène au sein desquels on peut
cependant définir les caractéristiques suivantes :
1. début dans la première décennie ;
2. évolution très lentement progressive ;
3. contexte familial et mode de transmission récessif ou “sporadique” ;
4. faiblesse fluctuante des muscles
proximaux et ptôsis, pouvant évoluer sur un mode chronique pseudomyopathique ;
5. séronégativité RACH et Musk.
Les investigations en biologie moléculaire seront guidées par la clinique. Ainsi, un début à l’âge adulte
orientera vers une mutation des
gènes DOK7, RAPSN et canal lent,
un mode de transmission autosomique dominant vers un canal lent
(ou une mitochondriopathie), un
tableau de myopathie des ceintures
de l’adulte vers DOK-7 ou GFPT1,
une atteinte des extenseurs des poignets et doigts vers un canal lent,
une atteinte oculaire vers LAMB2
(myosis), COLQ (réflexe photomoteur) et GPT1 (dégénérescence
maculaire, rétinite pigmentaire),
un double PGAM vers COLQ ou
un canal lent, et une inefficacité ou
aggravation avec les inhibiteurs de
l’acétylcholinestérase vers CPLQ ou
DOK7.
Les mutations les plus prévalentes
sont celles de CHRNE et de RAPSN
et leur recherche est recommandée en première intention, en absence d’orientation évidente, par le
consensus international réalisé en
2004 (33).
Le diagnostic reste donc complexe,
mais l’enjeu est cependant de taille
pour le patient auquel on évitera
une thymectomie et une immunosuppression prolongée inutile. n
Correspondance
Dr Perrine Devic
Service de neurologie
Hôpital de la Croix-Rousse
103 Grande rue de la Croix-Rousse
69004 Lyon
E-mail : [email protected]
Mots-clés : Syndromes
myasthéniques congénitaux,
Jonction neuromusculaire, Fente
synaptique, Génétique, Electromyographie, Atteinte oculomotrice,
Détresse respiratoire, Myopathie
des ceintures, Anticholinestérasiques,
RACH, MUSK
167
DOSSIER
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Pathologies neuromusculaires - L’évolution des connaissances
Bibliographie
DOSSIER
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Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
diagnostic
Identification de patients atteints
de la maladie d’Alzheimer
Utilisation de tests sanguins basés sur l’analyse
d’expression génique
n Le point sur les nouveaux tests sanguins basés sur les altérations de l’expression des ARN
messagers et/ou de l’épissage, biomarqueurs potentiels de la maladie d’Alzheimer et utilisant
un système de biopuce. L
a maladie d’Alzheimer pose
un problème de santé publique par sa fréquence et
ses complications en termes de
morbimortalité.
Néanmoins, le diagnostic est souvent retardé de plusieurs années
du fait d’une banalisation des
symptômes par l’entourage et le
sujet âgé souffrant de démence,
parfois même par les soignants.
Le diagnostic de maladie d’Alzheimer en pratique courante est
établi grâce à la confrontation
d’éléments cliniques (histoire de
la maladie, antécédents, comorbidités, traitements, tests neuropsychologiques) et des marqueurs
d’imagerie cérébrale (imagerie par
résonnance magnétique, ou scanner en cas de contre-indication).
A ces critères peuvent s’ajouter
des critères biologiques qui, en dehors de la recherche clinique, sont
réservés aux sujets avec suspicion
de diagnostic de maladie d’Alzheimer atypique et aux sujets jeunes
âgés de moins de 60 ans (1). Ces
*CHU Dupuytren, Pôle Personnes âgées et Soins à domicile,
Limoges
Neurologies • Mars 2012 • vol. 15 • numéro 146
Isabelle Saulnier, Florent Lachal et Thierry Dantoine*
marqueurs de neurodégénérescence (protéines tau, tau phosphorylée et peptide Aβ1-42) sont dosés
dans le liquide céphalorachidien
prélevé par ponction lombaire.
Cet acte est invasif, parfois difficile
techniquement et difficilement
accepté par les malades.
Une technique de dosage des marqueurs dans le sang serait donc
plus accessible pour tous les patients.
Actuellement, de nombreuses
équipes travaillent au développement de techniques fiables et
reproductibles de dosages plasmatiques des marqueurs de la maladie d’Alzheimer.
La revue de la littérature par S.
Schraen (2) sur les biomarqueurs
sanguins a montré un nombre important de tests sanguins en cours
d’étude, tels que le dosage des peptides amyloïdes A-β40 et A-β42, le
dosage simultané de plusieurs protéines de signalisation (interleukines, chimiokines, facteurs de
croissance dont l’interleukine 1α
et le Tumor Necrosis Factor α) et
l’étude du transcriptome.
Dans cet article, nous proposons
de décrire l’état de l’art concernant de nouveaux tests sanguins
basés sur les altérations de l’expression des ARN messagers et/
ou de l’épissage, biomarqueurs
potentiels de la maladie d’Alzheimer et utilisant un système de
biopuce.
Actuellement, deux tests sont disponibles :
• AclarusDx® (mis au point par
Exonhit) ;
• et ADtect® (mis à disposition
par DiaGenic).
Le test AclarusDx®
AclarusDx® est une signature moléculaire sanguine permettant
d’identifier la maladie d’Alzheimer de manière simple et non
traumatique. L’analyse du transcriptome des leucocytes circulants peut révéler des évènements moléculaires survenant à
distance du système nerveux central (3, 4).
169
diagnostic
Le transcriptome et
épissage alternatif
Le transcriptome est l’ensemble
des ARN messagers présents au
sein d’une cellule ou d’un tissu à
l’origine de la synthèse de multiples protéines. Cette synthèse
protéique issue d’un même gène
est régulée par l’épissage constitutif et alternatif. L’expression de
la majorité des gènes de l’ADN (60
à 100 %) est régulée par l’épissage
alternatif, variable selon la cellule
ou le tissu (5-7).
L’épissage alternatif conduit à la
maturation d’un ARN originel
par élimination des séquences
nucléotidiques afin d’aboutir à un
ARN mature qui sera traduit ensuite en une protéine (Fig. I).
Les biopuces et la
technologie Genome-Wide
SpliceArray™ :
épissage alternatif
❚❚Principe de la technique de
biopuce
Le transcriptome peut être analysé par une technique de microarrays ou de biopuce à ADN. C’est un
ensemble de sondes spécifiques,
capable de s’hybrider avec les
ADNc (ADN complémentaires)
marqués à la biotine et préalablement synthétisés à partir des ARN
totaux extraits du sang.
Ici, est utilisé le SpliceArray™
avec une biopuce de type GWSA
(Genome-Wide
SpliceArray®)
d’Exonhit. Elle permet de cibler
21 000 gènes (8) en ajoutant une
analyse des évènements d’épissage
alternatif sur toute la longueur du
transcrit.
❚❚Identification d’une signature
transcriptomique sur 177 sujets
(9)
Une étude multicentrique visant
à identifier la signature transcriptomique de la maladie d’Alzheimer
170
Figure 1 - Schéma récapitulatif de l’épissage alternatif.
a été réalisée grâce à une cohorte
(étude EHTAD/002 et CRO) à
partir de 177 échantillons issus
de 90 patients souffrant de maladie d’Alzheimer (MA) selon
les critères du DSMIV-TR et de
NINCDS-ADRDA et de 87 sujets
“contrôles” asymptomatiques.
L’âge moyen était de 78,08 ±
6,67 ans avec des âges extrêmes
de 58 et 95 ans dans le groupe MA
contre 69,71 ± 6,53 ans avec des
âges de 56 et 86 ans dans le groupe
“contrôles”.
Le MMSE moyen était de 17,16
± 6,04 ans dans le groupe MA
contre 29,31 ± 0,97 dans le groupe
“contrôles”.
Deux tiers des prélèvements des
malades ont servi à développer le
modèle mathématique par analyse
numérique et procédés itératifs
tandis que le tiers restant a servi à
valider les modèles ainsi créés.
Le choix de la signature optimale est basé sur la performance
globale. Une analyse par composante principale permet de
visualiser les performances de
la signature sélectionnée en
différenciant
significativement
les deux populations étudiées. Les
mesures d’expression sont obtenues sur plus de deux millions de
groupes de sondes.
Cent trente-six gènes sont associés à la signature. Parmi eux,
certains sont impliqués dans la
physiopathologie inflammatoire
et immunitaire de la MA, tels que
Rock1, Bcl2A1, JAK2 (10-12).
Cette technologie a été réalisée
chez des sujets porteurs d’autres
types de démences que la MA mais
les résultats ne sont pas connus
actuellement.
Validation en aveugle de la
signature sur une cohorte
additionnelle indépendante
pour établir une zone grise :
étude EHTAD/002 (13)
L’étude EHTAD/002 est une
étude multicentrique transversale destinée à établir la performance d’AclarusDx®, en aveugle
sur une cohorte indépendante de
111 sujets atteints de MA et 98 sujets
“contrôles” asymptomatiques en y
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Identification de patients atteints de la maladie d’Alzheimer
ajoutant une zone d’indétermination dite grey zone ou “zone grise”.
AclarusDx® a montré une sensibilité supérieure à 80 % et une spécificité proche de 70 % en excluant
les échantillons situés dans la zone
grise.
Utilisations actuelles
Cette technique d’identification
n’est pas encore utilisée en pratique courante. Elle est disponible uniquement sur le marché
français depuis le 15 mars 2011
dans les Centres Mémoire de Ressource et de Recherche (CMRR)
et les Centres Mémoire (CM)
pour le diagnostic in vitro en association avec les évaluations
usuelles dans le cadre de la démarche diagnostique de la MA.
Il existe également 4 études cliniques en cours utilisant le test
AclarusDx® :
• l’étude française BIO-MAPT
(Multidomain Alzheimer Preventive Trial) dont l’objectif est
d’identifier une population de sujets âgés fragiles à risque de MA et/
ou de déclin cognitif rapide ;
• l’étude française BALTAZAR
(Biomarker of AmyLoïd pepTide
and AlZheimer’s diseAse Risk) :
évaluation de la relation entre des
biomarqueurs plasmatiques amyloïdes pour la maladie d’Alzheimer
(Aβ40, Aβ42, sAPPα) et :
- le risque de conversion vers la
MA chez des patients MCI ;
- et la vitesse de progression de la
MA ;
• une étude observationnelle française longitudinale dont l’objectif
est d’estimer la prévalence de positivité d’AclarusDx® chez les patients souffrant de MA dans la population de primo-consultants vus
en CMMR ou Centre Mémoire ;
• et une étude pilote américaine
dont l’objectif principal est d’évaluer la capacité d’AclarusDx® à
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
identifier une MA chez des patients
américains primo-consultants référés dans un centre mémoire.
Le test ADTect® (2, 14)
Le test ADtect® mesure l’expression de gènes identifiés à partir de
l’analyse de profils d’expression
génique sur un support biopuce.
l’expression est spécifique de la
MA, ce qui permet notamment de
réduire les coûts de ce test et de le
rendre plus accessible technologiquement.
Il s’agit d’un test sanguin. Après
extraction des ARN totaux des
leucocytes, les échantillons sont
concentrés puis un brin d’ADNc
est synthétisé et marqué à la digoxigénine. C’est ce même brin qui
s’hybridera ou non avec les sondes
présentes sur la biopuce (AB 1700
Whole Genome Survey). Il s’agit
donc des mêmes techniques de
biologie moléculaire que pour la
méthode AclarusDx®, seul le marquage de l’ADNc change, ainsi que
la biopuce elle-même.
Les résultats préliminaires de
performance de ce test, issus
d’une étude multicentrique scandinave et ayant porté sur 103 patients atteints de MA et 105 sujets
“contrôles”, ont mis en évidence
que la signature AD-Tect® associée
à la MA permettrait de diagnostiquer la maladie avec une sensibilité de 72 % et une spécificité
de 72 % (15). Cependant, même si
ce test possède une bonne sensibilité, le modèle créé n’a pas été
validé avec des sujets contrôles atteints d’autres démences comme
la démence fronto-temporale ou la
démence vasculaire. La discrimination de ce test entre MA et une
démence d’autre étiologie reste à
démontrer.
Résultats
Utilisations actuelles
Principe de la technique
En partant de 32 878 sondes d’oligonucléotides (60 bases), un modèle mathématique a été construit
à partir de 94 personnes atteintes
de MA et de 94 témoins et 1 239
sondes spécifiques ont été identifiées. 67 patients en aveugle (31 patients atteints de MA, 25 contrôles
appariés sur l’âge, 7 contrôles
“jeunes” puis sur 27 patients atteints de maladie de Parkinson et
10 patients Mild Cognitive Impairment) ont permis de valider le test
avec une sensibilité de 84 ± 13 %
(IC à 95 %) et une spécificité de
91 ± 10 % (IC à 95 %). Cette signature moléculaire a ensuite
été adaptée sur une plateforme
RT-PCR (Reverse Transcriptase,
Réaction de Polymérisation en
Chaînes ; cela correspond à “l’inverse” d’une réaction de transcription de l’ADN en ARN).
En isolant 96 gènes dont
Ce test n’est pas utilisé en pratique
courante en France, bien que disponible dans plusieurs pays européens (Allemagne, Autriche, Danemark, Espagne, Grande-Bretagne,
Grèce, Finlande, Irlande, Norvège,
Suède, Suisse et Turquie) sur le site
www.diagenic.com.
En conclusion
Cette technique d’analyse transcriptomique représente la première
génération de tests sanguin de diagnostic de MA. Malheureusement,
leur sensibilité et leur spécificité ne
permettent actuellement qu’une
aide au diagnostic et n’est utilisée
qu’en recherche.
En France, seule la technique AclarusDx® est disponible et pour l’instant seulement pour le diagnostic de
MA.
En ce qui concerne le test
171
diagnostic
ADtect®, il n’est pas sur le marché en France et une seule étude
est à notre disposition sur un faible
nombre de sujets atteints de MA. n
Conflits d’intérêt :
Oui, participation à l’étude Exonhit
Diagnostic 002.
Correspondance :
Pr Thierry Dantoine
CHU Dupuytren
Pôle Personnes âgées et Soins
à domicile
2, Avenue Martin Luther King
87042 Limoges Cedex
E-mail : [email protected]
Mots-clés :
Maladie d’Alzheimer,
MCI, Mild Cognitive Impairment,
Diagnostic,
Biopuces,
Marqueurs sanguins,
Transcriptome
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AD/ADHonoluluICADJuly10Postervs12.pdf
à lire
Neurologie
Jean Cambier, Maurice Masson, Catherine Masson et Henri Dehen
Editions Masson,
Collection Abrégés
2012, 560 pages
www.elsevier-masson.fr
Treizième édition, totalement actualisée, de ce classique des ouvrages de neurologie.
172
Alzheimer et communication non verbale
Cécile Delamarre
Préface de Didier Armaingaud
Editions Dunod, Collection Action sociale
Avec le soutien du groupe Medica
2011, 214 pages - www.dunod.com
Un décryptage des gestes et attitudes qui permettent au malade
Alzheimer de communiquer avec son milieu. En complément, un logiciel téléchargeable : Sémacorps®.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Le point sur…
Les troubles du contrôle
des impulsions
Prévenir et dépister précocement
n Des troubles du comportement, à type de comportements compulsifs et répétitifs, tels que le
jeu pathologique, les achats compulsifs et une hypersexualité, ont été rapportés avec la lévodopa et les agonistes dopaminergiques, principalement chez les patients traités pour une maladie
de Parkinson (1). Ces troubles du contrôle des impulsions (TCI) ont fait l’objet d’une attention
particulière au cours des dernières années en raison de leurs conséquences familiale, sociale et
professionnelle parfois dramatiques. Leur fréquence, les facteurs favorisants et l’influence des
différents traitements antiparkinsoniens sont désormais établis (2, 3). Les principaux
troubles du
contrôle des
impulsions
Les principaux TCI rapportés chez
les patients atteints de la maladie
de Parkinson sont :
• le jeu pathologique (dépendance
aux jeux notamment de hasard et
d’argent) ;
• une hypersexualité (augmentation de la libido, exhibitionnisme) ;
• des achats compulsifs (non indispensables et parfois inadaptés
au budget) ;
• et des troubles du comportement
alimentaire (boulimie/grignotage,
appétence pour les sucreries).
D’autres troubles du comportement, tels que l’hypomanie, des
troubles obsessionnels compulsifs, une anxiété pathologique ou
le punding (4) sont également
associés aux traitements dopaminergiques.
*Département de Neurologie, Centre Hospitalo-Universitaire de
Rouen, Charles Nicolle
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Dans les formes sévères, l’association de plusieurs troubles du
comportement peut conduire à un
syndrome de dysrégulation dopaminergique (5).
Le jeu pathologique
La pratique du jeu devient pathologique lorsqu’elle répond aux critères du DSM-IV (encadré).
En pratique, elle concerne le plus
souvent des jeux à gratter ou en
ligne, la fréquentation des salles de
jeu (casinos) ou les courses de chevaux. Les conséquences peuvent
être dramatiques sur le plan financier, familial et professionnel.
L’hypersexualité
Plus fréquente chez les patients
masculins, elle se manifeste souvent par une simple augmentation de la libido qui peut conduire
à un harcèlement incessant de la
conjointe. Dans les cas plus sévères, elle peut se traduire par des
phénomènes d’exhibitionnisme,
de violences sexuelles, un attrait
David Maltête*
exacerbé envers tout ce qui touche
au monde du sexe (sex shops, sites
pornographiques, prostituées).
Le punding
Il s’agit d’un comportement moteur
stéréotypé, non productif, sans but,
caractérisé par le besoin d’examiner, manipuler, collectionner,
monter et démonter des objets (4).
Il doit être différencié des troubles
obsessionnels compulsifs (absence d’idée obsédante) et des
états hypomaniaques (absence
d’excitation caractéristique).
L’activité répétitive est souvent en
rapport avec l’activité professionnelle antérieure du patient. Ainsi,
les hommes s’orienteront vers le bricolage, la mécanique, les activités de
jardinage, alors que les femmes seront davantage attirées par les activités artistiques (peinture, sculpture).
Le patient est conscient de l’absence de finalité des actes, mais
recommence tous les jours de la
même manière. Le caractère permanent des troubles a un impact
sur la qualité de vie des patients.
173
Le point sur…
Le syndrome de
dysrégulation
dopaminergique
Le syndrome de dysrégulation dopaminergique (Hedonistic Homeostatic Dysregulation) est un tableau
sévère caractérisé par l’association
des signes suivants (5) :
• un comportement maniaque ou
hypomaniaque : le patient alterne
entre des états euphoriques avec
sentiment d’invulnérabilité, enthousiasme (en période ON) et des
états dysphoriques avec apathie,
dépression, isolement (en période
OFF) ;
• des troubles du contrôle des impulsions multiples, comme le jeu
pathologique, l’hypersexualité ou
les achats compulsifs ;
• un punding ;
• des errances pathologiques :
dans les périodes ON, le patient
éprouve le besoin de déambuler
et va parfois parcourir de grandes
distances sans but précis avec une
perception erronée du temps ;
• une addiction aux thérapies antiparkinsoniennes souvent compliquée de dyskinésies sévères.
Quelle prévalence ?
Au cours des dernières années,
plusieurs études transversales
ont évalué la prévalence et les
facteurs favorisant les principaux TCI. En outre, une large
étude multicentrique (2) réalisée
aux Etats-Unis et au Canada sur
3 090 patients parkinsoniens révèle que 13,6 % des patients présentent au moins un TCI actif :
5 % présentent un jeu pathologique, 3,5 % une hypersexualité,
5,7 % des achats compulsifs et
4,3 % des accès boulimiques.
La distribution des TCI varie en
fonction du sexe : la prévalence
de l’hypersexualité étant plus élevée chez les hommes alors que les
achats compulsifs et les accès bou174
Définition du jeu pathologique,
selon le DSM-IV
A. Pratique inadaptée, persistante et répétée du jeu,
comme en témoignent au moins 5 des manifestations suivantes :
- préoccupation par le jeu (remémoration d’expériences de jeu passées
ou prévisions de tentatives prochaines, ou moyens de se procurer de
l’argent pour jouer) ;
- besoin de jouer avec des sommes d’argent croissantes pour atteindre
l’état d’excitation désiré ;
- efforts répétés mais infructueux pour contrôler, réduire ou arrêter ;
- agitation ou irritabilité lors des tentatives de réduction ou d’arrêt ;
- joue pour échapper aux difficultés ou pour soulager une humeur
dysphorique ;
- après avoir perdu de l’argent au jeu, retourne souvent jouer un autre
jour pour recouvrer ses pertes ;
- ment à sa famille, à son thérapeute ou à d’autres pour dissimuler
l’ampleur réelle de ses habitudes de jeu ;
- commet des actes illégaux, tels que des falsifications, fraudes, vols
ou détournement d’argent pour financer la pratique du jeu ;
- met en danger ou perd une relation affective importante, un emploi
ou des possibilités d’étude ou de carrière à cause du jeu ;
- compte sur les autres pour obtenir de l’argent et se sortir de situations financières désespérées dues au jeu.
B. La pratique du jeu n’est pas mieux expliquée par un épisode
maniaque.
limiques sont plus fréquents chez
les femmes. Enfin, la présence de
2 TCI ou plus est observée chez
3,9 % des patients.
Le syndrome de dysrégulation dopaminergique toucherait environ
4 % des patients parkinsoniens
traités. Toutefois, cette prévalence
est probablement sous-estimée en
raison de l’absence d’outil de mesures spécifique.
Les facteurs
favorisants
Les principaux facteurs favorisants
identifiés sont les traitements
pharmacologiques et la personnalité prémorbide du patient (3).
Ainsi, il a été montré que le risque
de développer un TCI était multiplié par 2 à 3 chez les patients
traités par agonistes dopaminergiques. Le risque est accru avec
l’augmentation de la posologie.
En revanche, il n’existe pas de
différence significative entre les
principaux agonistes (ropinirole,
pramipexole) suggérant un effet
de classe. Par ailleurs, l’association
d’un agoniste à la L-dopa majore
le risque de survenue d’un TCI.
Enfin, il faut souligner que les TCI
peuvent être observés chez des
patients traités en monothérapie
par L-dopa avec une fréquence
moindre (7 %).
L’âge < 65 ans, le célibat, le tabagisme et les antécédents familiaux
de jeu pathologique ou d’addiction
sont des facteurs prédisposant à
la survenue d’un TCI chez les patients parkinsoniens traités par
agonistes dopaminergiques.
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Les troubles du contrôle des impulsions
De plus, l’existence d’un syndrome
anxiodépressif ou de troubles obsessionnels compulsifs, les traits
de personnalité en faveur d’une
impulsivité, ou d’une extravagance
sont retrouvés plus fréquemment
chez les patients traités ayant développé un TCI (4).
La physiopathologie
Les principaux symptômes moteurs de la maladie de Parkinson
(rigidité, akinésie, tremblement)
sont le reflet de la dénervation
dopaminergique striatale. Cette
dénervation obéit à un gradient,
avec une atteinte précoce de la
portion dorsale du striatum, dévolue à la motricité et plus tardive de
la portion ventrale impliquée dans
les boucles cortico-sous-corticales
associatives et limbiques.
Ainsi, dans les formes légères à modérées, la prescription d’agonistes
dopaminergiques non ergotés de
seconde génération avec une affinité particulière pour les récepteurs D3, abondants dans le striatum ventral, pourrait favoriser une
sur-stimulation de la voie ventrale
intacte. Il en résulterait une perturbation des boucles impliquées dans
la récompense, la motivation et le
contrôle des impulsions.
Plusieurs études d’imagerie corroborent l’hypothèse d’une implication de la voie ventrale du striatum
dans le syndrome de dysrégulation
dopaminergique et le jeu pathologique associés à la maladie de Parkinson (6, 7).
La prise en charge
La prise en charge des TCI passe
par les trois actions suivantes :
• informer,
• diagnostiquer,
• et traiter.
En France, les TCI ont fait l’objet
d’une Lettre aux professionnels
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
Lettre de l’Afssaps
aux professionnels de santé
«• Il est important d’informer les patients et leur entourage de ce risque
de troubles du comportement et de la nécessité de consulter un professionnel de santé en cas de survenue.
• Il est important d’être attentif à toute modification du comportement
chez les patients traités par un ou plusieurs médicaments dopaminergiques, surtout en cas de traitement à des posologies élevées, et/ou
après une augmentation récente des posologies.
• En cas de survenue de troubles du comportement ayant un impact
sur la qualité de vie du patient et/ou des conséquences familiales,
sociales ou professionnelles, une modification du traitement dopaminergique utilisé devra être envisagée. »
de santé de l’Agence française de
sécurité sanitaire des produits de
santé (Afssaps) en 2009 (encadré) et
sont inclus dans les mentions légales des agents dopaminergiques.
En pratique
d Une information claire et détaillée devra être délivrée au patient et si possible à l’aidant principal, dès l’initiation du traitement
dopaminergique.
Cette information devra être relayée auprès du médecin traitant,
assurant ainsi sa traçabilité.
La recherche des modifications
comportementales devra ensuite être systématique à chaque
consultation de suivi, à l’aide d’un
interrogatoire ciblé, en présence
de l’aidant principal.
d Chez les sujets à risque (âge
jeune et antécédents d’addiction),
l’initiation d’un traitement par
agoniste dopaminergique et/ou
l’ajustement d’un traitement antiparkinsonien (augmentation de
dose) devront être réalisés prudemment en évaluant le rapport
bénéfice/risque.
d Dans l’idéal, les patients et l’aidant principal pourront être inclus dans un projet d’éducation
thérapeutique.
Le traitement
La prise en charge est d’autant
plus aisée que le dépistage a été
précoce.
Lorsqu’un TCI est identifié et qu’il
retentit de manière significative
sur la qualité de vie du patient, un
ajustement du traitement doit
être systématiquement envisagé.
L’arrêt de l’agoniste dopaminergique demeure la prise en charge
la plus efficace puisqu’elle s’accompagne d’une disparition des TCI
dans 90 % des cas. Afin de compenser ce sevrage qui peut être
source d’une aggravation motrice,
les doses de L-dopa sont généralement augmentées avec une dose totale d’équivalent-dopa stable (8, 9).
Dans certains cas, la réduction de
l’agoniste dopaminergique ou le
switch par un autre agoniste sont
proposés avec des résultats inconstants et globalement décevants.
En effet, une étude prospective récente réalisée chez 35 patients présentant un TCI révèle que le switch
avec un autre agoniste est efficace
chez 1/3 des patients alors que la
réduction est satisfaisante dans
seulement 10 % des cas (10).
Des mesures de protection (curatelle, retrait de la carte bancaire, interdiction de casino) seront parfois
175
Le point sur…
indispensables dans les cas de jeux
pathologiques ou de dépenses excessives incontrôlées.
L’intérêt de prescrire d’autres
thérapeutiques susceptibles de
réduire les TCI est parfois discuté. Toutefois, les données concernant l’amantadine (11) demeurent
controversées et les inhibiteurs de
recapture de la sérotonine n’ont
pas fait la preuve de leur efficacité.
Le recours aux neuroleptiques atypiques (risperdal, quétiapine, olanzapine) a parfois été proposé (12),
mais il est discutable car aucun bénéfice n’est confirmé dans la seule
étude contrôlée (13).
Récemment, l’efficacité du valproate
a été rapportée chez trois patients
présentant différents TCI (14).
Dans certains cas, un effet bénéfique de la cyprotérone (Androcur®) est souligné chez les hommes
présentant une hypersexualité.
Place de la
stimulation
cérébrale profonde
L’existence de TCI ne constitue
pas, per se, une indication à la stimulation cérébrale profonde.
Cependant, l’âge jeune des patients et la coexistence de complications motrices, telles que les
dyskinésies associées fréquemment au syndrome de dysrégulation dopaminergique, conduisent
naturellement certains patients
vers la chirurgie (15).
Les résultats d’une revue récente
de la littérature soulignent, néanmoins, la variabilité de l’effet de la
stimulation bilatérale du noyau
sous-thalamique sur les TCI (16).
Dans certains cas, il est noté une
amélioration (réduction ou disparition complète) qui est généralement attribuée à la réduction
concomitante des agonistes dopaminergiques.
Les autres mécanismes évoqués
sont la réduction de la stimulation
dopaminergique pulsatile (en particulier dans le syndrome de dysrégulation dopaminergique) ou
un effet direct sur les projections
limbiques du NST.
A l’inverse, certains patients vont
développer des troubles du comportement ou aggraver des TCI
préexistants après l’intervention
chirurgicale. Dans ce cas, l’hypothèse d’une diffusion du courant
électrique à la portion limbique
(plot ventral) du noyau sous-thalamique est discutée. Un ajustement des paramètres de stimulation (plot dorsal) peut permettre
une résolution des troubles.
complication majeure des traitements dopaminergiques dans la
maladie de Parkinson. Leur prise
en charge est avant tout préventive et soumise à la diffusion d’une
information claire au patient et à
l’aidant principal.
La prescription des agonistes doit
être particulièrement surveillée,
sans distinction entre les différentes molécules (effet de classe), y
compris dans les autres indications
(syndrome des jambes sans repos,
atrophie multisystématisée).
n
Correspondance
Dr David Maltête
Département de Neurologie,
Centre Hospitalo-Universitaire de
Rouen, Charles Nicolle
1 rue de Germont
76031 Rouen Cedex
Tél. : 02 32 88 87 40
E-mail: [email protected]
Mots-clés :
Troubles du contrôle des impulsions,
Jeu pathologique, Achats compulsifs,
Hypersexualité, Troubles du
comportement alimentaire, Hypomanie, Troubles obsessionnels
compulsifs, Anxiété pathologique,
Punding, Lévodopa, Agonistes dopa-
Conclusion
minergiques, Maladie de Parkinson,
Les troubles du contrôle des impulsions peuvent constituer une
Dysrégulation dopaminergique,
Stimulation cérébrale profonde
Bibliographie
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Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
413-7.
rendez-vous de l’industrie
Maladie de parkinson
Sclérose en plaques
Le laboratoire Teva crée le programme
AGIR-PARK
Novartis prépare “SEP en Scène”
A
près le succès, depuis 6 ans, du programme AGIR-SEP, le
laboratoire Teva a lancé,
à l’occasion de la Journée Mondiale de la maladie de Parkinson, le programme AGIR-PARK (Agir en Groupes
d’Initiatives Régionales dans la lutte contre la maladie de
Parkinson), destiné aux professionnels de santé impliqués
dans la maladie de Parkinson. Les programmes AGIR-SEP et
AGIR-PARK sont des programmes de soutien financier et d’accompagnement logistique à destination de spécialistes, pour
développer des projets de leur choix, répondant à des préoccupations régionales, autour de quatre axes majeurs incluant :
• l’amélioration des outils de prise en charge des patients ;
• la création d’outils de formation et d’information pour les
professionnels permettant d’optimiser la prise en charge des
patients ;
• l’apport de moyens logistiques pour soutenir la recherche ;
• le développement d’actions pluridisciplinaires permettant
d’enrichir le dialogue avec tous les acteurs impliqués dans la
prise en charge et le suivi des patients.
A travers AGIR-PARK, Teva apporte une aide financière annuelle
à des équipes hospitalières constituées en “groupes” animés
par un neurologue référent. Répartis dans toute la France, ces
groupes proposent des actions, qui une fois validées, sont mises
en œuvre de manière pratique par une plateforme logistique qui
est entièrement financée par le laboratoire.
n
Sclérose en plaques
Biogen Idec : 2e édition de la Maison
de la SEP
A
l’occasion de la
Journée Mondiale
de la Sclérose En Plaques
(le 30 mai 2012) et de
la semaine nationale
de sensibilisation à la SEP (du 23 au 30 mai 2012), Biogen Idec
France, en partenariat avec les réseaux de santé dédiés à la maladie et les associations de patients AFSEP, la Ligue Française
contre la SEP et “Notre Sclérose”, ouvre pour la deuxième année consécutive, dans 7 villes de France, la Maison de la SEP 
(1er juin 2012 à Toulouse ; 1er et 2 juin 2012 à Clermont-Ferrand,
Lyon, Nantes et Paris ; 2 juin 2012 à Lille ; 8 et 9 juin 2012 à
Marseille). Pendant deux jours, les patients atteints de SEP,
leur famille et leur entourage pourront s’informer sur la maladie, rencontrer et échanger avec des professionnels de santé,
des psychologues, des assistants sociaux, des associations de
patients et d’autres patients. Des ateliers sur l’intérêt de la
sophrologie dans la SEP seront animés par des professeurs de
la Fédération Française de Sophrologie (FFS).
L’accès à la Maison de la SEP est libre et ne nécessite pas d’inscription préalable.
n
Pour en savoir plus : http://www.lamaisondelasep.fr
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147
N
ovartis, en partenariat avec l’AFSEP et la LFSEP, prépare
une campagne nationale d’information et de sensibilisation du grand public, “SEP en Scène”, réalisée avec les différents acteurs impliqués dans la SEP : patients, neurologues
et associations de patients. Au cours de soirées pédagogiques
d’information, seront présentées en public des scènes de vie
issues d’ateliers d’expression de patients et conçues avec Isabelle Janier (ancienne pensionnaire de la Comédie Française et
atteinte elle-même), autour de trois thématiques : l’annonce
du diagnostic et le partage avec l’entourage ; le vécu d’une
prise en charge pluridisciplinaire avec ses contraintes et espoirs ; le retentissement de la SEP sur la vie conjugale, familiale, professionnelle, sociale. Trois comédiens interprèteront
tour à tour patients, aidants, familles, médecins, voisins, collègues… La première soirée d’information se déroulera à Paris
le 29 mai. Elle sera ensuite reproduite à l’identique à Toulouse
et Lyon. Un film sera également diffusé et commenté dans
plusieurs antennes régionales des associations de patients.
Le site www.sepenscene.com, lancé en avril, permettra de
suivre la campagne en ligne.
n
Epilepsie
Eisai lance l’antiépileptique Zebinix®
E
ISAI lance un nouvel antiépileptique, Zebinix® (acétate
d’eslicarbazépine, boite de 30 comprimés sécables dosés
à 800 mg) sous la licence du laboratoire Bial. Zebinix® est indiqué en association dans le traitement de l’épilepsie partielle
de l’adulte avec ou sans généralisation secondaire, à la posologie d’un comprimé par jour. L’efficacité et la tolérance de
Zebinix® ont été démontrées dans trois études randomisées
et contrôlées contre placebo, chez 1 049 patients atteints de
crises partielles réfractaires, ainsi que dans une étude à long
terme. n
Neurovasculaire
Prévention des AVC et FA :
le Registre GLORIA™-AF
B
oehringer Ingelheim a annoncé le lancement du Registre
GLORIA™-AF, le plus vaste au monde visant à évaluer l’utilisation au long cours d’un antithrombotique oral dans la prévention des AVC chez les patients atteints de fibrillation auriculaire non valvulaire, dans la vie réelle. 56 000 patients seront
recrutés dans 2 200 centres de 50 pays (cabinets de médecine
générale, de spécialistes, hôpitaux communautaires, hôpitaux universitaires, centres de soins ambulatoires et cliniques
d’anticoagulants). L’objectif est d’étudier les protocoles thérapeutiques disponibles dans cette indication, et de recueillir
des données sur la tolérance et l’efficacité des traitements antithrombotiques, dont la warfarine, l’acide acétylsalicylique, et
d’autres anticoagulants oraux, tels que le dabigatran etexilate
(Pradaxa®).D’ici fin 2012, le Registre GLORIA™-AF aura débuté
dans toutes les régions du monde, dont les USA, l’UE, l’Amérique Latine et l’Asie. D’autres pays seront amenés à participer
par la suite au Registre qui devrait s’achever d’ici à 2020. n
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